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CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 12 février 2009

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 12 février 2009
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 07/07476
Date : 12/02/2009
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/11/2007
Décision antérieure : TI LILLE, 23 juillet 2007
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2343

CA DOUAI (8e ch. 1re sect.), 12 février 2009 : RG n° 07/07476

Publication : Jurica

 

Extrait : « Cette clause, ainsi que l'a exactement apprécié et indiqué le premier juge, ne détermine pas des fractions utilisables selon une périodicité définie mais permet une augmentation du montant du capital prêté qui n'est pas conforme aux modèles de type réglementaire prévu en la matière puisque qu'elle permet, pour toute augmentation du montant du découvert, de dispenser le prêteur de soumettre à l'emprunteur une nouvelle offre préalable dans les termes des articles L. 311-8 et suivants du Code de la consommation, ce dernier ne peut donc exercer, après un examen formel de la nouvelle offre notamment quant au coût du crédit, sa faculté d'ordre public de rétracter son acceptation. Cette clause crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties et ce au détriment du consommateur, elle constitue donc une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, ainsi que l'a exactement qualifiée le premier juge et doit donc être réputée non écrite. »

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 12 FÉVRIER 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/07473. Jugement (N° 07/2286) rendu le 23 juillet 2007 par le Tribunal d'Instance de LILLE.

 

APPELANTE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA CETELEM

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, ayant son siège social [adresse], Représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour, Assistée de Maître Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

demeurant [adresse], Représenté par Maître QUIGNON, avoué à la Cour

 

DÉBATS : A l'audience publique du 5 novembre 2008, tenue par Madame VEJUX magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. CHARBONNIER, Président de chambre [minute Jurica page 2] Madame CONVAIN, Conseiller, Madame VEJUX, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 février 2009 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par M. CHARBONNIER, Président et Madame DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement contradictoire du tribunal d'instance de Lille en date du 23 juillet 2007 ;

Vu l'appel formalisé par la SA CETELEM le 22 novembre 2007 ;

Vu les conclusions de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société CETELEM en date du 5 novembre 2008 ;

Vu les conclusions signifiées le 25 septembre 2008 par M. X. ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte d'huissier du 23 mai 2007, la société CETELEM a assigné M. X. en paiement du solde d'une ouverture de crédit utilisable par fractions consentie le 24 avril 2001, devant le tribunal d'instance de Lille lequel après avoir constaté la forclusion des demandes de cette société a déclaré son action irrecevable.

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE soutient que le mécanisme du découvert maximum autorisé et du découvert utile est conforme aux dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation et qu'en tout état de cause la sanction éventuelle de l'irrégularité est la déchéance du droit aux intérêts et non pas la forclusion. Elle conclut donc à l'infirmation du jugement entrepris et sollicite la condamnation de M. X. à lui payer la somme de 4.903,65 € avec intérêt au taux contractuel de 16,56 % à compter du 15 juin 2006 outre celle de 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

M. X., au visa des articles L. 311-2 et L. 311-37 du Code de la consommation soutient que l'offre n'est pas conforme aux dispositions légales et, en tout état de cause, forclose. Il conclut donc à la confirmation du jugement entrepris et l'allocation de la somme de 1.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 septembre 2008 ; l'affaire est venue à l'audience de plaidoirie du 5 novembre 2008 date à laquelle elle a été mise en délibéré au 12 février 2009.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE

1. Aux termes de l'article 125 du nouveau Code de procédure civile, les fins de non recevoir doivent être relevés d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public ; cette obligation s'impose au juge sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que le moyen d'irrecevabilité résulte d'un ordre public de direction ou de protection.

Le Code de la consommation français intègre dans le droit national [diverses directives européennes] : les directives n° 87/102 le 22 décembre 1986 (modifiée par les directives n° 90/88 du 22 février 1990 et n° 98/7 du 16 février 1998) et 93/13 du 5 avril 1993 relatives respectivement aux crédits à la consommation et aux clauses abusives. La Cour de Justice des Communautés Européenne a par ailleurs été amenée à préciser à plusieurs reprises dans l'un et l'autre de ces domaines, notamment dans les arrêts des 4 octobre 2007 (Franfinance, KparK/épx Rampion) et 4 mars 2004 (Cofinoga/Sachithanathan) en matière de crédit à la consommation ou les arrêts du 27 juin 2000 [minute Jurica page 3] (Oceano Grupo) ou du 21 novembre 2002 (Cofidis/Fredout) que le but recherché par ces directives est une meilleure protection des consommateurs par l'imposition de certaines conditions valables pour toutes les formes de crédits ; cet objectif, double, doit donc tendre non seulement à la création d'un marché commun du crédit mais aussi à assurer la protection du consommateur. En raison des risques liés à l'ignorance de ses droits ou aux difficultés à les exercer dans laquelle le consommateur peut se trouver et afin de permettre l'émergence de ce marché unique et concurrentiel, la Cour a été amenée à préciser que pour que ce double objectif soit effectivement atteint il convient de permettre au juge national d'appliquer d'office les dispositions transposant en droit interne les directives précitées. De ce double objectif, la protection du consommateur et le marché commun et concurrentiel étant d'égale importance, il se déduit également qu'il n'y a plus lieu en droit interne de distinguer selon que ces dispositions relèvent d'un ordre public de direction ou de protection.

En matière de crédits utilisables par fractions, si l'article L. 311-9 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, ne pose l'obligation d'une offre préalable que pour le contrat initial, la dispense qui en résulte pour le prêteur de soumettre à l'acceptation de l'emprunteur une nouvelle offre préalable, lors d'un renouvellement du contrat initial, ne saurait s'étendre aux ouvertures de crédits qui emportent une augmentation du montant du crédit et/ou du taux du crédit pratiqué ; en effet, celles-ci doivent s'analyser en l'octroi d'un crédit complémentaire lequel constitue un nouveau contrat sur lequel le consommateur doit pouvoir s'exprimer en toute connaissance de cause, il doit donc être conclu dans les termes d'une offre préalable répondant aux exigences des dispositions des articles L. 311-9-1 et L. 311-10 du même Code. Au surplus, l'acceptation ne peut être tacite mais doit résulter d'un acte univoque de l'emprunteur.

Par ailleurs, aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable lors de la conclusion du contrat, les actions nées d'un contrat de crédit à la consommation doivent être engagées, à peine de forclusion, dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance ; s'agissant d'une action en paiement, le point de départ du délai de forclusion est fixé à la date de l'exigibilité des sommes dont le recouvrement est poursuivi. Plus précisément, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, le point de départ de ce délai se situe au moment où le montant du dépassement maximum initialement convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident caractérisant la défaillance de l'emprunteur.

Enfin, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, est réputé non écrite comme étant abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et des obligations des parties au contrat. À cet égard une clause contractuelle qui dispense le prêteur d'une nouvelle offre préalable lors d'augmentations du crédit initial, qui interviendront donc sans acceptation préalable de l'emprunteur mais également sans possibilité pour celui-ci de se rétracter, crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat et doivent être réputé non écrites.

2.1 Au cas d'espèce l'offre du 24 avril 2001 est relative à un crédit utilisable par fractions assorti d'une carte de crédit et remboursable par échéances mensuelles fixées en fonction du solde dû, le taux du crédit étant lui-même révisable suivant les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature.

L'article II-3 des conditions générales du crédit figurant au verso de l'offre stipule que :

« l'emprunteur peut faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à condition que, depuis l'ouverture du crédit ou à la précédente augmentation du découvert utile, aucun des événements suivants ne soit survenu : a) survenance d'un cas de suspension du droit a découvert, b) évolution de la situation financière de l'emprunteur, c) usage des moyens d'utilisation du compte en violation des conditions du présent contrat. L'augmentation du découvert utile ne peut [minute Jurica page 4] résulter du seul usage des moyens d'utilisation du compte et doit faire l'objet d'une demande expresse de l'emprunteur. »

Cette clause, ainsi que l'a exactement apprécié et indiqué le premier juge, ne détermine pas des fractions utilisables selon une périodicité définie mais permet une augmentation du montant du capital prêté qui n'est pas conforme aux modèles de type réglementaire prévu en la matière puisque qu'elle permet, pour toute augmentation du montant du découvert, de dispenser le prêteur de soumettre à l'emprunteur une nouvelle offre préalable dans les termes des articles L. 311-8 et suivants du Code de la consommation, ce dernier ne peut donc exercer, après un examen formel de la nouvelle offre notamment quant au coût du crédit, sa faculté d'ordre public de rétracter son acceptation. Cette clause crée donc un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties et ce au détriment du consommateur, elle constitue donc une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, ainsi que l'a exactement qualifiée le premier juge et doit donc être réputée non écrite.

2.2 L'offre souscrite le 24 avril 2001 prévoit un « découvert utile » d'un montant de 5.000 Francs soit 762,25 €. A l'examen de l'historique du compte (pièce 3), il apparaît que ce montant a été dépassé en janvier 2002 pour atteindre la somme de 1.847,40 € et il n'est jamais plus revenu en deçà du seuil initialement convenu par l'effet de versements de l'emprunteur ou d'une demande express de sa part ou encore d'une nouvelle offre préalable dans les termes des articles L 311-9 et s. du Code de la consommation ; au contraire, il n'a cessé d'augmenter. Ce dépassement du plafond autorisé constitue un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, point de départ du délai de forclusion au sens des dispositions précités de l'article L. 311-37 du même Code ; or, l'assignation étant intervenue le 23 mai 2007, c'est exactement que le premier juge a déclaré l'action de la société CETELEM, aux droits de laquelle vient la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, irrecevable par l'effet de la forclusion.

Le jugement doit être confirmé.

La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE succombe dans ses prétentions, elle supportera la charge des dépens d'appel ainsi que celle d'une indemnité de procédure, en application de l'article 700 du Code de procédure civile, d'un montant de 500 €.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme le jugement ;

Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;

Condamne SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. X. la somme de 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS   P. CHARBONNIER

 

Est cité par :