CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 21 juin 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 3199
CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 21 juin 2011 : RG n° 10/04277
Publication : Jurica ; Legifrance
Extrait : « Aux termes de l'article L. 141-4 du code de la consommation issu de la loi du 3 janvier 2008, « le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. »
Ainsi, bien que la SCI JC n'ait pas comparu en première instance, le premier juge pouvait soulever la question du caractère abusif des clauses du contrat. Le Tribunal n'a certes pas ordonné la réouverture des débats, mais ce moyen apparaît actuellement sans intérêt dès lors qu'en cause d'appel, la société PARFIP s'est expliquée sur cette question et a conclu au caractère inapplicable en l'espèce des dispositions du code de la consommation et à l'absence de caractère abusif des clauses imposant au non-professionnel une durée initiale du contrat supérieure à un an et excluant toute rupture anticipée du contrat par le locataire et en mettant à la charge du locataire la réparation des systèmes sans lui offrir la possibilité de rompre le contrat.
Les pièces produites ne permettent pas d'établir que la location d'un système de télésurveillance n'entre pas dans le cadre de l'activité à but lucratif exercée par la SCI. S'agissant de location de matériels destinés à assurer la sécurité de locaux, il apparaît que cette location concerne les besoins de son activité. Dès lors, c'est à tort que le premier juge a retenu la qualité de consommateur non professionnel à la SCI et a fait application à son profit des dispositions relatives aux clauses abusives.
Les clauses relevées par le premier juge à savoir celles prévoyant une durée irrévocable de 60 mois et celle fixant l'indemnité de résiliation au montant des loyers restant dus n'ont [pas] [N.B. « par » dans la version consultée] pour effet ou objet de créer un déséquilibre significatif entre les parties dans la mesure où le matériel financé par la location est difficilement cessible à un tiers en cas de résiliation anticipée, et où l'indemnité de résiliation correspond à la légitime rémunération que la société PARFIP pouvait escompter de son investissement si la location s'était poursuivie jusqu'à son terme. »
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU 21 JUIN 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 10/04277. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 29 avril 2010, ch. n° 1 : RG n° 2009/12080.
APPELANTE :
SAS PARFIP FRANCE
représentée par Maître Jean-Louis VERRIERE, avoué à la Cour, assistée de Maître Nathalie SAGNES JIMENEZ, avocat au barreau de l'Ain
INTIMÉE :
SCI JC
défaillante
Date de clôture de l'instruction : 18 janvier 2011.
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 mai 2011.
Date de mise à disposition : 21 juin 2011.
Audience présidée par Agnès CHAUVE, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré : - Jean-Jacques BAIZET, président - Claude MORIN, conseiller - Agnès CHAUVE, conseiller.
Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Claude MORIN, conseiller, le président étant empêché, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Le 6 août 2007, le gérant de la SCI JC a conclu directement avec la société ARTYS représentée par la société TOULOUSE TLS, un contrat d'abonnement de télésurveillance sous la condition suspensive d'acceptation de son dossier par un organisme de financement.
Le même jour, le gérant de la SCI JC a régularisé un contrat distinct de location, aux termes duquel il s'engageait à verser au loueur, 60 loyers mensuels d'un montant de 196 euros/HT.
Le 24 août 2007, la SCI JC a signé le procès-verbal de réception relatif aux équipements, sans émettre la moindre réserve ni contestation.
Un nouveau contrat abonnement de télésurveillance avec la Société ARTYS représentée par la Société TOULOUSE TLS ainsi qu'un nouveau contrat de location aux termes duquel il s'engageait à verser au loueur, 60 loyers mensuels d'un montant de 65 euros/HT ont été signés par le gérant de la SCI JC.
Le 28 août 2007, la SCI JC a signé le P-V de réception relatif aux équipements, sans émettre la moindre réserve ni contestation.
La société TOULOUSE a cédé les deux contrats de location à la société PARFIP France.
N'étant pas payée des loyers, la société PARFIP France a saisi le Tribunal de Grande Instance de LYON, qui par jugement rendu le 29 avril 2010, a, après avoir soulevé le caractère abusif de la clause de durée du contrat et de la clause de résiliation :
- condamné la SCI JC à verser à la société PARFIP FRANCE la somme de 2.813,04 euros avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % à compter du 20 mars 2009,
- condamné la SCI JC à verser à la société PARFIP FRANCE la somme de 932,88 euros avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % à compter du 20 mars 2009,
- débouté la société PARFIP de ses demandes au titre de l'indemnité de résiliation et des clauses pénales,
- ordonné à la SCI JC de restituer l'ensemble des matériels à la société PARFIP FRANCE dans le délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision au siège social de la société PARFIP FRANCE,
- débouté la société PARFIP FRANCE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société PARFIP FRANCE aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration en date du 11 juin 2010, la société PARFIP FRANCE a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions, elle demande à la Cour de :
- réformer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Lyon,
- constater la résiliation des contrats de location conclus entre elle et la SCI JC pour défaut de paiement des loyers,
- condamner la SCI JC à lui payer la somme de 3.038,08 euros au titre des loyers échus, la somme de 9.611,22 euros au titre de l'indemnité de résiliation, outre la somme de 961,12 euros au titre de la clause pénale contractuelle avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 20 mars 2009 pour le contrat en date du 6 août 2007,
- condamner la SCI JC à lui payer la somme de 1.007,51 euros au titre des loyers échus, la somme de 3.265,08 euros au titre de l'indemnité de résiliation, outre la somme de 326,51 euros au titre de la clause pénale contractuelle avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 20 mars 2009 pour le contrat en date du 6 septembre 2007,
- condamner la SCI JC à restituer l'ensemble des matériels loués au siège social de la Société PARFIP FRANCE, aux frais exclusifs de l'intimée,
- condamner l'intimée à lui payer la somme de 2.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec distraction de ceux d'appel au profit de maître VERRIERE.
Elle reproche au premier juge d'avoir soulevé d'office une argumentation relative au droit de la consommation inapplicable en l'espèce. Elle fait valoir que les dispositions du code de la consommation visées par les premiers juges sont inapplicables s'agissant d'un contrat de services ayant un rapport direct avec l'activité exercée par le cocontractant, et ce, même si l'objet du contrat est étranger à l'activité du cocontractant ou à sa sphère de compétence personnelle.
Elle en déduit que la mise en place d'un système de télésurveillance pour sécuriser des locaux professionnels est incontestablement en rapport avec l'activité de la SCI JC quels que soient ses compétences ou son objet social.
Elle considère au surplus que la clause de durée de location de 60 mois comme celle de résiliation ne sont pas abusives, s'agissant d'un contrat de location et que la SCI doit donc être condamnée à payer l'intégralité des loyers contractuellement prévus jusqu'à l'échéance.
Elle relève que la SCI JC a choisi librement le bien loué, l'a réceptionné sans réserves, ce qui établit qu'elle a parfaitement respecté ses obligations contractuelles, les contrats de location étant causés.
Régulièrement assignée le 21 octobre 2010, la SCI JC n'a pas constitué avoué.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS ET DÉCISION :
Aux termes de l'article L. 141-4 du code de la consommation issu de la loi du 3 janvier 2008, « le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. »
Ainsi, bien que la SCI JC n'ait pas comparu en première instance, le premier juge pouvait soulever la question du caractère abusif des clauses du contrat. Le Tribunal n'a certes pas ordonné la réouverture des débats, mais ce moyen apparaît actuellement sans intérêt dès lors qu'en cause d'appel, la société PARFIP s’est expliquée sur cette question et a conclu au caractère inapplicable en l'espèce des dispositions du code de la consommation et à l'absence de caractère abusif des clauses imposant au non-professionnel une durée initiale du contrat supérieure à un an et excluant toute rupture anticipée du contrat par le locataire et en mettant à la charge du locataire la réparation des systèmes sans lui offrir la possibilité de rompre le contrat.
Les pièces produites ne permettent pas d'établir que la location d'un système de télésurveillance n'entre pas dans le cadre de l'activité à but lucratif exercée par la SCI. S'agissant de location de matériels destinés à assurer la sécurité de locaux, il apparaît que cette location concerne les besoins de son activité.
Dès lors, c'est à tort que le premier juge a retenu la qualité de consommateur non professionnel à la SCI et a fait application à son profit des dispositions relatives aux clauses abusives.
Les clauses relevées par le premier juge à savoir celles prévoyant une durée irrévocable de 60 mois et celle fixant l'indemnité de résiliation au montant des loyers restant dus n'ont [pas] [N.B. « par » dans la version consultée] pour effet ou objet de créer un déséquilibre significatif entre les parties dans la mesure où le matériel financé par la location est difficilement cessible à un tiers en cas de résiliation anticipée, et où l'indemnité de résiliation correspond à la légitime rémunération que la société PARFIP pouvait escompter de son investissement si la location s'était poursuivie jusqu'à son terme.
L'article 10 des contrats stipulent notamment qu'en cas de non-paiement d'un loyer, le contrat pourra être résilié de plein droit par le bailleur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée sans effet.
En l'espèce, des courriers contenant mises en demeure de payer les loyers ont été adressés et reçus par la SCI le 24 mars 2009.
L'article 10 susvisé précise « qu'outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur, » que l'article 13 susvisé précise en outre « qu'outre la restitution du matériel, le locataire devra verser une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat tel que prévu à l'origine majorée d'une clause pénale de 10 %. »
La société PARFIP est donc fondée à réclamer pour le contrat du 6 août 2007 la somme de 3.038,08 euros au titre des loyers échus et celle de 9.611,22 euros au titre de l'indemnité de résiliation, avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 24 mars 2009, et pour le contrat du 6 septembre 2007, la somme de 1.007,51euros au titre des loyers échus et celle de 3.265,08 euros au titre de l'indemnité de résiliation, avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 24 mars 2009.
La clause pénale prévue au contrat sera par contre réduite comme le permet l'article 1152 du code civil à 1 euro, cette clause étant manifestement excessive eu égard à l'économie générale du contrat.
La restitution du matériel loué ordonnée par le premier juge sera confirmée.
La Cour n'estime pas devoir faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Infirme le jugement rendu le 29 avril 2009 par le Tribunal de Grande Instance de LYON sauf en ce qu'il a condamné la SCI JC à restituer l'ensemble des matériels à la société PARFIP FRANCE.
Statuant à nouveau des autres chefs,
Condamne la SCI JC à payer à la SAS PARFIP FRANCE pour le contrat du 6 août 2007 la somme de 3.038,08 euros au titre des loyers échus et celle de 9.611,22 euros au titre de l'indemnité de résiliation, avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 24 mars 2009.
Condamne la SCI JC à payer à la SAS PARFIP FRANCE pour le contrat du 6 septembre 2007, la somme de 1.007,51 euros au titre des loyers échus et celle de 3.265,08 euros au titre de l'indemnité de résiliation, avec intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 24 mars 2009.
Condamne la SCI JC à payer à la SAS PARFIP FRANCE la somme de un euro au titre de la clause pénale.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SCI JC aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de l'avoué de son adversaire, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président
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