TI PARIS (11e arrdt), 1er juin 2004
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 437
TI PARIS (11e arrdt), 1er juin 2004 : RG n° 11-03-002512
(rectification par TI Paris (11e arrdt), 7 septembre 2004 : RG n° 11-04-001442 et sur appel CA Paris (8e ch. A), 23 février 2006 : RG n° 04/15558 ; arrêt n° 188)
Extrait : 1/ « Attendu que le contrat de surveillance litigieux, conclu par M. X. pour ses locaux professionnels, entre dans le domaine d'application de ce texte, dans la mesure où l'activité de photographe, exercée par M. X., se trouve sans rapport direct avec les biens et services offerts par la société CIPE, et ne lui confère aucune compétence particulière en matière de télésurveillance, de sorte qu'il est assimilable à un simple consommateur, au sens de la loi ».
2/ « Attendu qu'en prévoyant d'une part que la télésurveillance des locaux de M. X. sera assurée pour une durée irrévocable de 48 mois, sans envisager aucune possibilité de rupture anticipée par le consommateur, notamment l'hypothèse où il quitterait les lieux faisant l'objet de la télésurveillance, en prévoyant d'autre part que le contrat se poursuivra après son terme pour des périodes successives d'un an, à défaut de notification de sa résiliation, 3 mois avant son terme, sans prévoir aucune possibilité d'éviter l'automaticité de la reconduction, et en disposant encore qu'à défaut de paiement de l'une quelconque des mensualités, le contrat sera résilié 8 jours après une mise en demeure restée sans effet, et que le solde des mensualités non réglées et restant à courir deviendra de plein droit et immédiatement exigible, le contrat litigieux a pour effet, sinon pour objet, de créer au détriment du co-contractant de la société de télésurveillance un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à la convention, de sorte que lesdites clauses, dont se prévaut la société demanderesse à l'appui de ses prétentions, doivent être tenues pour non écrites ».
3/ « Qu'il en résulte que le droit commun des contrats et obligations est applicable, et que l'objet du contrat ayant disparu du fait du départ de M. X. des lieux faisant l'objet de la télésurveillance, en novembre 1999, la société ADT SURVEILLANCE ne pouvait plus exiger de lui le paiement des mensualités futures, qui étaient alors dépourvues de cause, comme l'a en définitive plaidé M. X. au cours de l'audience ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE PARIS
ONZIÈME ARRONDISSEMENT
JUGEMENT DU 1er JUIN 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-03-002512.
DEMANDEUR :
Société Anonyme La société ADT TELESURVEILLANCE
[adresse], représentée par Maître NIZOU-LESAFFRE Alain, avocat au barreau de LIMOGES
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
[adresse], assisté de Maître ALTMANN Karine, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Vice-Président : Monsieur Gérard MARTIN
Greffier : Mademoiselle Yvette DAVALAN
DÉBATS : Audience publique du : 4 mai 2004
JUGEMENT : contradictoire en dernier ressort, prononcé publiquement le 1er juin 2004 par Monsieur Gérard MARTIN, Vice-Président, assisté de Mademoiselle Yvette DAVALAN, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Photographe de profession, M. X. a signé le 15 février 1999 avec la société CIPE FRANCE SA, nouvellement dénommée ADT TELESURVEILLANCE, un contrat d'abonnement de télésurveillance en vertu duquel elle s'est obligée à installer un matériel de télésurveillance dans les locaux professionnels de M. X. (situés [adresse]), et à assurer la maintenance ainsi que la télésurveillance de ces locaux pour une durée irrévocable de 48 mois, de février 1999 à janvier 2003, moyennant le versement de mensualités de 380,00 Francs HT (57,93 euros HT).
Le contrat prévoyait en son article 11 qu'à défaut de paiement de l'une quelconque des mensualités, le contrat serait résilié 8 jours après une mise en demeure restée sans effet, et que le solde des mensualités non réglées et restant à courir deviendrait de plein droit et immédiatement exigible.
Il prévoyait en outre, en son article 13, son renouvellement par tacite reconduction pour des périodes successives d'un an, à défaut de résiliation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, trois mois avant l'échéance de chaque période contractuelle. ;
Ce matériel a été livré et installé le 23 février 1999, mais M. X. n'a réglé que les mensualités des mois de février à novembre 1999, ainsi que celle d'avril 2000, et n'a pas procédé à la résiliation du contrat, qui s'est tacitement reconduit pour la période allant de février 2003 à janvier 2004.
M. X. n'ayant pas réagi à une mise en demeure effectuée au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 mars 2003, la société ADT SURVEILLANCE l'a, par acte d'huissier du 22 septembre 2003, fait assigner devant le tribunal de ce siège, auquel elle a demandé, en ordonnant l'exécution provisoire du jugement à intervenir, de :
- constater que le contrat en date du 15 février 1999 a été résilié de plein droit 8 jours après l'envoi de la mise en demeure du 3 mars 2003
- de condamner M. X. à lui payer la somme de 3.507,02 euros en principal, conformément aux clauses du contrat, ladite somme s'établissant comme suit :
* mensualités de décembre 1999 à mars 2000 279,44 euros
* mensualités de mai 2000 à janvier 2004 3.117,60 euros
* frais : 109,98 euros
- de dire que cette somme portera intérêts à compter du 3 mars 2003, et d'ordonner la capitalisation des intérêts échus
- de lui allouer une somme de 920,00 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
[minute page 3] M. X. explique, sans être contredit, qu'il a quitté les lieux en novembre 1999, époque à laquelle l'appareil de surveillance a été débranché, par les soins du CIPE, de sorte qu'il a cru, en toute bonne foi, qu'il avait été mis fin au contrat d'abonnement, et que les prélèvements prévus ont été rejetés, à compter de décembre 1999, à l'exception des prélèvements d'avril et mai 2000, étant précisé qu'à compter du mois d'août 2000, aucun prélèvement n'a été présenté.
Il conclut au caractère abusif des clauses litigieuses, au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, et corrélativement à la nullité du contrat, sollicitant la somme de 579,30 [rectification par jugement du 7 septembre 2004] euros au titre des mensualités réglées en exécution dudit contrat, outre une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Attendu que M. X. se prévaut des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, énonçant que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrats, et disposant que les clauses abusives sont réputées non écrites ;
Attendu que le contrat de surveillance litigieux, conclu par M. X. pour ses locaux professionnels, entre dans le domaine d'application de ce texte, dans la mesure où l'activité de photographe, exercée par M. X., se trouve sans rapport direct avec les biens et services offerts par la société CIPE, et ne lui confère aucune compétence particulière en matière de télésurveillance, de sorte qu'il est assimilable à un simple consommateur, au sens de la loi ;
Attendu qu'en prévoyant d'une part que la télésurveillance des locaux de M. X. sera assurée pour une durée irrévocable de 48 mois, sans envisager aucune possibilité de rupture anticipée par le consommateur, notamment l'hypothèse où il quitterait les lieux faisant l'objet de la télésurveillance, en prévoyant d'autre part que le contrat se poursuivra après son terme pour des périodes successives d'un an, à défaut de notification de sa résiliation, 3 mois avant son terme, sans prévoir aucune possibilité d'éviter l'automaticité de la reconduction, et en disposant encore qu'à défaut de paiement de l'une quelconque des mensualités, le contrat sera résilié 8 jours après une mise en demeure restée sans effet, et que le solde des mensualités non réglées et restant à courir deviendra de plein droit et immédiatement exigible, le contrat litigieux a pour effet, sinon pour objet, de créer au détriment du co-contractant de la société de télésurveillance un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à la convention, de sorte que lesdites clauses, dont se prévaut la société demanderesse à l'appui de ses prétentions, doivent être tenues pour non écrites ;
[minute page 4] Qu'il en résulte que le droit commun des contrats et obligations est applicable, et que l'objet du contrat ayant disparu du fait du départ de M. X. des lieux faisant l'objet de la télésurveillance, en novembre 1999, la société ADT SURVEILLANCE ne pouvait plus exiger de lui le paiement des mensualités futures, qui étaient alors dépourvues de cause, comme l'a en définitive plaidé M. X. au cours de l'audience ;
Qu'il convient en conséquence de débouter la société ADT SURVEILLANCE de sa demande principale, et de la condamner à rembourser à M. X. la somme de 57,93 euros correspondant au prélèvement effectué en avril 2000 [rectification de la mention 2002 par jugement du 7 septembre 2004] ;
Attendu que M. X., en revanche, est malvenu à solliciter le remboursement des mensualités réglées à la société CIPE pendant la période allant du jour de la conclusion du contrat jusqu'en novembre 1999, époque à laquelle il a quitté les lieux, s'agissant de paiements qui avaient pour contrepartie l'exécution par la société demanderesse des prestations mises à sa charge par la convention des parties ;
Attendu que la demande aux fins d'exécution provisoire est dépourvue d'objet, le présent jugement n'étant pas susceptible de l'exercice des voies de recours ordinaires ;
Attendu que l'équité commande d'allouer à M. X. la somme de 450 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Que succombant dans ses prétentions, la société ADT TELESURVEILLANCE doit supporter les entiers dépens de l'instance, de sorte qu'elle ne peut se prévaloir de l'application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
CONSTATE que le contrat conclu entre les parties comporte des clauses abusives, au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ;
DEBOUTE la société ADT TELESURVEILLANCE de ses demandes ;
CONDAMNE cette société à rembourser à M. X. la somme de CINQUANTE SEPT EUROS ET QUATRE VINGT TREIZE CENTS (57,93 euros) correspondant au prélèvement effectué en avril 2000 [rectification de la mention 2002 par jugement du 7 septembre 2004] ;
CONDAMNE ladite société à payer à M. X. une somme de QUATRE CENT CINQUANTE EUROS (450 euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
[minute page 5] REJETTE les prétentions plus amples ou contraires ;
CONDAMNE la société ADT TELESURVEILLANCE aux dépens de l'instance ;
Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an susdits.
Le Greffier Le Président
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