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CA ANGERS (ch. A civ.), 4 novembre 2014

Nature : Décision
Titre : CA ANGERS (ch. A civ.), 4 novembre 2014
Pays : France
Juridiction : Angers (CA), ch. civ.
Demande : 13/01689
Date : 4/11/2014
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 25/06/2013
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4913

CA ANGERS (ch. A civ.), 4 novembre 2014 : RG n° 13/01689

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « M. X. se prévaut des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, et en particulier au défaut des informations concernant le droit de rétractation que doit contenir un contrat passé entre un professionnel et un consommateur. Il se prévaut de la qualité de consommateur en soutenant que le contrat est sans rapport avec son activité professionnelle dans la mesure où il exerçait une activité de tailleur de pierres qu'il a dû cesser à la suite d'un accident de la vie privée survenu le 5 octobre 2011.

Cependant M. X. a contracté avec la société Locam dans le cadre de son activité professionnelle d'artisan maçon, afin de développer sa clientèle au moyen d'un outil de communication adapté à son époque, et par voie de conséquence son chiffre d'affaires et les revenus professionnels qui en découlent. Il a d'ailleurs apposé sur le contrat à deux reprises son cachet humide à l'enseigne de son fonds artisanal « Entreprise X. - Taille de pierres - Maçonnerie Carrelage. » Le même tampon a également été apposé sur le procès-verbal de réception. Il ressort de ces éléments que le droit de la consommation est inapplicable en l'espèce, dans la mesure où il existe un rapport direct entre la conclusion du contrat en cause et l'activité professionnelle exercée par Monsieur X., peu important que par la suite, il ait cessé cette activité.

Le moyen de nullité du contrat doit donc être rejeté. »

2/ « M. X., qui se prévaut des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, prétend que la clause du contrat de location qui prévoit que pendant une durée de 48 mois, le locataire a une obligation de payer tous les mois la somme due malgré la résiliation peut être considérée comme abusive et doit donc être tenue pour illicite.

Mais la société Locam fait observer tout d'abord, et à juste titre, que le contentieux relevant des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce relève de la compétence exclusive de certains tribunaux de commerce, l'appel des décisions rendues par ces juridictions relevant désormais de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris. La demande formée à ce titre par M. X. devant la cour de ce siège ne peut donc être accueillie, étant en outre observé que M. X., qui se borne à invoquer le texte précité, n'explique pas en quoi il y aurait en l'espèce un « déséquilibre significatif » dans les droits et obligations des parties, M. X. ayant conclu avec la société Locam un contrat à durée déterminée pour un objet précis et bien délimité, en contrepartie de quoi, il s'est engagé à payer des mensualités de location financière. Le moyen doit donc être rejeté. »

3/ « Le contrat à durée déterminée souscrit pas M. X. est un contrat synallagmatique. Conformément au droit commun des contrats, la cause de l'obligation de l'une des parties réside dans l'objet de l'obligation de l'autre. Il s'agit d'un élément essentiel de la formation du contrat.

En l'espèce la société Locam s'est engagée à financer l'installation d'un site internet qui a été installé au profit de M. X. et qui a régulièrement fonctionné. De son côté, M. X. s'est engagé à payer des loyers financiers, lesquels étaient exigibles dès la signature du procès-verbal de réception. Dès lors aucune absence de cause ne peut être invoquée par M. X. pour échapper à ses engagements contractuels. Le moyen tiré de l'absence de cause doit donc être rejeté. »

 

COUR D'APPEL D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE

ARRÊT DU 4 NOVEMBRE 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/01689. Jugement du 19 avril 2013, Tribunal d'Instance du MANS : R.G. n° 11-12-508.

 

APPELANT :

Monsieur X.

le [date] à [ville], représenté par Maître Guillaume BOIZARD, avocat postulant au barreau d'ANGERS - n° du dossier 130671 substituant Maître Caroline GLON, avocat plaidant au barreau de SAINT-BRIEUC

 

INTIMÉE :

SAS LOCAM

représentée par Maître Dominique BOUCHERON de la SELARL BOUCHERON, avocat au barreau d'ANGERS - n° du dossier 130222

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 22 septembre 2014 à 14h00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur HUBERT, Président de chambre qui a été préalablement entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur HUBERT, Président de chambre, Madame GRUA, Conseiller, Monsieur CHAUMONT, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame LEVEUF

ARRÊT : contradictoire, Prononcé publiquement le 4 novembre 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Monsieur HUBERT, Président et par Madame LEVEUF, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat de location longue durée du 4 juin 2010, M. X., développant une activité d'artisan maçon tailleur de pierres, a souscrit auprès de la société Locam un contrat destiné à financer l'installation d'un site internet moyennant le paiement de 48 mensualités de 200,92 euros chacune.

Un procès-verbal de réception de l'installation a été signé le 14 juin 2010.

Il était prévu au contrat qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance, et faute de règlement dans un délai de huit jours suivant une mise en demeure, la totalité des sommes dues deviendrait de plein droit et immédiatement exigibles, ainsi que le montant d'une clause pénale.

Plusieurs échéances étant restées impayées, le 20 janvier 2012, la société Locam a délivré une mise en demeure à Monsieur X., aux fins d'obtenir paiement de la somme totale de 7.072,38 euros, représentant le montant des loyers non payés et de la clause pénale.

C'est dans ces conditions que par acte du 27 mars 2012, la société Locam a fait assigner M. X. aux fins d'obtenir sa condamnation, avec exécution provisoire, à lui payer la somme de 7.072,38 euros, ainsi qu'une indemnité de 700,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En défense, Monsieur X. a soulevé différents moyens tendant à voir prononcer la nullité du contrat ou subsidiairement sa résiliation. Il demandait également un sursis à statuer dans l'attente de la production d'un décompte précis et historique, et sollicitait la réduction de la clause pénale ainsi qu'un délai de deux ans pour s'acquitter de dettes.

Par jugement du 19 avril 2013, le tribunal d'instance du Mans a rejeté l'ensemble des moyens soulevés par M. X., et l'a condamné, avec exécution provisoire, à payer à la société Locam la somme de 7.072,38 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012. Le tribunal a débouté la société Locam de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et a condamné M. X. aux entiers dépens de la procédure.

M. X. a interjeté appel le 25 juin 2013.

Les parties ont conclu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 septembre 2014.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement :

- du 28 novembre 2013 de M. X.,

- du 24 janvier 2014 de la société Locam,

qui peuvent se résumer ainsi qu'il suit.

M. X., poursuivant l'infirmation du jugement, demande à la cour :

- à titre principal : de prononcer l'annulation du contrat,

- à titre subsidiaire, de dire que le contrat n'est pas valable et que Monsieur X. ne peut être condamné à verser les sommes demandées,

- à titre encore subsidiaire, de juger que le contrat est illicite et que Monsieur X. ne peut être condamné à verser les sommes demandées,

- à titre plus encore subsidiaire, de prononcer la résiliation du contrat,

- à titre plus subsidiaire, de prononcer la caducité du contrat,

- à titre plus que subsidiaire, de surseoir à statuer dans l'attente de la production d'un décompte précis et historique par le demandeur,

- à titre encore plus subsidiaire, de réduire à une somme de principe la somme demandée au titre de la clause pénale, et cela en application de l'article 1152 du Code civil,

- à titre infiniment subsidiaire, d'accorder à Monsieur X. un délai de deux ans en application de l'article 1244-1 du Code civil pour s'acquitter des sommes éventuellement mises à sa charge,

- de dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code civil,

- et de condamner la société Locam aux dépens.

La société Locam demande à la cour la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur X. à lui payer la somme de 7.072,38 euros en principal, et l'infirmant pour le surplus, de dire que les intérêts seront dus sur la somme de 7.072,38 euros à compter de la mise en demeure du 20 janvier 2012, d'ordonner la capitalisation des intérêts, de condamner Monsieur X. au paiement d'une indemnité de 2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1) Sur la demande en nullité du contrat :

M. X. se prévaut des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, et en particulier au défaut des informations concernant le droit de rétractation que doit contenir un contrat passé entre un professionnel et un consommateur.

Il se prévaut de la qualité de consommateur en soutenant que le contrat est sans rapport avec son activité professionnelle dans la mesure où il exerçait une activité de tailleur de pierres qu'il a dû cesser à la suite d'un accident de la vie privée survenu le 5 octobre 2011.

Cependant M. X. a contracté avec la société Locam dans le cadre de son activité professionnelle d'artisan maçon, afin de développer sa clientèle au moyen d'un outil de communication adapté à son époque, et par voie de conséquence son chiffre d'affaires et les revenus professionnels qui en découlent.

Il a d'ailleurs apposé sur le contrat à deux reprises son cachet humide à l'enseigne de son fonds artisanal « Entreprise X. - Taille de pierres - Maçonnerie Carrelage. »

Le même tampon a également été apposé sur le procès-verbal de réception.

Il ressort de ces éléments que le droit de la consommation est inapplicable en l'espèce, dans la mesure où il existe un rapport direct entre la conclusion du contrat en cause et l'activité professionnelle exercée par Monsieur X., peu important que par la suite, il ait cessé cette activité.

Le moyen de nullité du contrat doit donc être rejeté.

 

2) Sur la validité du procès-verbal de réception :

M. X. prétend ne pas avoir reçu de procès-verbal de réception, et soutient que le contrat n'est pas valable, si bien qu'il ne doit rien payer.

Néanmoins il ressort de la pièce n° 2 communiquée que ce document, intitulé « procès-verbal de réception », a bien été signé par M. X.

Il y est précisé que Monsieur X. a pris connaissance de la mise en ligne de son site internet et « avoir vérifié la conformité au cahier des charges et à ses besoins du dit site internet, en avoir contrôlé le bon fonctionnement, avoir obtenu la justification des demandes de référencement effectuées auprès des moteurs de recherche par le fournisseur, en conséquence accepter le site internet et les prestations sans restriction ni réserves, (...). Le client déclare être parfaitement informé des modalités du site Web et de son contexte technique. »

Il est en outre indiqué : « la date du procès-verbal de réception rend exigible la 1re échéance. »

Enfin, il est constant que M. X. a exécuté le contrat pendant seize mois sans se prévaloir des nullités contractuelles dont il fait état aujourd'hui.

Le moyen de « non validité » doit donc être rejeté.

 

3) Sur l'existence d'une clause abusive :

M. X., qui se prévaut des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, prétend que la clause du contrat de location qui prévoit que pendant une durée de 48 mois, le locataire a une obligation de payer tous les mois la somme due malgré la résiliation peut être considérée comme abusive et doit donc être tenue pour illicite.

Mais la société Locam fait observer tout d'abord, et à juste titre, que le contentieux relevant des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce relève de la compétence exclusive de certains tribunaux de commerce, l'appel des décisions rendues par ces juridictions relevant désormais de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris.

La demande formée à ce titre par M. X. devant la cour de ce siège ne peut donc être accueillie, étant en outre observé que M. X., qui se borne à invoquer le texte précité, n'explique pas en quoi il y aurait en l'espèce un « déséquilibre significatif » dans les droits et obligations des parties, M. X. ayant conclu avec la société Locam un contrat à durée déterminée pour un objet précis et bien délimité, en contrepartie de quoi, il s'est engagé à payer des mensualités de location financière.

Le moyen doit donc être rejeté.

 

4) Sur la résiliation du contrat pour cause de cessation d'activité :

M. X. a cessé son activité le 5 octobre 2011 à la suite d'un accident de la vie privée.

Cette circonstance est néanmoins inopposable à la société Locam avec lequel M. X. a conclu un contrat irrévocable d'une durée de 48 mois, cette durée tenant compte de la mobilisation de la totalité du capital représentant le prix d'acquisition des droits d'exploitation du site.

La cessation d'activité de l'appelant, pour des raisons qui lui sont personnelles et n'entrent pas dans le champ contractuel, n'est pas en elle-même une cause légitime de résiliation du contrat de location à son initiative.

Le moyen doit donc être rejeté.

 

5) Sur l'absence de cause :

Le contrat à durée déterminée souscrit pas M. X. est un contrat synallagmatique.

Conformément au droit commun des contrats, la cause de l'obligation de l'une des parties réside dans l'objet de l'obligation de l'autre.

Il s'agit d'un élément essentiel de la formation du contrat.

En l'espèce la société Locam s'est engagée à financer l'installation d'un site internet qui a été installé au profit de M. X. et qui a régulièrement fonctionné.

De son côté, M. X. s'est engagé à payer des loyers financiers, lesquels étaient exigibles dès la signature du procès-verbal de réception.

Dès lors aucune absence de cause ne peut être invoquée par M. X. pour échapper à ses engagements contractuels.

Le moyen tiré de l'absence de cause doit donc être rejeté.

 

6) Sur la demande de sursis à statuer et le montant de la créance :

En application de l'article 18 des conditions générales, en cas de non-paiement, « outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur :

- une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10 % et des intérêts de retard ;

- une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorée d'une clause pénale de 10 % sans préjudice de tous dommages et intérêts que le locataire pourra devoir au loueur du fait de la résiliation. »

Comme l'a observé le premier juge, le décompte de la créance de la société Locam était parfaitement indiqué dans la mise en demeure qui a été adressée à M. X., le montant exigible étant de :

- 1.004,60 euros (loyers échus impayés de 200,92 euros, soit les échéances du 10 novembre 2011 au 10 mars 2012),

- 5.424,84 euros (loyers à échoir de 200,92 euros pour la période du 20 janvier 2012 au 20 juillet 2015, conformément à l'article 18 des conditions générales du contrat),

- 642,94 euros (indemnité et clause pénale de 10 %).

Monsieur X. doit bien à la société Locam la somme totale de 7.072,38 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2012, date de la mise en demeure (et non 26 janvier comme indiqué par la premier juge).

Il n'y a donc pas lieu à sursis à statuer.

La capitalisation des intérêts, demandée par la société Locam, sera ordonnée.

 

7) Sur la réduction de la clause pénale :

La clause pénale de 10 % stipulée au contrat ne constitue pas une peine manifestement excessive compte tenu de l'investissement réalisé par le loueur et des difficultés de gestion des suites du contrat.

Elle ne doit donc pas être réduite, contrairement à ce que prétend M. X.

 

8) Sur la demande du délai de paiement :

M. X. ne justifie pas d'une situation financière particulièrement difficile.

Sa demande de délais de paiement sera donc rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur X. à payer à la société Locam la somme en principal de 7.072,38 euros ;

Et le réformant pour le surplus, y ajoutant,

DIT que la condamnation à payer la somme de 7.072,38 euros portera intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2012, date de la mise en demeure ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts, dans les termes de l'article 1154 du code civil ;

CONDAMNE Monsieur X. à payer à la société Locam une indemnité de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur X. aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT

C. LEVEUF                           L-D. HUBERT

 

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