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CA DIJON (ch. civ. B), 27 mars 2003

Nature : Décision
Titre : CA DIJON (ch. civ. B), 27 mars 2003
Pays : France
Juridiction : Dijon (CA), ch. civ. sect B
Demande : 01/01609
Date : 27/03/2003
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : T. COM. CHALON-SUR-SAÔNE (1re ch.), 22 mars 1999, T. COM. CHALON-SUR-SAÔNE (1re ch.), 14 mai 2001
Numéro de la décision : 302
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 633

CA DIJON (ch. civ. B), 27 mars 2003 : RG n° 01/01609 ; arrêt n° 302 B

(déchéance du pourvoi le 16 février 2004)

Publication : Juris-Data n° 208898

 

Extrait : « La réglementation des clauses abusives, qui a pour objet de protéger les consommateurs ou les non professionnels, ne s'applique pas aux contrats souscrits entre professionnels, étant observé qu'en l'espèce le matériel loué l'était pour l'exercice par le locataire de son activité professionnelle ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE CIVILE B

ARRÊT DU 27 MARS 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 01/01609. Arrêt n° 302 B.

APPELANTE :

SA SOPAFOM

dont le siège social est : [adresse] ; représentée par la SCP AVRIL et HANSSEN, avoués à la Cour assistée de Maître Jean-Marie GUELOT, substitut par Maître DE GEOFFROY avocats au barreau de PARIS.

 

INTIMÉE :

SARL D. BATIMENT et TRAVAUX PUBLICS - DBTP

dont le siège social est : [adresse] ; représentée par Maître Philippe GERBAY, avoué à la Cour, assistée de la SCP ADIDA - MATHIEU - BUISSON - VIEILLARD - MEUNIER - GUIGUE, avocats au barreau de CHALON SUR SAÔNE.

 

COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats

Conseillers rapporteurs, avec l'accord des parties : Monsieur LITTNER, Conseiller, Madame ROUX, Conseiller, désignés à ces fonctions par ordonnance de Madame la Première Présidente en date du 18 décembre 2002, [minute page 2]

Greffier lors des débats et du prononcé : - Mme CREMASCHI, Greffier

Lors du délibéré : Monsieur LITTNER, Conseiller, Madame ROUX, Conseiller, qui ont rendu compte, conformément à l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile à l'autre magistrat composant la Chambre : - Monsieur RICHARD, Conseiller

DÉBATS : audience publique du 6 mars 2003

ARRÊT : rendu contradictoirement,

Prononcé à l'audience publique de la Cour d'Appel de DIJON le 27 mars 2003 par Monsieur LITTNER, Conseiller, qui a signé l'arrêt avec Madame CREMASCHI, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :

Le 24 octobre 1996, la SA SOPAFOM a donné en location un « chargeur bobcat » à la SARL D. BATIMENTS ET TRAVAUX PUBLICS (DBTP) moyennant un loyer de 700 Francs par jour.

Ce matériel a été volé sur un chantier dans la nuit du 30 au 31 octobre 1996 et la société SOPAFOM a adressé à sa locataire une facture de 125.279,28 Francs, correspondant à la valeur à neuf sous déduction d'une remise de 30 %.

La société DBTP ayant refusé de payer, la SA SOPAFOM l'a assignée en paiement de cette somme, outre intérêts.

Par jugement du 22 mars 1999, le tribunal de commerce de CHALON-SUR-SAONE, devant lequel la société défenderesse soutenait que la société SOPAFOM s'était engagée à souscrire une assurance vol, a dit qu'il convenait d'accueillir la demande de la société SOPAFOM dans son principe et a ordonné une expertise pour déterminer la valeur du matériel.

[minute page 3] L'expert a proposé deux chiffres, 26.800 Francs pour la valeur vénale, 103.880 Francs pour la valeur à neuf.

Le tribunal, par un autre jugement, en date du 14 mai 2001, a condamné la société DBTP à payer à la société demanderesse la somme de 26.800 Francs, avec intérêts à compter de la date de signification, ainsi que 6.000 Francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SA SOPAFOM a fait appel.

Par conclusions du 8 février 2002, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile, elle soutient que le jugement du 22 mars 1999 a autorité de chose jugée, que les conditions générales prévoient, en cas de vol, la facturation de la valeur à neuf, que cette clause n'est pas abusive et que la somme de 15.836,40 € (103.880 Francs) HT, outre pénalités de retard doit lui être accordée ainsi que 2.296,74 € (15.000 Francs) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SARL DBTP, par écritures du 14 août 2002, auxquelles il est pareillement fait référence, répond que le jugement du 22 mars 1999 n'a pas autorité de chose jugée, que l'accord cadre du 9 juin 1994 mettait à la charge du loueur l'obligation de souscrire une assurance et que la réclamation doit en conséquence être rejetée.

A titre subsidiaire, elle soutient que la clause prévoyant la facturation de la valeur à neuf du matériel volé est une clause abusive et que faire droit à cette demande constituerait une exécution du contrat de mauvaise foi, un enrichissement sans cause et qu'en toute hypothèse il s'agirait d'une clause pénale excessive qui devrait être réduite.

Elle souhaite obtenir 3.050 € en remboursement de ses frais irrépétibles.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1. Sur l'autorité du jugement du 22 mars 1999

Attendu qu'il est vrai que, dans son dispositif, le tribunal de commerce a seulement ordonné une expertise, confiée à M. X., aux fins de chiffrer la valeur du matériel ;

[minute page 4] Attendu cependant que, dans ses motifs, le tribunal avait expliqué que DBTP sollicitait le rejet de la demande en faisant valoir que SOPAFOM s'était engagée à souscrire une assurance contre le vol mais que cette prétention devait être rejetée parce que cet engagement était contenu dans une lettre simple ne permettant pas de déterminer de façon certaine l'échange des consentements entre les parties sur la souscription du contrat d'assurance ;

Attendu que la désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur du matériel n'a de sens que si le tribunal a préalablement rejeté la prétention de DBTP relative à l'obligation d'assurance ;

Attendu que la décision contenue dans les motifs, selon laquelle la demande de la société SOPAFOM doit être accueillie dans son principe est liée au dispositif, dont elle est le soutien nécessaire ;

Qu'elle bénéficie donc de l'autorité de la chose jugée, ce qui a d'ailleurs été admis au cours des opération d'expertise par la société DBTP, dont le représentant a déclaré qu'il n'assistait à la réunion que « sous réserve d'appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de CHALON-SUR-SAONE qui a tranché, dans ses motifs, une partie du principal » ;

Attendu que cette décision, signifiée le 15 juin 1999, n'a pas été frappée d'appel et est donc définitive ;

Qu'il ne peut donc plus être prétendu que la société SOPAFOM s'était engagée à souscrire une assurance pour les engins loués à DBTP;

 

2. Sur les clauses du contrat

Attendu que l'article XII des conditions générales de location, dont le locataire a déclaré dans le bon de prise en charge, juste avant sa signature, avoir pris connaissance, prévoyait que les « détériorations, nettoyages ou manques de matériel, notamment en cas de vol, seront facturés au client au coût de réparation ou pour la valeur à neuf au tarif en vigueur » ;

que l'article X indiquait que la responsabilité du locataire était engagée en cas de vol du matériel ;

Attendu que la société intimée considère que la clause relative à la facturation de la valeur à neuf est une clause abusive ;

[minute page 5] Mais attendu que la réglementation des clauses abusives, qui a pour objet de protéger les consommateurs ou les non professionnels, ne s'applique pas aux contrats souscrits entre professionnels, étant observé qu'en l'espèce le matériel loué l'était pour l'exercice par le locataire de son activité professionnelle ; que cette protection ne peut donc être revendiquée ;

Qu'il n'est pas possible de dire que cette clause, qui a été acceptée par la société DBTP, constitue une exécution de mauvaise foi du contrat ;

Attendu que l'enrichissement sans cause ne peut être invoqué en présence d'un contrat ;

Que la clause litigieuse ne peut être analysée comme une clause pénale dès lors qu'elle n'a pas pour objet, contrairement aux exigences de l'article 1226 du Code civil, d'assurer l'exécution de la convention ;

Attendu qu'elle doit donc recevoir application ;

Attendu que la valeur déterminée par l'expert n'est pas discutée et doit donc être retenue, soit 15.836,40 €, somme qui portera intérêts à compter de la date d'échéance de la facture conformément à l'article XV des conditions générales ;

 

3. Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Attendu que l'équité ne commande de faire bénéficier la société SOPAFOM des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ni en instance ni en appel ; que l'intimée, qui succombe, ne peut bénéficier de ce texte ;

Attendu que le litige résultant essentiellement de documents imprécis ou contradictoires imputables aux deux parties, chacune conservera la charge de ses dépens d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR

Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

[minute page 6] Condamne la SARL D. BATIMENTS ET TRAVAUX PUBLICS à payer à la SA SOPAFOM la somme de 15.836,40 €, avec intérêts « dans les conditions légales » à compter dul5 février 1997,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.