CA RENNES (2e ch.), 18 mai 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7587
CA RENNES (2e ch.), 18 mai 2018 : RG n° 15/00299 ; arrêt n° 270
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « L'action en contestation de la régularité de l'offre préalable est soumise au délai de prescription des articles 1304 du code civil et L. 110-4-1 du code de commerce. Ce délai initial de 10 ans a été réduit à 5 ans par l'effet de la loi du 17 juin 2008. […] Par application des dispositions de l'article 26-II de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Il résulte de ces dispositions que Mme X. est prescrite en sa contestation de l'offre préalable conclue le 2 avril 2007 en ce que cette contestation a été soulevée postérieurement au 19 juin 2013. »
2/ « S'agissant de la taille des caractères, il ressort de l'examen de la copie de l'offre préalable versée aux débats que la copie produite est une photocopie au format réduit A4 ainsi que le démontre les traces du document original créant des marges supplémentaires sur la troisième page de l'offre ; qu'il ne peut en conséquence être déduit de la taille des caractères de cette photocopie l'existence d'une irrégularité de taille des caractères ; le prêteur produit aux débats une copie taille réelle du modèle de l'offre dont la conformité typographique n'est pas contestée. En l'état de ces éléments, l'irrégularité de l'offre n'est pas établie de ce chef. »
3/ « Mais la régularité de l'offre préalable s'apprécie à la date où l'offre a été conclue ; les dispositions contractuelles critiquées offrent au prêteur la faculté de suspendre l'utilisation du crédit suivant sa seule appréciation de la solvabilité de l'emprunteur et alors même que ce dernier respecterait ses obligations contractuelles en assurant le règlement des échéances ; ces dispositions aggravent la situation de l'emprunteur en ce qu'elles permettent de manière unilatérale au prêteur de suspendre l'utilisation de l'ouverture de crédit sur la foi d'appréciations subjectives et ce y compris dans l'hypothèse où l'emprunteur assure pleinement ses obligations contractuelles. Une telle clause, est illicite en ce qu'elle restreint les droits de l'emprunteur et quand bien même des dispositions législatives postérieures ont pu s'inspirer d'un tel mécanisme. »
4/ « Si la faculté de cession par endossement dans les conditions prévues par le code monétaire et financier ne figure dans les modèles types il n'est pas démontré en quoi l'insertion d'une telle clause aggraverait la situation de l'emprunteur et le priverait de son droit de saisir le médiateur de l'ASF en ce que la cession de contrat emporte cession de toutes les obligations à la charge du cessionnaire ; qu'en tout état de cause si une telle éventualité devait advenir elle n'apparaît pas de nature à diminuer significativement les droits de l'emprunteur ; que par ailleurs les dispositions de l'article 1690 ancien du code civil ne sont pas d'ordre public et qu'il peut y être dérogé. »
5/ « Mais c'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a rappelé que la faculté de remboursement prévue par l'article L. 311-29 du code de la consommation n'est subordonnée à aucune condition ou indemnité. La stipulation querellée en ce qu'elle impose à l'emprunteur de procéder au remboursement à l'échéance du prêt fait obstacle au droit qui lui est reconnu par l'article L 311-29 de procéder au remboursement au moment qu'il choisit sans être tenu de respecter l'échéancier fixé ; qu'il est ainsi loisible à l'emprunteur de procéder au remboursement du capital emprunté entre deux échéances de prêt sans qu'il puisse lui être imposé de payer les intérêts pouvant être calculés entre la date de son paiement et l'échéance suivante comme tend à lui imposer la clause litigieuse. C'est en conséquence à bon droit que le premier juge a retenu le caractère abusif de cette clause qui aggrave la situation de l'emprunteur. »
6/ « Mais les contrats prévoyant des clauses abusives et illicites étrangères au contrat de crédit ne peuvent être regardés comme conformes aux dispositions des articles L. 311-8 et L. 311-13 du code de la consommation et c'est à bon, droit que Mme X. née Y. sollicite que le prêteur soit déchu du droit aux intérêts de ces prêts conformément aux dispositions de l'article L. 311-33 dans sa rédaction applicable aux contrats en cause (Cassation civile 1ère, 17 juin 2015). »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 18 MAI 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/00299. Arrêt n° 270.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN,
Assesseur : Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller, rédacteur,
GREFFIER : Monsieur Régis ZIEGLER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 23 novembre 2017, devant Monsieur Jean-François POTHIER, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 18 mai 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, après prorogation du délibéré
APPELANTE :
Madame X. née Y.
née le [date] à [ville], Représentée par Maître Bruno S. de la SELARL S. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société FACET
dont le siège social est [adresse], Représentée par Maître Johanne R.-L. de la SELARL L.R.B. AVOCATS CONSEILS, Postulant, avocat au barreau de NANTES, Représentée par Me Sébastien M.-G., Plaidant, avocat au barreau de PARIS
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Suivant offre préalable du 4 mars 2010, la SA Facet a consenti à Mme X. un crédit d'un montant de 7.000,00 euros remboursable en 60 mensualités au taux de 7,42 % pour un taux effectif global de 7,68 %.
Suivant offre préalable du 2 avril 2007, la SA Facet a consenti à Mme X. une ouverture de crédit d'un montant de 800,00 euros remboursable par mensualités au taux de 18,86 %. Suivant offre préalable du 26 janvier 2010, la SA Facet a porté l'ouverture de crédit à un montant de 4.000,00 euros remboursable par mensualités et taux variables.
Alléguant le non-paiement des échéances, par actes des 15 octobre et 14 décembre 2012, la SA Facet a assigné Mme X. devant le tribunal d'instance de Rennes qui par jugement du 1er décembre 2014 a :
- Constaté que l'offre de prêt acceptée le 4 mars 2010 n'est pas conforme aux exigences du code de la consommation,
- Constaté que les offres de prêt acceptées le 2 avril 2007 et le 26 janvier 2010 ne sont pas conformes aux exigences du code de la consommation,
- Prononcé en conséquence la déchéance du droit aux intérêts contractuels,
- Condamné Mme X. à payer à la SA Facet :
* 5.366,65 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2012 au titre du crédit souscrit le 4 mars 2010,
* 1.772,28 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2012 au titre des crédits souscrits les 2 avril 2007 et 26 janvier 2010,
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- Dit que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.
Mme X. est appelante du jugement suivant déclaration du 9 janvier 2015.
Par dernières conclusions signifiées le 17 février 2015, Madame X. demande de :
- Confirmer le jugement rendu le 1er décembre 2014 en ce qu'il a constaté que les offres de prêt n'étaient pas conformes et a dit la société Facet déchue du droit aux intérêts,
- Réformer le jugement pour le surplus,
- Condamner la société Facet à restituer à Mme X. les sommes perçues au titre des intérêts de ces offres de crédit outre les intérêts sur ceux-ci au taux légal à compter du jour de leur versement,
- Condamner la société Facet à remettre à Mme X. un décompte détaillé des sommes perçues au titre des intérêts outre des intérêts sur ceux-ci au taux légal à compter du jour de leur versement sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir et ce pendant un mois,
- Débouter la SA Facet de toutes ses demandes,
- Dire et juger que toute condamnation prononcée à l'encontre de Mme X. ne portera aucun intérêt contractuel ou légal,
- Condamner la SA Facet au paiement de la somme de 3.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées le 13 avril 2015, la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Facet demande de :
- Déclarer prescrite la demande de déchéance du droit aux intérêts au titre de l'offre du 2 avril 2007,
- Subsidiairement déclarer la demande irrecevable comme visant des clauses non contenues dans les conditions de l'offre de crédit renouvelable,
- Subsidiairement dire les clauses ni illicites ni abusives,
- Dire en tout état de cause les demandes de déchéance du droit aux intérêts infondées et infirmer le jugement,
- Condamner Mme X. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Facet la somme de 7 023,34 euros outre les intérêts au taux contractuel de 7,42 % à compter du 25 juillet 2012,
- Condamner Mme X. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Facet la somme de 4.276,15 euros outre les intérêts au taux contractuel de 17,99 % à compter du 10 août 2012,
Dans l'hypothèse où il serait fait droit à la déchéance du droit aux intérêts,
- Condamner Mme X. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Facet la somme de 6.042,81 euros et à tout le moins 5.718,55 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 2 août 2012 au titre du prêt du 4 mars 2010,
- Condamner Mme X. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Facet la somme de 3.333,69 euros et à tout le moins 3.098,15 outre les intérêts au taux légal à compter du 2 août 2012 au titre du crédit renouvelable,
- Débouter Mme X. du surplus de ses demandes,
- Condamner Mme X. au paiement d'une somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions visées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'offre préalable d'ouverture de crédit d'un montant de 800,00 euros du 2 avril 2007 :
Mme X. soutient la non-conformité de cette offre préalable.
La SA BNP Paribas Personal Finance soulève la prescription de l'action.
L'action en contestation de la régularité de l'offre préalable est soumise au délai de prescription des articles 1304 du code civil et L. 110-4-1 du code de commerce. Ce délai initial de 10 ans a été réduit à 5 ans par l'effet de la loi du 17 juin 2008.
Il ressort des énonciations du jugement querellé que les moyens soulevés d'irrégularités de l'offre ont été soulevés par Madame X. à l'audience du tribunal du 29 septembre 2014.
Par application des dispositions de l'article 26-II de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Il résulte de ces dispositions que Mme X. est prescrite en sa contestation de l'offre préalable conclue le 2 avril 2007 en ce que cette contestation a été soulevée postérieurement au 19 juin 2013.
Le jugement sera réformé de ce chef.
Sur l'offre préalable d'ouverture de crédit d'un montant de 4.000,00 euros du 26 janvier 2010 :
Le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de ce prêt en ce que l'offre n'est pas rédigée en corps d'imprimerie 8 ;
Mme X. fait valoir en sus qu'il s'agit en réalité d'un avenant au contrat souscrit en 2007 et qu'il ressort de l'historique de compte qu'à plusieurs reprises le plafond de 800,00 euros a été dépassé ; qu'en outre cette offre comprend un article II-2 relatif aux modalités de fonctionnement du crédit qui prévoit la possibilité pour le prêteur d'interdire l'utilisation du crédit en cas de « évolution de votre situation financière ».
Qu'elle contient un article II-8 qui indique que « Le présent contrat constitue un titre à ordre ; il pourra en conséquence être transmis par le prêteur par simple endossement, le bénéficiaire de l'endossement acquérant alors vis-à-vis de l'emprunteur tous les droits et garanties résultant du présent contrat sans qu'il lui soit nécessaire de notifier la cession du contrat à l'emprunteur ». Elle fait valoir que ces clauses sont illicites et abusives en ce qu'elles aggravent la situation du consommateur.
S'agissant de la taille des caractères, il ressort de l'examen de la copie de l'offre préalable versée aux débats que la copie produite est une photocopie au format réduit A4 ainsi que le démontre les traces du document original créant des marges supplémentaires sur la troisième page de l'offre ; qu'il ne peut en conséquence être déduit de la taille des caractères de cette photocopie l'existence d'une irrégularité de taille des caractères ; le prêteur produit aux débats une copie taille réelle du modèle de l'offre dont la conformité typographique n'est pas contestée.
En l'état de ces éléments, l'irrégularité de l'offre n'est pas établie de ce chef.
S'agissant des dépassements du découvert autorisé, le prêteur fait valoir à bon droit que les dépassements visés concernent l'ouverture de crédit du 2 avril 2007 ; qu'ils ont justifié la régularisation par signature de l'offre préalable du 26 janvier 2010 ; Les dépassements de plafonds antérieurs à sa conclusion ne sauraient affecter la régularité de cette offre.
S'agissant de l'insertion de l'article II-2 relatif aux modalités de fonctionnement du crédit celui-ci qui prévoit la possibilité pour le prêteur d'interdire l'utilisation du crédit en cas [d’évolution] de « votre situation financière. »
Le prêteur soutient que cette clause n'aggrave pas la situation de l'emprunteur en ce qu'elle n'autorise nullement à porter atteinte au droit d'utiliser le crédit sur le simple constat d'une évolution de la situation financière ; que cette clause n'a pour effet que de lui rappeler que s'il peut utiliser le crédit il doit le faire en conservant un comportement responsable ce qui suppose que son droit à utilisation n'ait pas été suspendu en application des dispositions de l'article I-4 qui prévoit limitativement les cas dans lesquels le prêteur peut suspendre le droit d'utiliser le crédit notamment en cas de risque d'insolvabilité.
La SA BNP Paribas Personal Finance fait valoir que ces dispositions n'aggravent pas la situation de l'emprunteur en ce que ce dispositif a été repris dans le cadre de la loi dite Lagarde en son nouvel article L. 311-16 qui prévoit la faculté pour le prêteur de suspendre le droit d'utilisation du crédit en cas de diminution de la solvabilité de l'emprunteur.
Mais la régularité de l'offre préalable s'apprécie à la date où l'offre a été conclue ; les dispositions contractuelles critiquées offrent au prêteur la faculté de suspendre l'utilisation du crédit suivant sa seule appréciation de la solvabilité de l'emprunteur et alors même que ce dernier respecterait ses obligations contractuelles en assurant le règlement des échéances ; ces dispositions aggravent la situation de l'emprunteur en ce qu'elles permettent de manière unilatérale au prêteur de suspendre l'utilisation de l'ouverture de crédit sur la foi d'appréciations subjectives et ce y compris dans l'hypothèse où l'emprunteur assure pleinement ses obligations contractuelles.
Une telle clause, est illicite en ce qu'elle restreint les droits de l'emprunteur et quand bien même des dispositions législatives postérieures ont pu s'inspirer d'un tel mécanisme.
Mme X. demande que soit déclarée illicite et abusive l'article II-8 du contrat qui indique que « Le présent contrat constitue un titre à ordre ; il pourra en conséquence être transmis par le prêteur par simple endossement, le bénéficiaire de l'endossement acquérant alors vis-à-vis de l'emprunteur tous les droits et garanties résultant du présent contrat sans qu'il lui soit nécessaire de notifier la cession du contrat à l'emprunteur ».
Mme X. soutient que cette clause est abusive au sens de l'article R. 132-2-5° du code la consommation en ce que cette cession à laquelle elle ne peut s'opposer est susceptible d'engendrer une diminution de ses droits et notamment le priver de la faculté de saisir le médiateur mis en place par l'ASF ; que la cession à un tiers qui ne serait pas membre de l'ASF est susceptible de lui faire perdre le bénéfice de cette faculté ; Mme X. fait valoir que cette faculté de titrisation n'est pas prévue par les modèles types ;
Si la faculté de cession par endossement dans les conditions prévues par le code monétaire et financier ne figure dans les modèles types il n'est pas démontré en quoi l'insertion d'une telle clause aggraverait la situation de l'emprunteur et le priverait de son droit de saisir le médiateur de l'ASF en ce que la cession de contrat emporte cession de toutes les obligations à la charge du cessionnaire ; qu'en tout état de cause si une telle éventualité devait advenir elle n'apparaît pas de nature à diminuer significativement les droits de l'emprunteur ; que par ailleurs les dispositions de l'article 1690 ancien du code civil ne sont pas d'ordre public et qu'il peut y être dérogé.
Mme X. sera déboutée de ses demandes tendant à voir déclarer la clause illicite.
Sur l'offre préalable de prêt personnel d'un montant de 7.000,00 euros du 4 mars 2010 :
Cette offre préalable contient un article I-4 relatif à la possibilité de remboursement par anticipation de l'emprunteur qui indique :
« Vous devrez informer le prêteur de votre décision avant une échéance mensuelle et régler au prêteur le montant du remboursement à la date d'échéance concernée. »
Mme X. soutient que cette clause est illicite car elle aggrave la situation de l'emprunteur dans la mesure où elle impose un préavis alors qu'un tel préavis n'est prévu ni par l'article 311-29 du code de la consommation, ni dans le modèle type établi par le comité de réglementation bancaire.
LA SA BNP Paribas Personal Finance demande l'infirmation du jugement qui a admis le caractère non conforme de cet article en soutenant que c'est à tort qu'il a retenu que les stipulations subordonnaient le remboursement à un préavis d'un mois que la clause critiquée ne prévoit aucunement.
Mais c'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a rappelé que la faculté de remboursement prévue par l'article L. 311-29 du code de la consommation n'est subordonnée à aucune condition ou indemnité.
La stipulation querellée en ce qu'elle impose à l'emprunteur de procéder au remboursement à l'échéance du prêt fait obstacle au droit qui lui est reconnu par l'article L 311-29 de procéder au remboursement au moment qu'il choisit sans être tenu de respecter l'échéancier fixé ; qu'il est ainsi loisible à l'emprunteur de procéder au remboursement du capital emprunté entre deux échéances de prêt sans qu'il puisse lui être imposé de payer les intérêts pouvant être calculés entre la date de son paiement et l'échéance suivante comme tend à lui imposer la clause litigieuse.
C'est en conséquence à bon droit que le premier juge a retenu le caractère abusif de cette clause qui aggrave la situation de l'emprunteur.
Mme X. sollicite également que soit déclarée abusive et illicite l'article II-8 du contrat qui indique que « Le présent contrat constitue un titre à ordre ; il pourra en conséquence être transmis par le prêteur par simple endossement, le bénéficiaire de l'endossement acquérant alors vis-à-vis de l'emprunteur tous les droits et garanties résultant du présent contrat sans qu'il lui soit nécessaire de notifier la cession du contrat à l'emprunteur ».
Pour les mêmes motifs que ceux retenus pour la clause insérée dans le contrat du 26 janvier 2010, cette clause n'apparaît pas abusive et Mme X. sera déboutée de ses demandes à ce titre.
Par application des dispositions de l'article L. 311-33 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date des contrats, le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
La SA BNP Paribas Personal Finance conteste le bien-fondé de la demande de déchéance du droit aux intérêts en faisant valoir que si les clauses litigieuses devaient être retenues comme abusives, ces clauses ne devraient qu'être déclarées non écrites.
Mais les contrats prévoyant des clauses abusives et illicites étrangères au contrat de crédit ne peuvent être regardés comme conformes aux dispositions des articles L. 311-8 et L. 311-13 du code de la consommation et c'est à bon, droit que Mme X. née Y. sollicite que le prêteur soit déchu du droit aux intérêts de ces prêts conformément aux dispositions de l'article L. 311-33 dans sa rédaction applicable aux contrats en cause (Cassation civile 1ère, 17 juin 2015).
Par application des dispositions de l'article L. 311-33 du code de la consommation, le prêteur ne peut prétendre qu'au règlement du capital restant dû à l'exclusion de tout autre frais et dès lors le prêteur ne peut prétendre au paiement des indemnités de défaillance.
Mme X. est fondée à réclamer le paiement des intérêts versés augmentés des intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement jusqu'à la date d'exigibilité du prêt.
Sur ce point, Mme X. est fondée à solliciter réformation du jugement, la compensation opérée sur le premier juge faisant perdre à l'emprunteur le bénéfice des intérêts sur les intérêts normalement prélevés.
Il n'y a pas lieu de de condamner la SA Facet à remettre un décompte détaillé des sommes perçues au titre des intérêts de ces prêts, le prêteur ayant produit aux débats l'historique complet de l'ouverture de crédit du 26 janvier 2010 et ayant établi dans ses conclusions un relevé des intérêts contractuels calculés.
En considération de ces éléments, le prêteur est fondé à réclamer à Mme X. :
1°) au titre de l'ouverture de compte du 26 janvier 2010 :
Au regard de ces éléments, au vu de l'offre préalable de prêt, l'historique du compte, du décompte des intérêts et du décompte de la créance :
- Echéances échues et impayées : 1.578,72 euros
- Capital restant dû : 2.461,89 euros
à déduire intérêts au taux contractuel : 942,46 euros
Soit au total : 3.098,15 euros.
2°) au titre du prêt du 4 mars 2010 :
Au vu de l'offre préalable de prêt, le tableau d'amortissement du décompte des intérêts et du décompte de la créance :
- Echéances échues et impayées : 2.646,29 euros
- Capital restant dû : 4.053,29 euros
à déduire intérêts au taux contractuel : 980,53 euros
Soit au total : 5.718,55 euros.
S'agissant des sommes restant dues au prêteur, Mme X. demande qu'il soit dit que toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ne portera aucun intérêt qu'il soit légal ou contractuel en faisant valoir une décision de la Cour de justice de l'Union Européenne en date du 2 mars 2014 suivant laquelle la cour a dit que les dispositions de l'article 23 de la directive 2008/48/CE relative à la sanction du prêteur nécessitent que cette sanction soit effective et dissuasive.
Il convient sur ce point de relever que la sanction du prêteur en ce qu'elle le prive d'intérêts aux taux contractuels de 17,99 % et 7,42 % l'an depuis la remise des fonds apparaît particulièrement significative au regard du taux d'intérêt légal applicable depuis la seule mise en demeure.
L'éventualité de la majoration de ce taux conformément aux dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier n'est que la conséquence d'une hypothétique défaillance de la débitrice dans l'exécution du jugement ; qu'en outre la SA BNP Paribas Personal Finance fait valoir à bon droit que le juge de l'exécution a la faculté de procéder à réduction voire la suppression de cette majoration.
En considération de ces éléments, l'application du taux légal sur le montant de la créance du prêteur déchu de son droit aux intérêts contractuels apparaît préserver tant l'effectivité de la sanction que son caractère dissuasif et Mme X. sera déboutée de ses demandes tendant à ce qu'il soit dit que les condamnations ne porteront aucun intérêt.
La SA BNP Paribas Personal Finance qui succombe en ses demandes sera condamnée aux dépens de l'instance mais il n'y a pas lieu de la condamner au paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement du tribunal d'instance de Rennes du 1er décembre 2014 en ce qu'il a :
- Constaté que les offres de prêt des 26 janvier 2010 et 4 mars 2010 n'étaient pas conformes aux exigences du code de la consommation ;
- Prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA Facet au titre de ces deux contrats ;
L'infirme pour le surplus ;
Déclare Mme X. prescrite en ses contestations du prêt consenti le 2 avril 2007 ;
Condamne Mme X. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Facet la somme de 3.098,15 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2012 au titre du solde de prêt du 26 janvier 2010 ;
Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à Mme X. les intérêts au taux légal sur les sommes versées par l'emprunteur au titre des intérêts contractuels à compter du jour de leur versement ;
Condamne Mme X. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Facet la somme de 5.718,55 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2012 au titre du solde de prêt du 4 mars 2010 ;
Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à Mme X. les intérêts au taux légal sur les sommes versées par l'emprunteur au titre des intérêts contractuels à compter du jour de leur versement ;
Déboute les parties de leurs autres demandes ;
Ordonne la compensation entre les dettes respectives ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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