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CA PAU (1re ch.), 11 février 2020

Nature : Décision
Titre : CA PAU (1re ch.), 11 février 2020
Pays : France
Juridiction : Pau (CA), 1re ch.
Demande : 17/02033
Décision : 20/00624
Date : 11/02/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 1/06/2017
Décision antérieure : CASS. COM., 21 septembre 2022
Numéro de la décision : 624
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8357

CA PAU (1re ch.), 11 février 2020 : RG n° 17/02033 ; arrêt n° 20/00624

Publication : Jurica

 

Extrait : « M. X. et la SARL X. SPORT font également valoir, le caractère abusif de la clause limitative de responsabilité fixant un délai d'un mois pour mettre en cause la responsabilité du cabinet d'expertise comptable, ce qui est de nature à priver le client de faire valoir ses droits en justice.

De ce chef, ils se prévalent des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

Toutefois, c'est par une exacte appréciation des éléments de la cause que les premiers juges ont relevé que le contrat entre la société SEGAGEST et la SARL X. SPORT, toutes 2 sociétés commerciales ne bénéficiait pas des dispositions du décret n° 2009-302 du 18 mars 2009 pour les clauses de limitation de responsabilité puis, au regard de la clause 1.5 selon laquelle la demande de dommages et intérêts devait être introduite dans le mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre, ont déclaré irrecevable comme étant prescrite l'action de la SARL X. SPORT à l'encontre du cabinet SEGAGEST et de M. Y. dès lors que M. X. a eu connaissance du sinistre au mois de décembre 2012 et a introduit son action à l'encontre des intéressés au mois de juillet 2016.

M. X. est un athlète de haut niveau dont les performances et la renommée ont entraîné un accroissement substantiel de ses revenus.

Si la lettre de mission qu'il a signée pour lui-même précise que son entreprise a le statut d'une entreprise individuelle et que son activité essentielle est constituée de revenus sportifs, cette lettre de mission, contrairement à celle signée avec la SARL X. SPORT, n'a pas de rapport direct avec ses activités professionnelles, mais avec ses obligations, qui sont celles de tout particulier, de déclarer ses différents revenus à l'administration fiscale. La finalité était donc personnelle et non professionnelle.

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le non professionnel ou le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations.

C'est donc par une exacte appréciation des éléments de la cause, que le tribunal, au regard des dispositions du code de la consommation, a écarté la clause au terme de laquelle toute demande de dommages et intérêts doit être introduite dans le mois suivant la date à laquelle le client aura connaissance du sinistre, délai extrêmement court créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat s'agissant d'une part, d'un sportif de haut niveau sans compétence particulière en matière de fiscalité et d'autre part d'une société d'expertise comptable, délai particulièrement réduit de nature à porter atteinte à l'exercice d'un droit à réparation du préjudice subi par le non-professionnel.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré recevable comme non prescrite, l'action de M. X. introduite dans le délai de 5 ans de la découverte du sinistre par M. X. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PAU

PREMIÈRE CHAMBRE

ARRÊT DU 11 FÉVRIER 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n°17/02033. N° Portalis DBVV-V-B7B-GSNH. Nature affaire : Demande en réparation des dommages causés par l'activité d'un expert en diagnostic, un commissaire aux comptes, un commissaire aux apports, un commissaire à la fusion ou un expert-comptable.

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 11 février 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * *

APRÈS DÉBATS à l'audience publique tenue le 3 décembre 2019, devant : Madame DUCHAC, Président, Monsieur CASTAGNE, Conseiller, Mme ROSA SCHALL, Conseiller, assistés de M. FAGE, Greffier, présente à l'appel des causes. Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

 

APPELANTS :

Monsieur X.

[adresse], Représenté par Maître Jean-Michel P., avocat au barreau de PAU, Assisté de Maître Myriam A., avocat au barreau de PARIS

SARL X. SPORT

[adresse], Représentée par Maître Jean-Michel P., avocat au barreau de PAU, Assistée de Maître Myriam A., avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉS :

M. Y.

[adresse], Représenté par Maître François P., avocat au barreau de PAU, Assisté de Maître Nathalie S.-B., avocat au barreau de PARIS

SARL SECAGEST

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, [adresse], Représentée par Maître François P., avocat au barreau de PAU, Assistée de Maître Nathalie S.-B., avocat au barreau de PARIS

Compagnie d'Assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, [adresse], Représentée par Maître François P., avocat au barreau de PAU, Assistée de Maître Nathalie S.-B., avocat au barreau de PARIS

 

sur appel de la décision en date du 15 MAI 2017 rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BAYONNE : RG numéro : 2016005026.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 19 mai 2006, M. X., athlète de haut niveau, a créé la société X. SPORT (SARL), dont le siège social est à [ville A.], qui a pour objet principal la gestion des gains provenant de son image et de sa notoriété. Elle est soumise au régime de l'impôt sur les sociétés.

Pour gérer la partie comptabilité de sa société et sa comptabilité personnelle, M. X. a fait appel à un cabinet d'expertise-comptable, la SARL SECAGEST dont le gérant est M. Y.

La SARL SECAGEST est assurée auprès de la SA MMA IARD assurances mutuelles.

Le 16 mai 2006, deux lettres de mission ont été régularisées par la SARL SECAGEST l'une avec la société X. SPORT, l'autre avec M. X., toutes deux portant sur la tenue et la présentation des comptes annuels.

Ces missions ont pris fin en juillet 2014.

À la suite de retards de déclarations auprès de l'administration fiscale M. X. a fait l'objet au cours de l'année 2009 d'un contrôle portant sur sa situation fiscale personnelle. Outre les taxations d'office assorties de pénalités et de majorations de retard, il s'est vu refuser l'application des dispositifs « Robien » et « Scellier » ayant motivé des investissements immobiliers.

Par ailleurs, il a également subi des redressements de la part du Régime Social des Indépendants auquel il était affilié, pour absence de dépôt de déclarations de revenus, notamment pour la période 2010, 2011, 2012.

Par la suite, M. X. a missionné un nouvel expert-comptable afin de réaliser un audit complet de sa situation personnelle et professionnelle.

C'est dans ce contexte que le 27 juillet 2016, M. X. et la société X. SPORT ont fait assigner la SARL SECAGEST, M. Y. et la SA MMA IARD assurances mutuelles devant le tribunal de commerce de Bayonne sur le fondement des articles 1382, 1832, 1833 et 1844-1 du code civil afin de les voir solidairement condamnés à lui payer, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, une somme totale de 1.364.079 € en réparation des divers manquements réalisés par le cabinet comptable et des différents préjudices qui en sont résultés, outre la somme de 25.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les intérêts légaux.

Par jugement du 15 mai 2017, le tribunal de commerce de Bayonne a, sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil :

- déclaré recevable, en la forme, l'exception de compétence soutenue in limine litis,

- débouté la SARL SECAGEST, M. Y. et la SA MMA IARD assurances mutuelles de leur demande d'exception de compétence d'attribution comme non fondée et s'est déclaré compétent,

- déclaré irrecevable car prescrite l'action de la SARL X. SPORT contre le cabinet SECAGEST et M. Y.,

- déclaré recevable comme non prescrite, l'action de M. X. contre le cabinet SECAGEST et M. Y.,

- débouté la société SECAGEST, M. Y. et la SA MMA IARD assurances mutuelles de leur demande de communication de l'assignation délivrée à Mme Z. ou toute lettre de mise en demeure ou de réclamation adressée à cette dernière,

- jugé qu'il n'y avait pas lieu à surseoir à statuer,

M. X. a été débouté de toutes ses demandes de condamnation solidaire à l'encontre du cabinet SECAGEST et de M. Y. et a été condamné à verser au cabinet SECAGEST et à M. Y. une somme de 1.500 € à chacun d'eux sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de l'instance.

La demande d'exécution provisoire a été rejetée.

Par déclaration régularisée le 1er juin 2017, M. X. et la SARL X. SPORT ont interjeté appel de cette décision qu'ils contestent en toutes ses dispositions.

[*]

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 28 août 2017, M. X. et la SARL X. SPORT demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de les déclarer recevables et bien fondés en leur action formée à l'encontre du cabinet SECAGEST, de M. Y. et de la SA MMA IARD assurances mutuelles et de les condamner solidairement à lui payer les sommes suivantes :

- 16.132 € au titre des pénalités après mise en recouvrement 2014,

- 22.594 € au titre des majorations de retard RSI,

- 180.000 € au titre des dommages et intérêts pour défaut de conseils,

- 275.689 € au titre de la perte de chance pour défaut de déclaration « Scellier » et « Robien »,

- 99.664 € au titre du défaut de diligences sur déductions de charges,

- 20.000 € au titre du préjudice financier résultant de l'absence d'adhésion à un organisme agréé,

- 150.000 € au titre des dommages et intérêts pour défaut de diligences,

- 600.000 € au titre du préjudice moral et financier,

- 25.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des intérêts légaux et des dépens de l'instance.

[*]

Par conclusions du 25 octobre 2017, M. Y., la SARL SECAGEST et la SA MMA IARD assurances mutuelles demandent, sur le fondement des articles 122, 9, 15, 132, 133, 378 du code de procédure civile et 1231-1 du code civil :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'exception tirée de la forclusion de l'action engagée par la SARL X. SPORT et M. X.,

- de dire et juger irrecevables les demandes formées par M. X. et la SARL X. SPORT à l'encontre du cabinet SECAGEST et de M. Y.,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les appelants de l'ensemble de leurs demandes, le cabinet SECAGEST et M. Y. n'ayant commis aucun manquement et, en conséquence, de débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes,

À titre subsidiaire :

- dire et juger que les préjudices allégués ne sont pas justifiés et, en conséquence, débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes,

- ordonner à M.D. de communiquer l'assignation délivrée à Mme Z. ou toute lettre de mise en demeure ou de réclamation ; ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la communication des éléments susmentionnés,

En tout état de cause, de condamner M. X. et la SARL X. SPORT au paiement d'une somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens pour lesquels il sera fait application des dispositions prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 octobre 2019.

Le dossier a été régulièrement communiqué au ministère public qui l'a visé le 28 novembre 2019.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion la cour, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, se réfère pour l'exposé plus ample des moyens et des prétentions des parties, à leurs dernières écritures visées ci-dessus.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Le jugement n'est pas contesté, en ce que le tribunal de commerce a rejeté l'exception d'incompétence d'attribution et s'est déclaré compétent.

Il sera confirmé de ce chef.

 

Sur la forclusion :

M. X. et la SARL X. SPORT demandent d'infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que la société X. SPORT était forclose en son action, faisant valoir, que la lettre de mission n'est pas paraphée sur l'ensemble des pages et qu’il y a une rature de sorte qu'il n'est pas établi, ni qu'elle ait pris connaissance de l'ensemble des clauses, ni que ce soit bien le document dont s'agit.

S'il résulte de la lettre de mission du 16 mai 2006 signée entre la société SEGAGEST et la SARL X. SPORT, qu'elle n'est pas paraphée sur l'ensemble de ses pages, M. X. et la SARL X. SPORT n'indiquent pas en vertu de quel texte, la validité d'une lettre de mission est conditionnée à ce que l'ensemble de ses pages soit paraphé.

Le document émanant de l'ordre des experts-comptables de la région Paris Île-de-France qu'ils produisent, ne le précise pas non plus.

Il convient d'observer que cette lettre de mission, document de 9 pages, annexes comprises, est signée sur 4 d'entre elles par chacun des contractants, ce qui démontre qu'elle a été soumise à un examen progressif et détaillé de son contenu.

Concernant la rature des mots : « de surveillance et », en première page de cette lettre de mission qui lui a été envoyée le 16 mai 2006, M. X. ne démontre pas avoir fait la moindre observation la concernant à la société SECAGEST.

Il s'ensuit que ces 2 moyens ne sont pas fondés.

M. X. et la SARL X. SPORT font également valoir, le caractère abusif de la clause limitative de responsabilité fixant un délai d'un mois pour mettre en cause la responsabilité du cabinet d'expertise comptable, ce qui est de nature à priver le client de faire valoir ses droits en justice.

De ce chef, ils se prévalent des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

Toutefois, c'est par une exacte appréciation des éléments de la cause que les premiers juges ont relevé que le contrat entre la société SEGAGEST et la SARL X. SPORT, toutes 2 sociétés commerciales ne bénéficiait pas des dispositions du décret n° 2009-302 du 18 mars 2009 pour les clauses de limitation de responsabilité puis, au regard de la clause 1.5 selon laquelle la demande de dommages et intérêts devait être introduite dans le mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre, ont déclaré irrecevable comme étant prescrite l'action de la SARL X. SPORT à l'encontre du cabinet SEGAGEST et de M. Y. dès lors que M. X. a eu connaissance du sinistre au mois de décembre 2012 et a introduit son action à l'encontre des intéressés au mois de juillet 2016.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Le tribunal a par contre retenu que pour sa comptabilité personnelle, M. X. bénéficiait des dispositions du code de la consommation, de sorte que la clause réduisant le délai à un mois pour présenter une demande de dommages et intérêts a été écartée et, considérant le délai de 5 ans de droit commun, a déclaré recevable comme non prescrite son action contre la SARL SEGAGEST.

M. Y., la SARL SECAGEST et la SA MMA IARD assurances mutuelles ont formé un appel incident de ce chef. Ils demandent d'infirmer le jugement et de constater la forclusion de l'action au regard de la clause 1.5 de la lettre de mission, soutenant que c'est dans le cadre de son activité professionnelle et en cette qualité de professionnel, que M. X. a signé la lettre de mission établie à son nom.

M. X. est un athlète de haut niveau dont les performances et la renommée ont entraîné un accroissement substantiel de ses revenus.

Si la lettre de mission qu'il a signée pour lui-même précise que son entreprise a le statut d'une entreprise individuelle et que son activité essentielle est constituée de revenus sportifs, cette lettre de mission, contrairement à celle signée avec la SARL X. SPORT, n'a pas de rapport direct avec ses activités professionnelles, mais avec ses obligations, qui sont celles de tout particulier, de déclarer ses différents revenus à l'administration fiscale. La finalité était donc personnelle et non professionnelle.

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le non professionnel ou le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations.

C'est donc par une exacte appréciation des éléments de la cause, que le tribunal, au regard des dispositions du code de la consommation, a écarté la clause au terme de laquelle toute demande de dommages et intérêts doit être introduite dans le mois suivant la date à laquelle le client aura connaissance du sinistre, délai extrêmement court créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat s'agissant d'une part, d'un sportif de haut niveau sans compétence particulière en matière de fiscalité et d'autre part d'une société d'expertise comptable, délai particulièrement réduit de nature à porter atteinte à l'exercice d'un droit à réparation du préjudice subi par le non-professionnel.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré recevable comme non prescrite, l'action de M. X. introduite dans le délai de 5 ans de la découverte du sinistre par M. X.

 

Sur la responsabilité de la SARL SECAGEST à l'égard de M. X. :

La mission de la SARL SECAGEST est, aux termes de la lettre du 16 mai 2006, la tenue et la présentation des comptes annuels.

Le statut fiscal de M. X. est celui des bénéfices non commerciaux (BNC).

Il est contractuellement prévu que certains travaux demeurent à la charge de M. X., notamment la remise des documents comptables, le pointage du grand livre et des comptes clients/fournisseurs ainsi que la remise des éléments d'inventaire.

C'est donc au regard de cette lettre de mission, qu'il doit être recherché s'il existe une défaillance contractuelle de l’expert-comptable dont la preuve doit être rapportée par M. X. et que doit être démontré, un lien de causalité entre les manquements de l'expert-comptable et le préjudice invoqué.

1. Sur le retard et l'absence de déclarations de revenus au titre des années 2009 à 2013 :

M. X. fait valoir que la SARL SECAGEST a manqué sur cette période, aux obligations de sa mission en n'établissant pas et ne déposant pas ses déclarations de revenus dans les délais.

M. Y., la SARL SECAGEST et la SA MMA IARD assurances mutuelles font valoir que l'expert-comptable est tenu d'une obligation de moyens, que son devoir d'information et de conseil ne s'applique pas aux faits qui sont de la connaissance de tous et que M. X. ne remplissait pas ses propres obligations en ne lui transmettant pas les éléments nécessaires à l'exercice de sa mission.

Il résulte des pièces produites aux débats, que dès le mois d'avril 2008, le cabinet comptable était amené à solliciter plusieurs fois M. X. par mail, pour pouvoir faire les comptes de l'activité BNC athlète de haut niveau.

Il était par exemple précisé à M. X., que s'il n'avait pas les documents nécessaires il devait les demander aux banques car il leur fallait absolument, qu'il devait également communiquer toutes ses factures, tous les appels pour les cotisations sociales et tous les justificatifs des gains perçus.

En mai 2009, il était indiqué « je vais être un petit peu désagréable comme d'habitude, j'ai besoin des documents pour sa comptabilité de 2008, il faudrait rapidement les relevés bancaires HSBC, les relevés bancaires caisse d'épargne ».

S'il est constant, que les difficultés ne sont apparues que pour les déclarations 2009 à 2013, il résulte de mails envoyés le 27 avril 2010, le 29 novembre 2010, que M. X. était régulièrement relancé pour qu'il produise ses relevés bancaires, toutes les factures (kiné, frais de déplacement') ainsi que les appels de cotisations pour lesquels il était indiqué en gras et souligné, « hyper hyper important ».

Le 23 novembre 2010, des explications lui étaient demandées sur des chèques encaissés sur son compte HSBC pour des remboursements du RSI de l'URSSAF. Il était également précisé « j'espère que tu as gardé les copies »

M. X. produit lui-même des mails dans lequel il lui est demandé ce qui a été encaissé avec un certain nombre de chèques (mail du 23 novembre 2010), ou un autre dans lequel il lui était indiqué « c'est surtout pour arriver à mettre de l'ordre dans tes charges sociales, faut que j'ai tous les paiements que tu as pu faire, donc c'est hyper important. »

Ainsi, contrairement à ce que soutient M. X., il était régulièrement relancé par la SARL SEGAGEST pour communiquer les justificatifs nécessaires à l'établissement de sa déclaration de revenus et il lui était souligné l'importance de communiquer les documents demandés.

Or :

À l'examen des éléments versés aux débats, M. X. ne produit quasiment aucun mail-hormis des confirmations de location d'une voiture ou de quelques voyages en avion en 2010 ou 2011 (le récapitulatif de facturation de sponsors, mail du 4 décembre 2009 concerne la société X. SPORT) - ni aucun courrier démontrant qu'il a transmis à son expert-comptable dans les délais, les justificatifs requis pour l'établissement de sa comptabilité personnelle.

L'ensemble de ces documents qu'il devait communiquer, n'est autre que celui dont tout contribuable doit pouvoir justifier auprès des impôts et il n'est pas contesté qu’ils étaient détenus par M. X.

Dès lors, rien ne démontre que les très nombreux documents justificatifs que M. X. a produit aux débats aient été communiqués en temps et heure à son comptable alors même que la lettre de mission précise, qu'il s'engageait à mettre à la disposition des membres de l'ordre, dans un délai convenu, l'ensemble des documents et informations nécessaires à l'exécution de la mission et à réaliser les travaux qui lui incombent conformément au tableau de répartition.

Il ressort également des documents que verse au débat M. X., afférents à la proposition de rectification suivant la vérification de sa comptabilité dont il a fait l'objet sur les années 2009 2010 et 2011, qu'un courrier recommandé qui lui avait été présenté le 19 décembre 2012 mais qu'il ne l'a pas retiré (pièce n° 9, lettre de la direction générale des finances publiques du 16 juillet 2013).

L'administration fiscale qui relevait dans ce courrier d'autres difficultés pour entrer en contact avec M. X. avait attiré son attention sur le fait que lorsque le contrôle fiscal ne peut pas avoir lieu du fait du contribuable, les bases d'imposition sont évaluées office et lui avait même rappelé, qu'au-delà des sanctions administratives, ses agents dans l'impossibilité d'accomplir leurs fonctions, étaient habilités à constater les infractions à la législation des impôts, lui rappelant également les sanctions pénales encourues.

Au demeurant, il résulte du mail du 26 février 2013 adressé par Mme W, de la société SEGAGEST, à la direction générale des finances publiques, que des éléments manquaient toujours au cabinet d'expertise comptable pour la régularisation des déclarations BNC de 2010 et 2011 et les déclarations de revenus 2009, 2010 et 2011 que le cabinet comptable demandait' aux impôts de les lui faire parvenir pour régulariser les déclarations.

En conséquence, c'est par une exacte appréciation des éléments de la cause, que les premiers juges ont retenu que c'est du fait de ses retards ou manquements fautifs, que M. X. a été à l'origine des retards dans l'établissement de ses déclarations de revenus et l'a débouté de sa demande de remboursement des pénalités après mise en recouvrement qui s'élevait après transaction à la somme de 16.132 €.

 

2. Sur l'absence de déclarations de revenus auprès du RSI :

Par courriers du 4 mars 2014, le régime social des indépendants (RSI) informait M. X. de ce qu'il n'était pas en possession de sa déclaration de revenus professionnels et de ses cotisations personnelles obligatoires 2011 et 2012.

Le 10 mars 2014 M. X. recevait une mise en demeure avant poursuites pour le recouvrement de la somme de 14.706 €.

Il ne résulte pas de la lettre de mission, que le cabinet comptable était chargé des cotisations personnelles obligatoires de M. X., au demeurant, tous les courriers du RSI lui sont adressés directement à son adresse, [...].

Concernant ses déclarations de revenus en cause, 2011 et 2012, les difficultés rencontrées par l'expert-comptable pour obtenir les pièces justificatives nécessaires à l'établissement de celles-ci ont été démontrées ci-dessus.

De ce chef, il n'est allégué par M. X. aucune autre cause que celle dont il se prévaut pour ses déclarations de revenus de sorte que c'est nécessairement et uniquement pour ces mêmes motifs, que les déclarations de revenus n'ont pas pu être transmises à temps au RSI pour ces 2 années.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. de sa demande de condamnation solidaire des intimés au titre des majorations de retard pour des cotisations RSI à hauteur de la somme de 22.594 €.

 

3. Sur le défaut de déclaration des biens immobiliers en « Robien » et « Scellier » :

Il résulte des mails du 30 avril et du 25 mai 2010 adressés à Mme Z. par Mme R. du cabinet comptable SEGAGEST, et du mail adressé le 12 mai 2013 par Mme Z. à Mme W du cabinet comptable SEGAGEST, que c'est Mme Z. qui avait en charge la gestion du patrimoine foncier de M. X. et qui établissait la déclaration 2044 foncier dont le cabinet comptable avait besoin pour la déclaration d'impôts de M. X.

Dans le dernier de ces mails, en réponse aux interrogations du cabinet comptable, Mme Z. répondait que l'amortissement est en « de Robien », qu'elle appellerait HSBC pour le tableau d'amortissement, et que pour les loyers, elle avait envoyé un BBM à M. X..

Au demeurant, lors de ces échanges, Mme Z. ne s'est jamais étonnée de ces demandes qui démontraient que le cabinet comptable SEGAGEST ne disposait pas de ces documents.

Le jugement sera confirmé de ce chef sans qu'il y ait lieu d'examiner les demandes de communication de l'assignation délivrée à Mme Z. ou de toute lettre de mise en demeure ou de réclamation adressée à cette dernière et de sursis à statuer dans l'attente de la communication de ces éléments, dès lors que ces demandes n'étaient présentées qu'à titre subsidiaire.

 

4. Sur le défaut de diligences sur déductions de charges :

M. X. fait valoir que de nombreux frais professionnels n'ont pas été déduits.

Le différentiel allégué non imputé de 99.664 € ne ressort ni des pièces produites (pièces 49 à 54), ni de l'audit réalisé à la demande de M. X. par Christal expertise qui ne retenaient qu'un différentiel sur pièces justificatives de 14.007 euros pour lesquelles encore une fois, la preuve n'est rapportée que pour très peu d'entre elles (cf. ci-dessus : 1.) qu'elles ont été transmises en temps utile -obligation qui incombait au client- pour que l'expert-comptable puisse établir les déclarations de revenus litigieuses dans les délais.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. de ce chef de demande.

 

5. Sur la gestion défectueuse des dividendes et de la rémunération :

Cette demande concerne la mission de la tenue et de la présentation des comptes annuels de la SARL X. SPORT.

L'audit Christal Expertise (pièce n° 41 de M. D.) indique notamment, concernant la SARL X. SPORT, que le compte courant d'associé est crédité du montant des dividendes distribués dans l'exercice, et en cas de solde débiteur en fin d'exercice, il est soldé par le compte de rémunération du gérant.

L'action de cette société ayant été déclarée prescrite, M. X. et la SARL X. SPORT sont irrecevables de ce chef de demande.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

6. Sur l'absence d'inscription auprès d'un organisme agréé :

M. X. fait grief au cabinet SECAGEST de n'avoir procédé à sa réinscription à l'AraPL, organisme de gestion agréée, qu’au mois de décembre 2012, après sa radiation intervenue en 2008.

M. X. a été réinscrit à compter du 1er janvier 2013.

Il résulte de mails échangés entre M. X. et Mme R. de l'AraPl que cet organisme a bien envoyé à son cabinet d'expert-comptable le 4 mars 2008 un appel de la déclaration 2035, puis le 3 juin 2008 un première relance déclaration 2035, le 21 juillet 2008 une seconde relance puis, a informé le cabinet comptable le 17 septembre 2008 de la procédure d'exclusion en cours et 19 novembre 2008, de l'exclusion entérinée.

Toutefois, en sa qualité de sportif, M. X. pouvait à tout moment solliciter lui-même à nouveau son adhésion à cet organisme en vue de bénéficier sous certaines conditions d'avantages fiscaux.

Il est constant surtout, que l'adhésion à une telle association de gestion agréée nécessite que lui soit communiquée la déclaration 2035 et ses annexes ou que lui soit indiqué le régime déclaratif retenu or il a été établi qu'entre 2009 et 2013, du fait des propres manquements de M. X. à ses obligations résultant de la lettre de mission, ces déclarations ont été établies avec retard, ou n'ont pas pu être établies.

Dès lors, M. X. ne démontre pas qu'il aurait effectivement pu être réinscrit avant le 1er janvier 2013.

En conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef.

Aucune défaillance contractuelle de la SARL SEGAGEST n'étant prouvée par M. X., le jugement sera confirmé en ce qu'il l’a débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour défaut de conseils, défaut de diligences et au titre du préjudice moral et financier, aucun lien de causalité ne pouvant être établi entre son préjudice et l'existence d'une faute.

 

Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Le jugement déféré sera confirmé de ces chefs.

M. X. et la SARL X. SPORT succombant en leur recours, seront déboutés de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamnés aux dépens de l'instance en appel.

Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à l'égard de M. Y., la SARL SECAGEST et la SA MMA IARD assurances mutuelles qui seront déboutés de cette demande.

Il sera fait droit à la demande d'application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant

Déboute M. X. et la SARL X. SPORT de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute M. Y., la SARL SECAGEST et la SA MMA IARD assurances mutuelles de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne M. X. et la SARL X. SPORT aux dépens de l'appel et autorise Maître P. à procéder au recouvrement direct des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Président, et par Mme BLONDEL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,                   LE PRESIDENT,

Corinne BLONDEL             Caroline DUCHAC