CA CHAMBÉRY (2e ch.), 29 octobre 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8619
CA CHAMBÉRY (2e ch.), 29 octobre 2020 : RG n° 20/00098
Publication : Jurica
Extrait : « La SCI Datcha prétend que les clauses du contrat relatives aux intérêts du prêt sont abusives et doivent être réputées non écrites. Elle doit être regardée comme fondant cette prétention sur les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur au 20 août 2009, aux termes desquelles « […]. »
En l'espèce, ainsi que l'a relevé le premier juge, ce texte n'est pas applicable en l'espèce, dès lors d'une part que l'appelante est une personne morale qui ne peut se prévaloir de la qualité de consommateur et que d'autre part, elle agit à des fins professionnelles puisque le prêt souscrit est destiné au financement d'un immeuble, opération qui relève de son objet social, quand bien même il s'agit d'une SCI familiale et que le bien acquis à crédit constitue la résidence de ses associés.
En tout état de cause, à l'instar du premier juge, la cour relève que la clause de variation du taux n'a ni pour objet, ni pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les parties au profit de la Société Générale, les risques limités de la variation du taux initial étant supportés dans des proportions identiques par les deux parties et la Société Générale ne disposant pas du pouvoir d'agir sur les éléments composant cet indice ou sur ses évolutions.
En conséquence, les clauses relatives aux intérêts contractuels ne sont pas entachées de nullité.
Dans ces circonstances, en l'absence de toute autre contestation de l'appelante sur le montant de la créance de la Société Générale, la disposition du jugement déféré ayant constaté que cette créance arrêtée au 6 décembre 2019, s'élevait à la somme de 552.155,37 euros, outre intérêts postérieurs au taux de 3,04 % sur le principal de 401.713,93 euros doit être confirmée. »
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU29 OCTOBRE 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00098. N° Portalis DBVY-V-B7E-GMVO. Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge de l'exécution d'ALBERTVILLE en date du 10 janvier 2020 : R.G. n° 19/00012.
Appelante :
SCI DATCHA
dont le siège social est sis [adresse] prise en la personne de son représentant légal, représentée par la SCP A. - C. ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY
Intimée :
SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE
dont le siège social est sis [adresse] prise en la personne de son représentant légal, Représentée par la SCP M.D.T., avocat au barreau d'ALBERTVILLE
COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 22 septembre 2020 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffier,
Et lors du délibéré, par : - Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désigné par ordonnance de Madame la Première Présidente - Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseiller, qui a procédé au rapport - Monsieur Philippe GREINER, Conseiller hors hiérarchie,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits, procédure et prétentions des parties :
M. X. était propriétaire sur la [...], d'une maison d'habitation qu'il a vendue pour le prix TTC de 450.000 euros, à la SCI Datcha constituée le 4 août 2009 entre lui-même et sa compagne Mme Y., et immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 24 août 2009.
Selon acte authentique du 20 août 2009, la Société Générale a prêté à la SCI Datcha la somme de 450.000 euros remboursable en 360 mensualités de 2.335,39 euros, exigibles à compter du 7 octobre 2009, le taux des intérêts étant initialement de 4,04 % et susceptible de varier d'un point en plus ou en moins.
Par acte du 6 décembre 2018, la Société Générale a fait délivrer à la SCI Datcha un commandement de payer la somme de 557.715,29 euros au titre du solde du prêt, commandement valant saisie immobilière de la maison désignée ci-dessus.
Par acte du 25 février 2019, la Société Générale a fait citer la SCI Datcha devant le juge de l'exécution d'Albertville aux fins de poursuite de la procédure de saisie immobilière sur la mise à prix de 165.000 euros.
Par jugement d'orientation du 10 janvier 2020, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Albertville a
- débouté la SCI Datcha de ses demandes relatives à la nullité et à la caducité du commandement de payer valant saisie ainsi que de sa demande de compensation de créances réciproques
- déclaré irrecevable la demande indemnitaire formée par la SCI Datcha
- constaté que le créancier poursuivant est titulaire d'une créance liquide et exigible et agit en vertu d'un titre exécutoire, comme il est dit aux articles L. 311-2 et L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution
- constaté que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables au sens de l'article L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution
- constaté que la créance de la Société Générale à l'encontre de la SCI Datcha s'élève à la somme de 552.155,37 euros, en principal, intérêts et frais arrêtés au 6 décembre 2019, outre intérêts postérieurs au taux de 3,04 % sur le principal de 401.713,93 euros
- autorisé la SCI Datcha à procéder à la vente amiable du bien saisi pour un prix minimal de 330.000 euros, prix devant être consigné auprès de la Caisse des dépôts et consignations
- taxé les frais de poursuite à la somme de 3.059,70 euros
- renvoyé l'affaire à l'audience du 7 mai 2020
- débouté la Société Générale de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- réservé les dépens.
Par déclaration du 21 janvier 2020, la SCI Datcha a interjeté appel de ce jugement.
Le même jour, elle présentait une requête à la première présidente de la cour aux fins d'être autorisée à assigner la Société Générale à jour fixe, autorisation
- obtenue par ordonnance du 10 février 2020, pour le 12 mai 2020,
- et mise en œuvre par acte du 21 février 2020.
[*]
Aux termes des conclusions qu'elle a notifiées par voie électronique le 11 mars 2020, la SCI Datcha demande à la cour :
- d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions
- de juger nul le commandement de payer aux fins de saisie immobilière du 6 décembre 2018
- de déclarer irrecevable la procédure de recouvrement engagée par la Société Générale
- de débouter la Société Générale de toutes ses demandes, fins et prétentions
- de juger que la Société Générale n'a pas respecté à son égard ses devoirs de prudence, de diligence, de conseil et de mise en garde et que les fautes qu'elle a commises sont à l'origine d'un préjudice à la réparation duquel elle doit être condamnée à hauteur de 557.715,29 euros
- de juger que par voie de compensation, la Société Générale ne peut se prévaloir d'aucune créance à son encontre
- de condamner la Société Générale aux entiers dépens et à lui payer la somme globale de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI Datcha soutient que
- la Société Générale ne détient pas de titre exécutoire à son encontre dans la mesure où :
* d'une part l'acte du 20 août 2009 est nul pour défaut de capacité de sa part à s'engager
* d'autre part l'acte du 20 août 2009 ne vaut que comme écrit sous signature privée dès lors que n'y étaient pas jointes certaines procurations
- la Société Générale ne détient pas de créance liquide et exigible au sens de l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution, les clauses contractuelles ne permettant pas de déterminer sa créance
- les clauses du contrat stipulant le taux d'intérêt conventionnel sont abusives au sens de l'article 212-1 du code de la consommation et doivent être réputées non écrites
- le commandement du 6 décembre 2018 est nul dans la mesure où il ne comporte pas le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus avec indication du taux des intérêts moratoires
- le juge de l'exécution était compétent pour connaître de sa demande reconventionnelle tendant à la condamnation de la Société Générale à lui payer la somme de 557.715,29 euros à titre de dommages et intérêts, demande qui est fondée.
[*]
Aux termes des conclusions qu'elle a notifiées par voie électronique le 12 mars 2020, la Société Générale demande à la cour :
- de déclarer l'appel de la SCI Datcha irrecevable
- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions
- de renvoyer l'affaire devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Albertville
- de condamner la SCI Datcha à lui payer la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
- d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la vente.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
A titre liminaire, la cour observe que si la Société Générale conclut à l'irrecevabilité de l'appel de la SCI Datcha, elle n'articule aucun moyen, notamment aucune fin de non-recevoir, au soutien de cette prétention qui ne peut en conséquence qu'être rejetée.
Sur l'absence de titre exécutoire constatant une créance liquide :
Il résulte de l'article L. 111-2 du code des procédures civiles d'exécution que seul le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur.
Sur l'absence de titre exécutoire :
Aux termes de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires.
La SCI Datcha soutient que l'acte authentique du 20 août 2009 dont se prévaut la Société Générale ne peut en l'espèce constituer un titre exécutoire. Elle étaye cette prétention sur deux moyens.
* Sur la nullité de l'acte pour défaut de capacité de la SCI Datcha
La SCI Datcha, qui n'était pas encore dotée au 20 août 2009 de la personnalité juridique, soutient qu'elle ne pouvait pas être partie à l'acte authentique signé à cette date.
Il résulte des dispositions de l'article 1843 du code civil qu'un acte peut être conclu au nom d'une société en formation et qu'une fois immatriculée, celle-ci peut reprendre les engagements souscrits qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par elle.
Par ailleurs, aux termes du troisième paragraphe de l'article 6 du décret n°78-704 du 3 juillet 1978, « les associés peuvent, dans les statuts ou par acte séparé, donner mandat à l'un ou plusieurs d'entre eux, ou au gérant non associé qui a été désigné, de prendre des engagements pour le compte de la société. Sous réserve qu'ils soient déterminés et que les modalités en soient précisées par le mandat, l'immatriculation de la société emportera reprise de ces engagements par ladite société. »
En l'espèce, à la rubrique « Identification des parties » de l'acte du 20 août 2009, figure en qualité d'acquéreur et d'emprunteur la SCI Datcha dont il est précisé qu'elle est en cours d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ;
A la rubrique « Présence – Représentation » de cet acte,
* il est énoncé que la SCI Datcha est représentée par Mme Y. en vertu des pouvoirs qui lui ont été conférés par l'article 39 des statuts de la société
* il est précisé que
- la vente et le prêt sont réalisés pour le compte de la société en formation dans le cadre des dispositions de l'article 1843 du code civil et du 3ème paragraphe de l'article 6 du décret du 3 juillet 1978
- conformément à la règle posée par ce dernier texte, le représentant susnommé agit aux présentes comme il est dit ci-dessus
- le mandat en question détermine les engagements à prendre pour le compte de la société et en précise les modalités.
* il est rappelé que conformément aux dispositions des textes précités, l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés emportera, sous réserve qu'elle intervienne dans le délai de trois mois à compter de l'acte, reprise à son profit de la présente opération qui sera alors réputée avoir été effectuée dès l'origine par la société elle-même.
Il résulte de ce qui précède que l'acte du 20 août 2009 n'a pas été passé par la SCI Datcha qui ne disposait pas à cette date de la capacité juridique, mais par une personne agissant au nom de cette société en cours de formation et disposant des pouvoirs à cet effet. Et dans la mesure où la SCI Datcha a été immatriculée le 24 août 2009, soit dans le délai de trois mois contractuellement convenu, elle est devenue propriétaire de la maison vendue par M. X. et est tenue au remboursement du prêt consenti par la Société Générale.
Sur ce point, le jugement déféré doit donc être confirmé.
* Sur la disqualification de l'acte du 20 août 2009 en un acte sous seing privé
L'article 1318 du code civil en vigueur à cette date disposait que « L'acte qui n'est point authentique (...) par un défaut de forme, vaut comme écriture privée, s'il a été signé des parties ».
Aux termes de l'article 21 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires, « L'acte notarié porte mention des documents qui lui sont annexés. Les procurations sont annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte. Dans ce cas, il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes. »
En l'espèce, l'acte du 20 août 2009 a été signé au nom de la Société Générale par un des clercs du notaire en l'étude duquel il a été passé, en vertu d'une procuration ou délégation de signature que lui avait donnée M. A. responsable du service des traitements de la Société Générale. Cette procuration a été annexée à l'acte.
Il ressort de cette procuration que M. A. disposait au sein de la Société Générale du pouvoir d'engager cette banque en vertu de délégations de pouvoirs successivement consenties par M. X., directeur délégué de la Banque de détail en France de la Société Générale à M. B., directeur du pôle services clients de cette banque puis par M. B. à M. A. Ces délégations de pouvoir n'ont pas été annexées à l'acte du 20 août 2009. Toutefois, elles ne constituent pas des procurations au sens de l'article 21 du décret du 26 novembre 1971 rappelées ci-dessus.
En tout état de cause, en l'état actuel du droit positif, l''inobservation de l'obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l'acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique et, partant, son caractère exécutoire.
Sur ce point, le jugement déféré doit donc également être confirmé.
Sur l'absence de créance liquide :
Selon l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution, la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation.
La SCI Datcha rappelle que le prêt consenti par la Société Générale était assorti d'intérêts à un taux initial de 4,04 % susceptible de variation et soutient que les clauses de l'acte du 20 août 2009 ne permettent pas de connaître la manière dont variait ce taux.
Il suffit pourtant pour être renseigné sur ce point de se référer aux conditions particulières du contrat, plus précisément à la clause relative au « taux d'intérêt du prêt » figurant en page 15 de l'acte du 20 août 2009, rédigée en des termes clairs permettant de connaître l'indice de référence et son taux au jour du contrat et limitant les effets de la variation à + ou - un point.
En outre, il était annexé à l'acte une notice explicative du mécanisme de révision du taux.
En conséquence, la SCI Datcha n'est pas fondée à soutenir que la Société Générale ne dispose pas d'une créance liquide au sens de l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution.
Sur la nullité du commandement du 6 décembre 2018 :
Selon l'article R. 321-3 du code des procédures civiles d'exécution, le commandement de payer aux fins de saisie immobilière doit comporter à peine de nullité le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts moratoires.
Conformément aux dispositions de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité du commandement pour absence de décompte, ne peut être prononcée que si ce vice de forme cause un grief au débiteur saisi.
En l'espèce, ainsi que l'a parfaitement analysé le premier juge, un décompte de créance arrêté au 9 juillet 2018 fait partie intégrante du commandement du 6 décembre 2018. Ce décompte d'un montant global de 557.715,29 euros ventile cette somme en principal (463.505,04 euros), indemnité forfaitaire (28.119,98 euros) et intérêts échus au 9 juillet 2018 (66.090,27 euros), les intérêts à échoir et frais ultérieurs étant mentionnés pour mémoire.
Ce décompte répond aux prescriptions de l'article R. 321-3 du code des procédures civiles d'exécution et a mis la SCI Datcha en mesure de connaître la somme qui lui était réclamée et de comprendre les éléments qui la composaient, et ainsi de discuter le montant de cette somme.
Elle prétend d'ailleurs que le calcul des intérêts est erroné dans la mesure où le taux appliqué a toujours été de 4,04 % alors que la Société Générale l'a informée par courriers du 7 août 2012 et du 6 mars 2014 d'une baisse du taux des intérêts contractuels à 3,55 %.
Toutefois, le fait que le décompte soit éventuellement erroné est indifférent à la régularité formelle du commandement.
En conséquence, à l'instar du premier juge, la cour rejette l'exception de nullité du commandement soulevée par la SCI Datcha, acte dont il n'est plus soutenu qu'il serait caduc.
Sur le montant de la créance de la Société Générale :
La SCI Datcha prétend que les clauses du contrat relatives aux intérêts du prêt sont abusives et doivent être réputées non écrites.
Elle doit être regardée comme fondant cette prétention sur les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur au 20 août 2009, aux termes desquelles « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. (...) Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l'une de l'autre. / Les clauses abusives sont réputées non écrites. »
En l'espèce, ainsi que l'a relevé le premier juge, ce texte n'est pas applicable en l'espèce, dès lors d'une part que l'appelante est une personne morale qui ne peut se prévaloir de la qualité de consommateur et que d'autre part, elle agit à des fins professionnelles puisque le prêt souscrit est destiné au financement d'un immeuble, opération qui relève de son objet social, quand bien même il s'agit d'une SCI familiale et que le bien acquis à crédit constitue la résidence de ses associés.
En tout état de cause, à l'instar du premier juge, la cour relève que la clause de variation du taux n'a ni pour objet, ni pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les parties au profit de la Société Générale, les risques limités de la variation du taux initial étant supportés dans des proportions identiques par les deux parties et la Société Générale ne disposant pas du pouvoir d'agir sur les éléments composant cet indice ou sur ses évolutions.
En conséquence, les clauses relatives aux intérêts contractuels ne sont pas entachées de nullité.
Dans ces circonstances, en l'absence de toute autre contestation de l'appelante sur le montant de la créance de la Société Générale, la disposition du jugement déféré ayant constaté que cette créance arrêtée au 6 décembre 2019, s'élevait à la somme de 552.155,37 euros, outre intérêts postérieurs au taux de 3,04 % sur le principal de 401 ?713,93 euros doit être confirmée.
Sur la créance indemnitaire de la SCI Datcha et la compensation avec sa propre dette :
L'article L. 213-6 du code des procédures civiles d'exécution dispose que 'Le juge de l'exécution connaît (...) de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit, ainsi que de la procédure de distribution qui en découle ».
En l'espèce, la SCI Datcha ne dispose d'aucun titre constatant l'existence d'une créance indemnitaire qu'elle détiendrait à l'encontre de la Société Générale et qu'elle pourrait compenser avec sa propre dette. La demande présentée à cette fin ne pouvait donc qu'être rejetée par le premier juge dont la décision mérite sur ce point confirmation.
La SCI Datcha a entendu engager devant le juge de l'exécution une action en responsabilité à l'encontre de la Société Générale et obtenir la condamnation de celle-ci à lui payer des dommages-intérêts. Une telle action est étrangère aux conditions d'exécution de la saisie immobilière et ne constitue pas une demande née de cette procédure ou s'y rapportant directement.
En conséquence, le premier juge a justement considéré que cette action excédait ses pouvoirs et l'a déclarée irrecevable.
Sur ce point, le jugement déféré doit également être confirmé.
La cour constate que si l'appelante conclut à l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, elle ne critique pas, ne serait-ce qu'à titre subsidiaire, les dispositions du jugement déféré
- l'ayant autorisé à procéder à la vente amiable du bien saisi au prix minimal de 330.000 euros, à consigner auprès de la Caisse des dépôts et consignations,
- et ayant taxé les frais de poursuite à la somme de 3.059,70 euros.
Ces dispositions, qui ne sont pas davantage critiquées par la Société Générale, seront donc confirmées.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Dès lors que la vente amiable du bien saisi a été autorisée et l'affaire renvoyée devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Albertville, le sort des dépens de première instance a été justement réservé et c'est en équité qu'il n'a pas été fait application de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur ces deux points, le jugement déféré doit aussi être confirmé :
En application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de l'appelante et la cour la condamne à payer à la Société Générale la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a été contrainte d'exposer.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
après en avoir délibéré conformément à la loi, la cour statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare recevable l'appel de la SCI Datcha,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SCI Datcha
- aux dépens d'appel
- à payer à la Société Générale la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Ainsi prononcé publiquement le 29 octobre 2020 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Sylvie DURAND, Greffier.
- 5735 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Nature - Clause nulle
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5872 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Activité et objet social
- 5920 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Immeubles - Contrats immobiliers conclus par des sociétés immobilières
- 5937 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Prêts
- 5983 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Juge de l’exécution (JEX)
- 6020 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Réciprocité - Réciprocité des contreparties : obligations principales
- 6106 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Décret du 18 mars 2009 - Prix
- 6638 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit immobilier - Présentation générale
- 6979 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à la loi n° 2017-203 du 21 février 2017