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CJUE (gde ch.), 3 mars 2020

Nature : Décision
Titre : CJUE (gde ch.), 3 mars 2020
Pays : UE
Juridiction : Cour de Justice de l'UE (grande ch.)
Demande : C-125/18
Date : 3/03/2020
Nature de la décision : Question préjudicielle (CJUE)
Mode de publication : Site Curia (CJUE)
Date de la demande : 16/02/2018
Décision antérieure : CJUE (9e ch.), 17 novembre 2021
Référence bibliographique : 5804 (directive, introduction partielle), 5805, 5813 et 5817 (ord. 23 août 2001, application dans le temps), 5988 (conformité aux normes), 6016 (clauses définissant l’objet principal), 6638 (prêt, taux variable), 5740 (effet, retour au droit supplétif)
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9188

CJUE (gde ch.), 3 mars 2020 : Affaire C-125/18 

Publication : Rec. ; site Curia

 

Extrait : « 1) L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que relève du champ d’application de cette directive la clause d’un contrat de prêt hypothécaire conclu entre un consommateur et un professionnel, qui prévoit que le taux d’intérêt applicable au prêt est fondé sur l’un des indices de référence officiels prévus par la réglementation nationale susceptibles d’être appliqués par les établissements de crédit aux prêts hypothécaires, lorsque cette réglementation ne prévoit ni l’application impérative de cet indice indépendamment du choix de ces parties, ni son application supplétive en l’absence d’un arrangement différent entre ces mêmes parties.

2) La directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 8, doit être interprétée en ce sens qu’une juridiction d’un État membre est tenue de contrôler le caractère clair et compréhensible d’une clause contractuelle portant sur l’objet principal du contrat, et ce indépendamment d’une transposition de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive dans l’ordre juridique de cet État membre.

3) La directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 5, doit être interprétée en ce sens que, aux fins de respecter l’exigence de transparence d’une clause contractuelle fixant un taux d’intérêt variable, dans le cadre d’un contrat de prêt hypothécaire, cette clause doit non seulement être intelligible sur les plans formel et grammatical, mais également permettre qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret du mode de calcul de ce taux et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières. Constituent des éléments particulièrement pertinents aux fins de l’appréciation que le juge national doit effectuer à cet égard, d’une part, la circonstance que les éléments principaux relatifs au calcul de ce taux sont aisément accessibles à toute personne envisageant de contracter un prêt hypothécaire, en raison de la publication du mode de calcul dudit taux ainsi que, d’autre part, la fourniture d’informations sur l’évolution passée de l’indice sur la base duquel est calculé ce même taux.

4) L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que, en cas de nullité d’une clause contractuelle abusive fixant un indice de référence pour le calcul des intérêts variables d’un prêt, le juge national substitue à cet indice un indice légal, applicable en l’absence d’accord contraire des parties au contrat, pour autant que le contrat de prêt hypothécaire concerné ne puisse subsister en cas de suppression de ladite clause abusive, et que l’annulation de ce contrat dans son ensemble exposerait le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables. ».

 

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE

GRANDE CHAMBRE

ARRÊT DU 3 MARS 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Dans l’affaire C‑125/18, ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de Primera Instancia n° 38 de Barcelona (tribunal de première instance n° 38 de Barcelone, Espagne), par décision du 16 février 2018, parvenue à la Cour le même jour, dans la procédure

Marc Gómez del Moral Guasch

contre

Bankia SA,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente, MM. J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev, E. Regan, M. Safjan et S. Rodin (rapporteur), présidents de chambre, MM. L. Bay Larsen, T. von Danwitz, D. Šváby, F. Biltgen, Mme K. Jürimäe et M. C. Lycourgos, juges,

Avocat général : M. M. Szpunar,

Greffier : Mme L. Carrasco Marco, administratrice,

Vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 février 2019,

Considérant les observations présentées :

- pour M. Gómez del Moral Guasch, par Mes J. M. Erausquin Vázquez, A. Benavente Antolín, M. Ortiz Pérez et S. Moreno de Lamo, abogados,

- pour Bankia SA, par Mes R. Fernández-Aceytuno Sáenz de Santamaría, F. Manzanedo González, M. Muñoz García-Liñán, V. Rodríguez de Vera Casado, L. Briones Bori et A. Fernández García, abogados,

- pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. García-Valdecasas Dorrego et M. J. Rodríguez de la Rúa Puig, en qualité d’agents,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. S. Brandon, en qualité d’agent, assisté de Mme A. Howard, barrister,

- pour la Commission européenne, par MM. N. Ruiz García et J. Baquero Cruz ainsi que par Mme C. Valero, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 septembre 2019,

rend le présent

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Arrêt

1. La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29), notamment de l’article 1er, paragraphe 2, de l’article 4, paragraphe 2, de l’article 6, paragraphe 1, de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 8 de cette directive.

2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Marc Gómez del Moral Guasch à Bankia SA au sujet de la clause relative au taux d’intérêt variable et rémunératoire contenue dans le contrat de prêt hypothécaire conclu entre ces deux parties.

 

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3. Le vingt-quatrième considérant de la directive 93/13 énonce que « les autorités judiciaires et organes administratifs des États membres doivent disposer de moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’application de clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ».

4. L’article 1er, paragraphe 2, de cette directive dispose :

« Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des dispositions ou principes des conventions internationales, dont les États membres ou [l’Union européenne] sont parties, notamment dans le domaine des transports, ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

5. L’article 4 de ladite directive dispose :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

6. Aux termes de l’article 5 de la même directive :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. [...] »

7. L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 prévoit :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

8. Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de cette directive :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

9. L’article 8 de ladite directive dispose :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

10. L’annexe de la directive 93/13, qui contient une liste indicative de clauses qui peuvent être déclarées abusives, est rédigée comme suit :

« 1. Clauses ayant pour objet ou pour effet :

[...]

l) de prévoir que le prix des biens est déterminé au moment de la livraison, ou d’accorder au vendeur de biens ou au fournisseur de services le droit d’augmenter leurs prix, sans que, dans les deux cas, le consommateur n’ait de droit correspondant lui permettant de rompre le contrat au cas où le prix final est trop élevé par rapport au prix convenu lors de la conclusion du contrat ;

[...]

2. Portée des points g), j) et l)

[...]

c) Les points g), j) et 1) ne sont pas applicables aux :

– transactions concernant les valeurs mobilières, instruments financiers et autres produits ou services dont le prix est lié aux fluctuations d’un cours ou d’un indice boursier ou d’un taux de marché financier que le professionnel ne contrôle pas,

[...]

d) Le point l) ne fait pas obstacle aux clauses d’indexation de prix pour autant qu’elles soient licites et que le mode de variation du prix y soit explicitement décrit. »

 

Le droit espagnol

11. L’article 1303 du Código Civil (code civil) dispose :

« Lorsqu’une obligation est déclarée nulle, les contractants doivent se restituer réciproquement les choses ayant fait l’objet du contrat, les fruits produits par ces choses et le prix assorti d’intérêts, sauf dans les cas prévus par les articles suivants. »

12. La deuxième disposition additionnelle de l’Orden del Ministerio de la Presidencia, sobre transparencia de las condiciones financieras de los préstamos hipotecarios (arrêté du ministère de la présidence relatif à la transparence des conditions financières des prêts hypothécaires), du 5 mai 1994 (BOE no 112, du 11 mai 1994, p. 14444), tel que modifié par l’arrêté ministériel du 27 octobre 1995 (BOE no 261, du 1er novembre 1995, p. 31794) (ci‑après l’« arrêté du 5 mai 1994 »), disposait :

« La Banque d’Espagne, sur rapport de la [Dirección General del Tesoro y Política Financiera (direction générale du Trésor et de la politique financière, Espagne)], définit par voie de circulaire un ensemble d’indices ou de taux de référence officiels susceptibles d’être appliqués par les entités auxquelles se réfère l’article 1.1 aux prêts hypothécaires à taux d’intérêt variable et publie régulièrement leur valeur. »

13. Le Real Decreto Legislativo 1/2007 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley General para la Defensa de los Consumidores y Usuarios y otras leyes complementarias (décret royal législatif 1/2007, portant adoption du texte consolidé de la loi générale relative à la protection des consommateurs et des usagers et d’autres lois complémentaires), du 16 novembre 2007 (BOE n° 287, du 30 novembre 2007, p. 49181, ci-après le « décret royal législatif 1/2007 ») dispose, à son article 8, intitulé « Droits fondamentaux des consommateurs et des usagers » :

« Les droits fondamentaux des consommateurs et des usagers sont les suivants :

[...]

b) La protection de leurs intérêts économiques et sociaux légitimes, tout particulièrement face aux pratiques commerciales déloyales et à l’insertion de clauses abusives dans les contrats.

[...] »

14. L’article 60 du décret royal législatif 1/2007, intitulé « Informations précontractuelles », prévoit :

« 1. Avant que le consommateur ou l’usager ne soit lié par un contrat ou une offre du même type, le professionnel lui fournit, d’une manière claire et compréhensible, les informations pertinentes, correctes et suffisantes sur les principales caractéristiques du contrat, notamment sur ses conditions juridiques et économiques, pour autant qu’elles ne ressortent pas clairement du contexte.

[...] »

15. Aux termes de l’article 80 du décret royal législatif 1/2007, intitulé « Exigences à l’égard des clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle » :

« 1. Dans les contrats conclus avec des consommateurs et des usagers qui comprennent des clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle, y compris les contrats conclus par l’administration publique et les entités et entreprises qui en dépendent, ces clauses doivent respecter les exigences suivantes :

[...]

c) bonne foi et juste équilibre entre les obligations des parties, ce qui exclut, en tout état de cause, l’utilisation de clauses abusives.

[...] »

16. L’article 82 du décret royal législatif 1/2007, intitulé « Notion de clauses abusives », dispose :

« 1. Sont considérées comme abusives toutes les clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle ainsi que toutes les pratiques qui ne résultent pas d’un accord exprès et qui, en dépit de l’exigence de bonne foi, créent au détriment du consommateur et de l’usager un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

[...] »

17. L’article 27 de l’Orden EHA/2899/2011 de transparencia y protección del cliente de servicios bancarios (arrêté ministériel EHA/2899/2011 relatif à la transparence et à la protection des utilisateurs de services bancaires), du 28 octobre 2011 (BOE n° 261, du 29 octobre 2011, p. 113242), intitulé « Taux d’intérêt officiels », prévoit, à son paragraphe 1, sous a) :

« 1. En vue de leur application par les organismes de crédit, selon les conditions établies dans le présent arrêté ministériel, les taux d’intérêt officiels suivants seront publiés sur une base mensuelle :

a) Taux moyen des prêts hypothécaires d’une durée supérieure à trois années visant à l’acquisition d’un logement dont le prix est librement fixé accordés par les établissements de crédit en Espagne. »

18. La Ley 14/2013 de apoyo a los emprendedores y su internacionalización (loi 14/2013 de soutien aux entrepreneurs et à leur internationalisation), du 27 septembre 2013 (BOE n° 233, du 28 septembre 2013, p. 78787) prévoit, à sa quinzième disposition additionnelle, que les taux supprimés mentionnés au paragraphe 1 de cette disposition, dont l’indice basé sur le taux moyen des prêts hypothécaires des caisses d’épargne espagnoles (ci‑après l’« IRPH des caisses d’épargne espagnoles »), sont remplacés par le taux ou l’indice de référence de substitution prévu dans le contrat, et que, à défaut de taux de substitution contractuel, le taux de substitution est le « taux d’intérêt officiel dénommé “taux moyen des prêts hypothécaires d’une durée supérieure à trois années visant à l’acquisition d’un logement dont le prix est librement fixé accordés par les établissements de crédit en Espagne”, auquel est appliqué une marge équivalente à la moyenne arithmétique des différences entre le taux supprimé et le taux susmentionné, calculées selon les informations disponibles entre la date de conclusion du contrat et celle où le taux a effectivement été remplacé ».

 

Le litige au principal et les questions préjudicielles

19. Le 19 juillet 2001, M. Gómez del Moral Guasch a conclu avec le prédécesseur de Bankia, un établissement bancaire, un contrat de prêt hypothécaire, pour un montant de 132.222,66 euros, visant à financer l’acquisition d’un logement.

20. Le point 3 bis de ce contrat, intitulé « Taux d’intérêt variable », contient une clause en vertu de laquelle le taux d’intérêt à payer par le consommateur varie en fonction de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles (ci-après la « clause litigieuse »). Cette clause litigieuse est libellée comme suit :

« Le taux d’intérêt contractuel est déterminé par périodes semestrielles, calculées à compter de la date de signature du contrat, le taux du premier semestre étant celui mentionné dans la troisième clause financière. Pour les semestres suivants, le taux applicable est le taux moyen des prêts hypothécaires d’une durée supérieure à trois années visant à l’acquisition d’un logement dont le prix est librement fixé accordés par les caisses d’épargne, en vigueur au moment de la révision, qui est officiellement publié par la Banque d’Espagne à intervalles réguliers dans le Boletín Oficial del Estado pour les prêts hypothécaires à taux variable visant à l’acquisition d’un logement, arrondi au quart de point de pourcentage supérieur et majoré de 0,25 point de pourcentage. »

21. M. Gómez del Moral Guasch a formé un recours devant le Juzgado de Primera Instancia n° 38 de Barcelona (tribunal de première instance n° 38 de Barcelone, Espagne) tendant, notamment, à l’annulation de cette clause en raison de son caractère prétendument abusif.

22. La juridiction de renvoi relève, tout d’abord, que l’indexation des intérêts variables d’un prêt hypothécaire calculée sur la base de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles est moins favorable que celle calculée sur la base du taux moyen du marché interbancaire européen (ci-après, l’« indice Euribor »), qui serait utilisé dans 90 % des prêts hypothécaires souscrits en Espagne. L’utilisation de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles engendrerait un coût supplémentaire de l’ordre de 18.000 à 21.000 euros par prêt.

23. La juridiction de renvoi se demande ensuite si le fait que l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles est un indice réglementé a pour conséquence que l’exception prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit s’appliquer, même si la soumission des parties au contrat de prêt à cet indice résulte de l’application d’une clause de ce contrat.

24. En outre, la juridiction de renvoi se demande si le consommateur doit être informé de la méthode de calcul de l’indice de référence ainsi que de son évolution dans le passé en vue de pouvoir apprécier le coût financier du prêt contracté. À cet égard, la juridiction de renvoi relève que, afin de garantir un niveau de protection du consommateur plus élevé que celui prévu par cette directive, l’exception découlant de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 n’a pas été transposée dans l’ordre juridique espagnol.

25. Par ailleurs, la juridiction de renvoi se demande si, en cas de non-conformité de la clause litigieuse au droit de l’Union, la substitution de l’indice Euribor à l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles ou le remboursement du seul capital prêté sans paiement des intérêts seraient conformes à la directive 93/13.

26. C’est dans ces conditions que le Juzgado de Primera Instancia n° 38 de Barcelona (tribunal de première instance n° 38 de Barcelone) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) [L’IRPH des caisses d’épargne espagnoles] doit-il faire l’objet d’une protection juridictionnelle, au sens d’un examen tendant à vérifier si cet indice est compréhensible pour un consommateur, sans que le fait qu’il soit régi par des dispositions réglementaires ou administratives y fasse obstacle, ce cas n’étant pas prévu à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, puisqu’il ne s’agit pas d’une disposition obligatoire mais d’un intérêt variable et rémunératoire inclus facultativement dans le contrat par le professionnel ?

2) a) Conformément à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13, non transposée dans l’ordre juridique [espagnol], lorsque le législateur n’a volontairement pas transposé cette disposition car il entendait assurer un niveau de protection totale à l’égard de l’ensemble des clauses qu’un professionnel est susceptible d’insérer dans un contrat conclu par un consommateur, y compris lorsqu’elles concernent l’objet principal du contrat et même si elles ont été rédigées de façon claire et compréhensible, le fait pour une juridiction espagnole d’invoquer et d’appliquer ladite disposition est‑il contraire à cette directive, en particulier à son article 8 ?

2) b) Est-il en tout état de cause nécessaire, pour la compréhension de la clause essentielle, de l’IRPH [des caisses d’épargne espagnoles] en particulier, de transmettre l’information ou la publicité concernant l’ensemble ou certains des faits ou données mentionnés ci-après ?

i) expliquer comment le taux de référence [est] établi, c’est‑à‑dire informer sur le fait que cet indice inclut les commissions et d’autres frais en sus de l’intérêt nominal, qu’il s’agit d’une moyenne simple non pondérée, que le professionnel d[oi]t savoir et faire savoir qu’une marge négative [doit] être appliquée et que les données fournies ne sont pas publiques, par comparaison avec l’indice habituel, [l’indice Euribor] ;

ii) expliquer comment cet indice a évolué dans le passé et peut évoluer à l’avenir, en donnant des informations et en incluant dans la publicité les graphiques expliquant de façon claire et compréhensible au consommateur l’évolution de ce taux spécifique, en lien avec [l’indice Euribor], taux habituel des prêts assortis d’une garantie hypothécaire.

2) c) Si la Cour conclut qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’examiner le caractère abusif des clauses contractuelles et d’en tirer toutes les conséquences conformément à son droit national, il convient de lui poser la question suivante : le défaut d’information concernant l’ensemble de ces éléments n’impliquerait-il pas un défaut de compréhension de la clause en ce qu’elle ne serait pas claire pour le consommateur moyen (article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13), ou l’omission de cette information ne signifierait-elle pas que le professionnel n’a pas traité de façon loyale [avec le consommateur], de sorte que, si ce dernier avait été informé convenablement, il n’aurait pas accepté l’indexation de son prêt à l’IRPH [des caisses d’épargne espagnoles] ?

3) Si la nullité de l’IRPH [des caisses d’épargne espagnoles] [...] est constatée, laquelle des deux conséquences suivantes serait conforme à l’article 6, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13, à défaut d’accord ou si un tel accord est davantage préjudiciable pour le consommateur ?

i) réviser le contrat en appliquant l’indice de substitution habituel, [l’indice Euribor], puisqu’il s’agit d’un contrat essentiellement lié à un intérêt favorable à l’établissement [de crédit], [qui a la qualité de] professionnel ;

ii) ne plus appliquer les intérêts, en ne laissant subsister que l’obligation pour l’emprunteur ou le débiteur de rembourser le capital prêté dans les délais prévus au contrat. »

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur les questions préjudicielles :

Sur la première question :

27. À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises (arrêt du 7 août 2018, Smith, C‑122/17, EU:C:2018:631, point 34).

28. À cet égard, la première question vise certes, en tant que tel, l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles. Toutefois, en vue de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, il y a lieu de comprendre cette question en ce sens que, par celle-ci, cette juridiction demande si l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’est exclue du champ d’application de cette directive une clause d’un contrat de prêt hypothécaire conclu entre un consommateur et un professionnel, qui prévoit que le taux d’intérêt applicable au prêt est fondé sur l’un des indices de référence officiels prévus par la réglementation nationale susceptibles d’être appliqués par les établissements de crédit aux prêts hypothécaires.

29. Selon cette disposition, les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ne sont pas soumises aux dispositions de la directive 93/13.

30. Ladite disposition institue ainsi une exclusion de ces clauses du champ d’application de la directive 93/13, cette exclusion étant d’interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, points 27 et 31 ainsi que jurisprudence citée).

31. Cette exclusion suppose que deux conditions soient remplies : d’une part, la clause contractuelle doit refléter une disposition législative ou réglementaire et, d’autre part, cette disposition doit être impérative (arrêts du 10 septembre 2014, Kušionová, C‑34/13, EU:C:2014:2189, point 78, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 28).

32. Afin d’établir si ces conditions sont remplies, la Cour a jugé qu’il incombe au juge national de vérifier si la clause contractuelle concernée reflète des dispositions du droit national s’appliquant de manière impérative entre les parties contractantes indépendamment de leur choix ou des dispositions de nature supplétive et dès lors applicables par défaut, c’est-à-dire en l’absence d’un arrangement différent entre les parties à cet égard (arrêts du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, point 26 ; du 10 septembre 2014, Kušionová C‑34/13, EU:C:2014:2189, point 79, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, points 29 et 30).

33. En l’occurrence, il découle de la description, par la juridiction de renvoi, de la réglementation nationale applicable à l’affaire au principal que cette réglementation ne contenait pas d’obligation de prévoir, dans les clauses de rémunération incluses dans des contrats de prêt hypothécaire, l’application de l’un des six indices officiels prévus par la circular 8/1990 del Banco de España, a entidades de crédito, sobre transparencia de las operaciones y protección de la clientela (circulaire 8/1990 de la Banque d’Espagne, à l’attention des établissements de crédit, relative à la transparence des opérations et à la protection des clients), du 7 septembre 1990 (BOE n° 226, du 20 septembre 1990, p. 27498), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « circulaire 8/1990 »).

34. À cet égard, comme l’a relevé en substance M. l’avocat général aux points 78 à 83 de ses conclusions, il apparaît, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, que l’arrêté du 5 mai 1994 n’imposait pas, pour les prêts à taux d’intérêt variable, l’utilisation d’un indice de référence officiel, y compris de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles, mais se bornait à établir les conditions devant être remplies par « les indices ou taux de référence » pour pouvoir être utilisés par les établissements de crédit.

35. Partant, sous réserve d’éventuelles vérifications par la juridiction de renvoi, Bankia avait, ainsi qu’il ressort du point 3 bis, paragraphe 1, sous d), de l’annexe II de l’arrêté du 5 mai 1994, la faculté de définir le taux d’intérêt variable « de toute autre manière, à condition pour celui-ci d’être clair, concret et compréhensible pour l’emprunteur et d’être conforme au droit ».

36. Par conséquent, la référence à l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles dans la clause litigieuse, en vue du calcul des intérêts dus dans le cadre du contrat en cause au principal, ne résulte pas d’une disposition législative ou réglementaire impérative au sens de la jurisprudence rappelée aux points 31 et 32 du présent arrêt. Sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, cette clause relève dès lors du champ d’application de la directive 93/13.

37. Il s’ensuit qu’il y a lieu de répondre à la première question que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que relève du champ d’application de cette directive la clause d’un contrat de prêt hypothécaire conclu entre un consommateur et un professionnel, qui prévoit que le taux d’intérêt applicable au prêt est fondé sur l’un des indices de référence officiels prévus par la réglementation nationale susceptibles d’être appliqués par les établissements de crédit aux prêts hypothécaires, lorsque cette réglementation ne prévoit ni l’application impérative de cet indice indépendamment du choix de ces parties, ni son application supplétive en l’absence d’un arrangement différent entre ces mêmes parties.

 

Sur la deuxième question, sous a) :

38. Par sa deuxième question, sous a), la juridiction de renvoi demande si la directive 93/13, et notamment son article 8, doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à ce qu’une juridiction d’un État membre applique l’article 4, paragraphe 2, de cette directive aux fins de ne pas contrôler le caractère éventuellement abusif d’une clause contractuelle rédigée de façon claire et compréhensible et portant sur l’objet principal du contrat, lorsque cette dernière disposition n’a pas été transposée dans l’ordre juridique de cet État membre.

39. Il ressort néanmoins des explications contenues dans la décision de renvoi quant à la deuxième question que, par le premier volet de celle-ci, la juridiction de renvoi s’interroge plus particulièrement sur la possibilité pour une juridiction nationale, même en l’absence d’une transposition de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 dans le droit interne, de contrôler si une clause telle que la clause litigieuse satisfait à l’exigence de transparence édictée par cette directive.

40. En l’occurrence, il convient de constater, à titre liminaire, que la juridiction de renvoi a posé la deuxième question, sous a), en partant de la prémisse que la transposition de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 dans l’ordre juridique espagnol fait défaut.

41. De leur côté, Bankia et le gouvernement espagnol soutiennent que le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), dans ses arrêts 406/2012 du 18 juin 2012 (ES:TS:2012:5966) et 241/2013 du 9 mai 2013 (ES:TS:2013:1916), a relevé que le législateur espagnol avait transposé l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 en droit national par la Ley 7/1998 sobre condiciones generales de la contratación (loi 7/1998 relative aux conditions contractuelles générales), du 13 avril 1998 (BOE n° 89, du 14 avril 1998, p. 12304). Il résulterait de ces arrêts, premièrement, que l’expression « juste équilibre des contreparties », qui figurait dans la législation espagnole antérieure à l’adoption de la directive 93/13, a été remplacée par l’expression « déséquilibre significatif entre les droits et les obligations », en vue de limiter le contrôle portant sur le caractère éventuellement abusif d’une clause contractuelle, deuxièmement, que le prix et l’équilibre des prestations proprement dit ne peuvent pas faire l’objet d’un contrôle et, troisièmement, que les éléments essentiels du contrat, bien qu’ils soient exclus d’un contrôle sur le fond, peuvent néanmoins faire l’objet d’un contrôle portant sur les critères d’insertion et de transparence.

42. Toutefois, eu égard à la précision apportée au point 39 du présent arrêt quant à la portée de la deuxième question, sous a), il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la transposition effective de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 dans l’ordre juridique espagnol.

43. En effet, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le système de protection mis en œuvre par la directive 93/13 repose sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d’information, situation qui le conduit à adhérer aux conditions rédigées préalablement par le professionnel, sans pouvoir exercer une influence sur le contenu de celles-ci (voir, notamment, arrêts du 3 juin 2010, Caja de Ahorros y Monte de Piedad de Madrid, C‑484/08, EU:C:2010:309, point 27 et jurisprudence citée, ainsi que du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 49).

44. Eu égard à une telle situation d’infériorité, la directive 93/13 oblige les États membres à prévoir un mécanisme assurant que toute clause contractuelle n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle puisse être contrôlée afin d’apprécier son caractère éventuellement abusif. Dans ce cadre, il incombe au juge national de déterminer, en tenant compte des critères énoncés à l’article 3, paragraphe 1, et à l’article 5 de la directive 93/13, si, eu égard aux circonstances propres au cas d’espèce, une telle clause satisfait aux exigences de bonne foi, d’équilibre et de transparence posées par cette directive (voir, en ce sens, arrêts du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, points 42 à 48 ; du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 40, et du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 50).

45. L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13, lu en combinaison avec l’article 8 de celle-ci, permet néanmoins aux États membres de prévoir, dans la législation transposant cette directive, que l’» appréciation du caractère abusif » ne porte pas sur les clauses visées à cette disposition, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible (voir, en ce sens, arrêts du 3 juin 2010, Caja de Ahorros y Monte de Piedad de Madrid, C‑484/08, EU:C:2010:309, point 32, et du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 41).

46. La Cour a, en outre, souligné que cette même exigence de rédaction claire et compréhensible figure à l’article 5 de la directive 93/13, qui prévoit que les clauses contractuelles doivent « toujours » satisfaire à cette exigence (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, points 67 et 68, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 43). Il s’ensuit que cette dernière s’applique en tout état de cause, y compris lorsqu’une clause relève du champ d’application de l’article 4, paragraphe 2, de ladite directive et même si l’État membre concerné n’a pas transposé cette disposition. Cette exigence ne saurait être réduite au seul caractère compréhensible sur les plans formel et grammatical d’une clause contractuelle (arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 71).

47. Il convient donc de répondre à la deuxième question, sous a), que la directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 8, doit être interprétée en ce sens qu’une juridiction d’un État membre est tenue de contrôler le caractère clair et compréhensible d’une clause contractuelle portant sur l’objet principal du contrat, et ce indépendamment d’une transposition de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive dans l’ordre juridique de cet État membre.

 

Sur la deuxième question, sous b) et c) :

48. Par sa deuxième question, sous b) et c), la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 5, doit être interprétée en ce sens que, aux fins de respecter l’exigence de transparence d’une clause contractuelle, dans le cadre d’un contrat de prêt hypothécaire, fixant un taux d’intérêt variable, dont le mode de calcul est considéré comme complexe pour un consommateur moyen, le professionnel doit communiquer au consommateur des informations relatives à la méthode de calcul de l’indice sur la base duquel ledit taux d’intérêt est calculé ainsi qu’à l’évolution de cet indice dans le passé et la manière dont il pourrait évoluer dans le futur.

49. À cet égard, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé aux points 106 à 109 de ses conclusions, selon une jurisprudence constante de la Cour relative à l’exigence de transparence, l’information, avant la conclusion d’un contrat, sur les conditions contractuelles et les conséquences de ladite conclusion est, pour un consommateur, d’une importance fondamentale. C’est, notamment, sur la base de cette information que ce dernier décide s’il souhaite se lier contractuellement à un professionnel en adhérant aux conditions rédigées préalablement par celui-ci (arrêts du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, point 44 ; du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 70 ; du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980, point 50, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 48).

50. Il s’ensuit que, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 46 du présent arrêt, l’exigence de transparence des clauses contractuelles, telle qu’elle résulte de l’article 4, paragraphe 2, et de l’article 5 de la directive 93/13, ne saurait être réduite au seul caractère compréhensible sur les plans formel et grammatical de celles-ci. Le système de protection mis en œuvre par ladite directive reposant sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel en ce qui concerne, notamment, le niveau d’information, cette exigence de rédaction claire et compréhensible des clauses contractuelles et, partant, de transparence, imposée par la même directive, doit être entendue de manière extensive (arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, points 71 et 72, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 44).

51. S’agissant d’une clause prévoyant, dans le cadre d’un contrat de prêt hypothécaire, une rémunération de ce prêt au moyen d’intérêts calculés sur la base d’un taux variable, cette exigence doit donc s’entendre comme imposant non seulement que la clause concernée soit intelligible pour le consommateur sur les plans formel et grammatical, mais également qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret du mode de calcul de ce taux et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 75, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 51).

52. La compétence de la Cour portant uniquement sur l’interprétation des dispositions du droit de l’Union, en l’occurrence de la directive 93/13 (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, point 48 et jurisprudence citée), il appartient à la seule juridiction de renvoi de procéder aux vérifications nécessaires à cet égard, au regard de l’ensemble des éléments de fait pertinents, au nombre desquels figurent la publicité et l’information fournies par le prêteur dans le cadre de la négociation d’un contrat de prêt (arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 74 ; du 26 février 2015, Matei, C‑143/13, EU:C:2015:127, point 75, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 46). Plus particulièrement, il incombe au juge national, lorsqu’il tient compte de l’ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat, de vérifier que, dans l’affaire concernée, ont été communiqués au consommateur l’ensemble des éléments susceptibles d’avoir une incidence sur la portée de son engagement lui permettant d’évaluer, notamment, le coût total de son emprunt. Jouent un rôle décisif dans cette appréciation, d’une part, la question de savoir si les clauses sont rédigées de manière claire et compréhensible de sorte qu’un consommateur moyen, tel que décrit au point 51 du présent arrêt, est mis en mesure d’évaluer un tel coût et, d’autre part, la circonstance liée à l’absence de mention, dans le contrat de crédit, des informations considérées, au regard de la nature des biens ou des services qui font l’objet de ce contrat, comme étant essentielles (arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 47 ainsi que jurisprudence citée).

53. S’agissant d’une clause telle que celle visée au point 51 du présent arrêt, qui contient une référence à un taux variable dont la valeur exacte ne peut pas être déterminée dans un contrat de crédit pour toute la durée de ce contrat, il convient de constater, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé aux points 122 et 123 de ses conclusions, qu’est pertinente aux fins de cet examen la circonstance que les éléments principaux relatifs au calcul de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles étaient aisément accessibles à toute personne envisageant de contracter un prêt hypothécaire, dès lors que ces éléments figuraient dans la circulaire 8/1990 publiée au Boletín Oficial del Estado. Cette circonstance était en effet de nature à permettre à un consommateur raisonnablement attentif et avisé de comprendre que cet indice était calculé sur la base d’une moyenne des taux des prêts hypothécaires d’une durée supérieure à trois années visant à l’acquisition d’un logement, incluant ainsi la moyenne des marges et des frais pratiqués par ces établissements, et que, dans le contrat de prêt hypothécaire concerné, ledit indice était arrondi au quart de point de pourcentage supérieur auquel s’ajoutait encore une marge de 0,25 %.

54. Est également pertinente pour apprécier le caractère transparent de la clause litigieuse la circonstance que, selon la réglementation nationale en vigueur à la date de la conclusion du contrat en cause au principal, les établissements de crédit étaient tenus d’informer les consommateurs de l’évolution de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles au cours des deux années civiles précédant la conclusion des contrats de prêt ainsi que de la dernière valeur disponible. De telles informations sont aussi de nature à offrir au consommateur une indication objective sur les conséquences économiques découlant de l’application d’un tel indice et constituent un point de comparaison utile entre le calcul du taux d’intérêt variable basé sur l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles et d’autres formules de calcul de taux d’intérêt.

55. La juridiction de renvoi devra dès lors vérifier si, dans le cadre de la conclusion du contrat en cause au principal, Bankia a effectivement respecté toutes les obligations d’information prévues par la réglementation nationale.

56. Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question, sous b) et c), que la directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 5, doit être interprétée en ce sens que, aux fins de respecter l’exigence de transparence d’une clause contractuelle fixant un taux d’intérêt variable dans le cadre d’un contrat de prêt hypothécaire, cette clause doit non seulement être intelligible sur les plans formel et grammatical, mais également permettre qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret du mode de calcul de ce taux et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières. Constituent des éléments particulièrement pertinents aux fins de l’appréciation que le juge national doit effectuer à cet égard, d’une part, la circonstance que les éléments principaux relatifs au calcul de ce taux sont aisément accessibles à toute personne envisageant de contracter un prêt hypothécaire, en raison de la publication du mode de calcul dudit taux ainsi que, d’autre part, la fourniture d’informations sur l’évolution passée de l’indice sur la base duquel est calculé ce même taux.

 

Sur la troisième question :

57. Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que, en cas de nullité d’une clause contractuelle abusive fixant un indice de référence pour le calcul des intérêts variables d’un prêt, et à défaut d’accord contraire entre les parties, le juge national substitue à cet indice un indice légal ou impose à l’emprunteur de rembourser le capital prêté dans les délais prévus audit contrat sans paiement des intérêts.

58. Il y a d’abord lieu de rappeler que, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, il incombe au juge national d’écarter l’application des clauses abusives afin qu’elles ne produisent pas d’effets contraignants à l’égard du consommateur, sauf si le consommateur s’y oppose (voir, en ce sens, arrêts du 4 juin 2009, Pannon GSM, C‑243/08, EU:C:2009:350, point 35 ; du 14 juin 2012, Banco Español de Crédito, C‑618/10, EU:C:2012:349, point 65, et du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 52).

59. Ensuite, selon la jurisprudence de la Cour, lorsque le juge national constate la nullité d’une clause abusive dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une règle de droit national qui permet au juge national de compléter ce contrat en révisant le contenu de cette clause (arrêts du 14 juin 2012, Banco Español de Crédito, C‑618/10, EU:C:2012:349, point 73 ; du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 77, ainsi que du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 53).

60. Ainsi, s’il était loisible au juge national de réviser le contenu des clauses abusives figurant dans un tel contrat, une telle faculté serait susceptible de porter atteinte à la réalisation de l’objectif à long terme visé à l’article 7 de la directive 93/13. En effet, cette faculté contribuerait à éliminer l’effet dissuasif exercé sur les professionnels par la pure et simple non-application à l’égard du consommateur de telles clauses abusives, dans la mesure où ceux-ci demeureraient tentés d’utiliser lesdites clauses, en sachant que, même si celles-ci devaient être invalidées, le contrat pourrait néanmoins être complété, dans la mesure nécessaire, par le juge national de sorte à garantir ainsi l’intérêt desdits professionnels (arrêts du 14 juin 2012, Banco Español de Crédito, C‑618/10, EU:C:2012:349, point 69 ; du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, point 79, et du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 54).

61. Toutefois, la Cour a déjà jugé que, dans une situation dans laquelle un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur ne peut subsister après la suppression d’une clause abusive, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 ne s’oppose pas à ce que le juge national, en application de principes du droit des contrats, supprime la clause abusive en lui substituant une disposition de droit national à caractère supplétif dans des situations dans lesquelles l’invalidation de la clause abusive obligerait le juge à annuler le contrat dans son ensemble, exposant par là le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables, de sorte que ce dernier en serait pénalisé (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, points 80 à 84 ; du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, points 56 et 64, ainsi que du 3 octobre 2019, Dziubak, C‑260/18, EU:C:2019:819, point 48).

62. À cet égard, la Cour a jugé qu’une telle substitution est pleinement justifiée au regard de la finalité de la directive 93/13. En effet, elle est conforme à l’objectif de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, dès lors que cette disposition tend à substituer à l’équilibre formel que le contrat établit entre les droits et obligations des cocontractants un équilibre réel de nature à rétablir l’égalité entre ces derniers et non pas à annuler tous les contrats contenant des clauses abusives (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, points 81 et 82 ainsi que jurisprudence citée, et du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 57).

63. Si, dans une situation telle que celle décrite au point 61 du présent arrêt, il n’était pas permis de substituer à une clause abusive une disposition de droit national à caractère supplétif, obligeant le juge à annuler le contrat dans son ensemble, le consommateur pourrait être exposé à des conséquences particulièrement préjudiciables, de sorte que le caractère dissuasif résultant de l’annulation du contrat risquerait d’être compromis. En effet, s’agissant d’un contrat de prêt, une telle annulation aurait en principe comme conséquence de rendre immédiatement exigible le montant du prêt restant dû dans des proportions risquant d’excéder les capacités financières du consommateur et, de ce fait, tendrait à pénaliser celui-ci plutôt que le prêteur qui, par voie de conséquence, ne serait pas dissuadé d’insérer de telles clauses dans les contrats qu’il propose (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, EU:C:2014:282, points 83 et 84, ainsi que du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 58).

64. Il y a dès lors lieu de considérer que, dans une situation dans laquelle un contrat de prêt hypothécaire conclu entre un professionnel et un consommateur ne peut subsister après la suppression d’une clause abusive se référant à un indice légal pour le calcul du taux d’intérêt variable applicable au prêt, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 ne saurait être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que le juge national, en vue d’éviter la nullité de ce contrat, substitue à cette clause un indice prévu à titre supplétif par le droit national, dans la mesure où l’annulation du contrat exposerait le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables (voir, par analogie, arrêt du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia, C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 59).

65. En l’occurrence, la clause litigieuse prévoit que le taux d’intérêt variable est calculé sur la base de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles. Toutefois, il ressort du dossier dont dispose la Cour que cet indice légal, prévu par la circulaire 8/1990, a été remplacé, en vertu de la quinzième disposition additionnelle de la loi 14/2013, du 27 septembre 2013, par un indice de substitution, que le gouvernement espagnol qualifie de « supplétif ». En effet, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, cette disposition additionnelle prévoit l’application de cet indice de substitution à défaut d’arrangement différent entre les parties au contrat.

66. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi, dans l’hypothèse où elle devrait constater, premièrement, le caractère abusif de la clause litigieuse, deuxièmement, que le contrat de prêt hypothécaire en cause au principal ne pourrait survivre sans cette clause et, troisièmement, que l’annulation de ce contrat exposerait le requérant au principal à des conséquences particulièrement préjudiciables, pourrait remplacer ladite clause par l’indice de substitution visé par la loi 14/2013, du 27 septembre 2013, pour autant que celui-ci puisse être considéré comme ayant un caractère supplétif au regard du droit national.

67. Il convient donc de répondre à la troisième question que l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que, en cas de nullité d’une clause contractuelle abusive fixant un indice de référence pour le calcul des intérêts variables d’un prêt, le juge national substitue à cet indice un indice légal, applicable en l’absence d’accord contraire des parties au contrat, pour autant que le contrat de prêt hypothécaire concerné ne puisse subsister en cas de suppression de ladite clause abusive, et que l’annulation de ce contrat dans son ensemble exposerait le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables.

 

Sur la demande de limitation des effets dans le temps du présent arrêt :

68. La troisième question préjudicielle étant formulée de façon à viser l’éventualité de la « nullité de l’IRPH des caisses d’épargne espagnoles », le gouvernement espagnol, dans ses observations écrites et orales devant la Cour, a demandé à celle-ci de limiter les effets de son arrêt dans le temps. Il convient de préciser que la demande du gouvernement espagnol est fondée sur l’hypothèse dans laquelle, en cas de nullité d’une clause contractuelle telle que la clause litigieuse, le contrat de prêt subsisterait sans paiement d’intérêts.

69. Ainsi qu’il a été rappelé au point 52 du présent arrêt, la compétence de la Cour porte uniquement sur l’interprétation des dispositions du droit de l’Union, en l’occurrence de la directive 93/13.

70. Or, il ressort de la réponse à la troisième question préjudicielle que, en cas de nullité d’une clause telle que la clause litigieuse, le juge national est habilité, dans les conditions rappelées au point 67 du présent arrêt, à substituer à l’indice retenu dans la clause un indice légal applicable en l’absence d’accord contraire des parties au contrat.

71. Dans ces conditions, les conséquences financières d’une éventuelle nullité d’une telle clause, pour les établissements bancaires pris individuellement et pour le système bancaire pris dans son ensemble, ne sauraient être déterminées uniquement sur la base de l’interprétation du droit de l’Union donnée par la Cour dans le cadre de la présente affaire (voir, par analogie, arrêt du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, points 60 et 61).

72. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de limiter dans le temps les effets du présent arrêt.

 

Sur les dépens :

73. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit :

1) L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que relève du champ d’application de cette directive la clause d’un contrat de prêt hypothécaire conclu entre un consommateur et un professionnel, qui prévoit que le taux d’intérêt applicable au prêt est fondé sur l’un des indices de référence officiels prévus par la réglementation nationale susceptibles d’être appliqués par les établissements de crédit aux prêts hypothécaires, lorsque cette réglementation ne prévoit ni l’application impérative de cet indice indépendamment du choix de ces parties, ni son application supplétive en l’absence d’un arrangement différent entre ces mêmes parties.

2) La directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 8, doit être interprétée en ce sens qu’une juridiction d’un État membre est tenue de contrôler le caractère clair et compréhensible d’une clause contractuelle portant sur l’objet principal du contrat, et ce indépendamment d’une transposition de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive dans l’ordre juridique de cet État membre.

3) La directive 93/13, et notamment son article 4, paragraphe 2, et son article 5, doit être interprétée en ce sens que, aux fins de respecter l’exigence de transparence d’une clause contractuelle fixant un taux d’intérêt variable, dans le cadre d’un contrat de prêt hypothécaire, cette clause doit non seulement être intelligible sur les plans formel et grammatical, mais également permettre qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, soit mis en mesure de comprendre le fonctionnement concret du mode de calcul de ce taux et d’évaluer ainsi, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières. Constituent des éléments particulièrement pertinents aux fins de l’appréciation que le juge national doit effectuer à cet égard, d’une part, la circonstance que les éléments principaux relatifs au calcul de ce taux sont aisément accessibles à toute personne envisageant de contracter un prêt hypothécaire, en raison de la publication du mode de calcul dudit taux ainsi que, d’autre part, la fourniture d’informations sur l’évolution passée de l’indice sur la base duquel est calculé ce même taux.

4) L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que, en cas de nullité d’une clause contractuelle abusive fixant un indice de référence pour le calcul des intérêts variables d’un prêt, le juge national substitue à cet indice un indice légal, applicable en l’absence d’accord contraire des parties au contrat, pour autant que le contrat de prêt hypothécaire concerné ne puisse subsister en cas de suppression de ladite clause abusive, et que l’annulation de ce contrat dans son ensemble exposerait le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables.

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