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T. COM. COUTANCES, 18 juin 2004

Nature : Décision
Titre : T. COM. COUTANCES, 18 juin 2004
Pays : France
Juridiction : Coutances (TCom)
Demande : 2003/005267
Date : 18/06/2004
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 20/11/2003
Décision antérieure : CA CAEN (1re ch. sect. civ. et com.), 26 janvier 2006
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 198

T. COM. COUTANCES, 18 juin 2004 : RG n° 2003/005267

(sur appel CA Caen (1re ch. civ. et com.), 26 janvier 2006 : RG n° 04/02622)

 

Extraits 1/ : « SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE considère que la société GRANVILLE MARINE LOISIRS, société commerciale, ne peut bénéficier de la protection réservée par le Code de la Consommation au consommateur. L'article L.132-1 du Code de la Consommation dispose que dans les contrats entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. En conséquence de quoi, les clauses abusives sont réputées non écrites. L'activité de la SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS est la réparation et la vente de matériel nautique. Elle n'est pas donc un professionnel de la surveillance électronique. La prestation de service fournie par la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE échappe ainsi à la compétence professionnelle de la SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS. SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS doit dès lors être considérée comme un consommateur à l'égard de la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE ».

 2/ « Le présent contrat est conclu pour une durée de 48 mois irrévocable et indivisible. En n'envisageant aucune possibilité de rupture anticipée par la société GRANVILLE MARINE LOISIRS, même de manière justifiée, les stipulations dudit contrat, en son article 13, lui sont particulièrement défavorables. Cette clause institue un net déséquilibre entre les parties quant à leur possibilité de dénoncer le contrat. En l'espèce, la faculté de dénoncer le contrat est refusée au consommateur.

La clause de l'article 23 dudit contrat, stipulée dans l'intérêt exclusif de la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, qui impose le paiement immédiat de la somme des loyers à payer jusqu'au terme du contrat, majorée d'une clause pénale de 10 %, est également abusive. Ce type de clause est abusif non seulement parce toute résiliation anticipée du contrat de télésurveillance n'est pas nécessairement fautive, mais aussi parce qu'il oblige le non professionnel ou consommateur à continuer à acquitter une somme d'argent correspondant à une prestation qui ne lui est plus fournie. En l'espèce, SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE ayant repris possession de son matériel le 3 septembre 2002, n'est plus en mesure d'assurer la prestation de télésurveillance ce depuis cette date. Cette clause crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur les droits et obligations des parties au contrat.

Le contrat du 17 juillet 2001, unilatéralement pré rédigé par le professionnel, contient manifestement des clauses abusives au sens de la recommandation n° 97-01 de la commission des clauses abusives, que la société GRANVILLE MARINE LOISIRS est fondée à opposer à la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE.

En application des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation et de la jurisprudence y afférente, il y a lieu de constater que les articles 13 et 23 du contrat contiennent des clauses abusives et de dire qu'elles doivent être réputées non écrites.

Le contrat du 17 juillet 2001 devient donc un contrat à durée indéterminée et peut faire l'objet d'une résiliation à tout moment sans indemnité. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE COUTANCES

JUGEMENT DU 18 JUIN 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 2003/005267. Tribunal de Commerce des arrondissements d'Avranches, de Coutances et de Saint-Lô, séant en ladite ville de COUTANCES.

 

DEMANDEUR :

SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE, venant aux droits de la société STPE

dont le siège social est à [adresse], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de [ville] sous le numéro XX, représentée par son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, comparant par Maître DUMONT-FOUCAULT, Avocat au Barreau de COUTANCES, substituant Maître DARDANNE, elle-même substituant Maître NIZOU-LESAFFRE.

 

DÉFENDEUR :

SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS

dont le siège social est à [adresse], comparant par Maître JAGOU, Avocat au Barreau d'AVRANCHES.

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Roger TIXIER, Président de Chambre, Messieurs Christophe MAHE et Christian DUTERTRE, Juges, assistés de Maître Gw. LE MARCHAND, Greffier en Chef.

DÉBATS : À l’audience publique du 28 mai 2004.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PROCÉDURE :

Par acte d'huissier de Justice en date du 20 novembre 2003, le demandeur a fait donner assignation au défendeur d'avoir à comparaître le vendredi 19 décembre 2003 par-devant les Président et Juges composant le Tribunal de Commerce de COUTANCES.

L'affaire, évoquée à l'audience du 28 mai 2004, a été mise en délibéré à la date de ce jour.

 

PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR :

Par assignation en date du 20 novembre 2003, SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE demande au Tribunal de Commerce, vu les dispositions des articles 1134, 1153 et 1154 du Code Civil, de :

- La dire et juger recevable et fondée en l'ensemble de ses demandes,

- Constater que le contrat du 17 juillet 2001 a été résilié huit jours après l'envoi de la mise en demeure du 10 mars 2003,

- Condamner la SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS à lui payer la somme de 4.001,30 Euros en principal avec intérêts à compter du 10 mars 2003 et ordonner la capitalisation des intérêts échus,

- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- Condamner la société GRANVILLE MARINE LOISIRS à lui payer la somme de 1.100,00 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- Condamner la société GRANVILLE MARINE LOISIRS aux entiers dépens de l'instance.

SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE demande au Tribunal de lui adjuger le bénéfice de ses écritures et de rejeter les prétentions de la société GRANVILLE MARINE LOISIRS.

[minute page : 2]

SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS,

Vu l'article L. 132-1 du Code de la Consommation,

Vu la recommandation de la Commission des clauses abusives n° 97-01, conclut ainsi :

- Constater que les articles 13 et 23 du contrat du 17 juillet 2001 contiennent des clauses abusives et les réputer en tant que tel non écrites,

- Constater la résiliation du contrat à compter du  1er juillet 2002,

- Débouter en conséquence la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de toutes ses demandes,

- Condamner la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE à lui payer la somme de 1.200,00 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Condamner la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Le 17 juillet 2001, la société GRANVILLE MARINE LOISIRS a conclu avec la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE un contrat d'abonnement de télésurveillance avec option de location et de prestations sécuritaires.

Par courrier recommandé en date du 12 décembre 2001, la société GRANVILLE MARINE LOISIRS a résilié le contrat.

Le matériel de télésurveillance installé a été retiré par la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE le 3 septembre 2002.

Par courrier recommandé en date du 25 octobre 2002, la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a refusé à la société GRANVILLE MARINE LOISIRS la résiliation du contrat.

Par courrier recommandé en date du 10 mars 2003, la société GRANVILLE MARINE LOISIRS a été mise en demeure de régler la totalité des sommes dues jusqu'au terme du contrat.

Par courrier recommandé en date du 23 avril 2003, la société GRANVILLE MARINE LOISIRS a fait savoir à la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE qu'elle estimait que le contrat contenait des clauses abusives, et qu'elle n'entendait pas donner suite à la mise en demeure délivrée.

SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE a fait donner assignation à la société GRANVILLE MARINE LOISIRS d'avoir à comparaître devant ce Tribunal aux fins de voir constater la résiliation du contrat 8 jours après la mise en demeure du 10 mars 2003 et de voir condamner la société GRANVILLE MARINE LOISIRS à lui payer la somme de 4.001,30 Euros au titre du contrat du 7 juillet 2001, outre les intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2003.

 

Sur l'application des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation :

SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS invoque à son profit les dispositions du Code de la Consommation relatives aux clauses abusives.

SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE considère que la société GRANVILLE MARINE LOISIRS, société commerciale, ne peut bénéficier de la protection réservée par le Code de la Consommation au consommateur.

L'article L. 132-1 du Code de la Consommation dispose que dans les contrats entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. En conséquence de quoi, les clauses abusives sont réputées non écrites.

L'activité de la SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS est la réparation et la vente de matériel nautique. Elle n'est pas donc un professionnel de la surveillance électronique.

La prestation de service fournie par la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE échappe ainsi à la compétence professionnelle de la SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS.

SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS doit dès lors être considérée comme un consommateur à l'égard de la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE.

L'acte doit être soumis aux règles d'ordre public de l'article L. 132-1 et suivants du Code de la Consommation.

[minute page : 3]

Sur la qualification des clauses :

La recommandation n°97-01 du 24 avril 1997 de la Commission des clauses abusives contient notamment les observations suivantes

« Recommande ...

13 - que soient éliminés des contrats de télésurveillance proposés aux consommateurs les clauses ayant pour objet et pour effet :

3 - d'imposer une durée initiale du contrat supérieure à un an, ou, dans la limite de cette durée, d'exclure toute rupture anticipée même pour motifs légitimes...

17 - de mettre une pénalité contractuelle à la charge du consommateur qui manquerait à ses obligations sans prévoir une pénalité comparable à l'encontre du télésurveilleur qui n'exécuterait pas les siennes.

18 - d'imposer au consommateur, pour toute rupture anticipée de sa part, le paiement d'une indemnité équivalente au solde de la période contractuelle en cours ».

L'article 13 du contrat du 17 juillet 2001 prévoit :

13.1 Le présent contrat est conclu pour une durée de 48 mois, irrévocable et indivisible,

13.2 A défaut de notification, 3 mois avant son terme, d'une résiliation signifiée par STPE ou le client par lettre recommandée avec avis de réception, il se poursuivra par tacite reconduction pour des périodes successives de 12 mois, sauf résiliation par l'une ou l'autre des parties signifiée dans les formes et délai précités ».

L'article 23 du contrat du 17 juillet 2001 prévoit, concernant la résiliation du contrat, que celui-ci pourra être résilié par STPE, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée sans effet. En conséquence de cette résiliation, l'article 23 prévoit au paragraphe 23.2-2 que :

« Outre la restitution du matériel, le client devra verser à STPE une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée des indemnités et intérêts de retard définis à l'article 11 du présent contrat, ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine, majorée d'une clause pénale de 10 % (Sans préjudice de tous dommages et intérêts qu'il pourrait devoir). Il devra également rembourser au bailleur les frais éventuellement engagés par lui à l'occasion de la résiliation et de la reprise du matériel. Les avis de prélèvement présentés et réglés après la résiliation du contrat seront affectés aux sommes dues et n'emporteront pas novation de la résiliation du présent contrat ».

Le présent contrat est conclu pour une durée de 48 mois irrévocable et indivisible.

En n'envisageant aucune possibilité de rupture anticipée par la société GRANVILLE MARINE LOISIRS, même de manière justifiée, les stipulations dudit contrat, en son article 13, lui sont particulièrement défavorables.

Cette clause institue un net déséquilibre entre les parties quant à leur possibilité de dénoncer le contrat. En l'espèce, la faculté de dénoncer le contrat est refusée au consommateur.

La clause de l'article 23 dudit contrat, stipulée dans l'intérêt exclusif de la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, qui impose le paiement immédiat de la somme des loyers à payer jusqu'au terme du contrat, majorée d'une clause pénale de 10 %, est également abusive.

Ce type de clause est abusif non seulement parce toute résiliation anticipée du contrat de télésurveillance n'est pas nécessairement fautive, mais aussi parce qu'il oblige le non professionnel ou consommateur à continuer à acquitter une somme d'argent correspondant à une prestation qui ne lui est plus fournie. En l'espèce, SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE ayant repris possession de son matériel le 3 septembre 2002, n'est plus en mesure d'assurer la prestation de télésurveillance ce depuis cette date. Cette clause crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur les droits et obligations des parties au contrat.

[minute page 4] Le contrat du 17 juillet 2001, unilatéralement pré rédigé par le professionnel, contient manifestement des clauses abusives au sens de la recommandation n° 97-01 de la commission des clauses abusives, que la société GRANVILLE MARINE LOISIRS est fondée à opposer à la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE.

En application des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation et de la jurisprudence y afférente, il y a lieu de constater que les articles 13 et 23 du contrat contiennent des clauses abusives et de dire qu'elles doivent être réputées non écrites.

Le contrat du 17 juillet 2001 devient donc un contrat à durée indéterminée et peut faire l'objet d'une résiliation à tout moment sans indemnité.

SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS a résilié son contrat de télésurveillance par lettre recommandée avec avis de réception du 12 décembre 2001, mais a continué à régler les loyers pendant 6 mois jusqu'en juin 2002.

Dans ces conditions, il y a lieu de constater la résiliation du contrat à compter du 1er juillet 2002, date à laquelle la société GRANVILLE MARINE LOISIRS a cessé ses paiements, après une résiliation préalable, et de débouter purement et simplement la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de toutes ses demandes.

SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS est bien fondée à solliciter la condamnation de SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE au paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile que le Tribunal apprécie à la somme de 1.000,00 Euros. SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE doit, par conséquent, être condamnée au paiement de cette indemnité à SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS.

Les entiers dépens de l'instance doivent être supportés par SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE qui succombe.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant contradictoirement et en premier ressort,

Vu l'article L. 132-1 du Code de la Consommation,

Vu la recommandation de la commission des clauses abusives n° 97-01 du 24 avril 1997,

Constate que les articles 13 et 23 du contrat du 17 juillet 2001 contiennent des clauses abusives, et les répute non écrites.

Constate la résiliation du contrat à compter du 1er juillet 2002.

Déboute SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE de ses demandes, fins et conclusions en tant que dirigées à l'encontre de la société GRANVILLE MARINE LOISIRS.

Condamne SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE à payer à SARL GRANVILLE MARINE LOISIRS la somme de 1.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne SA ADT TÉLÉSURVEILLANCE au paiement des entiers dépens de la présente instance dont les frais de greffe liquidés à la somme de 69,69 Euros TTC.

Prononcé à l'audience publique du Tribunal de Commerce de COUTANCES le vendredi dix huit juin deux mille quatre par : Monsieur Roger TIXIER, Président.

 

 

 

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