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CA DOUAI (1re ch. 1re sect.), 12 avril 2007

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (1re ch. 1re sect.), 12 avril 2007
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 1re ch.
Demande : 06/01110
Date : 12/04/2007
Nature de la décision : Réformation
Décision antérieure : TI BÉTHUNE, 24 novembre 2005
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2257

CA DOUAI (1re ch. 1re sect.), 12 avril 2007 : RG n° 06/01110

 

Extrait : « Il ressort de l'ensemble des éléments de la cause que le contrat de location de matériel de téléphonie souscrit par Monsieur X. le 27 décembre 2002 a un rapport direct avec l'activité professionnelle de pharmacien exercé par celui-ci. En effet, le matériel était destiné à équiper la pharmacie exploitée par Monsieur X. et était nécessaire à son activité professionnelle dans le cadre des commandes à passer, des relations avec les médecins auxquels des précisions doivent fréquemment être demandées, des relations avec les clients relativement à l'achat de médicaments ou à leur utilisation.... Ainsi, l'usage de matériel de téléphonie est indispensable à l'exercice de la profession même de pharmacien et le contrat avait un rapport direct avec cette activité.

Dans ces conditions, il ne peut être reproché à la société GRENKE LOCATION de ne pas avoir respecté les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-29 du Code de la consommation qui ne sont pas applicables, en l'espèce, en application de l'article L. 121-22 du même code.

De même, l'article L. 132-1 du Code de la consommation, relatif à la protection des consommateurs contre les clauses abusives ne peut recevoir application dans le cadre du présent litige, le contrat litigieux ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle de Monsieur X., comme relevé ci-dessus. »

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 12 AVRIL 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 06/01110. Jugement (n° 05/430) rendu le 24 novembre 2005 par le Tribunal d'Instance de BETHUNE.

 

APPELANTE :

Société GRENKE LOCATION

ayant son siège social [adresse], représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX, représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués associés à la Cour, ayant pour conseil la SCP CAPELLE & MICHEL, avocats associés au barreau de BETHUNE.

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués associés à la Cour, ayant pour conseil la SCP Patrick et Antoine LE GENTIL, avocats au barreau d'ARRAS.

 

DÉBATS : Audience publique du 5 mars 2007, tenue par Madame ROUSSEL magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC).

[minute Jurica page 2] Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame HERMANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame ROUSSEL, Président de chambre, Madame GUIEU, Conseiller, Madame COURTEILLE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 avril 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame ROUSSEL, Président et Madame HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 6 FÉVRIER 2007

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par jugement rendu le 24 novembre 2005 le tribunal d'instance de Béthune a :

- déclaré nul le contrat de location de matériel de téléphonie en date du 27 décembre 2002,

- débouté, en conséquence, la société GRENKE LOCATION de sa demande en paiement de la somme de 6.235,01 euros,

- débouté Monsieur X. de sa demande de remboursement des sommes payées à la société GRENKE LOCATION,

- donné acte à Monsieur X. de ce qu'il s'engage à restituer le matériel de téléphonie et l'a condamné, en tant que de besoin, à restitution,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société GRENKE LOCATION à payer à Monsieur X. la somme de 250 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société GRENKE LOCATION aux dépens.

Cette dernière a relevé appel de cette décision.

Il est fait référence pour l'exposé des moyens et prétentions des parties devant la Cour à leurs dernières conclusions déposées le :

- 20 octobre 2006 pour Monsieur X.,

- 5 décembre 2005 pour la société GRENKE LOCATION.

 

Rappel des données du litige

[minute Jurica page 3] Dans le cadre de l'exercice de son activité de pharmacien, Monsieur X. a souscrit auprès de la société GRENKE LOCATION, le 27 décembre 2002, un contrat de location n° 055-XX de matériel de téléphonie dont le fournisseur était la société PROTECNICOM FRANCE.

Monsieur X. a pris possession du matériel loué le 19 décembre 2002.

La société PROTECNICOM FRANCE a été placée en liquidation judiciaire le 1er juillet 2003.

Se plaignant de la défectuosité du matériel et de la disparition de la maintenance, Monsieur X. a, par courrier du 10 janvier 2004, notifié à la société GRENKE LOCATION sa volonté de résilier le contrat de location et n'a plus honoré le paiement des loyers.

Par courrier du 14 janvier 2004, la société GRENKE LOCATION a précisé à Monsieur X. que son engagement consistait exclusivement en l'acquisition et la mise à disposition du matériel, que les dysfonctionnements éventuels du matériel loué ne libéraient pas le locataire de son obligation de payer le loyer, que la liquidation judiciaire d'un fournisseur ne pouvait remettre en cause la validité du contrat de location et qu'en cas de résiliation anticipée il lui était dû contractuellement une indemnité égale à tous les loyers à échoir soit 6.235,01 euros.

Par courrier du 12 août 2004, elle a notifié à Monsieur X. la résiliation du contrat pour impayés en application de l'article 13 des conditions générales.

Par exploit en date du 21 avril 2005, la société GRENKE LOCATION a fait assigner Monsieur X. devant le tribunal d'instance de Béthune afin d'obtenir paiement de la somme principale de 6.235,01 euros, outre intérêts et restitution du matériel loué.

La décision déférée a été rendue dans ces conditions retenant que les dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation, relatives au démarchage à domicile, n'avaient pas été respectées, alors que le matériel loué n'était pas en rapport direct avec l'activité commerciale ou scientifique de Monsieur X., et que le contrat du 27 décembre 2002 devait donc être annulé.

A l'appui de son appel, la société GRENKE LOCATION fait essentiellement valoir que :

- la location de matériel de téléphonie a bien un rapport direct avec l'activité de pharmacien de Monsieur X. et le matériel était utilisé à des fins professionnelles,

- l'article 1719 du Code civil n'est pas d'ordre public et les parties ont valablement convenu d'une clause exonérant le bailleur de son obligation d'entretien,

- la clause litigieuse est claire et n'est pas exprimée en termes généraux,

- le prétendu caractère abusif de la clause ne peut être retenu dès lors que Monsieur X. n'est ni un non professionnel, ni un consommateur et que l'article L. 132-1 du Code de la consommation n'est donc pas applicable en l'espèce.

Monsieur X. conclut à la confirmation du jugement déféré et subsidiairement à voir réduire à 1 euro, en application des articles 1152 et 1226 du Code civil, les somme dues à la société GRENKE LOCATION en exposant que :

- le contrat du 27 décembre 2002 contient en son article 1er une clause de non garantie, immunisant le bailleur de toute responsabilité en cas de défaillance du matériel loué,

- cette clause est contraire à l'article 1719 du Code civil et illicite,

- [minute Jurica page 4] si la société GRENKE LOCATION a délégué ses droits vis à vis du fournisseur, elle reste tenue de ses obligations de délivrance et d'entretien,

- la clause invoquée aboutirait à une exonération totale du bailleur et doit être déclarée nulle,

- cette clause s'avère abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation,

- il existe une indivisibilité conventionnelle dans les contrats de crédit-bail et de location financière qui ne peut être écartée contractuellement,

- le contrat peut également être annulé sur le fondement de l'article L. 121-23 du Code de la consommation,

- les dispositions de l'article L. 121-23, relatives au démarchage à domicile, n'ont, de plus, pas été respectées,

- il n'a pas de compétence spécifique en matière de téléphonie et n'est, en l'espèce, qu'un simple consommateur, en droit d'invoquer les dispositions protectrices sur le démarchage,

- subsidiairement, l'article 15 du contrat s'analyse en une clause pénale et l'indemnisation doit être réduite à 1 euro.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE

Il ressort de l'ensemble des éléments de la cause que le contrat de location de matériel de téléphonie souscrit par Monsieur X. le 27 décembre 2002 a un rapport direct avec l'activité professionnelle de pharmacien exercé par celui-ci.

En effet, le matériel était destiné à équiper la pharmacie exploitée par Monsieur X. et était nécessaire à son activité professionnelle dans le cadre des commandes à passer, des relations avec les médecins auxquels des précisions doivent fréquemment être demandées, des relations avec les clients relativement à l'achat de médicaments ou à leur utilisation....

Ainsi, l'usage de matériel de téléphonie est indispensable à l'exercice de la profession même de pharmacien et le contrat avait un rapport direct avec cette activité.

Dans ces conditions, il ne peut être reproché à la société GRENKE LOCATION de ne pas avoir respecté les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-29 du Code de la consommation qui ne sont pas applicables, en l'espèce, en application de l'article L. 121-22 du même code.

De même, l'article L. 132-1 du Code de la consommation, relatif à la protection des consommateurs contre les clauses abusives ne peut recevoir application dans le cadre du présent litige, le contrat litigieux ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle de Monsieur X., comme relevé ci-dessus.

Par ailleurs, la clause exonérant le bailleur de son obligation d'entretien est claire et licite, les parties pouvant contractuellement déroger aux dispositions de l'article 1719 du code civil qui ne sont pas d'ordre public.

Ainsi, le contrat qui à force de loi entre les parties doit-il recevoir application.

Quant à l'indivisibilité invoquée par Monsieur X., force est de constater que Monsieur X. ne précise pas les contrats qui seraient concernés par ce principe et qu'il ne produit aucun autre contrat que le contrat de location du 27 décembre 2002.

[minute Jurica page 5] Dans ces conditions, il convient de débouter Monsieur X. de ses demandes tendant à l'annulation du contrat, à l'annulation de clauses du contrat au regard de leur caractère abusif et à la résiliation du contrat du 27 décembre 2002.

La décision déférée doit être réformée en ce sens.

Le contrat a donc été valablement résilié par la société GRENKE LOCATION par courrier du 12 août 2004 pour impayés.

En ce qui concerne la demande subsidiaire formée par Monsieur X., il apparaît qu'en effet, l'article 15 du contrat, qui stipule qu'en cas de résiliation anticipée le bailleur a droit à une indemnité égale à tous les loyers échus jusqu'au terme initial du contrat, s'analyse en une clause pénale dans la mesure où elle a pour objet d'évaluer forfaitairement et d'avance l'indemnité due par le locataire, notamment en cas de résiliation anticipée du contrat en raison de l'inexécution par le locataire de son obligation de payer les loyers pendant au moins un trimestre.

La société GRENKE LOCATION ne fait d'ailleurs valoir aucun moyen de ce chef.

Eu égard à la durée du contrat (72 mois soit 24 trimestrialités de 328,15 euros TTC) à son exécution jusqu'en mars 2004 (5 trimestrialités), à la nature et la consistance du matériel loué, il apparaît que le montant de la clause pénale s'avère manifestement excessif au regard du préjudice subi par le bailleur, à qui, par ailleurs, le matériel a été restitué par Monsieur X. le 7 janvier 2006.

Il convient, dans ces conditions, de limiter à 2.000 euros l'indemnisation.

L'équité ne commande pas de faire application, en l'espèce, de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

Il convient de laisser à chacune des parties qui succombe partiellement dans ses prétentions la charge des dépens de première instance et d'appel par elle engagés.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Réforme le jugement déféré,

Déboute Monsieur X. de ses demandes tendant à l'annulation ou à la résiliation aux torts de la société GRENKE LOCATION du contrat de location du 27 décembre 2002,

Constate que le contrat a valablement été résilié par la société GRENKE LOCATION le 12 août 2004 pour défaut de paiement,

Condamne Monsieur X. à payer à la société GRENKE LOCATION la somme de 2.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 août 2004,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Donne acte à Monsieur X. de ce qu'il a restitué le matériel loué,

Dit que chacune des parties supportera la charge des dépens de première instance et d'appel par elle engagés.

Le Greffier,               Le Président,

N. HERMANT          B. ROUSSEL

 

 

Est cité par :