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CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 4 janvier 2010

Nature : Décision
Titre : CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 4 janvier 2010
Pays : France
Juridiction : Reims (CA), ch. civ. sect. 1
Demande : 08/03444
Date : 4/01/2010
Nature de la décision : Confirmation
Date de la demande : 30/12/2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2301

CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 4 janvier 2010 : RG n° 08/03444

 

Extrait : « Que subsidiairement, elle se prévaut de l'article L. 132-1 du Code précité relatif aux clauses abusives, considérant en l'espèce que doit être tenue pour telle celle figurant au contrat prévoyant une durée de location minimale irrévocable, de nature à déséquilibrer la relation au seul bénéfice du professionnel ; Attendu sur ce second point qu'il doit être observé qu'à supposer la dite clause effectivement abusive, la seule sanction serait sa non application, sans incidence sur l'obligation de paiement des mensualités pesant sur l’EARL X. ;

Attendu surtout que l'article L. 121-22 du Code de la consommation dispose qu'est soumis aux dispositions qui suivent quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage à domicile d'une personne physique ; que ne sont pas concernées les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre, notamment, d'une exploitation agricole ; Qu'en l'espèce, le contrat a été souscrit par une personne morale, l’EARL X., et pour les besoins de l'exploitation en ce sens qu'un système de télésurveillance est supposé améliorer les conditions d'exploitation en lui assurant un niveau supérieur de sécurité en l'absence de l'exploitant sur le site ; Qu'il s'ensuit que les dispositions précitées ne sont pas applicables à l'espèce, pas plus que l'article L. 132-1, qui ne concerne que les personnes physiques ou les personnes morales hors le champ de l'activité professionnelle auxquelles elles sont consacrées »

 

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 4 JANVIER 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 08/03444. Appel d'un jugement rendu le 25 novembre 2008 par le Tribunal de Commerce de REIMS.

 

APPELANTE :

EARL X.

[adresse] COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET - CAULIER-RICHARD avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SELARL B & M Associés, avocats au barreau de REIMS.

 

INTIMÉE :

SAS SOCIETE LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES ET MATERIELS

[adresse], Comparant, concluant par Maître Estelle PIERANGELI, avoués à la Cour, et ayant pour conseil la SCP JACQUEMET, avocats au barreau de REIMS.

 

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame Anne HUSSENET, Conseiller, ont entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposés. Ils en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : [minute Jurica page 2] Monsieur MAUNAND, Président de Chambre, Madame HUSSENET, Conseiller, Madame LEGRAND, Conseiller

GREFFIER : Madame Maryline THOMAS, Greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS : Audience publique du 23 novembre 2009, où l'affaire a été mise en délibéré au 4 janvier 2010.

ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 4 janvier 2010 et signé par Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame THOMAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 3 décembre 2004, l'EARL X. a souscrit un contrat de location de matériel de télésurveillance avec la société SYSTEL, distributeur, la société LOCAM étant désignée comme bailleresse.

Le matériel a été installé le 14 décembre suivant, mais Monsieur X., insatisfait du résultat, a cessé de régler les loyers en juillet 2006 et l'a restitué à la société SYSTEL début octobre.

Suite à une première lettre recommandée de la société LOCAM portant résiliation du contrat en vertu de la clause résolutoire de plein droit pour défaut de paiement, et sans réaction de Monsieur X., la société LOCAM a donné assignation à l’EARL X. le 29 mai 2007, à l'effet de la voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au paiement de la somme de 2 617,40 € outre les intérêts de droit à compter du 5 octobre 2006, de voir dire et juger que l’EARL défenderesse devra restituer à la société LOCAM la matériel objet du contrat, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, et de la voir condamner à lui verser en outre une indemnité de procédure de 700 € ainsi qu'aux dépens.

L'EARL X. s'opposait aux prétentions adverses et demandait au tribunal de :

- dire qu'elle n'avait pas la qualité de professionnel dans le contrat la liant à la société SYSTEL, que par suite les dispositions du Code de la consommation lui étaient applicables, que le cocontractant avait perçu des sommes avant l'expiration du délai de 7 jours et que le contrat ne comportait pas de bordereau de rétractation, que la société LOCAM devait en conséquence rembourser les sommes perçues soit 1 723,05 €,

- à défaut, dire et juger non écrite la clause abusive imposant une durée initiale de contrat supérieure à un an ou excluant toute rupture abusive, de dire injustifiée la créance de la société LOCAM, de dire que le contrat de louage de matériel était l'accessoire du contrat principal de télésurveillance lui-même sans objet, que la société LOCAM n'avait pas intérêt à agir et de la débouter de ses demandes, de la condamner au paiement des sommes perçues depuis le début du contrat soit 1 723,05 € outre 1 000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux dépens.

Par jugement rendu le 25 novembre 2008, le tribunal a condamné l’EARL X. à payer à la société LOCAM SAS la somme de 2.389,45 € outre les intérêts de droit à compter du 29 mai 2007, date de l'assignation, rejeté les autres demandes, fins et conclusions des parties, dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, et condamné la défenderesse aux dépens.

[minute Jurica page 3] L'EARL X. a relevé appel de cette décision par déclaration du 30 décembre 2008.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 2 avril 2009, auxquelles il sera renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, par application de l'article 455 du Code de procédure civile, elle poursuit l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la Cour, statuant à nouveau, de :

- dire et juger que la société LOCAM n'a pas d'intérêt à agir de sorte qu'elle est irrecevable en ses demandes,

- dire et juger que l’EARL X. n'a pas la qualité de professionnel dans le contrat qui le lie à la société SYSTEL et que les dispositions du Code de la consommation sont applicables,

- dire et juger que le cocontractant a perçu des sommes avant l'expiration du délai légal de 7 jours après la signature du contrat, lequel ne comporte par ailleurs aucun bordereau de rétractation,

- dire et juger que le contrat est nul et condamner la société LOCAM à rembourser les sommes perçues depuis le début du contrat soit 1.723,05 €,

A défaut,

- dire et juger non écrite la clause abusive qui impose une durée initiale du contrat supérieure à un an ou, dans la limite de cette durée, d'exclure toute rupture anticipée même pour motif légitime,

- dire et juger injustifiée la créance avancée par la société LOCAM alors qu'il n'y a pas eu de prestation de télésurveillance en retour du versement d'une somme correspondant au montant de la prestation,

- dire et juger que le contrat de louage de matériel est bien l'accessoire au contrat principal de télésurveillance et par conséquent, dire et juger que la prestation de télésurveillance est sans objet et que le louage de chose est également sans objet,

- dire et juger qu'il n'y a pas de créance exigible,

- condamner la société LOCAM à rembourser les sommes perçues depuis le début du contrat soit 1.723,05 €,

A titre infiniment subsidiaire, débouter la société LOCAM de ses demandes,

En toute hypothèse,

- condamner la société LOCAM à verser à l’EARL X. la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct pour la SCP DELVINCOURT JACQUEMET CAULIER-RICHARD, avoués.

Par dernières écritures notifiées le 28 août 2009, auxquelles il conviendra de même de se reporter, la SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATERIEL - conclut à la confirmation du jugement dont appel et demande à la Cour, y ajoutant, de condamner l 'EARL X. au paiement de la somme de 237,94 € au titre de la clause pénale, outre 3.000 € du chef des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens, avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître Estelle PIERANGELI, avoué.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Sur la recevabilité de la demande formée par la société LOCAM :

[minute Jurica page 4] Attendu que l’EARL X. soutient en premier lieu que la société LOCAM n'aurait pas d'intérêt à agir, n'étant pas partie au contrat qu'il a conclu avec la seule société SYSTEL;

Que toutefois, la convention régularisée le 3 décembre 2004 qui fait apparaître clairement la société SYSTEL en qualité de distributeur, comporte également des conditions générales du contrat de location souscrit dans le même temps, lesquelles stipulent dans leur article 1er que 'le locataire a librement choisi le bien, objet du présent contrat, ainsi que son fournisseur qui est en l'occurrence dans ce cas le distributeur. Il en a librement débattu et arrêté avec ce dernier les spécifications techniques, les conditions et délais de livraison. Le locataire a demandé par la suite au loueur de mettre à sa disposition ce bien par le présent contrat';que l'identification des sociétés susceptibles d'être retenues en qualité de loueur, parmi lesquelles la LOCAM, figure ensuite dans l'article 14.4 ;

Qu'il s'ensuit qu'un seul et même écrit a été signé, portant à la fois sur un contrat de location et sur un contrat de fourniture de matériel de télésurveillance ;

Que les contrats doivent s'appliquer de bonne foi, et qu'en l'espèce, il est constant que l’EARL X. a effectué le règlement des échéances mensuelles mises à sa charge auprès de la société LOCAM pendant un an et demi, sans contester la qualité de cocontractant de cette dernière ;

Attendu que c'est donc vainement qu'elle conteste aujourd'hui la réalité du lien existant entre elles, et, partant, l'intérêt à agir de la société LOCAM, alors même qu'il lui demande la restitution des sommes qu'elle a perçues motif pris de l'absence de prestation de télésurveillance ;

 

Sur le fond :

Sur la régularité du contrat :

Que l'appelante excipe ensuite des dispositions protectrices contenues dans les articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation interdisant notamment la perception par le vendeur professionnel de toute somme résultant du contrat avant l'expiration d'un délai de sept jours, et lui faisant obligation d'assortir son offre d'un bordereau de rétractation ; qu'il fait valoir que faute pour la société LOCAM d'avoir satisfait à ces injonctions, le contrat litigieux serait nul et de nul effet, de sorte que non seulement elle ne serait elle-même tenue à aucun paiement mais le cocontractant devrait lui rembourser les fonds perçus avant rupture du lien contractuel ;

Que subsidiairement, elle se prévaut de l'article L. 132-1 du Code précité relatif aux clauses abusives, considérant en l'espèce que doit être tenue pour telle celle figurant au contrat prévoyant une durée de location minimale irrévocable, de nature à déséquilibrer la relation au seul bénéfice du professionnel ;

Attendu sur ce second point qu'il doit être observé qu'à supposer la dite clause effectivement abusive, la seule sanction serait sa non application, sans incidence sur l'obligation de paiement des mensualités pesant sur l’EARL X. ;

Attendu surtout que l'article L. 121-22 du Code de la consommation dispose qu'est soumis aux dispositions qui suivent quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage à domicile d'une personne physique ; que ne sont pas concernées les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre, notamment, d'une exploitation agricole ;

Qu'en l'espèce, le contrat a été souscrit par une personne morale, l’EARL X., et pour les besoins de l'exploitation en ce sens qu'un système de télésurveillance est supposé améliorer les conditions d'exploitation en lui assurant un niveau supérieur de sécurité en l'absence de l'exploitant sur le site ;

Qu'il s'ensuit que les dispositions précitées ne sont pas applicables à l'espèce, pas plus que l'article L. 132-1, qui ne concerne que les personnes physiques ou les personnes morales hors le champ de l'activité [minute Jurica page 5] professionnelle auxquelles elles sont consacrées ;

Attendu que la régularité du contrat litigieux n'est par suite pas contestable ;

sur l'application des articles L. 121-23 à L. 121-26, et L. 132-1 du Code de la consommation [N.B conforme à la minute Jurica] ;

 

Sur la résiliation et les sommes dues par l’EARL X. :

Attendu que l'article 10-1 du contrat prévoit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance et passé huit jours après mise en demeure, la totalité des sommes deviendra exigible et la SAS LOCAM ou son subrogé pourra poursuivre le recouvrement ;

Attendu que le matériel loué a bien été livré le 14 décembre 2004 ainsi qu'en atteste le procès-verbal établi à cette occasion ;

Que la société LOCAM a dès lors rempli les obligations lui incombant, sans que puisse lui être reprochée l'éventuelle faute du fournisseur quant à la qualité de la prestation de télésurveillance, à laquelle elle est étrangère ;

Qu'il résulte ensuite des pièces produites que l’EARL X. est devenue débitrice de trois loyers échus impayés avant déchéance du terme, 26 loyers restant à échoir ;

Que faute de paiement après la mise en demeure qui lui a été régulièrement délivrée, la susnommée se trouve bien redevable de la somme principale de 2 389,45 €, sans pouvoir réclamer de son côté la restitution des 19 échéances réglées ;

Que la convention prévoyait par ailleurs une clause pénale, dont le juge peut diminuer le montant en application de l'article 1152 du Code civil s'il la considère excessive et disproportionnée par rapport à la dette principale et au préjudice subi ;qu'en l'espèce, la somme de 237,94 € réclamée de ce chef n'apparaît pas excessive de sorte que rien ne justifie qu'elle soit écartée comme en première instance, le jugement entrepris devant être réformé sur ce point ;

 

Sur les frais et dépens :

Attendu que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a mis à la charge de l’EARL X. les dépens de première instance ;

Que l’EARL X., qui succombe en cause d'appel, sera de nouveau tenu d'en supporter les dépens, et versera à la société LOCAM la somme de 1.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile, ne pouvant prétendre elle-même à une telle indemnité ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 25 novembre 2008 par le tribunal de commerce de REIMS ;

Y ajoutant,

Condamne l’EARL X. à payer à la SAS SOCIETE LOCAM la somme de 237,94 € au titre de la clause pénale figurant au contrat ;

Condamne l’EARL X. à verser à la société LOCAM la somme de 1 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile et rejette sa propre demande du même chef ;

[minute Jurica page 6] La condamne aux dépens d'appel et admet Maître Estelle PIERANGELI, avoué, au bénéfice de l'article 699 du Code précité.

LE GREFFIER            LE PRÉSIDENT

 

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