JUR. PROXIM. TULLE, 5 janvier 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 3715
JUR. PROXIM. TULLE, 5 janvier 2009 : RG n° 91-08-000093 ; jugt n° 2009/14
(sur appel CA Limoges (ch. civ.), 21 janvier 2010 : RG n° 09/00141)
Extraits : 1/ « Mme X. ne saurait être considérée comme une professionnelle au sens de l'article L. 121-22 2° du Code de la Consommation, en ce qu'elle n'exerce aucune profession et n'est inscrite, ni à la MSA, ni au Registre du Commerce, ni à la Chambre des Métiers, et que de surcroît les recettes qu'elle tire - voire entendait tirer en mai 2008 - de cette activité, en tant qu'elles sont inférieures à 23.000 € par an, sont imposées par l'administration fiscale dans la catégorie des BIC non professionnels, étant en outre relevé que la preuve de la qualité de professionnelle de Mme X., qui incombe à la SARL TOURISMORAMA, n'est pas rapportée par cette dernière. En conséquence de quoi Mme X. bénéficie des dispositions protectrices du Code de la Consommation en ses articles L. 121-21 à L. 121-33 sur le démarchage.
La Juridiction de Proximité rappelle incidemment qu'il convient de ne pas assimiler la qualité de professionnel, qui implique la notion de compétence technique et d'égalité des armes entre le démarcheur et le client, avec le fait de percevoir des revenus locatifs, ceux-ci fussent-ils tirés de locations meublées saisonnières ».
2/ « En conséquence, le contrat litigieux est nul ainsi que la facture afférente, ledit bon de commande étant au demeurant nul de plein droit en ce qu'il ne répond pas aux exigences des articles L. 121-23 7° et L. 121-24 du Code de la Consommation qui sont d'ordre public. »
JURIDICTION DE PROXIMITÉ DE TULLE
JUGEMENT DU 5 JANVIER 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 91-08-000093. Jugement n° 2009/14.
A l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 5 janvier 2009 ; Sous la Présidence de Cécile PAILLER, Juge de Proximité, assistée de Jacqueline TAFFARELLO, Greffier ; Après débats à l'audience du 8 décembre 2008, le jugement suivant a été rendu ;
ENTRE :
DEMANDERESSE :
SARL TOURISMORAMA
Gérant M. L. [adresse], représentée par Mme L.
ET :
DÉFENDERESSE :
Madame X.
[adresse], représentée par Maître VAL Dominique, avocat au Barreau de Tulle
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par déclaration reçue au greffe le 17 juillet 2008, la SARL TOURISMORAMA a formé une requête contre Mme X. devant la Juridiction de Proximité de Tulle afin d'obtenir sa condamnation au paiement d'une facture de 281,06 € TTC assortie des intérêts de retard, outre 500 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, outre celle de 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Au soutien de ses demandes, la SARL TOURISMORAMA expose :
Qu'en date du 6 mai 2008, elle a signé avec Mme X. un bon de commande pour la parution de ses chambres d'hôte sur son guide touristique en ligne www.tourismorama.com ;
Que cependant, Mme X. n'a pas réglé la facture de réalisation et d'abonnement annuel n° XX du 9 mai 2008 pour un montant TTC de 281,06 €, malgré une lettre recommandée en date du 23 mai 2008 ;
Que la cliente avait cependant demandé sur la fiche technique que sa page internet soit réalisée au plus vite ; que, vu l'urgence, le travail a été réalisé immédiatement et terminé le lendemain 7 mai au matin ;
Qu'elle a téléphoné le 7 mai en disant qu'elle voulait annuler ce contrat, et que sa lettre RAR d'annulation a été reçue le 9 mai ;
Que cependant cette annulation est impossible lorsque la prestation a commencé à s'exécuter avec l'accord du consommateur avant la fin du délai de rétractation, et que de plus le Code de la Consommation ne joue pas dans les relations entre professionnels.
Mme X. conclut au débouté de la SARL TOURISMORAMA et sollicite reconventionnellement la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts, outre 600 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre, à l'audience, le prononcé de la nullité du contrat. Elle expose :
Qu'elle dispose de deux chambres d'hôtes dans sa maison sise à [ville S.] ; que le représentant de la SARL TOURISMORAMA, qui l'a démarchée à domicile, lui a expressément indiqué qu'elle pouvait immédiatement signer le bon de commande, même si elle souhaitait prendre l'avis de son mari en soirée ; qu'elle n'aurait qu'à le rappeler en cas de difficulté ;
Que dès le lendemain 7 mai à 8 h 36 du matin, elle a téléphoné à la SARL TOURISMORAMA pour les informer qu'elle n'entendait pas donner suite à ce bon de commande ; qu'elle a confirmé cette annulation par lettre recommandée du jour même ;
Qu'elle bénéficie des dispositions protectrices du Code de la Consommation, d'abord du fait qu'au mois de mai elle n'avait pas encore commencé l'exploitation de ses chambres d'hôtes, et qu'elle n'avait donc aucunement la qualité de professionnel ; ensuite du fait qu'elle est retraitée et n'est inscrite, ni à la chambre des métiers, ni au registre du commerce, ni à la MSA ; que de plus les revenus tirés de l'activité de chambres d'hôtes ne sont pas des revenus professionnels au sens fiscal du terme ;
Que la SARL TOURISMORAMA a eu envers elle un comportement inacceptable, et par écrit, générateur d'un préjudice moral à son encontre.
[minute page 3]
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DU JUGEMENT :
I. Sur la qualité de professionnel :
Mme X. ne saurait être considérée comme une professionnelle au sens de l'article L. 121-22 2° du Code de la Consommation, en ce qu'elle n'exerce aucune profession et n'est inscrite, ni à la MSA, ni au Registre du Commerce, ni à la Chambre des Métiers, et que de surcroît les recettes qu'elle tire - voire entendait tirer en mai 2008 - de cette activité, en tant qu'elles sont inférieures à 23.000 € par an, sont imposées par l'administration fiscale dans la catégorie des BIC non professionnels, étant en outre relevé que la preuve de la qualité de professionnelle de Mme X., qui incombe à la SARL TOURISMORAMA, n'est pas rapportée par cette dernière.
En conséquence de quoi Mme X. bénéficie des dispositions protectrices du Code de la Consommation en ses articles L. 121-21 à L. 121-33 sur le démarchage.
La Juridiction de Proximité rappelle incidemment qu'il convient de ne pas assimiler la qualité de professionnel, qui implique la notion de compétence technique et d'égalité des armes entre le démarcheur et le client, avec le fait de percevoir des revenus locatifs, ceux-ci fussent-ils tirés de locations meublées saisonnières.
II. Sur le délai de rétractation :
Mme X. rapporte la preuve qu'elle a annulé son engagement du 6 mai 2008 par lettre recommandée postée le lendemain 7 mai et après un appel téléphonique au siège de la SARL TOURISMORAMA ([n° de téléphone]) à 8 h 36 du matin.
Elle a ainsi parfaitement respecté les formes légales requises pour se rétracter, aucun formulaire n'étant joint au contrat litigieux, étant en outre relevé qu'elle a usé de cette faculté de renonciation dès le premier jour du délai de sept jours qui lui était imparti.
Par ailleurs, la SARL TOURISMORAMA affirme mais ne démontre pas qu'elle avait commencé l'exécution de sa prestation dès le 7 mai, et seule sa lettre non contestée du 9 mai, soit deux jours après l'exercice de la faculté de rétractation par la cliente, rapporte la preuve de l'exécution de cette prestation de service.
En conséquence, le contrat litigieux est nul ainsi que la facture afférente, ledit bon de commande étant au demeurant nul de plein droit en ce qu'il ne répond pas aux exigences des articles L. 121-23 7° et L. 121-24 du Code de la Consommation qui sont d'ordre public.
III. Sur le préjudice moral et les autres demandes :
Le gérant de la SARL TOURISMORAMA ne rapporte pas la preuve de ses affirmations contenues dans sa lettre du 23 mai 2008, selon lesquelles Mme X. l'aurait menacé de lui nuire en faisant jouer ses relations. Par contre, ce courrier aux termes inqualifiables, qui est une lettre de menace caractérisée de M. L. envers Mme X., ne peut qu'avoir causé un préjudice moral certain à la défenderesse.
En conséquence de quoi la SARL TOURISMORAMA sera condamnée à verser à Mme X. la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts de ce chef.
[minute page 4] Il serait inéquitable de laisser supporter à Mme X. les frais irrépétibles engagés dans l'instance. La somme de 500 € lui sera donc allouée sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
En application de l'article 696 du Code de Procédure Civile, les entiers dépens seront mis à la charge de la partie perdante.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Juridiction de Proximité, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
* Déboute la SARL TOURISMORAMA de l'ensemble de ses demandes ;
* Constate la nullité du contrat conclu entre les parties le 6 mai 2008 ;
* Condamne la SARL TOURISMORAMA à payer à Mme X. la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
* Condamne la SARL TOURISMORAMA à payer à Mme X. la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
* Condamne la SARL TOURISMORAMA aux entiers dépens en application de l'article 696 du Code de Procédure Civile.
Le présent jugement a été signé par Cécile PAILLER, Juge de Proximité, et par Jacqueline TAFFARELLO, Greffier présent lors du prononcé.
LE GREFFIER LE JUGE DE PROXIMITÉ
- 5826 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Principe
- 5866 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection – Notion de professionnel - Principes - Charge de la preuve
- 5868 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Nature de l’activité
- 5869 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Caractères de l’activité
- 5885 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères combinés : rapport direct et compétence
- 5901 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Promotion de l’activité
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- 6979 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à la loi n° 2017-203 du 21 février 2017