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CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 24 juin 2016

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 24 juin 2016
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 11
Demande : 13/20422
Date : 24/06/2016
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/10/2013
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2016-015041
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5677

CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 24 juin 2016 : RG n° 13/20422

Publication : Jurica ; Juris-Data n°  2016-015041

 

Extrait : 1/ « Considérant que la mise en œuvre de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce suppose l'existence d'un rapport de force entre les cocontractants ayant permis à l'un d'eux de soumettre ou de tenter de soumettre son partenaire commercial, lors de la conclusion du contrat, à des obligations manifestement déséquilibrées ; que si les contrats d'adhésion ne permettent pas a priori de négociations entre les parties, il incombe néanmoins à la partie qui invoque l'existence d'un déséquilibre significatif de rapporter la preuve qu'elle a dû accepter, du fait du rapport de force existant, des obligations injustifiées et non réciproques ; Que si la notion de déséquilibre significatif figure à l'article L. 132-1 du code de la consommation, néanmoins le champ d'application des deux textes est distinct, puisque l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce n'a vocation à s'appliquer que dans les rapports entre professionnels où les rapports de force sont différents de ceux existants entre professionnels et consommateurs ; que les décisions de la Commission des clauses abusives, qui au surplus concernent les contrats conclus par les consommateurs, ne s'imposent pas au juge judiciaire ;

Considérant qu'il est constant que les sociétés CARROSSERIE B. et STANLEY SECURITY FRANCE étaient des partenaires économiques depuis plus de huit ans au moment de la résiliation du contrat d'abonnement de surveillance et de location du matériel ; que, cependant, la société CARROSSERIE B. n'invoque, ni ne justifie de l'existence d'une pression, d'une contrainte, d'un rapport déséquilibré, d'un état de dépendance économique ou juridique l'ayant obligée à signer le contrat d'abonnement initial en 2002, ni en 2006 et en 2010 lors de son renouvellement dans les mêmes termes ; que, d'ailleurs, comme l'a retenu le tribunal, les conditions générales du contrat étaient complétées par les conditions particulières soumises à la négociation des parties ; que les circonstances de faits entourant la conclusion et l'exécution du contrat démontrent que la société CARROSSERIE B. était satisfaite des conditions du contrat, jusqu'au changement de gérance, survenu postérieurement à la signature du contrat du 23 novembre 2010, laquelle a manifesté sa volonté de remettre en cause le contrat ; que faute de démontrer l'existence d'un rapport de soumission lors de la conclusion du contrat du 23 novembre 2010, l'appelante doit être déboutée de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ».

2/ « Mais considérant que la stipulation d'une durée de 48 mois n'implique pas l'existence d'un état de dépendance juridique dès lors que c'est volontairement que l'appelante a accepté cette durée lors de la conclusion et du renouvellement par deux fois du contrat ; qu'en effet, les conditions générales, aux articles 21 du contrat d'abonnement de surveillance et 2.1 du contrat de location, stipulent que la durée a été choisie par l'abonné, lequel dispose de la faculté à l’expiration du contrat de laisser celui-ci se poursuivre par tacite reconduction par période de 12 mois, avec faculté de résiliation 3 mois avant le terme ; que la société CARROSSERIE B., qui pouvait résilier le contrat sans pénalité en cas de manquement grave de son cocontractant, conformément au droit commun, ne justifie pas de la dépendance juridique et économique qu'elle invoque ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 11

ARRÊT DU 24 JUIN 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/20422 (9 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 septembre 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - R.G. n° 2012061972.

 

APPELANTE :

SARL CARROSSERIE B.

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ; n° SIRET : B XX (Angoulême), Représentée par Maître Pierre C. de la SELAS C. C. & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R109, Représentée par Maître Caroline B., avocat au barreau de CHARENTE

 

INTIMÉES :

SAS STANLEY SECURITY FRANCE aux droits de la société GENERALE DE PROTECTION

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, N° SIRET : YY (Créteil), Représentée par Maître Frédéric B., avocat au barreau de PARIS, toque : D1998 Représentée par Maître Marcella P. de la SELARL SELARL GMT Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0454

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 17 mars 2016, en audience publique, devant la Cour composée de : M. Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre, Madame Claudette NICOLETIS, Conseillère, chargée du rapport, qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 23 novembre 2010, la société CARROSSERIE B., qui exerce une activité de tôlerie- peinture de véhicules, a souscrit auprès de la société GÉNÉRALE DE PROTECTION, aux droits de laquelle vient la société STANLEY SECURITY FRANCE, dont l'activité est la surveillance par câble, un contrat d'abonnement de surveillance et de location pour une durée de 48 mois moyennant le paiement de loyers mensuels de 143,93 euros TTC, qui a pris effet le 5 février 2010.

Ce contrat faisait suite à deux précédents contrats [conclus] en 2002 puis en 2006.

Le procès-verbal de réception du matériel a été signé sans réserve le 24 décembre 2010 par la société CARROSSERIE B.

Fin août 2011 la société GÉNÉRALE DE PROTECTION a fait une offre pour l'installation de 4 détecteurs supplémentaires, à laquelle la société CARROSSERIE B. n'a pas donné suite.

Le 1er septembre 2011, un changement de gérance est intervenu au sein de la société CARROSSERIE B., qui a fait connaître son souhait de modifier le contrat.

Par courrier du 8 septembre 2011, la société CARROSSERIE B. a écrit à la société GÉNÉRALE DE PROTECTION « je vous confirme que devant le manque de compétence de vos services, je me vois dans l'obligation de mettre un terme au contrat qui lie nos deux entreprises. En effet, la proposition commerciale que l'on me propose n'est pas conforme à la réalité du marché car un de vos concurrents me propose une solution deux fois moins chère ».

Par courrier du 10 octobre 2011 la société CARROSSERIE B. a écrit à la société GÉNÉRALE DE PROTECTION qu'elle mettait un terme définitif au contrat en vertu de l'article 16 des conditions générales, en précisant que « Le contrat peut être résilié de plein droit en cas de cession amiable du fonds de commerce de l'abonné, ce qui s'est passé dans le cas précis de la carrosserie B. qui a changé de gérant le 1er septembre 2011 comme en témoigne l'extrait de Kbis ci-joint. En effet, devant l'incapacité de proposer une solution correcte pour assurer la surveillance du site de la CARROSSERIE B., je me vois dans l'obligation de procéder à cette démarche en vous demandant de faire le nécessaire pour que l'installation soit déposée avant le 31 octobre 2011. À défaut, je prendrai les décisions qui s'imposent auprès de mon organisme bancaire et auprès de mon conseiller juridique. ».

La société CARROSSERIE B. a cessé de régler les loyers à compter de l'échéance du 5 novembre 2011.

Le 28 novembre 2011, la société CARROSSERIE B. a fait dresser un constat huissier afin d'établir que l'installation de télésurveillance n'était pas conforme à la configuration des lieux, ni aux exigences imposées par les compagnies d'assurances.

Par courrier du 8 décembre 2011 la société GÉNÉRALE DE PROTECTION a répondu « que selon les clauses de votre contrat, la cession amiable du fonds de commerce ne saurait constituer une clause résolutoire de plein droit », a contesté avoir manqué à ses obligations contractuelles et indiqué que « nous ne pouvons pas répondre favorablement à votre demande de résiliation immédiate. Toutefois nous avons bien enregistré votre résiliation pour le terme de ce contrat, soit le 4 janvier 2015 » et que « notre responsable de clientèle... Afin de répondre à vos besoins, vous avait aussi fait une offre commerciale, notamment pour rajouter quatre détecteurs avec un nouveau montant d'abonnement de 120 4,90 [N.B. conforme à la minute Jurica] euros hors taxes. Vous n'avez pas donné suite à cette proposition car vous avez accepté une offre concurrente. »

Par courrier du 16 janvier 2012, la société GÉNÉRALE DE PROTECTION a mis en demeure la société CARROSSERIE B. de lui régler sous huitaine la somme de 481,47 euros, correspondant à trois échéances impayées augmentée des intérêts de retard conventionnels et de la pénalité forfaitaire de 10 %, sous peine de résiliation de plein droit du contrat aux torts de la société CARROSSERIE B., qui deviendrait « alors redevable en plus des échéances impayées, d'une indemnité de résiliation égale au total des échéances mensuelles échues jusqu'à la date d'expiration du contrat, majorées des pénalités prévues au contrat, soit une somme totale de 6.865,77 euros TTC. »

Par courrier du 19 janvier 2012, le conseil de la société CARROSSERIE B. a répondu que les clauses du contrat relatives à la résiliation pouvaient être qualifiées de clauses abusives.

Le 22 mai 2012 le matériel de vidéo surveillance a été démonté et récupéré par la société GÉNÉRALE DE PROTECTION.

Le 20 juin 2012, le conseil de la société GÉNÉRALE DE PROTECTION a adressé une nouvelle mise en demeure à la société CARROSSERIE B., sollicitant le paiement de la somme en principal de 5.973,55 euros, au titre des loyers impayés et à échoir et de la majoration de 10 %.

Par acte du 10 septembre 2012, la société GÉNÉRALE DE PROTECTION a assigné la société CARROSSERIE B. devant le tribunal de commerce de Paris, en résiliation du contrat et paiement de la somme de 5.973,55 euros en principal.

 

Par jugement du 2 septembre 2013 le tribunal de commerce a :

- constaté la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société CARROSSERIE B.,

- condamné la société la société CARROSSERIE B. à payer à la société GÉNÉRALE DE PROTECTION la somme de 5.973,55 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2012, date de la mise en demeure, avec anatocisme,

- débouté la société CARROSSERIE B. de sa demande de dommages et intérêts, l'a dit mal fondée,

- débouté les parties de leurs autres demandes au surplus non conforme au jugement,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société CARROSSERIE B. à payer à la société GÉNÉRALE DE PROTECTION la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné la société CARROSSERIE B. aux dépens.

Par déclaration du 22 octobre 2013 la société CARROSSERIE B. a interjeté appel de ce jugement.

 

Vu les dernières conclusions, déposées et notifiées le 8 juillet 2015, par lesquelles la société CARROSSERIE B. demande à la cour de :

Au visa des articles L. 442-6 I 2° du code de commerce, 1134, alinéa 3, 1135 et 1152 du code civil,

A titre principal :

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de PARIS en toutes ses dispositions,

- dire et juger que le contenu du contrat en litige emporte un déséquilibre contractuel au détriment de la société CARROSSERIE B. au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,

En conséquence,

- déclarer non écrits les articles 2.1.4, 3.3, 16, 21, 10, 11.2, 8 du contrat d'abonnement de surveillance, ainsi que les articles 10.3, 2.2 du contrat de location liant les parties,

- condamner la société GÉNÉRALE DE PROTECTION à verser la somme de 10.000 euros à la société CARROSSERIE B. à titre de dommages et intérêts,

A titre subsidiaire :

- condamner la société GÉNÉRALE DE PROTECTION à verser la somme de 10.000 euros à la société CARROSSERIE B. à titre de dommages et intérêts,

- dire et juger qu'il y a lieu de faire application de l'article 1152 du code civil et de réduire à 1 euro symbolique la somme due par la société CARROSSERIE B.,

- dire et juger qu'il y a lieu de compenser les deux sommes sans faire application de l'article 1154 du code civil,

En tout état de cause :

- condamner la société GÉNÉRALE DE PROTECTION à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

 

Vu les dernières conclusions, déposées et notifiées le 13 mars 2014, par lesquelles la société STANLEY SECURITY FRANCE demande à la cour de :

Au visa des articles 1134, 1153 et 1154, 1184 du code civil, 699 et 700 du code de procédure civile,

- constater que le tribunal de commerce de Paris a motivé avec soin sa décision,

- constater l'absence de déséquilibre significatif financier, juridique, ou encore résultant d'une dépendance économique ou d'une lésion, à l'occasion de la signature du contrat litigieux,

- constater à titre surabondant que le contrat litigieux a fait suite à deux précédents contrats, identiques en tout point, dont le plus vieux avait été signé 8 ans auparavant,

- constater la résiliation dudit contrat aux torts exclusifs de la société CARROSSERIE B.,

- débouter cette dernière de son appel, et de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions,

En conséquence :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a condamné la société CARROSSERIE B. au paiement au profit de la société STANLEY, de la somme en principal de 5.973,55 euros,

Y ajoutant :

- condamner la société CARROSSERIE B. à payer à la société STANLEY la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société CARROSSERIE B. aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement, pour ceux le concernant, sera directement poursuivi par Maître Frédéric B., avocat à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :

Sur l'application de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce :

Considérant que la société CARROSSERIE B. expose que le contrat conclu le 23 novembre 2010 est un contrat de prestation de services dont les clauses créent un déséquilibre à son détriment, en sa qualité d'abonné ; que les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sont applicables en l'espèce dès lors que les parties sont des partenaires commerciaux depuis plusieurs années ; que le code de commerce sanctionne le déséquilibre significatif « dans les droits et obligations des parties », ce qui implique qu'il soit apprécié au regard de l'économie générale du contrat et au regard du contexte dans lequel il a été conclu ou négocié ; qu'en l'espèce le déséquilibre est significatif car certaines clauses ne comportent pas de contrepartie rééquilibrant la relation ;

Que la jurisprudence du Conseil constitutionnel incite le juge judiciaire, pour établir l'existence d'un déséquilibre significatif, à se référer à la jurisprudence existante en matière de droit de la consommation qui prohibe les clauses abusives ; que la cour peut se reporter à la recommandation n° 97-01 de la Commission des clauses abusives relatives aux contrats concernant la télésurveillance, publiée le 11 juin 1997, afin de délimiter le contenu de la notion de déséquilibre significatif ;

Considérant que l'appelante expose que certaines clauses, contenues dans le contrat conclu le 23 novembre 2010, de nature à rompre l'égalité juridique entre les parties, ont déjà fait l'objet d'une recommandation de la commission des clauses abusives ;

Que les paragraphes 2.1.4 et 3.3 du contrat d'abonnement de surveillance stipulent « Le prestataire sera, de manière générale, tenu à une obligation de moyens », alors qu'il ne peut s'agir que d'une obligation de résultat ; que la Commission des clauses abusives fait valoir qu'une telle stipulation est abusive en ce qu'elle contribue à vider de son contenu la prestation de télésurveillance pour laquelle le contrat a été conclu, la mission du télésurveilleur qui consiste à veiller à la bonne transmission et réception des messages en provenance des locaux, est une obligation de résultat, dont le professionnel ne peut s'exonérer que par la preuve d'une cause étrangère ;

Que le paragraphe 10.3 du contrat de location qui stipule « En cas de résiliation, ... le locataire s'oblige à verser immédiatement au loueur toute autre somme dûe en vertu du contrat (loyers, frais de retard, indemnité de mis à disposition du matériel, etc...). Le loueur se réserve en outre la faculté d'exiger le paiement d'une indemnité de résiliation égale au total TTC des loyers non encore échus, majoré de 10 % » et l'article 16 du contrat d'abonnement de surveillance introduisent un double déséquilibre dans les obligations contractuelles des parties, puisque, d'une part, la résiliation pour manquement par le locataire à ses obligations contractuelles est assortie de pénalités, alors qu'il existe pas d'équivalent en cas de manquement à ses obligations par le loueur/prestataire ; que, d'autre part, l'abonné est obligé de continuer à acquitter une somme d'argent correspondant à la prestation qui ne lui est plus fournie ; que la Commission des clauses de justice et la Commission d'examen des pratiques commerciales ont indiqué que ces clauses étaient abusives ;

Que la volonté de résilier le contrat, motivée par l'insuffisance de protection des locaux, n'est pas fautive or la clause de résiliation met à la charge de l'appelante le paiement d'une indemnité dissuasive, quelles que soient les raisons et l'auteur de la rupture ;

Que l'article 21 du contrat d'abonnement de surveillance « Durée du contrat » qui stipule que « le présent contrat entrera en vigueur à la date de sa signature par les parties, et prendra fin à l'issue d'une période irrévocable et indivisible de 48 mois » « À son terme, le contrat se renouvellera par tacite reconduction, aux mêmes conditions financières et par période de 12 mois » et l'article 2.2 du contrat de location, impose une durée initiale du contrat supérieur à un an et n'envisage aucune sortie du contrat en dehors du terme ; qu'il existe un déséquilibre significatif dès lors que la faculté de mettre un terme au contrat n'appartient pas de façon égale à chacune des parties, le locataire ne peut sortir du contrat en dehors du terme, même en cas de motif légitime, alors que le prestataire peut, en application de l'article 16, mettre fin au contrat à tout moment, en cas de manquement du locataire à ses obligations contractuelles ; que les dispositions de l'article 1184 du code civil ne rétablissent pas l'égalité entre les parties puisque que la résolution doit être demandée en justice ;

Que les articles 10 et 11. 2 du contrat d'abonnement de surveillance, qui stipulent que le prestataire est débiteur de la maintenance du matériel installé, sous réserve des limitations de responsabilités listées introduisent un déséquilibre significatif en faveur du prestataire, dont la responsabilité ne pourra être engagée que dans des cas extrêmement limités même en cas de faute de sa part dans l'exécution du contrat ; que la Commission des clauses abusives a préconisé d'éliminer ce type de clause qui est à rapprocher de celle relative à la résiliation du contrat, qui peut intervenir à tout moment à l'initiative du prestataire sans qu'aucune contrepartie ne soit ouvert au locataire même en cas de manquement par le prestataire à ses obligations contractuelles ;

Considérant que la société CARROSSERIE B. soutient que certaines clauses, qui n'ont pas fait l'objet d'une recommandation de la Commission des clauses abusives, sont constitutives d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au contrat ;

Que la société GÉNÉRALE DE PROTECTION, en sa qualité de professionnel, était débitrice d'une obligation de résultat en matière de conseil sur le choix du matériel nécessaire aux besoins de son abonnée ; que l'article 8 du contrat de surveillance ne prévoit qu'un devoir d'information qui est insuffisant, compte tenu des risques encourus pour l'abonné en cas d'installation d'un matériel inadéquat ; que cet article, qui a pour effet de faire présumer que le prestataire a bien rempli son obligation de conseil envers son client, crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations respectifs des parties, puisqu'il a pour effet de renverser la charge de la preuve qui incombe en principe au professionnel lorsqu'il agit dans son domaine de spécialité ; qu'au surplus, l'article 8 en ce qu'il prévoit que « la responsabilité du prestataire ne peut donc être retenue au titre du choix du matériel » fait peser sur le client la charge de l'obligation de conseil en termes de choix du matériel installé ;

Que la société GÉNÉRALE DE PROTECTION a manqué à ses obligations contractuelles en ne prenant pas en considération le changement de situation de l'abonnée dont elle reconnaît avoir eu connaissance, manquant ainsi à son obligation de diligence et d'exécution du contrat de bonne foi ; que la volonté de résilier le contrat par l'appelante n'était pas fautive, mais les termes du contrat ont créé un déséquilibre significatif à son désavantage ;

Considérant que la société CARROSSERIE B. fait valoir que l'intimée ne tente même pas de démontrer que d'autres clauses du contrat viendraient rééquilibrer la situation ; que la circonstance que la redevance n'a pas été augmentée pendant plusieurs années ne constitue pas une clause permettant un rééquilibrage ;

Que c'est à l'occasion d'une renégociation de son contrat d'assurance de ses locaux, qu'elle s'est aperçue de la nécessité de prévoir un dispositif de surveillance plus complet et a fait part à l'intimée de sa demande de renégocier le contrat ; que compte tenu des termes du contrat, en faveur du prestataire, celui-ci a préféré prendre acte de la volonté de l'appelante de partir pour ensuite lui réclamer le paiement des échéances et des pénalités de retard, en sachant qu'il allait récupérer son matériel et cesser toute prestation ; que le contexte dans lequel le contrat a été proposé à la renégociation laisse apparaître un déséquilibre significatif au détriment de l'abonnée ;

Que la sanction du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au contrat du 23 novembre 2010 doit conduire à réputer non écrites l'intégralité des clauses en litige ; qu'en outre, l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce oblige l'auteur du déséquilibre à le réparer, la société STANLEY SECURITY FRANCE doit être condamnée à lui verser la somme de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts ;

 

Considérant que la société STANLEY SECURITY FRANCE répond que la demande de la société CARROSSERIE B. est abusive eu égard aux faits ; que le contrat signé courant 2002, pour une durée de 48 mois, a été exécuté à la parfaite satisfaction de l'appelante, qui à l'échéance du contrat a signé un deuxième contrat pour nouvelle période de 48 mois, en considérant que les conditions contractuelles étaient en adéquation avec ses besoins, puisque à l'échéance de ce contrat elle a signé un troisième contrat d'une durée de 48 mois, reprenant les mêmes prestations ; qu'à l'occasion de l'exécution et de la signature de ces contrats elle a consenti un effort financier important puisqu'elle a accepté de ne pas augmenter le montant de la redevance, alors que l'article 14 des conditions générales prévoit une révision automatique chaque année à la date anniversaire du contrat ; que le montant de la redevance est demeuré inchangé pendant neuf ans ;

Que l'article 8 des conditions générales du contrat de télésurveillance exprime une réalité de terrain, qui est que, si diverses configurations peuvent lui être proposées, l'abonné est maître de la décision finale, notamment eu égard au coût d'installation ; que l'appelante ne rapporte pas la preuve qu'une solution viable ne lui a pas été proposée, les arguments avancés ne servent qu'à tenter de dissimuler l'intention réelle du nouveau gérant, qui cherchait un prétexte pour résilier le contrat signé un an auparavant par la société CARROSSERIE B. ;

Considérant que l'intimée fait valoir que l'appelante fait un usage opportuniste de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, qu'elle invoque comme moyen de défense pour s'opposer à l'exécution loyale du contrat ; que cet article vise des hypothèses où un opérateur use de sa position dominante pour imposer à son partenaire des obligations créant non pas un simple déséquilibre, mais un déséquilibre significatif, c'est-à-dire tellement intolérable qu'une sanction civile peut être prononcée par les pouvoirs publics ; que les décisions de la Commission des clauses abusives ne font pas jurisprudence et les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables entre commerçants ; que le jugement du tribunal, motivé avec soin et apportant une réponse circonstanciée à chacun des points soulevés, doit être confirmé ;

Que l'objectif de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce est de protéger le cocontractant au moment de la formation du contrat et plus particulièrement au moment des négociations ; qu'il ne peut y avoir déséquilibre significatif alors que le contrat signé le 23 novembre 2010 fait suite à 2 contrats précédents, identiques ; que la société CARROSSERIE B. pouvait se délier du contrat, en notifiant avant l'échéance contractuelle son intention de ne pas reconduire le contrat en cours ; qu'elle pouvait également ne pas conclure un nouveau contrat d'une durée de 48 mois, mais laisser le contrat en cours se poursuivent par tacite reconduction, pour des périodes successives d'une seule année ;

 

Mais considérant que l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce prévoit qu’« engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au registre du commerce... De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;

Considérant que la mise en œuvre de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce suppose l'existence d'un rapport de force entre les cocontractants ayant permis à l'un d'eux de soumettre ou de tenter de soumettre son partenaire commercial, lors de la conclusion du contrat, à des obligations manifestement déséquilibrées ; que si les contrats d'adhésion ne permettent pas a priori de négociations entre les parties, il incombe néanmoins à la partie qui invoque l'existence d'un déséquilibre significatif de rapporter la preuve qu'elle a dû accepter, du fait du rapport de force existant, des obligations injustifiées et non réciproques ;

Que si la notion de déséquilibre significatif figure à l'article L. 132-1 du code de la consommation, néanmoins le champ d'application des deux textes est distinct, puisque l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce n'a vocation à s'appliquer que dans les rapports entre professionnels où les rapports de force sont différents de ceux existants entre professionnels et consommateurs ; que les décisions de la Commission des clauses abusives, qui au surplus concernent les contrats conclus par les consommateurs, ne s'imposent pas au juge judiciaire ;

Considérant qu'il est constant que les sociétés CARROSSERIE B. et STANLEY SECURITY FRANCE étaient des partenaires économiques depuis plus de huit ans au moment de la résiliation du contrat d'abonnement de surveillance et de location du matériel ; que, cependant, la société CARROSSERIE B. n'invoque, ni ne justifie de l'existence d'une pression, d'une contrainte, d'un rapport déséquilibré, d'un état de dépendance économique ou juridique l'ayant obligée à signer le contrat d'abonnement initial en 2002, ni en 2006 et en 2010 lors de son renouvellement dans les mêmes termes ; que, d'ailleurs, comme l'a retenu le tribunal, les conditions générales du contrat étaient complétées par les conditions particulières soumises à la négociation des parties ; que les circonstances de faits entourant la conclusion et l'exécution du contrat démontrent que la société CARROSSERIE B. était satisfaite des conditions du contrat, jusqu'au changement de gérance, survenu postérieurement à la signature du contrat du 23 novembre 2010, laquelle a manifesté sa volonté de remettre en cause le contrat ; que faute de démontrer l'existence d'un rapport de soumission lors de la conclusion du contrat du 23 novembre 2010, l'appelante doit être déboutée de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;

 

Sur la résiliation du contrat :

Considérant que la société CARROSSERIE B. soutient qu'elle s'est trouvée dans l'impossibilité de résilier le contrat de location et de surveillance malgré les manquements de la société GÉNÉRALE DE PROTECTION, car le contrat ne le lui permettait pas, alors que cette dernière pouvait rompre le contrat à tout moment en cas de manquement de sa part ; que la dépendance juridique résultant du contrat d'une durée initiale de 48 mois, avec une indemnité de résiliation dissuasive pour l'abonnée, aboutit à une soumission économique de cette dernière qui doit, soit rompre le contrat en versant une indemnité de résiliation important, soit maintenir le contrat malgré des prestations d'un coût trop élevé, malgré que le prestataire ne respecte pas ses obligations ; que la dépendance juridique créée par le contrat a aboutie à une soumission économique ;

Qu'à titre subsidiaire, l'appelante fait valoir que l'état de soumission économique et juridique à laquelle le contrat a conduit justifie qu'il soit fait application de l'article 1152 du code civil et que la somme réclamée par l'intimée soit réduite à 1 euro symbolique ;

Considérant que la société STANLEY SECURITY FRANCE expose que, à la suite du changement de gérance, intervenu le 1er septembre 2011, la société CARROSSERIE B. a fait connaître sa volonté de mettre en place un système d'alarme plus étoffé, comprenant 6 détecteurs au lieu de 2 ; que l'appelante a néanmoins refusé la proposition chiffrée qui lui a été adressée, en soutenant dans sa lettre du 8 septembre 2011 qu'un concurrent lui proposait une solution deux fois moins chère ; que l'objet de ce courrier était de lui imposer les conditions financières d'un nouveau contrat, de faire pression et d'exercer un chantage à la résiliation ; que la nouvelle direction de la société CARROSSERIE B. a cherché des prétextes pour arrêter de payer les loyers et pour négocier un nouveau contrat à son profit ;

 

Mais considérant que la stipulation d'une durée de 48 mois n'implique pas l'existence d'un état de dépendance juridique dès lors que c'est volontairement que l'appelante a accepté cette durée lors de la conclusion et du renouvellement par deux fois du contrat ; qu'en effet, les conditions générales, aux articles 21 du contrat d'abonnement de surveillance et 2.1 du contrat de location, stipulent que la durée a été choisie par l'abonné, lequel dispose de la faculté à l’expiration du contrat de laisser celui-ci se poursuivre par tacite reconduction par période de 12 mois, avec faculté de résiliation 3 mois avant le terme ; que la société CARROSSERIE B., qui pouvait résilier le contrat sans pénalité en cas de manquement grave de son cocontractant, conformément au droit commun, ne justifie pas de la dépendance juridique et économique qu'elle invoque ;

Considérant que la société CARROSSERIE B. a rompu le contrat par courrier du 8 septembre 2011 ; qu'elle ne peut justifier la résiliation du contrat par l'impossibilité d'assurer ses locaux, dès lors qu'elle a refusé la proposition d'installation de 4 caméras supplémentaires en contrepartie d'une augmentation de 4 euros par mois qui lui a été faite par l'intimée et que cette proposition commerciale correspondait à la demande de l'assureur produite aux débats ;

Considérant que le changement de gérance n'entre pas dans les prévisions des articles 16.1 des conditions générales du contrat d'abonnement de surveillance et 10.2 du contrat de location, permettant la résiliation anticipée du contrat ; que les dispositions de l'article 12.2 du contrat d'abonnement de surveillance stipulent que l'abonné doit « informer le prestataire sans délai et par courrier recommandé avec accusé de réception de toute modification des renseignements communiqués relatifs aux destinataires d'alertes... », en conséquence l'appelante ne peut se plaindre que sa demande de modification faite par téléphone n'ait pas été prise en compte faute de confirmation écrite et ce pour des raisons de sécurité ; que l'appelante ne rapporte pas la preuve de manquements imputables à la société STANLEY SECURITY FRANCE, qui justifieraient la résiliation du contrat du 23 novembre 2010 au torts de l'intimée ;

Considérant que la créance de la société STANLEY SECURITY FRANCE d'un montant de 5.973,55 euros comprend le montant des échéances dues du 5 novembre 2011 au 4 janvier 2015, ainsi qu'une majoration de 10 % prévue au contrat ; que cette indemnité prévue par le contrat à titre de réparation du préjudice subi par le prestataire constitue une clause pénale valable qui peut être révisée par le juge si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que l'indemnité demandée par l'intimée n'étant pas manifestement excessive, il n'y a pas lieu de la modérer ; que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement ;

Et y ajoutant,

Déboute la SARL CARROSSERIE B. de toutes ses demandes ;

Condamne la SARL CARROSSERIE B. à verser à la SAS STANLEY SECURITY FRANCE la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL CARROSSERIE B. aux dépens d'appel, qui pourrons être recouvrés en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier                             Le président

 

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