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CASS. CIV. 1re, 17 novembre 1998

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 17 novembre 1998
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 96-17341
Date : 17/11/1998
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Bulletins officiels
Décision antérieure : CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. B), 10 mai 1996
Numéro de la décision : 1740
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2056

CASS. CIV. 1re, 17 novembre 1998 : pourvoi n° 96-17341 ; arrêt n° 1740

Publication : Bull. civ. I, n° 322 ; D. Affaires 1999. 372 ; Contrats conc. consom. 1999, n° 21, note L. Leveneur

 

Sommaire (origine : Bulletin de la Cour de cassation) : « Les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ne s’appliquent pas aux contrats de fourniture de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par le cocontractant ».

Extrait : « Attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés, le premier [1134 du code civil], en lui conférant une portée qu’il n’a pas, et le second [L. 132-1 c. consom.] , par fausse application ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 96-17341. Arrêt n° 1740.

DEMANDEUR à la cassation : UFB LOCABAIL

DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X.

Président : M. Lemontey. Rapporteur : M. Aubert. Avocat général : M. Sainte-Rose. Avocats : la SCP Delaporte et Briard, M. Boullez.

 

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu les articles 1134 du Code civil et L. 132-1 du Code de la consommation ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, dans le cadre de son activité professionnelle, M. X. a pris en location un tracto-pelle par contrat de crédit-bail en date du 15 juin 1987, conclu avec la société UFB Locabail (Locabail) ; que le 25 octobre 1988, il a averti cette société du vol de ce matériel ; que la société Locabail, après avoir reçu de son assureur une indemnité de 200.000 francs, a réclamé à M. X., outre des dommages-intérêts, une somme de 136.577,31 francs en application des stipulations du contrat qui prévoyaient qu’en cas de destruction totale du matériel, même par cas fortuit, le locataire devrait verser au bailleur à titre forfaitaire, une indemnité égale aux loyers restant à courir, après déduction de l’indemnité d’assurance ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour débouter la société Locabail de ses demandes, l’arrêt énonce que cette société, du fait de sa position économique, se trouvait en mesure d’imposer à ses locataires une clause qui les contraignait à continuer à payer des loyers alors qu’ils s’étaient vu retirer, par un fait qui leur était étranger, la jouissance du matériel loué ; que cette clause supprimait l’obligation de cette société de mettre à disposition de son locataire le matériel loué alors qu’elle avait été indemnisée de sa perte totale et que rien ne s’opposait à ce qu’elle le remplace et qu’elle faisait supporter au locataire la totalité des risques de perte du matériel, même ceux dus à un cas de force majeure, conférant ainsi au bailleur un avantage excessif, de sorte que cette clause était abusive comme contraire à l’article 1134 et devait être réputée non écrite ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés, le premier, en lui conférant une portée qu’il n’a pas, et le second, par fausse application ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la seconde branche du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 10 mai 1996, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Delaporte et Briard, avocat aux Conseils pour la compagnie Union française de Banque Locabail.

 

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société UFB LOCABAIL de sa demande de condamnation de M. X. à lui payer la somme de 136.577,31 francs, en vertu du contrat de crédit-bail du 15 juin 1987,

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE la clause de l'article 5 du contrat de crédit-bail signé le 15 juin 1987 par M. X. prévoit qu'en cas de destruction totale du matériel, même par cas fortuit (ce qui est le cas du vol), le locataire doit verser au bailleur « à titre forfaitaire une indemnité égale auxdits loyers augmentée de la valeur résiduelle prévue au contrat sous déduction de l'indemnité de la Compagnie d'assurance » ; qu'une telle indemnité qui a pour objet d'évaluer forfaitairement le préjudice subi par le bailleur en cas de sinistre total du matériel dû à un fait étranger au locataire ne constitue pas une clause pénale susceptible d'être modérée par application de l'article 1152 du Code civil ; que cette clause n'en est pas moins une clause abusive, comme le soutient d'ailleurs M. X. qui la qualifie de « léonine », en ce qu'elle procure un avantage excessif à l'UFB LOCABAIL qui, du fait de sa position économique, se trouve en mesure d'imposer à ses locataires de continuer à lui payer des loyers, alors que lesdits locataires se sont vus retirer, par un fait qui leur est étranger, la jouissance du matériel loué et qu'elle même, propriétaire de ce matériel, a été indemnisée de la perte de celui-ci sans qu'elle soit tenue d'offrir un matériel de remplacement ; qu'une telle clause supprime donc abusivement l'obligation de l'UFB LOCABAIL de mettre à disposition de son locataire le matériel loué, alors qu'elle a été indemnisée de sa perte totale et que rien ne s'oppose à ce qu'elle le remplace ; que cette clause est donc contraire à l'article 1134 du Code civil ; que l'UFB LOCABAIL profite également de sa position dominante pour faire assurer par ses locataires un risque financier qui lui est propre et contre lequel elle doit s'assurer ; que la clause qui fait supporter au locataire la totalité des risques de perte du matériel, même lorsque ceux-ci sont dus à un cas de force majeure, et qui confère donc au bailleur un avantage excessif, doit être réputée non écrite ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS D'UNE PART QU'aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du 1er février 1995 sont réputées abusives et dès lors non écrites les clauses qui apparaissent imposées aux non professionnels ou consommateurs par un abus de la puissance économique de l'autre partie et qui confèrent à cette dernière un avantage excessif ; que dès lors, dans un contrat entre professionnels, une clause ne saurait être réputée non écrite en raison de son caractère abusif ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que M. X. avait conclu le contrat de crédit-bail litigieux portant sur une tracto-pelle, pour les besoins de sa profession d'entrepreneur de travaux publics ; que c'est d'ailleurs pour cette raison que le Tribunal de commerce a été compétent pour statuer en première instance ; que dès lors, en décidant que la clause de transfert des risques au crédit-preneur devait être réputée non écrite en raison de son caractère abusif, la Cour d'appel a violé les articles L. 132-1 du Code de la consommation et 1134 du Code civil,

ALORS D'AUTRE PART QU'en tout état de cause, le crédit-preneur qui se prétend libéré par cas fortuit doit démontrer concrètement le cas fortuit qui le libère ; qu'en décidant que le vol est nécessairement un cas fortuit, alors qu'il peut être dû à une négligence du volé, la Cour d'appel a violé l'article 5 du code civil.

 

 


 

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