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TI PARIS (9e arrdt), 23 avril 1992

Nature : Décision
Titre : TI PARIS (9e arrdt), 23 avril 1992
Pays : France
Juridiction : Paris (TI) 9e arrdt
Demande : 1754/91
Décision : 1134/92
Date : 23/04/1992
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 5/09/1991
Décision antérieure : CA PARIS (8e ch. sect. A), 23 novembre 1993
Numéro de la décision : 1134
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 435

TI PARIS (9e arrdt), 23 avril 1992 : RG n° 1754/91, jugement n°1134/92

(sur appel CA Paris (8e ch. A), 23 novembre 1993 : RG n° 92/21697)

 

Extrait : « Attendu que la responsabilité de la SNCF ne saurait être recherchée que dans le cadre contractuel soit celui d'une convention de dépôt des bagages à main nécessaire et accessoire au contrat de transport de voyageurs. Attendu que la SNCF a entendu exclure sa responsabilité dans ce domaine, par les dispositions de l'article 55 A 1er alinéa du tarif général des voyageurs dont l'opposabilité n'est pas contestée par le demandeur. Que cet article prévoit que « la SNCF n'assume aucune responsabilité en ce qui concerne les bagages et colis à main qui demeurent sous la surveillance exclusive du voyageur même lorsqu'ils sont placés en bout de voiture dans les emplacements prévus à cet effet ».

Attendu que si la SNCF peut valablement se décharger de sa responsabilité en cette matière, encore faut-il pour que cette clause exclusive de responsabilité produise ses effets que cette dernière permette au voyageur d'exercer normalement l'obligation de surveillance mise à sa charge. Que la configuration même d'une voiture, les sièges se trouvant dos au porte-bagages en bout de voiture, empêche le voyageur d'exercer une telle surveillance. Qu'en conséquence, la clause exclusive de responsabilité dans le cadre du contrat de dépôt des bagages à main est inapplicable ; qu'en revanche, en informant de manière non équivoque le voyageur de ne pas déposer d'objets de valeur dans les cases à bagages à l'entrée de chaque salle, la SNCF a tenu en toutes hypothèses à limiter sa responsabilité au contenu habituel d'un bagage pouvant s'assimiler au dommage prévisible de l'article 1150 du Code Civil. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE PARIS

NEUVIÈME ARRONDISSEMENT

JUGEMENT DU 23 AVRIL 1992

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 1754/91. Jugement n° 1134/92.

 

DEMANDEUR :

- Monsieur X.

demeurant [adresse], Représenté par Maître SLOAN JEAN-PIERRE, avocat au barreau de PARIS [adresse]

 

DÉFENDEUR :

- SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS

dont le siège social est situé [adresse], Représenté par Maître BERTIN MICHEL, avocat au barreau de PARIS [adresse]

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Président : Anne BOULANGER, JUGE

Greffier : Edith RODA

DÉBATS : Audience publique du 26 mars 1992

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, prononcé publiquement par Anne BOULANGER,  JUGE, assisté de Edith RODA, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Vu l'assignation délivrée le 5 Septembre 1991 par la SCP A., Huissier de Justice à [ville], en ses motifs et son dispositif.

Après quatre renvois à la demande des parties, l'affaire est retenue à l'audience du 12 mars 1992.

Le Demandeur, représenté par Maître Jean-Pierre SLOAN, expose que le 11 mai 1991 il a pris place dans une voiture de première classe du train SNCF MONTPELLIER-TOULOUSE, ayant déposé sa valise en raison de sa dimension dans le casier à bagages situé à l'extrémité de la voiture. Une heure plus tard, il s'est aperçu que ce bagage avait disparu.

Il estime que la SNCF est responsable de ce vol dans la mesure :

- où le voyageur ne peut mettre que dans ce casier les bagages volumineux,

- où il n'est tenu à aucune obligation de surveillance ; que même si cette obligation pesait sur lui, il est dans l'incapacité de l'exercer puisque la disposition des sièges ne permet pas une telle surveillance,

- où la surveillance des agents de la SNCF est illusoire et où la SNCF n'a pris aucune disposition particulière pour remédier à ces vols habituels, par exemple en informant expressément les voyageurs par haut-parleurs de ce risque.

Il réfute la thèse de la SNCF de la manière suivante :

Si l'article 55 du tarif général voyageurs de la SNCF prévoit que la SNCF n'assume aucune responsabilité en ce qui concerne les bagages et colis à main qui [demeurent] sous la responsabilité exclusive du voyageur, même lorsqu'ils sont placés en bout de voitures, dans les emplacements prévus à cet effet, encore faudrait-il pour que la SNCF puisse se dégager de cette responsabilité, que l'obligation qu'elle met à la charge du voyageur soit possible ; que la configuration même des voitures empêche toute surveillance utile.

Il réclame donc à titre principal la réparation de son préjudice qu'il fixe à la somme de 30.000 Francs.

La Défenderesse, représentée par Maître Michel BERTIN, sollicite le débouté de son adversaire :

- pour les bagages à main, aucun contrat n'intervient entre le voyageur et la SNCF ; les dispositions du tarif général voyageurs de la SNCF précisent sans ambiguïté le fait que sa responsabilité contractuelle ne peut être mise en cause pour les pertes ou avaries de ces bagages,

- [minute page 3] sur le plan délictuel :

* le Demandeur ne rapporte pas la preuve de s'être trouvé dans l'impossibilité de laisser sa valise au-dessus de lui,

* le vol résulte d'un tiers dont la SNCF ne saurait être tenue pour responsable,

* la preuve d'une faute commise par la SNCF n'est pas rapportée.

C'est pourquoi, elle réclame le débouté de son adversaire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la responsabilité de la SNCF ne saurait être recherchée que dans le cadre contractuel soit celui d'une convention de dépôt des bagages à main nécessaire et accessoire au contrat de transport de voyageurs.

Attendu que la SNCF a entendu exclure sa responsabilité dans ce domaine, par les dispositions de l'article 55 A 1er alinéa du tarif général des voyageurs dont l'opposabilité n'est pas contestée par le demandeur.

Que cet article prévoit que « la SNCF n'assume aucune responsabilité en ce qui concerne les bagages et colis à main qui demeurent sous la surveillance exclusive du voyageur même lorsqu'ils sont placés en bout de voiture dans les emplacements prévus à cet effet ».

Attendu que si la SNCF peut valablement se décharger de sa responsabilité en cette matière, encore faut-il pour que cette clause exclusive de responsabilité produise ses effets que cette dernière permette au voyageur d'exercer normalement l'obligation de surveillance mise à sa charge.

Que la configuration même d'une voiture, les sièges se trouvant dos au porte-bagages en bout de voiture, empêche le voyageur d'exercer une telle surveillance.

Qu'en conséquence, la clause exclusive de responsabilité dans le cadre du contrat de dépôt des bagages à main est inapplicable ; qu'en revanche, en informant de manière non équivoque le voyageur de ne pas déposer d'objets de valeur dans les cases à bagages à l'entrée de chaque salle, la SNCF a tenu en toutes hypothèses à limiter sa responsabilité au contenu habituel d'un bagage pouvant s'assimiler au dommage prévisible de l'article 1150 du Code Civil.

Attendu que dans ce cadre, le tribunal retient, au vu des pièces justificatives produites, la somme de 10.000 Francs, rejetant le surplus des réclamations :

- [minute page 4] plusieurs pièces justificatives des objets perdus (tickets de caisse des chaussures, de vêtements) étant postérieures au vol,

- les boutons de manchettes en or, les clés et le manuscrit devant être assimilés à des objets de valeur.

Attendu qu'il apparaît équitable d'allouer au Demandeur la somme de 3.000 Francs au titre des frais irrépétibles.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant en audience publique, contradictoirement et en premier ressort ;

- Dit que la clause exclusive de responsabilité invoquée par la SNCF ne peut trouver application ;

- Condamne la SNCF à payer à M. X. la somme forfaitaire de DIX MILLE FRANCS (10.000 Francs) en réparation du préjudice prévisible subi, celle de TROIS MILLE FRANCS (3.000 Francs) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens.

Ainsi fait et jugé les jour, mois et an sus-indiqués.

LE GREFFIER            LE PRÉSIDENT

 

 

 

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