6612 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 10 - Responsabilité de la banque
- 6026 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre dans l’information - Informations connues du professionnel - Informations juridiques générales
- 6097 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations non monétaires - Allègement des obligations du professionnel
- 6603 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 1 - Formation et contenu du contrat
- 6604 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 2 - Titulaires du compte et mandats
- 6605 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 3 - Frais de fonctionnement (tarification initiale et évolution)
- 6606 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 4 - Fonctionnement du compte - Autorisation de découvert
- 6607 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 5 - Fonctionnement du compte - Exécution des opérations (retraits, virements, etc.)
- 6608 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 6 - Fonctionnement du compte - Preuve des opérations (relevés de compte)
- 6609 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 7 - Fonctionnement du compte - Comptes multiples
- 6610 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 8 - Fonctionnement du compte - Appareils automatiques de retrait et de dépôt
- 6611 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 8 - Fonctionnement du compte - Consultation à distance
- 6613 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Convention de compte - 11 - Clôture du compte
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6612 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT
BANQUE - CONVENTION DE COMPTE - 10 - RESPONSABILITÉ DU BANQUIER
Présentation. Depuis le décret du 18 mars 2009, les clauses ayant pour objet ou pour effet de limiter ou d’exclure la responsabilité du professionnel sont irréfragablement abusives. Cette solution a d’abord figuré aux art. R. 132-1-6° C. consom., puis à compter de l’ordonnance du 14 mars 2016, elle a été intégrée à l’art. R. 212-1-6° C. consom., étendu aux non-professionnels par l’art. R. 212-5 C. consom. Cette prohibition ne contient aucune exception dans les art. R. 212-3 et 4 C. consom. (anciennement l’art. R. 132-2-1 C. consom.).
Clauses abusives en raison de leur rédaction (obscure, générale, imprécise). Est abusive en raison de sa rédaction obscure et ambiguë, la clause selon laquelle « la banque exécute les ordres donnés avec la diligence attendue d'un professionnel, en n'assumant qu'une obligation de moyens ; elle ne sera pas responsable en cas d'exécution tardive ou erronée ou de défaut d'exécution liés aux moyens de communication utilisés par le client ou sur ses ordres. CA Angers (ch. com.), 24 février 2009 : RG n° 07/02296 ; arrêt n° 49 ; site CCA ; Cerclab n° 2884 (problème relevés : 1/ l'expression « liés aux moyens de communication qu'il utilise » ne renvoie pas seulement à l'hypothèse d'une erreur de l'utilisateur ou d'une défaillance technique imputable au donneur d'ordre : telle qu'elle est rédigée, la clause exonère la banque en cas de défaut ou de mauvaise exécution d'un ordre du client par suite de la défaillance de ses services internes ; 2/ l’expression « ou sur ses ordres » n'est pas intelligible au premier abord et peut conduire à un contresens, laissant croire que le client donnant des ordres ne peut pas rechercher la responsabilité de la banque ; ambiguïtés levées par la nouvelle rédaction de la clause), confirmant TGI Laval, 22 octobre 2007 : RG n° 06/00173 ; jugt n° 07/755 ; Cerclab n° 4181 (clause difficile à comprendre pour un lecteur profane ; arguments similaires à l’arrêt : 1/ la clause peut aboutir à faire peser sur le client les conséquences d'un fait extérieur, tel un problème de transmission du fax dans les services de la banque, un problème de fonctionnement du site internet dont la maintenance relève de la banque ou un problème de distribution du courrier à son destinataire ; 2/ idem pour la référence aux ordres du client).
Est abusive, en raison de son ambiguïté, la clause qui laisse croire au client qu'il est responsable du terminal à distance qu'il utilise chez son commerçant et qu'il encourt les mêmes responsabilités que ce commerçant. CA Paris (15e ch. B), 3 avril 2008 : RG n° 06/18279 ; Cerclab n° 2602 ; Juris-Data n° 2008-365292 (clause imposant que le client s’assure s'assurer que le terminal est agréé par le Groupement avec le logo CB), sur appel de TGI Paris (9e ch. 2e sect.), 13 septembre 2006 : RG n° 05/1493 ; Cerclab n° 3184 (jugement critiquant la clause en raison d’une ambiguïté différente liée au fait qu’elle concernait pour partie les terminaux détenus par certains clients).
Manquements à l’obligation d’information. V. pour la Commission avant le décret du 18 mars 2009 : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'exonérer l'établissement de crédit de toute responsabilité lorsque les dommages et incidents sont dus à un défaut d'information imputable au professionnel. Recomm. n° 05-02/1 : Cerclab n° 2171 (considérant n° 6-1 ; arg. : clauses laissant croire au consommateur qu'il ne peut rechercher la responsabilité du professionnel).
Manquements aux obligations légales du banquier. V. pour la Commission avant le décret du 18 mars 2009 : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'exonérer l'établissement de crédit de toute responsabilité lorsque la responsabilité du professionnel est prévue par la loi. Recomm. n° 05-02/1 : Cerclab n° 2171 (considérant n° 6-1 ; exemple : L. 132-4 C. mon. fin. ; arg. : clauses laissant croire au consommateur qu'il ne peut rechercher la responsabilité du professionnel).
Nature de l’obligation. N’est pas abusive la clause qui stipule que, pour les opérations d'encaissement des effets, valeurs et chèque, la banque n’est tenue que d’une obligation de moyens dès lors que la stipulation d'une obligation de ce type est conforme aux usages et au droit, la banque, lorsqu'elle procède à ce type d'encaissement, ne pouvant être tenue d'une obligation de résultat, qui serait inconciliable avec cette donnée déterminante que les opérations concernées impliquent nécessairement l'intervention de tiers, en particulier de la banque tirée. CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989 (autres arg. : 1/ la clause ne limite pas la responsabilité du banquier ; 2/ la présentation des chèques obéit à des règles précises résultant des usages et de la jurisprudence, de sorte qu'en cette matière, la preuve de la faute de la banque par le client est facilitée ; 3/ subordonner la rectification des erreurs à l'accord du client équivaudrait à permettre à un cocontractant de mauvaise foi d'imposer par son refus l'octroi d'un crédit sans l'accord du prêteur de deniers, en méconnaissance du principe de liberté contractuelle posé par l’ancien art. 1134 C. civ.), confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162 (mêmes arguments).
Clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité en cas d’erreurs ou fautes du professionnel. * Commission des clauses abusives. V. pour la Commission avant le décret du 18 mars 2009 : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de faire supporter par le client les conséquences financières et les sanctions contractuelles de tous incidents de fonctionnement du compte, sans réserver les cas d'erreur ou de faute de l'établissement de crédit. Recomm. n° 05-02/4 : Cerclab n° 2171 (considérant n° 6-4 ; sanctions prévues : commissions et intérêts, retrait d'instruments de paiement).
* Cour de cassation. Doit être présumée abusive de manière irréfragable, en application de l’ancien art. R. 132-1-6° [212-1-6°] C. consom. la clause selon laquelle la responsabilité de banque pour l’exécution erronée de l’opération effectuée au moyen d’une carte bancaire sera limitée au montant principal débité du compte, ainsi qu’aux intérêts de ce montant au taux légal, dès lors que le banquier tenu de réparer l’entier préjudice, ne peut supprimer ni réduire le droit à réparation de son client. Cass. civ. 1re, 23 janvier 2013 : pourvois n° 10-21177 et n° 10-22815 ; Cerclab n° 4187, rejetant le pourvoi contre CA Grenoble (1re ch. civ.), 18 mai 2010 : RG n° 07/04169 ; site CCA ; Cerclab n° 4157 (le tribunal a à juste titre retenu que le banquier, qui était tenu dans ce cas à une obligation de résultat, devait au visa de l'ancien art. 1147 [1231-1] C. civ. réparation de l'entier préjudice ; N.B. le moyen contestait la pertinence de la référence à l’obligation de résultat pour déterminer le montant du préjudice réparable), sur appel de TGI Grenoble (4e ch. civ.), 12 novembre 2007 : RG n° 05/03780 ; Cerclab n° 4158 (clause légalement abusive au regard de l'ancien art. R. 132-1 C. consom. en ce qu'elle énumère de manière limitative les postes de préjudices que la banque sera amenée à indemniser, alors même qu'au visa de l'ancien art. 1147 C. civ., il est de jurisprudence constante qu'en ce cas, le banquier est tenu d'une obligation de résultat et doit réparation de l'entier préjudice ; N.B. l’ancien art. R. 132-1 C. consom., dans sa rédaction antérieure au décret du 18 mars 2009, ne concernait que les contrats de vente).
* Juges du fond. Est abusive au regard de l’ancien art. R. 132-1-6° [212-1-6°] C. consom. la clause imposant au client d'accepter par avance des reprises d'écriture si la banque se trouvait amenée à accepter des rejets tardifs, en ce qu'elle est susceptible d'exonérer la banque de sa responsabilité à raison de la faute qu'elle a pu commettre et qu'elle fait supporter au consommateur une éventuelle carence de sa part. CA Grenoble (1re ch. civ.), 22 novembre 2010 : RG n° 09/02931 ; Cerclab n° 2932, sur appel de TGI Grenoble (4e ch.), 8 juillet 2009 : RG n° 05/02253 ; jugt n° 164 ; Cerclab n° 4166 (idem pour la clause similaire des versions antérieures). § Est abusive la clause limitant la responsabilité de la banque quelle que soit la faute commise. CA Nancy (2e ch. civ.), 10 septembre 2009 : RG n° 08/00567 ; arrêt n° 2249/09 ; Cerclab n° 1628 (contrat d’abonnement d’une association - MJC - à des services télématiques ; clause limitant le montant des dommages et intérêts alloués, en cas de reconnaissance de la responsabilité du banquier, à une somme égale à seulement à dix fois celui de la redevance perçue l'année du fait générateur de celle-ci), sur appel de TI Nancy, 16 janvier 2008 : RG n° 06/01919 ; Dnd. § Est abusive la clause stipulant que la responsabilité de la banque en cas d'exécution erronée d’une opération sera limitée au montant du principal débité du compte du titulaire de la carte, ainsi qu'aux intérêts sur ce montant au taux légal, dès lors qu’elle a pour effet et pour objet de limiter, envers le consommateur, la responsabilité de banquier professionnel en cas de faute de sa part, en lui laissant à sa charge la part de préjudice, consécutif à la mauvaise exécution par la banque de ses obligations essentielles, qui excède le montant du débit indu majoré des intérêts. CA Angers (ch. com.), 24 février 2009 : RG n° 07/02296 ; arrêt n° 49 ; site CCA ; Cerclab n° 2884 (clauses relatives à la carte de paiement), infirmant sur ce point TGI Laval, 22 octobre 2007 : RG n° 06/00173 ; jugt n° 07/755 ; Cerclab n° 4181 (inapplicabilité de l’ancien art. R. 132-1 C. consom. qui ne concerne que les ventes ; clause non abusive : dans les contrats de prestations de service, l'étendue de la responsabilité contractuelle du prestataire peut être limitée, dès lors que cette limitation a été portée à la connaissance du consommateur).
V. déjà, dans le même sens que l’arrêt de cassation : est abusive la clause qui stipule que la responsabilité de la banque pour l'exécution erronée de l'opération sera limitée au montant principal débité du compte du titulaire de la carte, ainsi qu'aux intérêts sur ce montant au taux légal, qui laisse croire au client qu’il n’a droit à aucune autre indemnité supplémentaire à laquelle il pourrait prétendre dans certaines circonstances, alors qu’une supprimant ou réduisant la responsabilité du professionnel est interdite par l’ancien art. R. 132-1 C. consom. CA Paris (15e ch. B), 3 avril 2008 : RG n° 06/18279 ; Cerclab n° 2602 ; Juris-Data n° 2008-365292 (N.B. : 1/ le texte visé ne concernait à l’époque que les contrats de vente ; 2/ pour le groupement, la clause ne concerne que les retraits dans des appareils automatiques, ce qui est difficile à vérifier sans consultation de l’ensemble des conditions, ce qui justifierait l’évaluation du préjudice ; 3/ pour le groupement, la clause n'exclut pas pour autant l'indemnisation des préjudices indirects liés à la modification du solde disponible, ce qui semble en revanche très contestable puisqu’elle précisait explicitement « à l'exclusion d'un éventuel préjudice supplémentaire »), confirmant TGI Paris (9e ch. 2e sect.), 13 septembre 2006 : RG n° 05/1493 ; Cerclab n° 3184 (clause abusive rédigée de telle façon qu'elle est de nature à laisser croire à un client qu'il ne saurait en aucun cas être indemnisé d'un montant supérieur au montant débité de son compte, augmenté des intérêts).
Comp. obsolète : n'est pas abusive la clause qui stipule qu’« en ce qui concerne les délais d'encaissement et les avis d'impayé, notre responsabilité n'est engagée qu'en cas de dépassement des délais d'usage imputable à une faute lourde de notre établissement », dès lors que la référence aux usages n'est pas illicite pas plus que l'exonération de responsabilité en cas de faute légère. CA Lyon (1re ch. civ.), 11 mai 2006 : RG n° 05/00699 ; Cerclab n° 2934, confirmant TGI Lyon (4e ch.), 3 janvier 2005 : RG n° 03/14001 ; Cerclab n° 3068 (s'il n'existe pas de texte législatif ou réglementaire fixant les délais, les délais d'usage sont les délais les plus brefs possible eu égard aux contraintes techniques de traitement des opérations ; en cas de manquement de la banque à ses obligations quant aux délais d'encaissement, sa responsabilité peut être engagée pour faute grave ; association invoquant l’oubli d’un chèque ou l’erreur d’un employé). N.B. Cette solkution n’est plus possible depuis le décret du 18 mars 2009 (art. R. 212-1-6° C. consom., anciennement R. 132-1-6° C. consom. depuis le décret du 18 mars 2009). Elle était doublement discutable à l’époque de ces décisions. D’une part, le renvoi à des usages dont le contenu est inconnu du consommateur est caractéristique d’une asymétrie d’information source communément admise de déséquilibre (V. Cerclab n° 6026). D’autre part, la clause allégeant les obligations du professionnel était en général considérée comme abusive (V. Cerclab n° 6097).
Incidents techniques. V. pour la Commission avant le décret du 18 mars 2009 : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'exonérer l'établissement de crédit de toute responsabilité lorsque les dommages et incidents sont dus à l'utilisation de moyens techniques dont il a la maîtrise. Recomm. n° 05-02/1 : Cerclab n° 2171 (considérant n° 6-1 ; exemple : utilisation de moyens de communication à distance dont l'établissement de crédit peut maîtriser les dysfonctionnements ; arg. : clauses laissant croire au consommateur qu'il ne peut rechercher la responsabilité du professionnel).
N.B. Depuis la réforme du Code civil, la solution va dépendre de l’interprétation donnée par la jurisprudence au nouvel art. 1218 C. civ. définissant la force majeure.