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CA BORDEAUX (1re ch. sect. B), 20 juin 2006

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (1re ch. sect. B), 20 juin 2006
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 1re ch. sect. B
Demande : 04/00873
Date : 20/06/2006
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 17/02/2004
Décision antérieure : TI ANGOULÊME, 26 novembre 2003
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1023

CA BORDEAUX (1re ch. sect. B), 20 juin 2006 : RG n° 04/00873

Publication : Juris-Data n° 308443

 

Extraits : 1/ « Qu'en fait, M. X., médecin spécialiste en […], a conclu deux contrats de télésurveillance, l'un pour son domicile, l'autre pour son cabinet médical ; Attendu qu'en ce qui concerne la seconde convention le médecin a contracté pour les besoins de l'exploitation de son cabinet dont il voulait assurer la protection du matériel contre le vol, l'installation a un rapport direct avec l'activité professionnelle ».

2/ « Qu'en fait l'article 13 fixe la durée du contrat à une période « irrévocable et indivisible de 48 mois » ; Attendu qu'en n'envisageant aucune possibilité de rupture anticipée pour le consommateur, cette stipulation lui est particulièrement défavorable parce qu'elle lui laisse croire que même de manière justifiée, il ne peut mettre fin au contrat avant terme et parce qu'elle l'empêche de recourir durant cette période aux services d'un autre professionnel plus compétitif ; Qu'ainsi le caractère abusif de cette clause la répute non écrite ».

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 20 JUIN 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 04/00873. Nature de la décision : AU FOND.

[minute page 2] Rendu par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450-2° alinéa du Nouveau Code de Procédure Civile, Par Monsieur Pierre Louis CRABOL, Conseiller, en présence de Madame Armelle FRITZ, Greffier, La COUR d'APPEL de BORDEAUX, PREMIERE CHAMBRE SECTION B, a, dans l'affaire opposant :

 

APPELANTE :

LA SA PROTECTION ONE FRANCE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], Représentée par la SCP Solange CASTEJA-CLERMONTEL et Hélène JAUBERT, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Florence BRIAND, Avocat au barreau de MARSEILLE, Appelante d'un jugement rendu le 26 novembre 2003 par le Tribunal d'Instance d'ANGOULÊME suivant déclaration d'appel en date du 17 février 2004,

 

à :

INTIMÉ :

Monsieur X.

de nationalité française, demeurant [adresse], Représenté par la SCP Michel PUYBARAUD, Avoué à la Cour, et assisté de Maître Bernard CATHELINEAU, Avocat au barreau de la Charente, Intimé,

 

Rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue, en audience publique le 21 mars 2006 devant : [minute page 3] Monsieur Louis MONTAMAT, Président, Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller, Monsieur Alain PREVOST, Conseiller, Madame Armelle FRITZ, Greffier, Et qu'il en a été délibéré par les Magistrats du Siège ayant assisté aux débats :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte en date du 6 août 1998, M. X., médecin spécialiste en […], a souscrit auprès de la SA PROTECTION ONE FRANCE deux contrats d'abonnement de télésurveillance pour son domicile et pour son cabinet. Le matériel, objet des contrats, a été régulièrement livré et installé mais l'abonné ne s'est pas acquitté du montant des échéances mensuelles.

Saisi, suivant assignation en date du 20 janvier 2003, par la SA PROTECTION ONE FRANCE contre M. X. d'une demande, fondée sur les dispositions des articles 1134 du Code Civil, en résiliation des contrats d'abonnement et paiement des échéances impayées, le Tribunal d'Instance d'ANGOULÊME, par jugement en date du 26 novembre 2003, a reconnu la qualité de consommateur à M. X. dans le cadre des contrats d'abonnement. En application des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, le Tribunal a réputé non écrites différentes clauses en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif au profit du professionnel entre les obligations respectives des parties. Pour autant, comme le contrat subsiste et qu'il n'est pas dépourvu de cause, la demande en nullité du contrat a été rejetée. Après avoir réputé non écrite la clause relative à la durée du contrat, le Tribunal a relevé que l'abonné était fondé à demander à tout moment la résiliation du contrat pour un motif légitime. La vente du local professionnel puis celle du local d'habitation constituant sans conteste un tel motif, le Tribunal a jugé que la résiliation des contrats avait eu lieu le 29 mars 2002 et le 30 mars 2001 et a donc condamné M. X. au paiement des sommes de 2.565,79 Euros et 1.728,80 Euros. La résiliation étant du fait du consommateur, le Tribunal a ordonné la restitution, à ses frais, du matériel installé. Comme le Tribunal a condamné la SA PROTECTION ONE FRANCE à payer à M. X. la somme de 3.500,00 Euros à titre de dommages et intérêts, la compensation des sommes dues a été ordonnée ainsi que l'exécution provisoire du jugement.

[minute page 4] Dans ses dernières conclusions déposées le 16 juin 2004, la SA PROTECTION ONE FRANCE, au soutien de son appel, demande la réformation du jugement entrepris en faisant valoir la mauvaise foi de l'intimé qui a utilisé le matériel sans aucune contestation et ce, jusqu'à son assignation.

L'appelante soutient également l'impossibilité, pour M. X., de soulever la nullité d'un contrat qui est déjà exécuté. Après avoir souligné le caractère non contraignant de la recommandation numéro 3 de la Commission des Clauses Abusives, l'appelante soutient, en application d'une jurisprudence bien établie, que l'intimé avait bien la qualité de professionnel lors de la conclusion des contrats en cause. En conséquence, il ne peut en aucun cas se prévaloir des dispositions sur les clauses abusives. La résiliation des contrats est donc bien du fait de l'intimé qui n'a, en outre, jamais justifié de son absence de paiement. La SA PROTECTION ONE FRANCE demande donc à la Cour de condamner l'intimé au paiement des sommes de 2.928,63 Euros et de 3.180,16 Euros au titre des échéances impayées. L'appelante sollicite également de la Cour qu'elle condamne M. X. à la restitution du matériel, objet des contrats.

Outre sa condamnation aux entiers dépens, la S.A. PROTECTION ONE FRANCE demande la condamnation de l'intimé au paiement de la somme de 1.500,00 Euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 2 septembre 2004, M. X. demande la confirmation du jugement entrepris en faisant valoir que si, lors de la conclusion du contrat d'abonnement de télésurveillance pour le domicile, il a agi en tant que consommateur, il en va de même s'agissant du contrat souscrit pour son cabinet médical dans la mesure où il n'est pas, ainsi que l'exige la jurisprudence, en rapport direct avec sa profession. M. X. tient également à souligner, ainsi que l'ajustement relevé le Tribunal d'Instance, le caractère abusif de nombreuses clauses contractuelles. En conséquence, c'est à bon droit que le Tribunal a jugé que la résiliation avait eu lieu pour un motif légitime et a limité le montant des sommes dues. Par ailleurs, l'intimé fait valoir qu'en ayant souscrit de tels contrats sans avoir la possibilité d'y mettre un terme avant une période de quatre ans, il a incontestablement subi un préjudice. Enfin, il justifie son absence de paiement des différentes redevances par le défaut d'utilité, pour lui, des deux contrats souscrits. Outre la condamnation de la SA PROTECTION ONE FRANCE aux entiers dépens, M. X. sollicite de la Cour sa condamnation au paiement de la somme de 2.000,00 Euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] SUR CE :

Sur le contrat de télésurveillance du cabinet :

Attendu que les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation prohibent, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, les clauses abusives ;

Qu'en fait, M. X., médecin spécialiste en […], a conclu deux contrats de télésurveillance, l'un pour son domicile, l'autre pour son cabinet médical ;

Attendu qu'en ce qui concerne la seconde convention le médecin a contracté pour les besoins de l'exploitation de son cabinet dont il voulait assurer la protection du matériel contre le vol, l'installation a un rapport direct avec l'activité professionnelle ;

Attendu que les dispositions du Code de la Consommation sont donc inapplicables au contrat de télésurveillance du cabinet médical (contrat n° XX), c'est à tort que le Tribunal n'a pas fait droit aux demandes de la SA PROTECTION ONE FRANCE, du chef de ce contrat ;

 

Sur le contrat de télésurveillance du domicile :

Attendu que suivant les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation les clauses abusives sont réputées non écrites ;

Qu'en fait l'article 13 fixe la durée du contrat à une période « irrévocable et indivisible de 48 mois » ;

Attendu qu'en n'envisageant aucune possibilité de rupture anticipée pour le consommateur, cette stipulation lui est particulièrement défavorable parce qu'elle lui laisse croire que même de manière justifiée, il ne peut mettre fin au contrat avant terme et parce qu'elle l'empêche de recourir durant cette période aux services d'un autre professionnel plus compétitif ;

[minute page 6] Qu'ainsi le caractère abusif de cette clause la répute non écrite ;

Attendu qu'il s'ensuit que l'abonné était fondé à résilier ce contrat pour tout motif légitime, c'est à juste titre que le Tribunal a fixé la résiliation du contrat n° XX au 29 mars 2002, date de la vente de sa maison d'habitation par le consommateur ;

Attendu enfin que le consommateur ne justifie d'aucun préjudice susceptible d'avoir droit à dommages et intérêts ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Réformant partiellement,

Dit que le contrat n° XX ne relève pas des dispositions du Code de la Consommation,

En conséquence,

Condamne M. X. à payer à la SA PROTECTION ONE FRANCE la somme de TROIS MILLE CENT QUATRE VINGT EUROS (3.180,00 Euros) au titre des échéances impayées, correspondant à la période du 17 janvier 2000 au 16 août 2002 pour le contrat de télésurveillance numéro XX,

Déboute M. X. en son action en dommages et intérêts contre la SA PROTECTION ONE FRANCE,

Confirme le jugement déféré dans ses autres dispositions,

[minute page 7] Dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure devant la Cour,

Condamne M. X. aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SCP Solange CASTEJA-CLERMONTEL, et Hélène JAUBERT, Avoués Associés à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Signé par Monsieur Louis MONTAMAT, Président, et par Madame Annelle FRITZ, Greffière.

 

 

 

Est cité par :