CASS. CIV. 1re, 8 juillet 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5217
CASS. CIV. 1re, 8 juillet 2015 : pourvoi n° 14-14942 ; arrêt n° 803
Publication : Legifrance
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 8 JUILLET 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 14-14942. Arrêt n° 803.
DEMANDEUR à la cassation : SCI Saint-Joseph
DÉFENDEUR à la cassation : société Dexia BIL
Mme Batut (président), président. SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles 16 et 783 du code de procédure civile ;
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les conclusions postérieures à l’ordonnance de clôture par lesquelles une partie demande la révocation de l’ordonnance de clôture ou le rejet des débats des conclusions ou productions de dernière heure de l’adversaire sont recevables ;
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Saint-Joseph a assigné la société Dexia BIL en réparation pour manquement à son obligation de conseil devant le tribunal de grande instance de Grasse ; que cette dernière a soulevé l’incompétence du juge français en raison de la clause attributive de juridiction au tribunal de première instance de Luxembourg, stipulée au contrat de prêt conclu entre les parties ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, pour statuer sur les demandes de la société Saint-Joseph, l’arrêt vise les conclusions de cette dernière du 24 septembre 2012 et celles de la société Dexia BIL du 30 août 2013 ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Qu’en statuant ainsi, sans se prononcer sur les conclusions de la société Saint-Joseph déposées après l’ordonnance de clôture du 3 septembre 2013 pour en solliciter la révocation, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
Met hors de cause M. Y. ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il a confirmé l’ordonnance ayant ordonné la disjonction de l’instance, l’arrêt rendu le 24 octobre 2013, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ;
Condamne la société Dexia banque internationale aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Dexia banque internationale, la condamne à payer à la SCI Saint-Joseph la somme de 3.000 euros et condamne la SCI Saint-Joseph à payer à M. Y. la somme de 3.000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille quinze.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Saint-Joseph
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit le tribunal de grande instance de Grasse incompétent pour statuer sur le litige opposant la SCI Saint-Joseph à la société Dexia Banque Internationale à Luxembourg, d’avoir renvoyé la SCI Saint-Joseph à mieux se pourvoir et d’AVOIR ordonné la disjonction de l’instance poursuivie à l’égard de Monsieur Y. devant le tribunal de grande instance de Grasse
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE « Vu les conclusions déposées le 24 septembre 2012 par la SCI SAINT-JOSEPH au terme desquelles celle-ci sollicite la réformation de l’ordonnance du juge de la mise en état et :
- le constat du caractère non écrit de la clause attributive de compétence figurant au contrat de prêt au regard de ce qu’elle n’a pas la qualité de commerçant ni celle de professionnelle au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation
- le constat de ce que la clause du contrat de prêt autorisant la banque DEXIA BIL à pouvoir déroger seule à l’attribution de juridiction n’entre pas dans le cadre du Règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000
- le rejet de l’exception de compétence territoriale soulevée par la société DEXIA BIL
- la mise en demeure de cette société de conclure sur le fond du litige
- la condamnation de la société DEXIA BIL aux entiers dépens et en paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
- À l’appui de ses prétentions, la SCI SAINT-JOSEPH fait valoir :
- qu’en droit français, les clauses attributives de compétence sont prohibées entre non commerçants et sont donc nulles
- qu’elle n’a pas la qualité de commerçante ni de professionnelle se présentant, en effet, comme une société familiale, propriétaire d’un seul bien immobilier et sans aucune expérience précédente en matière de promotion immobilière ou d’investissements tels que ceux objets du contrat
- qu’une personne morale peut être considérée comme non professionnelle et se prévaloir du bénéfice des dispositions protectrices contre les clauses abusives de compétence
- que l’article 17 du contrat de prêt laissant possibilité à la seule société DEXIA de déroger à l’application de la clause d’attribution de compétence créée un déséquilibre contractuel et est contraire au règlement communautaire.
Vu les dernières conclusions déposées le 30 août 2013 par la société DEXIA BIL aux termes desquelles celle-ci sollicite la confirmation de l’ordonnance querellée et, subsidiairement, d’être invitée à conclure sur le fond du litige. Elle soutient la condamnation de la SCI SAINT-JOSEPH aux dépens et en paiement de la somme de 15.000 roues (euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
À l’appui de ses prétentions, la société DEXIA BIL fait valoir :
- que le droit applicable à un contrat conclu entre deux parties résidant dans deux états membres de l’union européenne est défini par l’article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 comme celui qui a été convenu entre les parties au contrat soit le droit du Luxembourg
- que les parties ont accepté de soumettre leur litige au tribunal luxembourgeois et sont par conséquent liées par ladite clause attributive de compétence insérée à l’acte notarié
- que la SCI ne peut se prévaloir de sa qualité de simple consommateur et prétendre à l’application des dispositions de l’article L. 132-1 du code de la consommation
- que la disposition permettant à la banque de déroger à la clause attributive de compétence ne poursuit aucun objectif frauduleux ou abusif, qu’elle est conforme à la volonté des parties et n’a pas été mis en œuvre Vu les conclusions déposées par le 8 mars 2012, la SCP Z.- A.- B., anciennement Y. Z. et par Me Y. au terme desquelles ceux-ci sollicitent :
- la mise hors de cause de la SCP notariée non partie à l’instance et la condamnation de la SCI SAINT-JOSEPH à lui payer la somme de 2.000 €
Sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
- le constat qu’il n’est formé aucune demande de l’encontre de Me Y., non concerné l’applicabilité de la clause attributive de compétence aux rapports contractuels entre DEXIA BIL et la SCI SAINTJOSEPH
- l’inopposabilité de la clause attributive de compétences à Me Y.
- la confirmation de l’ordonnance querellée sur ce point
- la condamnation de la SCI SAINT-JOSEPH aux dépens et à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et celle de 4.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Au soutien de leurs prétentions, la société de notaire et Me Y. font valoir :
- que la SCP de notaire n’a jamais été partie à l’instance ni assignée
- que Me Y. est étranger aux débats sur la compétence, l’ordonnance du juge de la mise en état, non contestée sur ce point, ayant désigné le tribunal de grande instance de Grasse pour connaître de l’action en responsabilité dirigée contre lui par la SCI SAINT-JOSEPH » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE les conclusions postérieures à la révocation de l’ordonnance de clôture par lesquelles une partie demande la révocation de cette ordonnance pour pouvoir répondre aux conclusions de la partie adverse, déposées à la veille de cette ordonnance, sont recevables ; qu’en statuant au visa des conclusions de la société DEXIA BIL déposées le 30 août 2013 sans se prononcer sur les dernières conclusions de la SCI Saint Joseph du 18 septembre 2013 sollicitant la révocation de l’ordonnance de clôture du 3 septembre 2013 pour pouvoir y répliquer, la cour d’appel a violé les articles 15, 16, 783 et 907 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit le tribunal de grande instance de Grasse incompétent pour statuer sur le litige opposant la SCI Saint-Joseph à la société Dexia Banque Internationale à Luxembourg, d’avoir renvoyé la SCI Saint-Joseph à mieux se pourvoir et d’AVOIR ordonné la disjonction de l’instance poursuivie à l’égard de Monsieur Y. devant le tribunal de grande instance de Grasse
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Les parties sont liées par un contrat de prêt passé en la forme authentique en l’étude de Maître Y., notaire à [ville C.] ; que celui-ci, contient sous le titre XII de ses conditions générales une clause attributive de compétence rédigée en ces termes : « Le présent crédit ainsi que tous les rapports juridiques de la banque avec le crédité et les garants sont régis par le droit luxembourgeois et la ville de Luxembourg en est le lieu d’exécution.
Toutes les contestations seront soumises aux tribunaux d’arrondissement de et à Luxembourg. Toutefois la banque se réserve la faculté de déroger à cette attribution de juridiction si elle le considère comme opportun » ; que l’article 17 du contrat dispose encore : « Chaque fois que les lois françaises le permettent les contestations au sujet des présentes seront soumises au tribunal d’arrondissement du Luxembourg. Toutefois, la banque se réserve la faculté de déroger à cette attribution de juridiction si elle le considère comme opportun. Le présent contrat est soumis au droit luxembourgeois pour tout ce qui n’est pas de la compétence exclusive de la loi française. » ; qu’il est enfin stipulé que : « L’établissement bancaire et l’acquéreur sont liés par un contrat de prêt non concerné par les dispositions de l’article L. 132-2 du code de la consommation régularisé entre eux le 28 mars 2006 dont un exemplaire demeurera annexé après mention » ; que ces dispositions claires et dépourvues d’ambiguïté ont été expressément approuvées par la SCI SAINT-JOSEPH dans l’acte authentique ; que pour autant, cette dernière les conteste à présent motif pris de ce que les clauses attributives de compétence sont prohibées en droit français si ce n’est lorsqu’elles sont stipulées entre commerçants ; que la SCI SAINT-JOSEPH se réfère à cet égard à l’article 48 du code de procédure civile qui dispose : « Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite, à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contractées en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée, de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée. » ; que s’agissant d’apprécier la qualité sous laquelle la SCI SAINT-JOSEPH est intervenue au contrat, professionnel ou simple consommateur, il convient de se référer à son objet social, à la nature de l’opération envisagée et à la qualification de ses membres ; que l’objet social de la SCI SAINT-JOSEPH est défini par ses statuts ; que celui-ci poursuit : « l’acquisition, la possession, la mise en valeur et l’administration notamment par location de tous immeubles et biens et droits immobiliers situés en France ou à l’étranger, tous emprunts assortis ou non de sûretés réelles destinées au financement de l’achat d’immeubles, fractions d’immeubles. Et plus généralement toutes opérations quelconques se rattachant directement ou indirectement à l’objet social pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société » ; que par ailleurs, son principal associé et gérant, M. X., s’est identifié comme promoteur immobilier dans ses relations avec la banque ; que l’opération envisagée a enfin consisté à obtenir un financement pour une opération immobilière d’une certaine envergure et complexité au Venezuela. L’ensemble de ces éléments démontre que l’opération poursuivait une visée commerciale qui s’évince de l’objet social très général de la SCI lequel s’applique à toutes transactions immobilières sans limitation qui se déduit encore de la nature, de l’importance et de la complexité de l’investissement projeté ne permettant pas de l’assimiler à une simple affaire à caractère familial et qui se rattache enfin à la qualité de promoteur affichée par son gérant ; que l’ordonnance du juge de la mise en état sera par conséquent confirmée en ce qu’elle a considéré que la SCI SAINT-JOSEPH a agi en tant que professionnelle soumise, à ce titre, à la clause attributive de compétence à laquelle elle a adhéré, sans possibilité de se prévaloir de règles tirées du droit interne ne bénéficiant qu’aux non professionnels dans la catégorie desquels elle n’entre pas ; que par ailleurs la SCI SAINT-JOSEPH reproche au contrat d’insérer une clause par laquelle seule la banque DEXIA peut renoncer à la clause attributive de compétence, celle-ci pouvant, « à son choix », se soumettre au droit qui lui est le plus favorable ; que sur ce point, l’article 23 du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 applicable à la détermination de la compétence judiciaire en matière civile et commerciale dans l’espace de la communauté européenne, précise notamment : « si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un Etat membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un Etat membre pour connaître des différents nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties » ; qu’en l’espèce, les parties ont inséré une clause dans l’acte notarié au terme de laquelle « Chaque fois que les lois françaises le permettent les contestations au sujet des présentes seront soumises au tribunal d’arrondissement du Luxembourg. Toutefois, la banque se réserve la faculté de déroger à cette attribution de juridiction si elle le considère comme opportun. Le présent contrat est soumis au droit luxembourgeois pour tout ce qui n’est pas de la compétence exclusive de la loi française. » ; que la SCI Saint-Joseph soutient le caractère illicite de cette clause en raison de son caractère potestatif conférant à la banque la possibilité de choisir seule le tribunal compétent, cette faculté unilatérale créant un déséquilibre contractuel ; que cependant, cette disposition du contrat permet, tout au plus, à la BANQUE DEXIA de déroger à la clause attributive de compétence sans pour autant lui laisser le choix d’un régime mieux adapté à ses intérêts, cette renonciation renvoyant de fait à l’application du droit commun ; qu’il ne s’agit par conséquent pas d’une clause permettant de soumettre, à discrétion et de façon imprévisible, le litige à un juge quelconque faisant application de règles non identifiées au moment de la conclusion du contrat ; qu’au contraire, cette clause a été admise devant notaire par un professionnel, la SCI SAINTJOSEPH, en mesure de réaliser les incidences qui pouvaient en résulter quant à la soumission ordinaire d’éventuels litiges à la justice luxembourgeoise dont relève la société DEXIA avec laquelle elle a traité, ou bien, selon l’option laissée à la BANQUE DEXIA, à l’application du droit commun comme étant celui de l’un ou l’autre des droits nationaux applicables français ou luxembourgeois ; que cette stipulation n’apparaît donc en rien abusive ou léonine, dès lors qu’elle a été convenue entre professionnels avisés, devant notaire et qu’elle n’ouvre jamais à la banque que la possibilité de choisir l’application des règles de droit interne connues de la SCI SAINTJOSEPH ; que ce moyen sera écarté »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « L’article 771 du code de procédure civile énonce que le juge de la mise en état est seul compétent jusqu’à son dessaisissement pour statuer sur les exceptions de procédure, dont l’exception d’incompétence prévue à l’article 75 de ce même code fait partie ; que l’article 75 du code de procédure civile prévoit en effet que s’il est prétendu que la juridiction saisie est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit la motiver à peine d’irrecevabilité, et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée ; qu’en l’espèce le contrat désigne comme compétents pour tout différend naissant du contrat de prêt ou relatif à ce contrat, les tribunaux du Luxembourg ; que l’alinéa Ier de l’article L. 132-1 du cade de la consommation énonce que : « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ; que la SCI SAINT JOSEPH ne peut se prévaloir du bénéfice de ces dispositions aux motifs qu’elle ne peut prétendre un consommateur ou encore un non professionnel ; que cela ressort des éléments versés aux débats ; qu’en effet il résulte des statuts de la SCI SAINT JOSEPH mis à jour au 4 septembre 2001 que l’objet social de cette société est défini pour être :
« L’acquisition, la possession, la mise en valeur et l’administration notamment par location de tous immeubles et biens et droits immobiliers situés en France ou à l’étranger, tous emprunts assortis ou non de sûretés réelles destinés au financement de l’achat d’immeubles ou fractions d’immeuble. Et plus généralement toutes opérations quelconques se rattachant directement ou indirectement à l’objet social pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société » ; que dans un courrier en date du 17 janvier 2006, la société DEXIA BIL a adressé à Monsieur X. gérant de la SCI une proposition de crédit, sur « la base des informations que vous nous avez transmises » est il précisé ; que dans ce courrier, et au titre des informations il est indiqué que le crédit visait une opération de « promotion immobilière - COGEBA AZUR », avec une avance à terme de 1.430.000 € maximum, destinée à être utilisée à concurrence de 600.000 € pour le financement d’un projet immobilier au Venezuela, et pour 830.000 € investis dans un portefeuille DEXIA ; que la lecture des statuts met en évidence que trois des quatre associés déclarent exercer les professions de promoteur immobilier, juriste et négociatrice en immobilier ; que selon procès-verbal d’assemblée générale datée du 5 avril 2006, SCI SAINT JOSEPH a statué sur la décision de contracter le prêt escompté auprès de la société DEXIA BIL ; que l’ordre du jour a précisé que l’assemblée était réunie à l’effet « d’emprunter la somme de 800.000 Euros dans le cadre d’une transaction immobilière et d’un investissement dans un portefeuille’ ; que Monsieur X. qui a agi pour le compte de la SCI a rempli les différents documents soumis par la société DEXIA BANQUE BIL en indiquant qu’il exerçait la profession de promoteur immobilier ; que l’ensemble de ces éléments, démontre que le contrat de prêt que La SCI SAINT JOSPEH a souscrit auprès de la société DEXIA BIL s’inscrivait dans son objet social à savoir notamment de contracter tous emprunts assortis ou non de sûretés réelles destinés au financement de l’achat d’immeubles ou fractions d’immeuble, en France ou à l’étranger ; que le prêt a été souscrit dans le but de réaliser une promotion immobilière à l’étranger, et de procéder à un investissement ; que c’est donc bien en tant que professionnel que la SCI SAINT JOSEPH a contracté le prêt en litige, et, à ce titre elle est mal fondée à se prévaloir de l’application des dispositions de l’article L 132-1 du code de la consommation ; que l’article 23 du Règlement européen n° 44/ 2001 est ainsi libellé : « Si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Cette convention attributive de juridiction est conclue :
a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite, ou
b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles, ou
c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.
2. Toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite.
3. Lorsqu’une telle convention est conclue par des parties dont aucune n’a son domicile sur le territoire d’un État membre, les tribunaux des autres États membres ne peuvent connaître du différend tant que le tribunal ou les tribunaux désignés n’ont pas décliné leur compétence.
4. Le tribunal ou les tribunaux d’un État membre auxquels l’acte constitutif d’un trust attribue compétence sont exclusivement compétents pour connaître d’une action contre un fondateur, un trustee ou un bénéficiaire d’un trust, s’il s’agit des relations entre ces personnes ou de leurs droits ou obligations dans le cadre du trust ;
5. Les conventions attributives de juridiction ainsi que les stipulations similaires d’actes constitutifs de trust sont sans effet si elles sont contraires aux dispositions des articles 13, 17 et 21 ou si les tribunaux à la compétence desquels elles dérogent sont exclusivement compétents » ; que le Règlement n° 44/2001 est entré en vigueur le 1er mars 2002, et il a vocation à s’appliquer à toutes les procédures introduites postérieurement à cette date, dans tous les Etats membres de l’Union Européenne, à laquelle le Luxembourg appartient ; que ce règlement européen a donc vocation à s’appliquer au contrat de prêt, objet du litige, pour avoir été conclu le 4 mai 2006, entre la société DEXIA BIL de nationalité luxembourgeoise ; que la clause attributive de juridiction doit désigner la juridiction d’un Etat membre, ce qui est le cas en l’espèce ; que l’une des parties au moins, a son domicile sur le territoire d’un Etat membre, ce qui est le cas de la société DEXIA BIL domiciliée à Luxembourg ; que la nature de la procédure engagée par la SCI SAINT JOSEPH n’est pas exclue du champ d’application du Règlement européen ; que l’article 15 qui renvoie à l’article 17 du même texte, du Règlement n° 44/2001 édicte des règles protectrices du consommateur ; que cette disposition vise plus particulièrement les contrats conclus par une personne, le consommateur, pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle ; que comme cela a été examiné plus haut la SCI SAINT JOSPEH n’est pas intervenue en tant que consommateur mais en qualité de professionnel, et elle ne peut prétendre à l’application de ces dispositions ; que c’est donc à bon droit que la société DEXIA BIL, à raison de la clause attributive de compétence du tribunal d’arrondissement de Luxembourg a soulevé l’incompétence du tribunal de grande instance de GRASSE ; que la compétence du tribunal de grande instance de GRASSE demeure au titre de l’action diligentée par la SCI SAINT JOSEPH à l’encontre de Me Y., la clause attributive de juridiction invoquée par la SA DEXlA BANQUE BIL, qui n’est pas partie à l’acte de prêt en litige lui étant inopposable ; qu’il convient d’ordonner en conséquence la disjonction de l’instance »,
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE la clause attributive de juridiction qui ne lie qu’une des parties contractantes et réserve à l’autre des parties la faculté d’y déroger pour saisir, non le tribunal que la clause désigne, mais tout autre tribunal compétent revêt un caractère potestatif à l’égard de cette dernière, est contraire à l’objet et à la finalité de la prorogation de compétence prévue par l’article 23 du règlement n° 44/2001/CE du 22 décembre 2000 et ne peut faire obstacle à la détermination de la juridiction compétente selon les règles définies par l’article 5 du règlement désignant le tribunal du lieu de fourniture de la prestation de services prévue au contrat ou par l’article 6 attribuant compétence, en cas de pluralité de défendeurs, au tribunal du lieu du domicile de l’un des défendeurs ; qu’en considérant que la clause prévue à l’acte de prêt du 4 mai 2006 attribuant compétence au tribunal d’arrondissement du Luxembourg pour connaître des contestations relatives au contrat chaque fois que la loi française le permet mais réservant à la société Dexia Banque Internationale à Luxembourg « la faculté de déroger à cette attribution si elle le considère comme opportun » était valable, pour dire le tribunal de grande instance de Grasse incompétent, la cour d’appel a violé les articles 5, 6 et 23 du règlement n° 44/2001/CE du 22 décembre 2000.
- 5810 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans l’espace - Conflits de lois
- 5856 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014
- 5857 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Présentation générale
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5872 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Activité et objet social
- 5896 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Objet du contrat - Importance du contrat
- 5920 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Immeubles - Contrats immobiliers conclus par des sociétés immobilières
- 6149 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Clauses attributives de compétence - Compétence territoriale
- 6226 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Droit applicable
- 6240 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Accès au juge