6112 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat par le professionnel - Présentation générale
- 6073 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Interprétation du contrat
- 6097 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations non monétaires - Allègement des obligations du professionnel
- 6113 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses sur les causes d’exonération et la force majeure
- 6114 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 212-1-6° C. consom.)
- 6115 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Présentation et arguments génériques
- 6116 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Typologie selon la nature des obligations
- 6117 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 – Arguments propres aux clauses limitatives
- 6118 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Retard d’exécution
- 6126 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Suspension du contrat - Exception d’inexécution du consommateur
- 6128 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Résolution ou résiliation pour manquement - Inexécution du professionnel
- 6142 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Preuve - Encadrement des modes de preuve
- 6621 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Régime général - Obligations de l’emprunteur - Déchéance et résiliation - Présentation générale
- 6123 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Retard d’exécution
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6112 (12 octobre 2023)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE
INEXÉCUTION DU CONTRAT PAR LE PROFESSIONNEL - PRÉSENTATION GÉNÉRALE
Présentation. L’inexécution du contrat par le professionnel, en violation de l’art. 1103 C. civ. (1134 ancien), offre au consommateur plusieurs possibilités. L’ordonnance du 10 février 2016 réformant le Code civil a créé un nouvel art. 1217 C. civ. qui liste les options offertes. Selon ce texte, « La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut : - refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ; - poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ; - solliciter une réduction du prix ; - provoquer la résolution du contrat ; - demander réparation des conséquences de l'inexécution. Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
À condition qu’il ait prouvé au préalable l’inexécution du professionnel (A) et, dans certains cas, qu’il ait mis en demeure le professionnel (B), l’issue respectant le mieux les prévisions des parties consiste à recourir à l’exécution forcée (C). Le consommateur peut aussi agir en responsabilité civile, ce qui peut soulever le problème des clauses par lesquelles le professionnel a allégé ses obligations (Cerclab n° 6097), augmenté les causes d’exonération de sa responsabilité (Cerclab n° 6113) ou celles par lesquelles il a limité ou exclu cette responsabilité (Cerclab n° 6114). L’inexécution peut également justifier que le consommateur suspende l’exécution de sa propre obligation (Cerclab n° 6126) et même, si le manquement est grave et persistant, qu’il demande la résolution ou la résiliation du contrat (Cerclab n° 6128).
A. PREUVE DE L’INEXÉCUTION
Annexe à la directive du 5 avril 1993 et à l’ancien art. L. 132-1 C. consom. L’annexe 1.m) à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., abrogée à compter du 1er janvier 2009, reprenant les termes de l’annexe à la directive n° 93/13/CEE du 5 avril 1993 (où elle est toujours présente), disposait que pouvait être considérées comme abusives, si la preuve d’un déséquilibre significatif était rapportée, les « clauses ayant pour objet ou pour effet d’accorder au professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou le service fourni est conforme aux stipulations du contrat ou de lui conférer le droit exclusif d’interpréter une quelconque clause du contrat ».
Décret du 18 mars 2009. Cette solution a été reprise par le décret du 18 mars 2009, avec une sanction beaucoup plus énergique, puisque la clause a été rangée dans les clauses « noires ». Aux termes de l’art. R. 212-1-4° C. consom. (reprenant l’ancien art. R. 132-1-4° C. consom., dans sa rédaction résultant du décret n° 2009-302 du 18 mars 2009, sauf pour la protection des non-professionnels reportée à l’art. R. 212-5 C. consom.), est de manière irréfragable présumée abusive et dès lors interdite, la clause ayant pour objet ou pour effet de « accorder au seul professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou les services fournis sont conformes ou non aux stipulations du contrat ou lui conférer le droit exclusif d’interpréter une quelconque clause du contrat ». § Sur ce texte, sous l’angle de l’interprétation, V. Cerclab n° 6073. § Sur la preuve de l’inexécution, V. pour une présentation générale Cerclab n° 6142.
B. MISE EN DEMEURE
Présentation. Selon l’ancien art. 1146 C. civ., « les dommages et intérêts ne sont dus que lorsque le débiteur est en demeure de remplir son obligation, excepté néanmoins lorsque la chose que le débiteur s’était obligé de donner ou de faire ne pouvait être donnée ou faite que dans un certain temps qu’il a laissé passer. La mise en demeure peut résulter d’une lettre missive, s’il en ressort une interpellation suffisante. » Le nouvel art. 1231 C. civ., dans sa rédaction résultant de l’ordonnance du 10 février 2016, dispose « à moins que l'inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement été mis en demeure de s'exécuter dans un délai raisonnable ». C’est désormais l’art. 1344 C. civ. qui définit la mise en demeure : « le débiteur est mis en demeure de payer soit par une sommation ou un acte portant interpellation suffisante, soit, si le contrat le prévoit, par la seule exigibilité de l'obligation ».
L’exigence d’une mise en demeure est une question de portée générale, qui peut concerner aussi bien les manquements du professionnel, que ceux du consommateur. Par ailleurs, la nécessité d’une mise en demeure est présente dans de multiples situations : exécution forcée (art. 1221 et 1222), réduction de prix (art. 1223), dommages et intérêts pour inexécution, déchéance du terme (V. Cerclab n° 6621), suspension du contrat (V. Cerclab n° 6125 et n° 6126), résolution et résiliation du contrat (V. Cerclab n° 6128et n° 6129).
Sous l’angle de la protection contre les clauses abusives, cependant, les clauses rencontrées en pratique sont celles qui dispensent le professionnel de mettre en demeure le consommateur, notamment pour son obligation de payer le prix à la date convenue (V. Cerclab n° 6123). En théorie, une clause concernant un manquement du professionnel est cependant concevable.
1/ Elle pourrait avoir tout d’abord pour effet d’imposer une mise en demeure lorsque celle-ci n’est pas nécessaire : une telle serait clause sans doute abusive dans le cas prévu par l’art. 1231 C. civ., puisqu’elle instituerait un obstacle à l’indemnisation du consommateur, sans aucune utilité pratique, le professionnel devant à l’évidence se préparer à une exécution à la date convenue.
2/ Elle pourrait aussi imposer une forme particulière à la mise en demeure envoyée par le consommateur. Si la formalité exigée reste réaliste, d’un coût faible et si elle est imposée également aux mises en demeure adressées par le professionnel (condition de réciprocité), le caractère abusif peut être écarté (V. Cerclab n° 6128 pour la résolution).
C. DROIT DU CONSOMMATEUR DE RECOURIR À L’EXÉCUTION FORCÉE
Présentation. Un contrat est conclu pour être exécuté : il fait la loi des parties (art. 1103 C. civ., anciennement art. 1134 C. civ.). Selon le nouvel art. 1221 C. civ., « le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier ». Le consommateur est donc en droit d’obtenir le bien ou la prestation promis, y compris sous la contrainte, sauf si cette exécution est impossible ou d’un coût manifestement disproportionné.
N.B. La réforme supprime l’ancien art. 1142 C. civ. (« toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d'inexécution de la part du débiteur »), dont l’application avait provoqué de nombreuses hésitations en jurisprudence. Le texte nouveau semble plus favorable à l’exécution forcée et devrait supprimer toutes les discussions antérieures sur l’exécution forcée ou non des obligations de faire. Cependant, la jurisprudence antérieure posait le principe que l’exécution forcée ne pouvait porter atteinte à la liberté individuelle du débiteur. Compte tenu de son fondement, cette solution ne peut que se maintenir. Si l’hypothèse est sans doute moins fréquente pour un professionnel qui propose le plus souvent une prestation standard à des clients indéterminés, elle ne peut être totalement exclue (médecin, artiste peintre).
Clause omettant de rappeler la possibilité d’exécution forcée. V. par exemple : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au vendeur en cas de résiliation imputable à l’acheteur de conserver l’acompte, sans rappeler qu’en cas de défaillance du professionnel, le consommateur a le choix entre l’exécution forcée de la livraison ou (et) l’allocation de dommages-intérêts. Recomm. n° 94-05/1°-B : Cerclab n° 2210 (vente de voitures d’occasion et contrats de garantie ; considérant évoquant aussi le fait qu’aucune indemnité équivalente n’est prévue à la charge du vendeur qui ne livrerait pas le véhicule).
Clauses excluant l’exécution forcée. Serait certainement abusive interdisant tout recours à l’exécution forcée, puisqu’elle contredirait la force obligatoire du contrat de façon frontale. Une clause qui étendrait les exceptions prévues par l’art. 1221 C. civ. pourraient également être jugée déséquilibrée.
V. avant la réforme du Code civil : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination, dans les contrats de fourniture d’accès internet à titre onéreux, des clauses ayant pour objet ou pour effet de restreindre à la résiliation du contrat les droits de l’abonné insatisfait du service ou contestant la facturation. Recomm. n° 03-01/II-21° : Cerclab n° 2200 (considérant : le contrat est significativement déséquilibré lorsqu’il met le professionnel à l’abri de l’exécution forcée de ses prestations dans les conditions convenues, d’autant plus que la résiliation n’est pas sans inconvénient pour son cocontractant qu’elle privera de son adresse électronique).
Est abusive la clause prévoyant que l’abonné non satisfait des services du fournisseur ne peut que résilier le contrat, qui a pour effet de priver le consommateur d’obtenir l’exécution forcée par le professionnel des obligations auxquelles il a consenties et qui l’oblige à se priver de son adresse électronique, alors que l’ancien art. 1184 C. civ. lui ouvre droit à cette exécution forcée, y compris par voie de référé par application des dispositions de l’art. 809 alin. 2 CPC. TGI Nanterre (1re ch. sect. A), 2 juin 2004 : RG n° 02/03156 ; site CCA ; Cerclab n° 3993, sur appel CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 15 septembre 2005 : RG n° 04/05564 ; Cerclab n° 3146 ; Juris-Data n° 2004-283144 (clause plus discutée en appel).
Clauses concernant l’évaluation du montant de la créance : droit local. Conformément à la dernière jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 2e, 25 juin 2020, pourvoi n° 19-23219), il convient de considérer que dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, constitue un titre exécutoire, au sens de l'article L. 111-5 du code CPCex., dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, un acte notarié de prêt qui a mentionné, au jour de sa signature, outre le consentement du débiteur à son exécution forcée immédiate, le montant du capital emprunté et ses modalités de remboursement permettant, au jour des poursuites, d'évaluer la créance dont le recouvrement est poursuivi ; d’autre part, l’art. 108 de la loi du 23 mars 2019 a modifié les dispositions de l'art. L. 111-5 en ajoutant que la prétention peut avoir pour objet le paiement d'une somme d'argent déterminable et non pas seulement déterminée ; cette nouvelle disposition, entrée en vigueur le 25 mars 2019, est applicable aux actes d'exécution pratiqués après cette date, quelle que soit la date de l'acte notarié. CA Colmar (12e ch.), 21 octobre 2021 : RG n° 21/00333 ; arrêt n° 107/21 ; Cerclab n° 9201, pourvoi contre T. exéc. Mulhouse, 23 septembre 2019 : Dnd. § Certes, en l’espèce, le contrat de prêt comporte une clause selon laquelle l'emprunteur et, s'il y a lieu la caution, donnent mandat à un représentant habilité du prêteur, à l'effet de, en son nom et pour son compte, reconnaître le solde de leur dette par acte authentique en l'étude du notaire soussigné, ou de ses successeurs, les obliger au remboursement avec tous intérêts, frais et accessoires, en la soumettant à l'exécution forcée immédiate dans tous leurs biens meubles et immeubles présents et à venir, conformément aux dispositions légales et il est aussi précisé que le mandat est donné dans l'intérêt commun du mandant et du mandataire et ne peut être révoqué que par consentement mutuel des parties ; mais ce mandat conféré « en tant que de besoin » n'a vocation à s'appliquer que dans l'hypothèse d'une créance non déterminée et non déterminable, telle la créance résultant d'une ouverture de crédit en compte devant donner lieu à établissement d'un arrêté de compte ; tel n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant d'un prêt remboursable en 240 mensualités dont le solde est déterminé ; indépendamment de la validité ou non de la clause de mandat, la banque dispose bien d'un titre exécutoire, au titre du seul contrat de prêt, lui ayant permis d'engager régulièrement la procédure d'exécution forcée immobilière. CA Colmar (12e ch.), 21 octobre 2021 : RG n° 21/00333 ; arrêt n° 107/21 ; Cerclab n° 9201, pourvoi contre T. exéc. Mulhouse, 23 septembre 2019 : Dnd.