CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 5 juin 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 2952
CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 5 juin 2012 : RG n° 09/00977
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « L'acquiescement au jugement rend sans objet l'examen des dispositions déclarées nulles par le jugement de première instance. Seront ainsi seules examinées celles des articles 2 alinéa 3 des conditions générales, 5 et 6 du règlement intérieur dans leur nouvelle version rectifiée au vu du jugement. »
2/ « - concernant l'article 2 alinéa 3 des conditions générales du nouveau contrat : La mention « sans indemnisation » comme sanction automatique d'une exclusion relevant de la seule appréciation du professionnel, même au conditionnel (« pourrait »), est constitutive d'une clause pénale au seul bénéfice du professionnel. Cette disposition est constitutive d'un déséquilibre que le premier juge a à bon droit considéré comme significatif pour justifier son illicéité comme clause abusive.
- concernant l'article 5 du règlement intérieur : Désormais dépourvues de sanction, les injonctions d'hygiène et de sécurité des effets personnels telles que formulées par cette disposition ne créent pas de déséquilibre au détriment du pratiquant justifiant qu'elle soit déclarée abusive.
- concernant l'article 6 du règlement intérieur : l'octroi à la seule Société SPORT ASSET de l'avantage automatique résultant de la conservation à titre de clause pénale du montant de l'abonnement pour sanctionner la mise en œuvre de cours « sauvages » ou « coaching » dans le cadre de la salle de sport se déduit naturellement de la formulation « sans indemnité d'aucune sorte » de cette disposition. Elle crée certes un déséquilibre significatif, mais elle ne s'applique qu'au seul « coach » qui perd dès lors la qualité de consommateur, de client ou d'élève, lequel n'est pas expressément visé par cette disposition. La qualité de non professionnel ou consommateur ne pouvant plus être reconnue à l'enseignant « sauvage », la clause ne pourra être qualifiée d'abusive. ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 5 JUIN 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 09/00977. Appel d'un Jugement (R.G. n° 06/3180) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, en date du 26 janvier 2009, suivant déclaration d'appel du 20 février 2009.
APPELANTE :
Société SPORT ASSET, ayant pour enseigne CLUB GYMNESIA EURL,
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, représenté par la SCP GRIMAUD, avoués jusqu'au 31 décembre 2011 et avocats au barreau de GRENOBLE depuis le 1er janvier 2012, postulant, plaidant par Maître Alain FESSLER, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
UFC 38 UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS DE L'ISÈRE QUE CHOISIR, Association Loi 1901,
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, représenté par la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, avoués jusqu'au 31 décembre 2011 et avocats au barreau de GRENOBLE depuis le 1er janvier 2012, postulant, plaidant par Maître M'BAREK de la SCP CONSOM'ACTES, avocats au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Dominique FRANCKE, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,
Assistés lors des débats de Hélène LAGIER, greffier
DÉBATS : A l'audience publique du 27 février 2012, Monsieur FRANCKE a été entendu en son rapport. Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par jugement du 26 janvier 2009, le tribunal de grande instance de GRENOBLE a, sur assignation de l’UFC 38 du 12 juillet 2006 :
- déclaré l'UFC 38 recevable en ses prétentions de suppression des clauses abusives ou illicites du contrat proposé par la SARL SPORT ASSET exerçant sous l'enseigne « CLUB GYMNESIA » ;
- rejeté la demande de l'association UFC Que Choisir 38 tendant à voir déclarer illicite ou abusive l'article 2.2 alinéa 1 des conditions générales ainsi rédigée : « l'accès au club est réglementé et suppose en plus de la présentation obligatoire par l'abonné de sa carte de membre, le strict respect par ce dernier du règlement intérieur tel que rappelé au contrat et/référencés (sic) à ce dernier, mais en tout état de cause portée (sic) à la connaissance de l'abonné par voie d'affichage au club. L'abonné s'engage par conséquent à respecter en toutes circonstances et tout moment les consignes de bonne conduite, d'hygiène et sécurité qui pourrait (sic) lui être rappelées par voie d'affichage sur tout document commercial. » ;
- déclaré illicites ou abusives et réputées non écrites les 14 clauses suivantes figurant dans les contrats proposés par la SARL SPORT ASSET :
* article 1.1 alinéa 1 des conditions générales : « la résiliation du contrat ne peut intervenir du fait de l’abonné qu'à son échéance contractuelle. La non-utilisation définitive ou temporaire des installations et/ou des prestations proposées au titre du contrat n'ouvre à l'abonné aucun droit à résiliation à quelque titre que ce soit, ni prolongation, ni remboursement. » ;
* article 1.1 alinéa 2 des conditions générales : « sans préjudice de ce qui précède, il est toutefois précisé que l'abonné qui aura souscrit à l'option « assurance » qui, dans ce cas de maladie ou d'accident grave, de décès, de grossesse, de licenciement économique ou de mutation professionnelle permet, aux conditions définies dans la notice d'assurance telle que référencée au contrat et remise à l'abonné lors de la conclusion de son contrat, d'obtenir la prolongation ou selon le cas le remboursement du prix de l'abonnement (suivant les clauses définies dans ledit contrat) » ;
* article 1.1 alinéa 3 des conditions générales : « l'abonné déclare en tout état de cause lors de la conclusion du contrat avoir fait contrôler préalablement par un médecin son aptitude à pratiquer une activité sportive et détenir l'attestation en ce sens établie par le médecin de manière à pouvoir la produire à la demande du Club Gymnesia...» ;
* article 1.1 alinéa 4 des conditions générales : « l'abonné bénéficie par ailleurs du contrat d'assurance responsabilité civile, police consultable à l'accueil dans un délai maximal de 48 heures. Il appartient à l'abonné de s'y reporter pour connaître les risques couverts, le montant des garanties et des franchises applicables le cas échéant » ;
* article 1.1 alinéa 5 des conditions générales : « sans préjudice de ce qui précède, l'abonné s'engage à remettre à l'accueil du club ces objets de valeur et ne pourra mettre en cause la responsabilité du Club Gymnesia en cas de vol ou de perte des objets qui ne lui auront pas été confiés. Le Club Gymnesia pourra cependant refuser de prendre en dépôt des objets d'une valeur supérieure à 500 euros, sans que sa responsabilité ne puisse être recherchée de ce fait » ;
* article 1.1 alinéa 6 et 7 des conditions générales : « l'abonné qui entend par ailleurs subordonner son engagement contractuel à certaines conditions doit les exprimer à la case observations particulière figurant au contrat. Club Gymnesia se réserve toutefois la possibilité de les refuser aux plus tard 48 heures après la conclusion du contrat » ;
* article 1.1 alinéa 8 des conditions générales : « en cas de non règlement des sommes dues par l'abonné au titre du présent contrat, Club Gymnesia pourra résilier le contrat de plein droit et sans formalités 15 jours après réception par l'abonné de la mise en demeure par lettre R. A. R demeurée sans effet. À compter de la prise d'effet de la résiliation, l'abonné se verra refuser l'accès au club et notamment aux prestations prévues au titre de l'abonnement et devra restituer, sans qu'il soit besoin d'une quelconque demande du Club Gymnesia, sa carte de membre et restera tenu du paiement des sommes contractuellement dues jusqu'à l'échéance de l'abonnement. Club Gymnesia se réserve par ailleurs le droit d'inscrire l'abonné sur son fichier de recouvrement contentieux « incidents de paiement » et ce dans le strict respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés » ;
* article 1.2 alinéa 1 et 2 des conditions générales : « Club Gymnesia propose à l'abonné durant les heures d'ouverture de pratiquer à volonté une activité de remise en forme caractérisée par la mise à disposition d'appareils ad hoc et d'assister à des cours collectifs animés par des conseillers sportifs. D'autres activités sportives ou de détente, éventuellement soumis à l'acquittement d'un supplément de prix, peuvent également être proposées à titre accessoire. » ;
* article 2.2 alinéa 1 second paragraphe des conditions générales « à défaut et sans préjudice subi, Club Gymnesia réserve le droit de prendre toutes mesures utiles visant à faire respecter par l'abonné les présents dispositions et notamment d'exclure du club l'abonné en infraction avec ces dernières, de résilier le contrat de plein droit et sans formalités, avec effet immédiat, à réception par l'abonné de la lettre R. A. R du Club Gymnesia lui exposant les motifs de la résiliation et l'inscription de l'abonné contrevenant sur la liste « incidents » dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés » ;
* article 2.2 alinéa 2 des conditions générales : « l'abonné s'interdit notamment sous peine de résiliation avec effet immédiat de son contrat dans le respect des formes précitées de (I)... (II) utiliser les appareils installations du club, (III)... (IV) s'inscrire ou se réinscrire auprès d'un club en cas d'inscription de l'abonné sur la liste incident précitée » ;
* article 2.2 alinéa 4 des conditions générales : « la responsabilité du club ne pourra être recherchée en cas d'accident résultant de l'inobservation des dispositions du présent contrat ou des consignes anormales des appareils prestations ou installations » ;
* article 5 du règlement intérieur : « les personnes extérieures non-membres, bénéficiant d'une invitation, d'une séance d'essais ou autorisées à fréquenter le club en vertu d'accords spécifiques sont soumises aux mêmes obligations et notamment aux mêmes règlements intérieurs que les membres. Elles devront déposer à l'accueil du club pendant leur séance les pièces ou objets qui leur seraient indiqués ainsi qu'en toute hypothèse tout objet de valeur, Club Gymnesia se réservant le droit de refuser le dépôt de tout objet l'une valeur de plus de 500 euros » ;
* article 7 du règlement intérieur, devenu l'article 6 du nouveau règlement intérieur : « il est expressément interdit, sous peine d'exclusion du club, de résiliation du contrat, sans préavis ni indemnité d'aucune sorte, de dispenser aux autres membres des cours particuliers sous quelque forme que ce soit ».
* article 8 du règlement intérieur : « les horaires d'ouverture, le planning de cours, la liste des activités sont susceptibles de modifications à tout moment. L'abonné se verra averti par affichage dans le club »,
* article 2 alinéa 3 du nouveau contrat : « l'abonné qui enfreindrait les consignes d'utilisation des matériels et prestations ou les conseils faits par le personnel du club dans le cadre des activités ou de l'utilisation du matériel, pourrait se voir exclu du club, sans indemnisation. » ;
- ordonné la suppression par la SARL SPORT ASSET de la totalité des clauses déclarées abusives ou illicites de son contrat par le présent jugement dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent jugement, et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard pendant une durée de 2 mois ;
- dit que le Tribunal se réserve le contentieux éventuel de la liquidation de l'astreinte ;
- condamné la société SPORT ASSET à verser à l'association UFC QUE CHOISIR la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice collectif, condamné la SARL SPORT ASSET à verser à l'UFC Que Choisir 38 la somme de deux mille euros (2.000 euros) en réparation de son préjudice associatif ;
- ordonné l'affichage du dispositif de ce jugement aux portes de l'établissement de la SARL SPORT ASSET pendant une durée de deux mois à compter de la signification de cette décision ;
- ordonné la publication par extraits du présent jugement dans les journaux « LE DAUPHINE LIBERE » et « LES AFFICHES GRENOBLOISES » à l'initiative de l'association UFC QUE CHOISIR 38 et aux frais de la SARL SPORT ASSET dans la limite de la somme totale de 1.500 euros par publication ;
- condamné la SARL SPORT ASSET à verser à l'Association UFC QUE CHOISIR 38 la somme de deux mille cinq cents euros (2.500 euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
- condamné la SARL SPORT ASSET aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la SCP BRASSEUR-M'BAREK, avocat.
La Société SPORT ASSET a relevé appel de la décision le 20 février 2009.
Elle demande à la Cour de constater qu'elle a vidé ses conditions générales et son règlement intérieur des clauses critiquées par l’UFC 38 dès réception de l'assignation, de débouter l’UFC 38 de l'intégralité de ses prétentions relatives au prétendu caractère abusif des clauses suivantes : l'article 2 alinéa 3 des conditions générales et les articles 5 et 6 du règlement intérieur,
Elle demande encore de débouter l’UFC 38 de ses demandes relatives au paiement d'astreinte et d’article 700 du code de procédure civile, aux mesures de publicité ainsi qu'au paiement des sommes au titre du préjudice collectif et au titre préjudice associatif, à titre subsidiaire de réduire le montant de ces condamnations dans des proportions importantes, de condamner l’UFC 38 à la somme de 4.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, de condamner l’UFC 38 aux dépens de première instance et d'appel et d'autoriser la SCP GRIMAUD avoués à les recouvrer directement contre elle.
Elle fait état de la nouvelle rédaction des conditions générales qui, reprenant les dispositions annulées, sont ainsi désormais rédigées :
- L’article 2 alinéa 3 des conditions générales stipule désormais : « l'abonné qui enfreindrait les consignes d'utilisation des matériels et prestations ou les conseils faits par le personnel du club dans le cadre des activités ou de l'utilisation du matériel pourrait se voir exclu du club sans indemnisation. »
- L'article 5 du règlement intérieur stipule : « en salles de cours collectifs, musculation et cardio-training, votre serviette doit être posée sur les appareils et tapis. Les effets personnels ainsi que les sacs de sport doivent rester dans les casiers de vestiaires fermés par votre cadenas »
- L'article 6 du règlement intérieur stipule : « il est expressément interdit, sous peine d'expulsion du club et de résiliation du contrat, sans préavis ni indemnité d'aucune sorte, de dispenser aux autres membres des cours particuliers sous quelque forme que ce soit ».
L'appelante demande ainsi à la Cour de dire que ces clauses n'ont aucun caractère abusif ou illicite, et de débouter l'UFC 38 de ses demandes.
Elle demande en outre à la cour de réviser les mesures accessoires :
Dans le dernier état de ses conclusions du 20 novembre 2009, l’UFC 38 demande confirmation du jugement et, par appel incident de dire illicites 15 autres clauses :
« Dans les conditions générales :
- l'article 1.1 alinéa 1, obligeant au paiement intégral de l'abonnement nonobstant la non-utilisation de la prestation,
- article 1.1 alinéa 2 relatif à l'assurance prolongation/remboursement du prix de l'abonnement,
- article 1.1 alinéa 3 relatif à l'attestation médicale,
- article 1.1 alinéa 4 relatif aux conditions de consultation de la police d'assurance responsabilité civile,
- article 1.1 alinéa 5 relatif à l'exonération du professionnel en cas de vol ou perte d'objet,
- article 1.1 alinéas 6 et 7 relatif aux observations particulières formulées par l'abonné au moment de la souscription du contrat,
- article 1.1 alinéa 8 relatif à la résiliation de plein droit du contrat en cas de non-paiement des sommes dues,
- article 1.2 alinéas 1 et 2 relatif aux activités proposées moyennant supplément de prix,
- article 2.2 alinéa 1, relatif au règlement intérieur porté à la connaissance de l'abonné par voie d'affichage,
- article 2.2 alinéa 1, 2ème §, relatif aux conséquences d'un manquement aux consignes de bonne conduite d'hygiène et de sécurité,
- article 2.2 alinéa 2, relatif à l'interdiction d'utiliser les appareils et installations du club,
- article 2.2 alinéa 4 relatif à l'absence de responsabilité du club en cas de méconnaissance des obligations contractuelles,
Dans le règlement intérieur :
- Article 5,
- Article 7,
- Article 8,
- DIRE ET JUGER illicites ou abusives dans les versions des règlement intérieur et conditions générales nouvellement produites (pièces n° 1 et 2 de la Société SPORT ASSET)
- dans les conditions générales : l'article 2 alinéa 3,
- dans le règlement intérieur : article 6.
Elle demande encore à la Cour de :
- ORDONNER en conséquence la suppression de l'ensemble des clauses ci-dessus, et ce dans le délai d'un mois de la décision à intervenir, et sous astreinte définitive d'un montant de 1.000 euros, par jour de retard à l'expiration du délai imparti,
- CONDAMNER la défenderesse à verser à l'UFC 38 à titre de dommages et intérêts :
- pour le préjudice collectif, la somme de : 10.000 euros,
- pour le préjudice associatif, la somme de : 2.000 euros,
- ORDONNER la publication de l'arrêt au regard de l’article L. 421-9 du Code de la Consommation dans les journaux : DAUPHINE LIBERE, les AFFICHES DE GRENOBLE, LE 38 et ce à la charge de la défenderesse, et à concurrence de 1.500 euros par insertion,
- ORDONNER l'affichage de l'arrêt à intervenir, sur le fondement de l’article L. 421-9 du Code de la Consommation, aux portes du local concerné,
- CONDAMNER encore la défenderesse sur le fondement de l’article 700 du CPC à lui verser une indemnité d'un montant de : 5.000 euros,
- LA CONDAMNER enfin aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, Avoués, sur son affirmation de droit.
Elle invoque la recommandation n° 87-03 « relative aux contrats proposés par les clubs de sport à caractère lucratif » du 26 juin 1987, rappelle l’article L. 132-1 du code de la consommation selon lequel « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties »
Elle soutient que la Société SPORT ASSET ne justifie pas de la date de mise en vigueur du contrat rectifié et soutient que le contrat et le règlement intérieur n'avaient pas été modifiés en juin 2007, que l'interdiction doit être faite d'utiliser l'ancien contrat lequel demeure en vigueur pour le passé.
Concernant les demandes complémentaires, l’UFC 38 invoque le principe posé par l'arrêt du 5 octobre 1999 de la Cour de Cassation qui précise, qu'au visa de l’article L. 421-6 du Code de la Consommation : « ... une association agréée de défense des consommateurs est en droit de demander devant les juridictions civiles la réparation, notamment par l'octroi de dommages et intérêts de tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs » (Cass, 5 octobre 1999 : RJDA 99, n° 1255).
Elle fait valoir que depuis la loi du 10 janvier 1978, compte tenu de la réglementation sur les clauses abusives, les professionnels devraient spontanément rédiger des contrats équilibrés, c'est à dire tenant compte aussi des intérêts légitimes du consommateur, selon l'objectif de la Directive Européenne de 1993, et non plus des contrats rédigés à sens unique, dans leur intérêt, qu'à plus forte raison, depuis la parution des Recommandations de la CCA en 1987 sur le sujet spécifique des clubs de sport, il est incompréhensible qu'un professionnel utilise encore un contrat contenant des clauses irrégulières.
Elle soutient que la Société SPORT ASSET ne justifie pas le caractère effectif de la mise en vigueur de la nouvelle version du contrat et du règlement intérieur, notamment par la production d'un contrat daté et signé.
Elle fait valoir que si elle rend sans objet la demande de suppression, l'action visant à faire juger les clauses abusives reste justifiée afin d'en interdire l'usage pour l'avenir.
La clôture, prononcée le 17 janvier, a été révoquée le 27 février, jour de l'audience de plaidoiries, pour être prononcée à cette date.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La Société SPORT ASSET a déclaré à l'audience acquiescer au jugement du tribunal de grande instance à l'exception de trois clauses et des mesures accessoires. Concernant les clauses, elle a ainsi entendu cantonner le débat en cause d'appel aux seules dispositions suivantes :
L'article 2 alinéa 3 des conditions générales qui stipule désormais : « l'abonné qui enfreindrait les consignes d'utilisation des matériels et prestations ou les conseils faits par le personnel du club dans le cadre des activités ou de l'utilisation du matériel pourrait se voir exclu du club sans indemnisation. »
Elle soutient que c'est par une interprétation tendancieuse que le Tribunal a considéré que cette clause crée une clause pénale au seul bénéfice du professionnel et au détriment du consommateur ;
qu'en effet, cette clause ne confère pas un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, mais ne fait que prévoir une sanction en cas de violation par l'usager des règles de bonne conduite au sein de la salle de gymnastique,
qu'il n'est pas excessif de prévoir la résiliation d'un contrat en cas d'inexécution par un des cocontractants de son obligation de bonne conduite, qu'il faut observer qu'il s'agit d'une simple possibilité d'exclusion permettant ainsi aux cocontractants de trouver un terrain d'entente, que cette clause ne signifie pas que le consommateur ne pourra se voir restituer pro rata temporis les sommes déjà versées.
- L'article 5 du règlement intérieur qui stipule : « en salles de cours collectifs, musculation et cardio-training, votre serviette doit être posée sur les appareils et tapis. Les effets personnels ainsi que les sacs de sport doivent rester dans les casiers de vestiaires fermés par votre cadenas »
Elle fait valoir que le rappel des règles élémentaires d'hygiène et de sécurité au sein de la salle des sports ne constitue nullement une clause abusive, qu’il n'est pas admissible que les usagers puissent être autorisés à laisser traîner leur sac de sport ou à ne pas fermer à clé leur casier de vestiaires pour ensuite pouvoir revendiquer un défaut de surveillance de la part des professionnels, qu'il est certain que si les usagers souhaitent que les vestiaires et casiers soient surveillés par un gardien continuellement présent dans les vestiaires, le coût de la cotisation sera beaucoup plus élevé, ce que de toute évidence ne souhaite pas le consommateur.
- L'article 6 du règlement intérieur qui stipule : « il est expressément interdit, sous peine d'expulsion du club et de résiliation du contrat, sans préavis ni indemnité d'aucune sorte, de dispenser aux autres membres des cours particuliers sous quelque forme que ce soit ».
Cette clause interdit simplement selon l'appelante à un membre de donner un cours à un autre membre, portant ainsi préjudice aux professionnels titulaires d'un diplôme d'enseignement. Il permet ainsi d'éviter une concurrence déloyale entre un professionnel reconnu et un simple usager.
Au demeurant, l'absence d'indemnisation prévue dans la clause ne signifie nullement que le consommateur ne pourra se voir restituer les sommes déjà versées au prorata temporis puisque le remboursement des sommes pour la période d'exclusion du club n'a aucun caractère indemnitaire.
L'appelante demande ainsi à la Cour de dire que ces clauses n'ont aucun caractère abusif ou illicite, et de débouter l'UFC 38 de ses demandes.
Elle demande en outre de réformer la décision de première instance sur les mesures accessoires, en ce que notamment :
« l'astreinte est inutile puisque la Société SPORT ASSET a rectifié les clauses du contrat d'abonnement et du règlement intérieur,
« le préjudice collectif qui serait né du maintien de clauses qui lui auraient conféré pendant de nombreuses années de multiples avantages injustifiés ou illicites lui procurant un accroissement non légitime de ses profits n'est pas constitué puisque l’UFC 38 ne justifie ni de la faute, ni du lien de causalité, ni du préjudice prétendument subi par ses membres et n'a produit aucune doléance ou plainte de ses adhérents. Elle souligne à cet égard avoir acquis le fonds de commerce litigieux fin 2004 et commencé à l'exploiter en 2005, que l'éventuel préjudice n'a pu être subi que pendant quelques mois,
« le préjudice associatif n'est pas constitué puisqu'un simple contact aurait permis de trouver une solution amiable,
« la publication paraît démesurée au regard de l'impact négatif pour la Société SPORT ASSET
« le procès était inutile pour obtenir satisfaction, aucune démarche préalable n'ayant été engagée par l’UFC 38 avant l'assignation.
Elle a régulièrement produit un exemplaire des conditions générales du contrat d'abonnement ainsi que du règlement intérieur rectifiés ainsi que la justification par les attestations de cinq clients du caractère effectif de la mesure d'affichage prononcée en première instance.
* * *
L’UFC 38 demande de son côté, outre la confirmation du jugement pour les clauses des conditions générales et du règlement intérieur non contestées en cause d'appel, de procéder à l'examen de la nouvelle version du contrat proposée par la Société SPORT ASSET à ses adhérents et de :
- DIRE ET JUGER illicites ou abusives dans les versions des règlement intérieur et conditions générales nouvellement produites (pièces n°1 et 2 de la Société SPORT ASSET)
« dans les conditions générales : l'article 2 alinéa 3, ainsi libellé :
« l'abonné qui enfreindrait les consignes d'utilisation des matériels et prestations ou les conseils faits par le personnel du club dans le cadre des activités ou de l'utilisation du matériel pourrait se voir exclu du club sans indemnisation. »
« dans le règlement intérieur : l’article 6, ainsi libellé :
« il est expressément interdit, sous peine d'exclusion du club et de résiliation du contrat, sans préavis ni indemnité d'aucune sorte, de dispenser aux autres membres des cours particuliers sous quelque forme que ce soit. »
* * *
L'acquiescement au jugement rend sans objet l'examen des dispositions déclarées nulles par le jugement de première instance.
Seront ainsi seules examinées celles des articles 2 alinéa 3 des conditions générales, 5 et 6 du règlement intérieur dans leur nouvelle version rectifiée au vu du jugement.
1 - Sur les dispositions contestées :
Selon les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, sont réputés abusives les clauses insérées dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment de ces derniers, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
- concernant l'article 2 alinéa 3 des conditions générales du nouveau contrat : La mention « sans indemnisation » comme sanction automatique d'une exclusion relevant de la seule appréciation du professionnel, même au conditionnel (« pourrait »), est constitutive d'une clause pénale au seul bénéfice du professionnel. Cette disposition est constitutive d'un déséquilibre que le premier juge a à bon droit considéré comme significatif pour justifier son illicéité comme clause abusive.
- concernant l'article 5 du règlement intérieur : Désormais dépourvues de sanction, les injonctions d'hygiène et de sécurité des effets personnels telles que formulées par cette disposition ne créent pas de déséquilibre au détriment du pratiquant justifiant qu'elle soit déclarée abusive.
- concernant l'article 6 du règlement intérieur : l'octroi à la seule Société SPORT ASSET de l'avantage automatique résultant de la conservation à titre de clause pénale du montant de l'abonnement pour sanctionner la mise en œuvre de cours « sauvages » ou « coaching » dans le cadre de la salle de sport se déduit naturellement de la formulation « sans indemnité d'aucune sorte » de cette disposition. Elle crée certes un déséquilibre significatif, mais elle ne s'applique qu'au seul « coach » qui perd dès lors la qualité de consommateur, de client ou d'élève, lequel n'est pas expressément visé par cette disposition. La qualité de non professionnel ou consommateur ne pouvant plus être reconnue à l'enseignant « sauvage », la clause ne pourra être qualifiée d'abusive.
2 - Sur les mesures accessoires :
L'absence de mise en demeure afin de mise en conformité préalable à l'assignation du 12 juillet 2006 à la Société SPORT ASSET, cessionnaire du fonds de commerce le 27 octobre 2004 et de nombre de contrats de clients de son vendeur à la date de l'assignation, la prise en compte et l'exécution du jugement de première instance ont limité le préjudice collectif dont la Société SPORT ASSET a pu se rendre responsable à l'égard de l'intérêt collectif représenté par l’UFC 38.
Son préjudice collectif sera réparé par une somme ramenée à la somme de 5.000 euros et son préjudice associatif par la somme de 1.000 euros.
Les autres condamnations et mesures accessoires sont justifiées ou leur nécessité caractérisée dans ce domaine. Elles seront confirmées.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Donne acte à la Société SPORT ASSET de son acquiescement au jugement en ce qu'il a déclaré illicites ou abusives les articles suivants des conditions générales et du règlement intérieur en vigueur à la date de l'assignation :
* 1.1 alinea 1, 1.1 alinea 2, 1.1 alinea 3, 1.1 alinea 4, 1.1 alinea 5, 1.1 alinea 6 et 7, 1.1 alinea 8, 1.2 alinea 1 et 2, 2.2 alinea 1 second paragraphe, 2.2 alinea 2, 2.2 alinea 4 des conditions générales
* 5, 8 du règlement intérieur.
- Déclare illicite ou abusif :
* l'article 2 alinéa 3 des conditions générales du nouveau contrat ainsi rédigé : « l'abonné qui enfreindrait les consignes d'utilisation des matériels et prestations ou les conseils faits par le personnel du club dans le cadre des activités ou de l'utilisation du matériel, pourrait se voir exclu du club, sans indemnisation »
- Déboute l’UFC 38 de leurs autres demandes de suppression de clauses du règlement intérieur du nouveau contrat.
- infirme le jugement en ce qu'il a condamné la Société SPORT ASSET à payer à l’UFC 38 les sommes de 10.000 euros au titre du préjudice collectif et 2.000 euros au titre du préjudice associatif, et
Statuant à nouveau sur ces chefs de demandes :
- condamne la Société SPORT ASSET à payer à l’UFC 38 la somme de 5.000 euros au titre du préjudice collectif et celle de 1.000 euros au titre du préjudice associatif,
- confirme le jugement en toutes ses autres dispositions.
Vu l’article 700 du code de procédure civile :
- condamne la Société SPORT ASSET à payer à l’UFC 38 la somme de 1.500 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,
- laisse les dépens à la charge de la Société SPORT ASSET et autorise la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC à les recouvrer directement contre elle pour le compte de son mandant.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile,
Signé par Madame KUENY, Conseiller, en remplacement du Président empêché, et par Madame DESLANDE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Conseiller
- 5735 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Nature - Clause nulle
- 5758 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Absence de conditions préalables à l’action
- 5773 -Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Suites de l’action - Acquiescement/transaction
- 5774 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Suites de l’action - Exécution provisoire
- 5777 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Suppression des clauses - Astreinte
- 5778 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Suppression des clauses - Donné acte
- 5779 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Réparation des préjudices - Préjudice collectif des consommateurs - Principes
- 5780 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Réparation des préjudices - Préjudice collectif des consommateurs - Éléments d’appréciation
- 5781 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Réparation des préjudices - Préjudice associatif
- 5785 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Effets de l’action - Publication des décisions - Modalités de publication
- 5865 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Principes - Date d’appréciation
- 6122 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Clauses pénales ou d’indemnité forfaitaire - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 (indices)
- 6438 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Sport - Club de sport et de remise en forme