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CA GRENOBLE (2e ch. civ.), 7 novembre 2005

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (2e ch. civ.), 7 novembre 2005
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA)
Demande : 03/03361
Date : 7/11/2005
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 9/09/2003
Décision antérieure : CASS. CIV. 1re, 30 octobre 2007, TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 30 juin 2003
Numéro de la décision : 646
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3130

CA GRENOBLE (2e ch. civ.), 7 novembre 2005 : RG n° 03/03361 ; arrêt n° 646

Publication : Juris-Data  n° 294521

 

Extraits : 1/ « Les dispositions particulières du contrat définissent la prestation comme « la possibilité de  communiquer un fichier d'offres. La prestation sera alors réputée rendue ». Attendu qu'il s'agit d'un contrat à exécution instantanée ; Attendu que l'obligation de préciser la durée imposée par l'article 79-2 du décret du 20 juillet 1972, visé par UFC 38, ne trouve à s'appliquer que dans la mesure où l'économie de contrat le permet, ce qui n'est pas le cas des contrats à exécution instantanée, qui par définition sont immédiatement exécutés ».

2/ « Attendu que le jugement a exactement jugé que si la société APL 38 ne pouvait s'exonérer de sa responsabilité en ce qui concerne la disponibilité du bien, en ce qui concerne le descriptif, ladite clause ne pouvait être considéré comme illicite ou abusive, dans la mesure où le vendeur de fichiers relatifs à la location ou sous-location de biens immobiliers ne peut se livrer simultanément à cette vente et à une autre activité d'agent immobilier portant sur la location ou sous-location de ces immeubles, sans méconnaître l'interdiction édictée au 1er alinéa de l'article 79-3 du décret du 20 juillet 1972 ; Attendu que, s'il résulte de l'article 79-1 du décret une obligation de présenter des biens disponibles qui pèse sur le marchand de listes et sur le titulaire des droits du bien devant figurer sur la liste, il n'existe aucun texte mettant à la charge du marchand de listes l'obligation de vérifier que les indications données par le titulaire du bien soient exactes ; que le marchand de listes n'exerce pas l'activité d'intermédiaire et n'a donc pas à procéder à des vérifications concrètes des caractéristiques précises du bien proposé à la location par le propriétaire personnellement et directement. »

3/ « Attendu que l'article 9 des conditions générales prévoit : « conformément à la loi informatique et liberté, les informations mentionnées sur la présente convention sont protégées. Le client s'engage à ne pas communiquer à des tiers quelque adresse que ce soit prélevée dans la liste ». Attendu que cette clause ne peut préjudicier à quiconque ; que le jugement sera encore confirmé ».

4/ « Attendu que le préjudice associatif est distinct du préjudice collectif ; qu'en effet, pour parvenir à la protection des consommateurs, l'UFC 38 est contrainte d'intervenir à de nombreuses reprises, alors que, comme toute association de consommateurs, elle a la mission légalement reconnue de contribuer à la « police » de consommateurs, ce qui l'oblige à engager des dépenses importantes ; Que la Cour a les éléments pour fixer à la somme de 2.000 € le montant de ce préjudice ; que le jugement qui a débouté l'UFC 38 sera réformé ».

5/ « Attendu que la publication ne se justifie pas, d'autant que APL 38 s'est mise en conformité avec la réglementation en vigueur en apportant les modifications décidées par le Tribunal ».

 6/ « Attendu que les avis ou recommandations de la CCA ne lient pas les juridictions. Qu'en sa qualité d'Association de consommateurs agréée, il ne saurait être interdit à UFC 38 d'évoquer les recommandations de la CCA, au seul motif que son conseil habituel a été membre de cette Commission ; Que le jugement sera réformé sur ce point ».

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 7 NOVEMBRE 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 03/03361. Arrêt n° 646. Appel d'une décision (N° R.G. 2001/01435) rendue par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE en date du 30 juin 2003, suivant déclaration d'appel du 9 septembre 2003.

 

APPELANTE :

Association UFC 38

prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant en cette qualité audit siège [adresse], représentée par la SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC, avoués à la Cour, assistée de Maître BRASSEUR, avocat au barreau de GRENOBLE

 

INTIMÉE :

SARL APL 38

prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant en cette qualité audit siège [adresse], représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour, assistée de Maître Alain COHEN BOULAKIA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Maître BERGON, avocat

 

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame B. BRENNEUR, Président, Monsieur O. FROMENT, Conseiller, Madame M. BOURGEOIS, Conseiller, Assistés lors des débats de Madame M.C. OLLIEROU, Greffier.

DÉBATS : À l'audience publique du 10 octobre 2005, les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] La société APL 38, membre du réseau APL, a pour activité la vente de listes en matière immobilière.

Dans le cadre de cette activité, la société APL 38 conclut des contrats d'adhésion avec les consommateurs qui s'adressent à elle.

L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS DE L'ISÈRE (UFC 38) a attrait, par acte en date du 16 mars 2001, la société APL 38 devant le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, notamment aux fins de dire illicites ou abusives certaines clauses figurant dans le contrat proposé par la société APL 38.

Par jugement en date du 28 janvier 2002, le Tribunal a sollicité l'avis de la Commission des clauses abusives sur certaines clauses figurant dans les contrats de la société APL 38.

Le 16 mai 2002, la Commission des clauses abusives refusait de donner son avis, renvoyant à la recommandation n° 2002-01 qu'elle avait émise le 13 décembre 2001.

Les sociétés APL Franchising et APL 38 ont présenté une requête devant la Cour Européenne de Droits de l'Homme aux fins de voir déclarer la recommandation 2002-01 incompatible avec l'article 6§1 de la Convention.

Par décision en date du 30 juin 2003, le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE a décidé qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la Cour Européenne de Droits de l'Homme, et a écarté des débats la recommandation n° 2002-01, l'estimant contraire aux dispositions de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, en raison de la double qualité de Maître BRASSEUR, à la fois rapporteur désigné par la Commission des clauses abusives, laquelle a adopté son projet de recommandation et Conseil de l'UFC 38 dans le cadre de la présente procédure.

Le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE a également enjoint à APL 38 de modifier le modèle de son contrat de diffusion de listes relatives à la location de logements, en y ajoutant la mention de la faculté de remboursement prévue à l'article 79-2 du décret du 20 juillet 1972 et la mention imposée par le troisième et dernier alinéa de l'article 79-3 du même décret.

Il a également ordonné à APL 38 de supprimer de son modèle de contrat, sous astreinte, les clauses suivantes reconnues comme abusives :

- clause relative à la possibilité de proposer aux candidats locataires des offres comportant des prix de loyers supérieurs de 20 % aux prix souhaités par ces candidats ;

- clause relative à la possibilité de proposer aux candidats locataires des offres sur des logements situés dans une commune dont la [minute page 3] plus proche limite est distante de plus de 10 kms des limites choisies par les locataires ;

- clause limitant les obligations de APL 38 à la présentation de biens « réputés disponibles » ;

- clause relative à l'admission par les candidats locataires de la réalité de la fourniture d'une prestation ;

- clause relative à la détermination d'un prix de location mensuel hors charges ;

En outre, le Tribunal de Grande Instance a alloué à l'UFC 38 la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice collectif des consommateurs, mais l'a déboutée de sa demande relative aux dommages et intérêts pour préjudice associatif, ainsi que de sa demande de publication de la décision.

Enfin, il a condamné la société APL 38 au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux entiers dépens.

Cette condamnation a été assortie de l'exécution provisoire.

L'UFC 38 a fait appel limité de cette décision,

Elle demande à la cour de :

- Confirmer la décision initiale sur les sept clauses écartées.

- De dire illicites ou abusives - outre celles objet du jugement - les clauses suivantes du contrat litigieux :

* la clause de l'article 2 des conditions générales sur la durée du contrat,

* la clause de l'article 3 des conditions générales qui exonère le professionnel si le descriptif n'est pas conforme,

* la clause de l'article 9 faisant référence à la loi informatique et liberté rédigée à sens unique, et faussement.

- D'ordonner en conséquence à la société APL 38 de supprimer de son contrat l'ensemble des clauses ci-dessus, et ce dans le délai d'un mois de la décision à intervenir, et sous astreinte définitive d'un montant de 763 € par jour de retard à l'expiration du délai imparti.

- De condamner la défenderesse à verser à l'UFC 38 à titre de dommages intérêts :

* pour le préjudice collectif, la somme de 11.000 €

* pour le préjudice associatif, la somme de 3.100 €

- D'ORDONNER la publication du jugement dans les journaux LE DAUPHINÉ LIBÉRÉ, LES PETITES ANNONCES, le 38 BONJOUR, et ce à la charge de la défenderesse, et à concurrence de 2.000 € par insertion.

- DE CONDAMNER encore la défenderesse sur le fondement de l'article 700 du NCPC à lui verser une nouvelle indemnité sur la procédure d'appel d'un montant de 2.500 €.

APL 38 forme un appel incident tendant d'une part, à se voir donner acte des modifications apportées dans son nouveau modèle de convention [minute page 4] et voir dire que les clauses litigieuses ne sont ni abusives ni illicites, et, d'autre part, portant demande reconventionnelle relative à l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile (3.000 €).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI, LA COUR :

Pour un plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées ;

 

- Sur les clauses :

- Sur la durée du contrat :

Les dispositions particulières du contrat définissent la prestation comme « la possibilité de communiquer un fichier d'offres. La prestation sera alors réputée rendue ».

Attendu qu'il s'agit d'un contrat à exécution instantanée ;

Attendu que l'obligation de préciser la durée imposée par l'article 79-2 du décret du 20 juillet 1972, visé par UFC 38, ne trouve à s'appliquer que dans la mesure où l'économie de contrat le permet, ce qui n'est pas le cas des contrats à exécution instantanée, qui par définition sont immédiatement exécutés ;

 

- Sur la clause de l'article 3 des conditions générales qui exonère le professionnel si le descriptif n'est pas conforme :

Attendu que l'article 3 des conditions générales prévoit « l'exactitude des informations concernant les biens proposés à la location et notamment le descriptif et la date de disponibilité sont transmis au client sous la seule responsabilité des propriétaires ».

Attendu que le jugement a exactement jugé que si la société APL 38 ne pouvait s'exonérer de sa responsabilité en ce qui concerne la disponibilité du bien, en ce qui concerne le descriptif, ladite clause ne pouvait être considéré comme illicite ou abusive, dans la mesure où le vendeur de fichiers relatifs à la location ou sous-location de biens immobiliers ne peut se livrer simultanément à cette vente et à une autre activité d'agent immobilier portant sur la location ou sous-location de ces immeubles, sans méconnaître l'interdiction édictée au 1er alinéa de l'article 79-3 du décret du 20 juillet 1972 ;

Attendu que, s'il résulte de l'article 79-1 du décret une obligation de présenter des biens disponibles qui pèse sur le marchand de listes et sur le titulaire des droits du bien devant figurer sur la liste, il n'existe aucun texte mettant à la charge du marchand de listes l'obligation de vérifier que les indications données par le titulaire du bien soient exactes ; que le marchand de listes n'exerce pas l'activité d'intermédiaire et n'a donc pas à procéder à [minute page 5] des vérifications concrètes des caractéristiques précises du bien proposé à la location par le propriétaire personnellement et directement.

Que le jugement sera confirmé ;

 

- Sur la clause de l'article 9 faisant référence à la loi informatique et liberté :

Attendu que l'article 9 des conditions générales prévoit : « conformément à la loi informatique et liberté, les informations mentionnées sur la présente convention sont protégées. Le client s'engage à ne pas communiquer à des tiers quelque adresse que ce soit prélevée dans la liste ».

Attendu que cette clause ne peut préjudicier à quiconque ; que le jugement sera encore confirmé ;

 

- Sur la demande de dommages-intérêts :

* Sur le préjudice associatif :

Attendu que le préjudice associatif est distinct du préjudice collectif ; qu'en effet, pour parvenir à la protection des consommateurs, l'UFC 38 est contrainte d'intervenir à de nombreuses reprises, alors que, comme toute association de consommateurs, elle a la mission légalement reconnue de contribuer à la « police » de consommateurs, ce qui l'oblige à engager des dépenses importantes ;

Que la Cour a les éléments pour fixer à la somme de 2.000 € le montant de ce préjudice ; que le jugement qui a débouté l'UFC 38 sera réformé :

 

* Sur le préjudice collectif :

Attendu que la Cour a les éléments pour fixer à 2.500 € le montant de ce préjudice ; que le jugement sur ce point sera confirmé ;

 

- Sur la demande de publication :

Attendu que la publication ne se justifie pas, d'autant que APL 38 s'est mise en conformité avec la réglementation en vigueur en apportant les modifications décidées par le Tribunal ;

 

- Sur l'incompatibilité de la recommandation de la Commission des Clauses Abusives avec l'article 6 de la convention des Droits de l'Homme :

Attendu que les avis ou recommandations de la CCA ne lient pas les juridictions.

[minute page 6] Qu'en sa qualité d'Association de consommateurs agréée, il ne saurait être interdit à UFC 38 d'évoquer les recommandations de la CCA, au seul motif que son conseil habituel a été membre de cette Commission ;

Que le jugement sera réformé sur ce point ;

Attendu que le jugement sera confirmé par adoption de motif dans ses autres dispositions ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement attaqué sauf en ce qu'il a débouté UFC 38 de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice associatif et en ce qu'il a écarté des débats la recommandation n° 2002-01 de la CCA,

ET STATUANT À NOUVEAU de ces seuls chefs,

CONDAMNE APL 38 à verser à l'UFC 38 à titre de dommages intérêts pour le préjudice associatif, la somme de 2.000 €,

DIT n'y avoir lieu d'écarter des débats la délibération n° 2002-01 de la Commission des Clauses Abusives,

CONDAMNE APL 38 à verser à UFC 38 la somme de 1200 € au titre de l'article 700 du NCPC.

La CONDAMNE aux entiers dépens et autorise la SELARL DAUPHIN à les recouvrer directement,

PRONONCE par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Brenneur, Président, et par M-C OLLIEROU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

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