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CA CHAMBÉRY (ch. com.), 24 septembre 2002

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBÉRY (ch. com.), 24 septembre 2002
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), ch. com.
Demande : 00/00756
Date : 24/09/2002
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 27/05/2000
Décision antérieure : TGI ANNECY (ch. com.), 1er février 2000
Numéro de la décision : 0
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 586

CA CHAMBERY (ch. com.), 24 septembre 2002 : RG n° 00/00756

Publication : Legifrance ; Juris-Data n° 199537

 

Extraits : 1/ « Attendu, tout d'abord, que la directive ne reconnaît la qualité de consommateurs qu'aux personnes physiques ; que, cependant, elle n'exclut pas la possibilité pour les Etats membres d'élargir les dispositions de transposition des principes qu'elle pose à un champ d'application plus étendu, quand aux personnes concernées ou quant aux contrats visés ; qu'en effet, l'objectif de la directive est de fixer des règles de protection minimales, puisqu'elle prévoit, en son article 8, que dans le domaine qu'elle régit, les Etats membres peuvent adopter ou maintenir des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur ; […] Attendu que l'article L. 311-10 ne peut cependant recevoir application, dans la mesure où il ne s'agit pas d'une opération de crédit au sens de l'article 311-2 du même Code mais d'une simple location ; Attendu, en revanche, que le champ d'application des dispositions protectrices de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne se limite pas au consommateur personne physique ; qu'il concerne tous les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs ; que l'association X. à but non lucratif est un non professionnel au regard de l'objet du contrat, à savoir la télésurveillance, qui n'a aucun rapport direct avec l'objet de son activité, lequel concerne l'éducation des enfants, hors temps scolaire, dans un environnement anglophone ».

2/ « Attendu que le contrat de télésurveillance n'exclut pas toute responsabilité de TEP France en cas de manquement à ses obligations ; que les causes d'exclusion concernent des cas fortuits, des modifications de l'environnement ou des interventions intempestives du client ou de tiers ; que la clause selon laquelle TEP est tenue d'une obligation de moyen, à l'exclusion de toute obligation de résultat, doit s'entendre en ce sens que TEP ne s'engage pas au résultat que le bénéficiaire ne subira aucune atteinte à sa sécurité, non en ce sens que TEP ne s'engage pas à garantir la défaillance du matériel ou de la surveillance ; qu'il ne s'agit donc pas là de clauses abusives ».

3/ « Attendu que l'application combinée de ces dispositions permet au bailleur et au prestataire de réduire s'ils le souhaitent le montant de la prestation de service à une somme symbolique, et d'obliger ainsi le consommateur à payer le montant intégral ou quasi-intégral des mensualités à titre de loyer, et non à titre de prestation, en le privant de la possibilité d'opposer au prestataire l'inexécution de ses obligations ; Attendu qu'une telle clause de variabilité crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat de prestation de service ; qu'elle est donc abusive ».

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 24 SEPTEMBRE 2002

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE DEUX LA CHAMBRE CIVILE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont le teneur suit :

dans la cause 00/00756 - Chambre commerciale (M.J.B/E.M.)

opposant :

 

APPELANTE

LA SA ADT TELESURVEILLANCE anciennement dénommée CIPE FRANCE VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE TEP FRANCE, suite à une fusion absorption, dont le siège social est […] représentée par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués à la Cour assistée de la SCP PLOUTON ET DOLMAZON avocats au barreau de LYON

à :

INTIMÉES

L'ASSOCIATION X. dont le siège social est à ANNECY […]

représentée par la SCP BUTTIN-RICHARD/FILLARD, avoués à la Cour assistée de la SCP CHEMIN SALE , avocats au barreau D'ANNECY

LA SA ADT FRANCE anciennement dénommée ADT PROVIDER venant aux droits de la société FIRENT, suite à une absorption dont le siège social est […], représentée par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués à la Cour, assistée de Maître TROMBETTA, avocat au barreau de SAINT ETIENNE

 

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 11 juin 2002 avec l’assistance de Madame TAMBOSSO, Greffier

[minute page 2] Et lors du délibéré, par : - Madame BERAUDO, Président - Madame CUNY, Conseiller - Monsieur BETOUS, Conseiller

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Annecy, statuant en matière commerciale, le 1er février 2000, qui a :

Dit que les contrats d'abonnement de télésurveillance et de location du 2 septembre 1997 comportent des clauses abusives réputées non écrites,

Condamné en conséquence solidairement la SA TEP et la SA FIRENT, ès qualités de représentante de la FIMACOM à rembourser à L'ASSOCIATION X. les échéances réglées, au titre desdits contrats, soit la somme de dix huit mille neuf cent quatre vingt quatorze francs et cinquante centimes (18.994,50 Francs),

Condamné la SA TEP et la SA FIRENT ès qualités de représentant de FINACOM, à payer à L'ASSOCIATION X. une indemnité de cinq mille francs (5.000 Francs) en vertu de l'article 700 du NCPC,

Ordonné l'exécution provisoire,

Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions,

Condamné solidairement aux entiers dépens de l'instance la SA TEP et la SA FIRENT en sa qualité de représentante de FIMACOM,

Vu l'appel interjeté par la société TEP France le 27 mars 2000,

Vu les conclusions déposées le 2 mai 2002 par la société ADT Télésurveillance, anciennement dénommée CIPE France, aux droits de la société TEP France, et par la société ADT France anciennement dénommée ADT Provider, aux droits de la société Firent,

Vu les conclusions déposées par l'association X. le 31 octobre 2000,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] Sur la recevabilité de la demande formée contre la société Firent, taux droits de laquelle se trouve la société ADT France :

Attendu que depuis le début de la procédure, les sociétés Firent puis ADT France opposent leur défaut de qualité à défendre à l'action introduite par l'association X. ;

Attendu que, de fait, la société Firent a été assignée en qualité de représentante de diverses sociétés financières, parmi lesquelles la société FINACOM, qui est le bailleur ayant noué des liens contractuels avec l'association X. par l'intermédiaire de Firent ;

Attendu que le contrat de location précise bien que la société Firent représente « celle des sociétés suivantes : Banque monétaire et financière, Cofilion, Crédit de l'Est, Fimacom, Fineq, Lionbail, Locam, Préfi, Sapar Location, Socréa Location, le fournisseur, qui acceptera ce contrat », et qu'il ressort des pièces produites notamment par l'association X. que c'est la société FINACOM qui a accepté ce contrat, ce dont l'association X. a été clairement informée par la dite société ; que l'association X. a d'ailleurs annulé par courrier du 23 octobre 1998 adressé à la Lyonnaise de Banque l'autorisation de prélèvements qu'elle avait consentie à la société FINACOM ;

Attendu qu'il est de principe qu'en France, nul ne plaide par procureur ; que la société FINACOM a seule qualité pour défendre à l'action de l'association X. ; que la demande dirigée contre la société Firent absorbée par ADT France doit donc être déclarée irrecevable ;

 

Sur le bien fondé de la demande dirigée contre la société Tep France, aux droits de laquelle se trouve la société ADT Télésurveillance,

Attendu que pour ordonner le remboursement à l'association X. des échéances réglées au titre des contrats de télésurveillance et de location, le tribunal s'est fondé sur l'existence de clauses abusives dans les conventions liant les parties ;

Attendu que la société ADT Télésurveillance objecte que l'association X. n'est pas un consommateur au motif qu'elle n'est pas une personne physique, en se référant, d'une part, aux dispositions de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 transposée en droit national parla loi du 1er février 1995, d'autre part à l'article L. 121-21 du Code de la consommation ;

Attendu que cette société crée ainsi une confusion entre divers principes et dispositions régissant les rapports entre professionnels et non professionnels ;

[minute page 4] Attendu, tout d'abord, que la directive ne reconnaît la qualité de consommateurs qu'aux personnes physiques ; que, cependant, elle n'exclut pas la possibilité pour les Etats membres d'élargir les dispositions de transposition des principes qu'elle pose à un champ d'application plus étendu, quand aux personnes concernées ou quant aux contrats visés ; qu'en effet, l'objectif de la directive est de fixer des règles de protection minimales, puisqu'elle prévoit, en son article 8, que dans le domaine qu'elle régit, les Etats membres peuvent adopter ou maintenir des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur ;

Attendu, ensuite, que les dispositions de l'article L. 121-1 du Code de la consommation sont inapplicables en la cause ; qu'en l'espèce, la demande de l'association X. est fondée sur les dispositions des articles L. 132-1 et L. 311-10 du Code de la consommation ;

Attendu que l'article L. 311-10 ne peut cependant recevoir application, dans la mesure où il ne s'agit pas d'une opération de crédit au sens de l'article 311-2 du même Code mais d'une simple location ;

Attendu, en revanche, que le champ d'application des dispositions protectrices de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne se limite pas au consommateur personne physique ; qu'il concerne tous les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs ; que l'association X. à but non lucratif est un non professionnel au regard de l'objet du contrat, à savoir la télésurveillance, qui n'a aucun rapport direct avec l'objet de son activité, lequel concerne l'éducation des enfants, hors temps scolaire, dans un environnement anglophone ;

Attendu que le caractère abusif d'une clause visée par l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne peut conduire qu'à l'annulation de cette clause, non à l'annulation du contrat ; qu'il convient donc, dans un premier temps, de rechercher s'il existe, dans les conventions conclues entre les parties, des clauses abusives, et dans un second temps d'en tirer les conséquences ;

Attendu que cet examen oblige à confronter les clauses du contrat de télésurveillance et celles du contrat de location, qui sont intimement liées, même si le contrat de location précise qu'il est autonome par rapport au contrat de télésurveillance ;

Attendu, en effet, que c'est le bailleur du matériel qui perçoit à la fois la prestation de télésurveillance et de maintenance du matériel et le montant du loyer ; que les deux contrats mentionnent le même montant de loyer, lequel comprend à la fois les deux éléments : loyer, d'une part, télésurveillance et maintenance du matériel, d'autre part ;

[minute page 5] Attendu que le contrat de télésurveillance n'exclut pas toute responsabilité de TEP France en cas de manquement à ses obligations ; que les causes d'exclusion concernent des cas fortuits, des modifications de l'environnement ou des interventions intempestives du client ou de tiers ; que la clause selon laquelle TEP est tenue d'une obligation de moyen, à l'exclusion de toute obligation de résultat, doit s'entendre en ce sens que TEP ne s'engage pas au résultat que le bénéficiaire ne subira aucune atteinte à sa sécurité, non en ce sens que TEP ne s'engage pas à garantir la défaillance du matériel ou de la surveillance ; qu'il ne s'agit donc pas là de clauses abusives ;

Attendu, en revanche, que pour connaître le montant exact de la prestation de télésurveillance et de maintenance, il faut se référer au contrat de location ;

Qu'en effet, c'est seulement au contrat de location qu'il est prévu (article 6 C) que le montant de la redevance due au titre de la prestation de service, qui est reversé par le bailleur au prestataire de service, correspond à un pourcentage de 19,5% du montant total encaissé mensuellement par le bailleur ; que ce montant peut être variable en fonction de critères monétaires financiers et techniques extérieurs au contrat et régissant les rapports du bailleur avec le prestataire de service ; que le montant des mensualités demeure fixe, quelles que soient les variations de la répartition entre le montant de la rémunération de la prestation de service réservé par le bailleur et le montant de la location de matériel, et que « le locataire reconnaît que cette répartition susceptible de fluctuation est indifférente à la validité de son engagement, la répartition du coût de l'abonnement entre la location du matériel et celui de la prestation de service lui étant indifférente, seul le montant global, fixe et invariable tel que défini par l'article 1 constituant une condition substantielle déterminant son engagement » ;

Attendu que, parallèlement, l'article 6 (B) prévoit que le bailleur, qui a reçu mandat d'encaisser, en même temps que les loyers, les redevances dues au prestataire de service, n'assume aucune responsabilité quant à l'exécution des prestations et ne garantit pas les obligations du prestataire ; que par conséquent, le locataire s'interdit de refuser le paiement des loyers pour toute cause fondée sur un contentieux lié à l'exécution ou l'inexécution des prestations de service ;

Attendu qu'il suit de là que le bailleur et le prestataire ont la faculté de faire varier librement la part du loyer et la part des prestations de service à l'intérieur de la mensualité fixe, et que, même en cas d'inexécution du contrat de prestation de service, le locataire doit payer la part de la mensualité correspondant au montant du loyer ;

Attendu que l'application combinée de ces dispositions permet au bailleur et au prestataire de réduire s'ils le souhaitent le montant de la prestation de service à une somme symbolique, et d'obliger ainsi le consommateur à payer le montant intégral ou quasi-intégral des mensualités à titre de loyer, et non à titre de prestation, en le privant de la possibilité d'opposer au prestataire l'inexécution de ses obligations ;

[minute page 6] Attendu qu'une telle clause de variabilité crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat de prestation de service ; qu'elle est donc abusive ;

Attendu que l'association X. ne peut, néanmoins, se fonder sur le caractère abusif de cette clause figurant au contrat de location pour solliciter du prestataire la restitution des sommes payées ;

Qu'en effet, dès lors que la clause de variabilité est écartée, il est possible de distinguer, à l'intérieur du montant mensuel payé entre les mains du bailleur, la part qui revient à celui-ci et celle qui revient au prestataire ;

Que la clause abusive devant être réputée non écrite, la répartition convenue au départ entre les parties (19,5% pour la prestation de service) doit s'appliquer pendant toute la durée du contrat ;

Que le locataire doit donc payer la part correspondant à la redevance pendant la durée convenue, et ce tant que la société de télésurveillance exécute ses obligations ;

Attendu que s'agissant du caractère irrévocable de la durée convenue de 48 mois, celui-ci n'a été stipulée que par le contrat de location ; qu'il ne concerne donc que les rapports entre le bailleur et le locataire ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de prononcer l'annulation de la clause relative à la durée du contrat qui figure au contrat d'abonnement de télésurveillance, ce contrat n'excluant pas toute possibilité de résiliation en cas de défaillance du prestataire ;

Attendu que l'association X. pourrait réclamer au prestataire le remboursement des redevances, à condition de démontrer qu’elles l'ont été à tort, la société de télésurveillance s'étant montrée défaillante dans l'exécution de ses obligations ;

Mais attendu qu'en l'espèce, l'association X. n'apporte pas une telle démonstration ;

Qu'en effet, elle se borne à alléguer, sans en apporter la preuve, qu'à deux reprises durant l'été 1998, des personnes ont pu s'introduire dans les locaux de l'association X., sans que cela ait donné lieu à la moindre intervention de la société de télésurveillance ;

Attendu que l'association X. doit donc être déboutée de sa demande de restitution des échéances déjà réglées ;

[minute page 7]

Sur la demande reconventionnelle,

Attendu que la société ADT Télésurveillance sollicite des dommages-intérêts au motif que l'association X. se serait opposée à toute intervention de sa part pour vérifier le bon fonctionnement du matériel ; qu'elle produit une fiche d'intervention technique du 4 décembre 1997 qui fait état d'un tel refus, motivé par le désir de voir enlever le matériel ;

Mais attendu que l'exécution du contrat s'est poursuivie au-delà du 4 décembre 1997, et que la société ADT Télésurveillance ne justifie d'aucun préjudice subi du fait de cette opposition ponctuelle de l'association X. à toute intervention de la part

Qu'elle doit donc être déboutée de sa demande de dommages-intérêts;

Attendu, enfin, qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs,

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Réforme le jugement,

Déclare irrecevable l'action de l'association X. en ce qu'elle est dirigée contre la société Firent aux droits de laquelle se trouve la société ADT France,

Déboute l'association X. de ses demandes envers la société ADT Télésurveillance,

Déboute cette dernière société de sa demande de dommages-intérêts,

Condamne l'association X. aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ces derniers, au profit de la SCP Buttin Richard et Fillard, avoués,

[minute page 8] Dit n'y avoir lieu faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du NCPC,

Ainsi prononcé en audience publique le 24 septembre 2002 par Madame BERAUDO, Président, qui a signé le présent arrêt avec Madame TAMBOSSO, Greffier.

 

 

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