COMMISSION DES CLAUSES ABUSIVES, AVIS du 18 mai 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7152
COMMISSION DES CLAUSES ABUSIVES, AVIS du 18 mai 2017 : n° 17-01
Publication : Site CCA
Extraits : 1/ « La Commission des clauses abusives, en application des dispositions de l'Article L. 822-4 du code de la consommation, a pour mission exclusive de rechercher si « des contrats proposés par les professionnels à leurs contractants consommateurs ou non professionnels (...) contiennent des clauses qui pourraient présenter un caractère abusif » et qu'ainsi elle ne saurait s'intéresser au caractère illicite de telles stipulations, à moins que cette illicéité dégénère en un abus. Elle ne saurait davantage donner un quelconque avis sur l'existence ou l'importance d'un préjudice subi par les consommateurs ou non-professionnels ; Après avoir également rappelé qu'en application de cette même disposition légale, la commission ne saurait apporter une quelconque observation sur des ajouts ou modifications à apporter au contrat qui lui est soumis pour avis ».
2/ « Il est produit aux débats un procès-verbal de constat d’huissier établi le 1er avril 2015, capturant les écrans numériques contenant les conditions générales, à cette date, du contrat de vente proposé par cette société. Ce sont ces stipulations à la date d'établissement de ce constat qui sont soumises à la commission qui rend le présent avis conformément à la législation en vigueur à la date du constat ».
3/ « Ce commentaire inséré au sein des conditions générales du contrat s'analyse en des stipulations de celui-ci. »
4/ « Sur les clauses, V. les motifs de l’avis ».
COMMISSION DES CLAUSES ABUSIVES
AVIS N° 17-01
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE L’AVIS – TEXTES CONCERNÉS (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La Commission des clauses abusives,
Vu les articles L. 212-1, L. 217-7, L. 217-8, L. 217-9, L. 217-10, L. 217-15, L. 221-1, L. 221- 2, L. 221-18, L. 221-21, L. 221-23, L. 221-24, L. 221-28 et R. 212-1, R. 212-2, R. 631-3, R. 822-21 du code de la consommation, dans sa codification en vigueur au jour du présent avis ;
Vu l’article 1641 du code civil ;
Vu l’article 46 du code de procédure civile ;
Vu la demande d’avis du TGI de Bobigny reçue au secrétariat de la Commission le 6 février 2017 dans une instance opposant […] à […] et dont le dispositif est pour l'essentiel rédigé comme il suit : « Saisit la Commission des clauses abusives aux fins d'obtenir son avis, notamment : sur le caractère illicite ou abusif des clauses figurant aux articles 6, 7, 8, 9 et 15 des conditions générales de vente en ligne de La société SASU ALES DIFFUSION, sur les suppressions, ajouts ou modifications à apporter aux conditions générales de vente précitées, et toute observation qui lui paraîtra utile quant à l'évaluation du préjudice subi par les consommateurs du fait des manquements constatés » ;
Après avoir rappelé que la Commission des clauses abusives, en application des dispositions de l'Article L. 822-4 du code de la consommation, a pour mission exclusive de rechercher si « des contrats proposés par les professionnels à leurs contractants consommateurs ou non professionnels (...) contiennent des clauses qui pourraient présenter un caractère abusif » et qu'ainsi elle ne saurait s'intéresser au caractère illicite de telles stipulations, à moins que cette illicéité dégénère en un abus. Elle ne saurait davantage donner un quelconque avis sur l'existence ou l'importance d'un préjudice subi par les consommateurs ou non-professionnels ;
Après avoir également rappelé qu'en application de cette même disposition légale, la commission ne saurait apporter une quelconque observation sur des ajouts ou modifications à apporter au contrat qui lui est soumis pour avis ;
La Commission des clauses abusives est d’avis que :
[page 2]
Rappel des faits et analyse du contrat litigieux
L’action a été engagée par Le Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL).
La société SASU ALES DIFFUSION n’a pas comparu en justice.
La dite société a pour activité la vente, en ligne ou par téléphone, de mobiliers d'ameublement ou d'équipements pour la maison.
Il est produit aux débats un procès-verbal de constat d’huissier établi le 1er avril 2015, capturant les écrans numériques contenant les conditions générales, à cette date, du contrat de vente proposé par cette société. Ce sont ces stipulations à la date d'établissement de ce constat qui sont soumises à la commission qui rend le présent avis conformément à la législation en vigueur à la date du constat.
L'article L. 221-1 du code de la consommation énonce que :
« Pour l'application du présent titre, sont considérés comme :
1° Contrat à distance : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ».
L’article L. 221-2 du même code ajoute que :
« Sont exclus du champ d'application du présent chapitre :
1° Les contrats portant sur les services sociaux, y compris le logement social, l'aide à l'enfance et aux familles, à l'exception des services à la personne mentionnés à l'article L. 7231-1 du code du travail ;
2° Les contrats portant sur les services de santé fournis par des professionnels de la santé aux patients pour évaluer, maintenir ou rétablir leur état de santé, y compris la prescription, la délivrance et la fourniture de médicaments et de dispositifs médicaux ;
3° Les contrats portant sur les jeux d'argent mentionnés à l'article L. 320-1 du code de la sécurité intérieure, y compris les loteries, les jeux de casino et les transactions portant sur des paris ;
4° Les contrats portant sur les services financiers ;
5° Les contrats portant sur un forfait touristique, au sens de l'article L. 211-2 du code du tourisme ;
6° Les contrats portant sur les contrats d'utilisation de biens à temps partagé, les contrats de produits de vacances à long terme et les contrats de revente et d'échange mentionnés aux articles L. 224-69 et L. 224-70 ;
7° Les contrats rédigés par un officier public ;
8° Les contrats portant sur la fourniture de denrées alimentaires, de boissons ou d'autres biens ménagers de consommation courante, qui sont livrés physiquement par un professionnel lors de tournées fréquentes et régulières au domicile ou au lieu de résidence ou de travail du consommateur ;
[page 3] 9° Les contrats portant sur les services de transport de passagers, à l'exception des dispositions prévues à l'article L. 221-14 ;
10° Les contrats conclus au moyen de distributeurs automatiques ou de sites commerciaux automatisés ;
11° Les contrats conclus avec des opérateurs de télécommunications pour l'utilisation des cabines téléphoniques publiques ou aux fins d'une connexion unique par téléphone, internet ou télécopie, notamment les services et produits à valeur ajoutée accessibles par voie téléphonique ou par message textuel ;
12° Les contrats portant sur la création, l'acquisition ou le transfert de biens immobiliers ou de droits sur des biens immobiliers, la construction d'immeubles neufs, la transformation importante d'immeubles existants ou la location d'un logement à des fins résidentielles. »
Le contrat litigieux a vocation à être formé entre un professionnel et des consommateurs et a trait à des commandes de meubles faites par voie électronique.
Au regard des dispositions légales rappelées plus avant, il s'agira alors bien là d'un contrat de vente à distance.
Toutefois ce même contrat, en ce qu'il serait formé entre un professionnel et un non-professionnel, ne relèverait pas de cette réglementation encadrant les contrats à distance.
Article numéroté 6 du contrat
A la lecture du procès-verbal de constat d'huissier, ledit article est rédigé comme il suit :
« Rétractation
Les acheteurs, personnes physiques non professionnelles, bénéficient d'un droit de rétractation de sept jours à compter de la livraison de leur commande pour faire retour du produit au vendeur pour échange ou remboursement sans pénalité.
Il convient que l'acheteur informe au préalable par lettre recommandée avec AR le vendeur qui lui communiquera un numéro de retour avec les coordonnées de la plate forme de retour MOBILIER/UNIQUE.
Tout retour de marchandise sans notre accord sera refusé à réception.
L'acheteur doit de lui-même et à sa charge financière trouver un transporteur afin de nous retourner le ou les produits dans les meilleures conditions de transport et de livraison.
L'acheteur est seul responsable des risques liés au retour du produit, celui-ci devant être renvoyé dans son emballage d'origine avec notices et accessoires. Le cas échéant, les produits ne seraient pas acceptés et la livraison refusé par ALES DIFFUSION.
Il convient que les produits ne seront pas remboursés ni échangés si
- Produits non renvoyés dans son emballage d'origine,
- Emballage d'origine détérioré,
- Marchandises abimées ou déchirées.
[page 4] Les articles faisant l’objet d’une promotion par le biais de soldes, déstockage, vente flash ou d’une promotion quelconque ne feront l’objet d’aucun remboursement mais d’un échange ou d’un avoir.
Les articles réalisés sur commande, deux couleurs, de couleur spécifique, de taille exceptionnelle, sur mesure, façonnés différemment, ne rentrent pas dans le cadre du droit à rétractation. Les canapés d’angle de plus de trois places, ainsi que les canapés d’angle panoramique n’entrent pas dans le cadre du droit à rétractation car ceux ci sont réalisés uniquement sur commande ».
1/ L'événement ouvrant droit à rétractation
L'article L. 221-18 du code de la consommation, applicable aux contrats à distance est rédigé comme suit :
« Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.
Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :
1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 221-4 ;
2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
Dans le cas d'une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d'une commande d'un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.
Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien. »
L'article 6 du contrat, tel qu'il est rédigé, énonce que le bénéfice du droit à rétractation n'est ouvert qu'au jour de la livraison du bien au consommateur. Or, si le délai expire bien à l'issue d'un délai courant du jour de la livraison, il n'en reste pas moins que le droit de se rétracter nait antérieurement à cette date, le jour même de la formation du contrat. Il sera ajouté que l'expression de la volonté de renoncer au contrat est plus aisée lorsque le bien n'est pas encore remis à l'acheteur, notamment en ce qu'il ne supportera pas le prix du retour,
Le caractère imprécis et, ce faisant, ambigu de la rédaction de cette clause est de nature à contrarier l'expression du droit légal à rétractation ; dès lors, elle a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
2/ La durée du délai de rétractation
Le contrat limite la durée du dit délai à 7 jours et non à 14 jours, en contravention avec L'article L. 221-18 du code de la consommation rappelé plus avant.
[page 5] Cette clause est illicite, maintenue dans les contrats, elle est de nature à faire croire au consommateur qu'il ne bénéficie plus du droit légal de se rétracter à l’issue du délai de 7 jours avant l'expiration de celui-ci ; dès lors, elle a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
3/ L'exigence d'une rétractation par la voie exclusive de l’envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception
Le même article L. 221-18 du code de la consommation ne conditionne pas l'expression de la rétractation à l'envoi d'un courrier ainsi recommandé avec avis de réception.
La stipulation imposant une telle modalité ajoute à la loi une formalité substantielle ; elle constitue un frein à l'expression du droit légal à rétractation et peut laisser croire indument au consommateur qu'il pourrait être privé de l’exercice de ce droit à défaut d’un tel formalisme.
Dès lors, elle a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
4/ L'exigence d'un accord du vendeur
L’indication de la nécessité d’un « accord du vendeur » dans l’exercice du droit de retour du bien vendu laisse croire à la possibilité d’un droit de celui-ci de refuser un tel retour, alors que le droit de rétractation du consommateur est unilatéral. Elle constitue un frein à l'expression de ce droit consacré par la loi et a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
5/ La prise en charge du coût de retour des biens acquis et livrés
L'article L. 221-23 du code de la consommation énonce en ses deux premiers alinéas que :
« Le consommateur renvoie ou restitue les biens au professionnel ou à une personne désignée par ce dernier, sans retard excessif et, au plus tard, dans les quatorze jours suivant la communication de sa décision de se rétracter conformément à l'article L. 221-21, à moins que le professionnel ne propose de récupérer lui-même ces biens.
Le consommateur ne supporte que les coûts directs de renvoi des biens, sauf si le professionnel accepte de les prendre à sa charge ou s'il a omis d'informer le consommateur que ces coûts sont à sa charge. Néanmoins, pour les contrats conclus hors établissement, lorsque les biens sont livrés au domicile du consommateur au moment de la conclusion du contrat, le professionnel récupère les biens à ses frais s'ils ne peuvent pas être renvoyés normalement par voie postale en raison de leur nature. »
Le professionnel est obligé à la rédaction d'un contrat clair et compréhensible (article L. 211-12 du code de la consommation).
L'article 6 du contrat est rédigé en des termes ambigus, en ce qu'il peut être lu par un consommateur comme ne mettant à sa charge que le seul coût de recherche d'un transporteur et non le coût du transport en / de retour lui-même.
Cette rédaction ne satisfait pas à l'obligation d'information du consommateur au sein du contrat, instituée par l'article L. 221-23 alinéa 2.
[page 6] Elle a pour effet de ne pas permettre au consommateur de comprendre à tort que le coût du retour du bien acquis resterait à sa charge en cas de rétractation et en cela crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
6/ Le renvoi du bien et de son emballage d'origine
L'article L. 221-23 du code de la consommation en son alinéa 3 prévoit que :
« La responsabilité du consommateur ne peut être engagée qu'en cas de dépréciation des biens résultant de manipulations autres que celles nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement de ces biens, sous réserve que le professionnel ait informé le consommateur de son droit de rétractation, conformément au 2° de l'article L. 221- 5. »
La stipulation qui impose le renvoi du bien livré dans son emballage d’origine ajoute une condition au retour ne figurant pas à l’article L. 221-23 qui évoque exclusivement le renvoi du bien lui-même.
La stipulation qui exclut tout remboursement en cas de détérioration du dit emballage contrevient aux dispositions de ce même texte légal, en ce que l’ouverture de l’emballage et son éventuelle dégradation peuvent-être des actions nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien.
Elle constitue un frein à l’exercice du droit de retour et au droit de remboursement consacrés par la loi et a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
7/ L'exclusion du droit à remboursement de certains biens
L'article L. 221-24 du code de la consommation dispose que :
« Lorsque le droit de rétractation est exercé, le professionnel rembourse le consommateur de la totalité des sommes versées, y compris les frais de livraison, sans retard injustifié et au plus tard dans les quatorze jours à compter de la date à laquelle il est informé de la décision du consommateur de se rétracter.
Pour les contrats de vente de biens, à moins qu'il ne propose de récupérer lui-même les biens, le professionnel peut différer le remboursement jusqu'à récupération des biens ou jusqu'à ce que le consommateur ait fourni une preuve de l'expédition de ces biens, la date retenue étant celle du premier de ces faits.
Le professionnel effectue ce remboursement en utilisant le même moyen de paiement que celui utilisé par le consommateur pour la transaction initiale, sauf accord exprès du consommateur pour qu'il utilise un autre moyen de paiement et dans la mesure où le remboursement n'occasionne pas de frais pour le consommateur.
Le professionnel n'est pas tenu de rembourser les frais supplémentaires si le consommateur a expressément choisi un mode de livraison plus coûteux que le mode de livraison standard proposé par le professionnel. »
[page 7] Cette disposition légale ne prévoit aucune autre conséquence possible au retour du bien durant le délai de rétractation autre que le remboursement du consommateur et cela en utilisant le même moyen de paiement que celui utilisé par ce dernier sauf son accord.
Or, le contrat stipule que les articles faisant l'objet d'une promotion par le biais de soldes, déstockage, vente flash ou d'une promotion quelconque ne feront l'objet d'aucun remboursement mais d'un échange ou d'un avoir, en contravention avec cette disposition légale. Il oblige ainsi le consommateur à acheter un autre bien au professionnel alors même qu'il a entendu rompre son engagement initial comme la loi l'y autorise ; cette stipulation pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
8/ L'exclusion du droit de rétractation pour certains biens
L'article L. 221-28 du code de la consommation énonce que :
« Le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats :
(...) 3° De fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés (...).
Le contrat définit les bien exclut/s du droit de rétractation comme ceux « réalisés sur commande, deux couleurs, de couleur spécifique, de taille exceptionnelle, sur mesure, façonnés différemment (…) les canapés d'angle de plus de trois places, ainsi que les canapés d'angle panoramique n'entrent pas dans le cadre du droit à rétractation car ceux-ci sont réalisés uniquement sur commande »,
Cette clause rédigée en des termes parfois généraux ainsi les vocables « exceptionnel » et « spécifique » est insuffisamment précise quant à la définition des biens non susceptibles de donner lieu à exercice du droit de rétraction, en cela elle peut laisser croire au consommateur que ce droit est exclu à l'égard de certains biens alors qu'ils ne répondent pas à la définition stricte de l'article L. 221-8 alinéa 3 rappelé plus avant, qui vise exclusivement les biens nettement personnalisés. Elle est de nature à faire croire au consommateur qu'il ne bénéficie pas du droit légal de se rétracter qui peut pourtant lui être ouvert ; dès lors, elle a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Article numéroté 7
Le dit article est rédigé comme il suit :
« Modalités de paiement,
Le prix est exigible à la commande. Les paiements seront effectués :
Par carte bancaire, il seront réalisés par le biais du système sécurisé du Crédit Mutuel-CIC, qui utilise le protocole SSL, de telle sorte que les informations transmises sont cryptées par un logiciel et qu'aucun lien [N.B. tiers ?] ne peut prendre connaissance au cours de transport sur le réseau ;
Par carte bancaire en trois fois (le 1er à la commande, le 2ème à 30 jours et le 3ème à 60 jours) ;
Dans le cadre d'un paiement en trois fois la commande ne sera validée qu'au paiement
complet ou total de la commande. Le délai de livraison et de fabrication ne commencera dès [page 8] que le paiement sera enregistré sur nos comptes bancaires. La date de début de fabrication sera la date de validation du dernier paiement sur notre banque ;
Paiement par PayPal ;
Par virement bancaire, la commande sera validée dès réception de votre paiement (un RIB vous sera alors adressé par e-mail) ;
Par chèque bancaire en trois à partir de 900 euros d'achats (le 1er à la commande, le 2ème à 30 jours et le 3ème à 60 jours) ;
(…) A la demande de l'acheteur, il lui sera dressé une facture sur papier faisant ressortir la TVA »
Aucune disposition légale ou réglementaire ne prohibe l'exigence d'un paiement à la commande en matière de contrat de vente à distance et une telle demande ne créé aucun déséquilibre manifeste entre les droits et obligations des parties.
Article numéroté 8
Ledit article est rédigé comme il suit :
« Les délais de livraison
Il s’agit du délai que nous indiquons sur toutes nos fiches produits et au cours duquel nous nous engageons à livrer votre commande.
Ces délais s’entendent en jours ouvrés Nous avons conscience qu’en achetant sur mobilierunique.com, vous achetez des produits de qualité, à un prix défiant toute concurrence et dans la majeure partie du temps livrés sous 15 jours. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que ces délais soient respectés et même améliorés. Néanmoins, il peut arriver qu’au cours de ce long trajet qui sépare notre dépôt de votre domicile en France, que certains éléments viennent perturber les délais de livraison pour vous satisfaire au plus vite.
N’hésitez pas à nous contacter si vous faites partie de nos rares clients livrés en retard ».
L'huissier de justice instrumentaire du procès-verbal de constat mentionne qu'au sein du document 11 portant cet article 8, est porté le commentaire suivant :
« Les délais de livraison ne sont donnés qu’à titre indicatif. Tout dépassement de délai ne peut donner droit en aucun cas ni à indemnités ni à l’annulation de la commande. Les produits peuvent être livrés dans un délai de 16 à 20 semaines maximum Au cas où un produit n’est plus disponible, nous vous proposerons soit un produit similaire au même prix, soit le contrat de vente pourra être résilié et l’acheteur remboursé ».
Ce commentaire inséré au sein des conditions générales du contrat s'analyse en des stipulations de celui-ci.
1/ L’indication d’un délai indicatif
L'article L. 111-1 du code de la consommation énonce que :
« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
[page 9] (…)
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ».
L'article R. 212-2 7° du code de la consommation présume abusive la stipulation d'une date indicative d'exécution du contrat, hors les cas où la loi l'autorise.
Aucun élément n'a trait à l'apport d'une preuve du bien-fondé de cette stipulation.
Cette clause sera considérée comme abusive.
2/ Le défaut de sanction du retard
L'article L. 216-2 du même code ajoute que :
« En cas de manquement du professionnel à son obligation de livraison du bien ou de fourniture du service à la date ou à l'expiration du délai prévus au premier alinéa de l'article L. 216-1 ou, à défaut, au plus tard trente jours après la conclusion du contrat, le consommateur peut résoudre le contrat, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par un écrit sur un autre support durable, si, après avoir enjoint, selon les mêmes modalités, le professionnel d'effectuer la livraison ou de fournir le service dans un délai supplémentaire raisonnable, ce dernier ne s'est pas exécuté dans ce délai.
Le contrat est considéré comme résolu à la réception par le professionnel de la lettre ou de l'écrit l'informant de cette résolution, à moins que le professionnel ne se soit exécuté entretemps.
Le consommateur peut immédiatement résoudre le contrat lorsque le professionnel refuse de livrer le bien ou de fournir le service ou lorsqu'il n'exécute pas son obligation de livraison du bien ou de fourniture du service à la date ou à l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article L. 216-1 et que cette date ou ce délai constitue pour le consommateur une condition essentielle du contrat. Cette condition essentielle résulte des circonstances qui entourent la conclusion du contrat ou d'une demande expresse du consommateur avant la conclusion du contrat. »
L'article R. 212-1 6° du code de la consommation présume irréfragablement abusive la stipulation ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations.
Telle est la mention au terme de laquelle « Tout dépassement de délai ne peut donner droit en aucun cas ni à indemnités », elle est ainsi abusive.
L'article R. 212-1-7° du code de la consommation présume irréfragablement abusive la stipulation ayant pour objet ou pour effet d'interdire au consommateur le droit de demander la résolution ou la résiliation du contrat en cas d'inexécution par le professionnel de ses obligations de délivrance ou de garantie d'un bien ou de son obligation de fourniture d'un service.
La mention au contrat d'une exclusion de toute « annulation » du contrat, en cas de retard dans la livraison, s'entendant en réalité d'une résolution, est ainsi abusive.
[page 10]
Article numéroté 9
Ledit article est rédigé comme il suit [N.B. orthographe conforme à la clause telle que reproduite dans l’avis] :
« Garanties
Tous les produits fournis par le vendeur bénéficient de la garantie légale prévue par les articles 1641 et suivants du code civil.
Nos canapés cuir sont garantie 2 ans. Nos meubles sont garantie 1 an.
Tous les canapés cuirs ou meubles vendu en modèle d’exposition sont garanties 3 mois Les lampes led, transformateurs et chargeurs ne sont garanties que deux mois.
En cas de non-conformité d’un produit vendu, il pourra être retourné au vendeur qui le reprendra, l’échangera ou le remboursera.
Toute modification, démontage ou démantèlement d’un produit annulera de plein droit la garantie ».
La présentation de ces stipulations ne distingue pas entre la garantie légale des vices cachés, la garantie légale de conformité et les garanties commerciales.
Cette présentation est d’autant plus critiquable que l’article L. 217-15, alinéas 3 et 4, du code de la consommation indique que :
Le contrat « mentionne de façon claire et précise que, indépendamment de la garantie commerciale, le vendeur reste tenu de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 217-4 à L. 217-12 et de celle relative aux défauts de la chose vendue, dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil.
Les dispositions des articles L. 217-4, L. 217-5, L. 217-12 et L. 217-16 ainsi que l'article 1641 et le premier alinéa de l'article 1648 du code civil sont intégralement reproduites dans le contrat. »
Le manquement au respect de ces prescriptions légales, ajouté au défaut de distinction entre les garanties rend confuse la compréhension des dites stipulations et, en cela, entrave de manière excessive l’exercice par le consommateur de son droit à garantie.
Dès lors, celles-ci ont pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Article numéroté 15
« Les présentes conditions de vente en ligne sont soumises à la loi française.
En cas de litige, compétence est attribuée aux tribunaux compétents de BOBIGNY, nonobstant pluralité de défendeurs ou appel en garantie. »
Cette clause attributive de compétence géographique exclusive aux tribunaux de BOBIGNY contrevient aux dispositions de l’article 46 du code de procédure civile, énoncées comme il suit :
« Le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur :
[page 11] En matière contractuelle, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de service (...) ».
Elle contrevient également aux dispositions de l'article Article [N.B. conforme à l’avis] R. 631-3 du code de la consommation, qui prévoit que :
« Le consommateur peut saisir, soit l'une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, soit la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable. »
L'article R. 212-2-7° du code de la consommation présume abusive la stipulation de clauses ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou entraver l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d'arbitrage non couverte par des dispositions légales ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges.
En limitant la compétence territoriale à une juridiction, alors que l’exécution du contrat par la livraison du bien au domicile du consommateur ou non professionnel, pouvant être située sur l’ensemble du territoire français métropolitain et, au surplus, que l’objet du litige peut être d’un faible montant, cette stipulation a pour effet d’entraver l’action de ceux-ci.
Aucun élément n’apporte la preuve contraire à l'existence d'un abus et cette clause sera considérée comme abusive.
Délibéré et adopté, sur le rapport de M. Étienne RIGAL, dans sa séance du 18 mai 2017
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- 6079 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Consentement - Modes d’expression du Consentement - Contrats conclus à distance ou par Internet
- 6083 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Consentement - Permanence du Consentement - Consommateur - Droit de rétractation
- 6101 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations monétaires - Date de paiement du prix
- 6114 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 212-1-6° C. consom.)
- 6118 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Retard d’exécution
- 6128 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Résolution ou résiliation pour manquement - Inexécution du professionnel
- 6142 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Preuve - Encadrement des modes de preuve
- 6149 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Clauses attributives de compétence - Compétence territoriale
- 7142 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Vente en général (1) - Formation du contrat - Internet - Vente en général