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TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 1er mars 2010

Nature : Décision
Titre : TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 1er mars 2010
Pays : France
Juridiction : TGI Grenoble. 4e ch.
Demande : 08/02845
Date : 1/03/2010
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Site Com. cl. abusives (CCA)
Date de la demande : 2/06/2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4064

TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 1er mars 2010 : RG n° 08/02845

Publication : Site CCA

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE GRENOBLE

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 1er MARS 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 08/02845.

 

ENTRE :

DEMANDERESSE :

[UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE L'ISÈRE]

dont le siège social est [adresse], représentée par la SCP BRASSEUR M'BAREK PAYET, avocats au barreau de GRENOBLE et plaidant par Maître BRASSEUR, D'UNE PART

 

ET :

DÉFENDEUR :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté et plaidant par Maître Alain CHAPUIS, avocat au barreau de GRENOBLE, D'AUTRE PART

[minute page 2]

COMPOSITION DU TRIBUNAL : lors des débats et du délibéré :

Présidente : Guilaine GRASSET, Vice-Présidente

Assesseurs : Marie-Pascale BLANCHARD, Vice-Présidente, Frédéric BLANC, Juge

Assistés lors des débats par Anne-Marie CHAMBRON, Greffier

LE TRIBUNAL

A l'audience publique du 25 janvier 2010, après avoir entendu Frédéric BLANC en son rapport et les avocats en leur plaidoirie, l'affaire a été mise en délibéré, et le prononcé de la décision renvoyé au 1er mars 2010, date à laquelle il a été statué en ces termes :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PRÉTENTIONS ET PROCÉDURE :

Par exploit d'huissier en date du 2 juin 2008, [l'UFC Que Choisir] a fait assigner devant le Tribunal de  Grande Instance de GRENOBLE Monsieur X. exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.] et entend (se) voir dans ses dernières écritures déposées au greffe le 2 septembre 2009 :

- dire recevables et bien fondées ses demandes au regard des articles L. 421-1 et suivants, R. 411-2 et L. 132-1 du code de la consommation et en conséquence,

- dire illicites ou abusives les clauses suivantes du contrat litigieux :

1) celle qui ne définit pas le programme et le déroulement de la formation en contravention avec l'article R. 213-3 § 4 du code de la route,

2) celle qui ne précise pas les moyens pédagogiques et techniques mis en œuvre pour la formation du candidat en contravention avec l’article R. 213-3 § 5 et ne définit pas les obligations respectives des parties, en contravention avec l'article R. 213-3 § 7 du code de la route,

3) celle qui laisse au professionnel le pouvoir unilatéral de décider de la présentation de l'élève à l'examen,

4) celle qui autorise le professionnel à résilier le contrat, à défaut de paiement, sans mise en demeure ni préavis et sans prévoir la possibilité d'invoquer un motif légitime,

5) celle qui oblige le candidat à justifier d'un cas de force majeure pour ne pas se voir facturer les heures de conduite non prises ou voir droit à un report,

6) celle qui oblige le candidat à prévenir une semaine à l'avance en cas de défaut de présentation à une épreuve sous peine de perdre les frais de la prestation, sans prévoir une exonération pour motif légitime,

7) celle qui limite à trois mois la possibilité de suspension du contrat pour motif légitime,

8) [minute page 3] celle qui rend opposable au consommateur le règlement intérieur qui ne lui a pas été remis en annexe du contrat,

9) celle qui permet à l'auto-école, en cas de résiliation de retenir toutes sommes versées par l'élève, même lorsque la résiliation est due à elle-même,

10) celle qui permet au professionnel de modifier unilatéralement le tarif choisi d un commun accord,

11) celle qui impose au consommateur de demander, voire de se déplacer pour obtenir la restitution de son dossier,

12) celle qui impose au consommateur d'adhérer au contrat avant la phase préalable d'évaluation,

13) celle qui ne prévoit pas l'échelonnement des paiements prévu,

14) celle qui autorise le professionnel à ne pas fournir une leçon, et/ou obtenir la rémunération, en l'absence du livret d'apprentissage,

15) celle qui permet la résiliation sur le champ en cas d'« incorrection ou attitude agressive » dont l'appréciation est laissée à la discrétion du professionnel et/ou en autorisant ce dernier à conserver les sommes pré-payées sur prestations non réalisées,

16) celle qui autorise le professionnel à modifier en cours d'année son tarif,

- ordonner en conséquence au défendeur de supprimer de son contrat les clauses-ci dessus, dans le délai d'un mois de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte définitive d'un montant de 800 euros par jour de retard à l'expiration du délai imparti,

- interdire l'usage de telles clauses à l'avenir,

- imposer au défendeur de porter au contrat, dans le même délai que ci-dessus, la mention des nom de la compagnie d'assurance et le numéro de la police, et l'existence ou l'absence de souscription de l'établissement à un dispositif financier et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée à l'expiration de ce délai condamner le défendeur à verser à l'UFC à titre de dommages et intérêts :

* 24.000 euros pour le préjudice collectif,

* 5.000 euros pour le préjudice associatif,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- autoriser l’UFC à publier le jugement par extrait - mentionnant la liste des clauses écartées - au regard de l'article L. 421-9 du code de la consommation dans les journaux : le Dauphiné Libéré, Affiches de Grenoble, Paru-vendu, et aux frais du défendeur à concurrence de 1.500 euros par insertion,

- condamner encore le défendeur à lui verser une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le même aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de son Avocat.

* * *

En réponse, dans ses dernières écritures déposées au greffe le 15 avril 2009, Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], souhaite voir :

A titre principal,

- dire que l’UFC n'apporte pas la preuve que les clauses du contrat-type qu'il propose seraient illicites ou abusives

- [minute page 4] débouter l’UFC de l'ensemble de ses demandes de suppression desdites clauses sous astreinte, de condamnation à dommages et intérêts et de publication de la décision à intervenir,

- constater qu'il justifie parfaitement sur le contrat du numéro d'agrément, de la date d'obtention et de réactualisation et débouter en conséquence l’UFC de sa demande à ce titre,

- constater sa bonne foi,

- condamner l’UFC à lui verser une indemnité de procédure de 2.000 euros,

A titre subsidiaire,

- dire que les demandes de condamnation à dommages et intérêts sont excessives et mal fondées au regard du préjudice réellement subi,

- les réduire considérablement,

- débouter de sa demande au titre de la publication et d'indemnité de procédure,

En toute hypothèse,

- condamner la requérante au dépens dont distraction au profit de son Avocat.

* * *

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient en vertu de l'article 455 du code de procédure civile de se référer à leurs dernières écritures.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2009.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'action de l'[UFC 38] :

Attendu que par application de l'article L. 421-6 du code de la consommation, l'association I'UFC, agréée par l'autorité administrative, sera déclarée recevable à agir en suppression des clauses illicites ou abusives insérées dans le contrat type proposé par le défendeur ;

 

Sur le caractère abusif ou illicite des clauses critiquées :

1) « Programme et déroulement de la formation.

L'établissement délivre une formation conforme aux objectifs contenus dans le Programme National de Formation affiché dans l'auto-école et énumérés dans les étapes de formation du livret d'apprentissage ».

Attendu que la clause litigieuse apparaît contraire aux articles R. 213-3 § 4 du code de la route et à l’article R. 132-1 § 1 du code de la consommation dès lors que le contrat ne détaille pas le programme et le déroulement de la formation et se contente de renvoyer au Programme National de Formation affiché dans l'établissement dont il n'est pas établi la preuve de la prise de connaissance effective par l'élève ;

Que la clause doit être jugée illicite ;

[minute page 5]

2) « Moyens pédagogiques et techniques.

L'établissement s'engage à dispenser la formation et à présenter le candidat aux épreuves en fournissant les moyens nécessaires, sous réserve que le candidat ait atteint le niveau requis et dans la limite des places d'examens attribuées à l'établissement par l'administration ».

Attendu qu'au vu de l'article R. 213-3 § 5 du code de la route, il apparaît que le contrat énumère au verso dans le paragraphe « tarifs des prestations » les moyens mis en œuvre par l'établissement lors de la formation de sorte que la clause ne peut être jugée illicite ;

Qu'elle n'apparaît pas davantage abusive pour défaut d'énumération des obligations du candidat dès lors que celles-ci sont indiquées dans d'autres paragraphes, notamment « règlement », « annulation des leçons ou examen », « résiliation et rupture du contrat » et « modalités de paiement », qui font par ailleurs l'objet de critiques de la part de la demanderesse de sorte que l'éventuel déséquilibre et défaut d'information au détriment du consommateur seront appréciés pour chacune des obligations mis à sa charge dans les autres clauses litigieuses ;

Que la clause n'est donc pas davantage abusive ;

 

3) « Les présentations aux examens théoriques ne se feront qu'après l'accord du formateur (...) »

Attendu que la clause litigieuse apparaît abusive, en ce que notamment contraire à la recommandation numéro 05-03 de la Commission des clauses abusives, puisqu'elle confère à l'établissement d'enseignement un pouvoir d'appréciation arbitraire de l'aptitude de l'élève à être présenté aux examens du permis de conduire sans motivation écrite ni possibilité de contestation ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée abusive ;

 

 4) « Règlement.

Le candidat est tenu de régler les sommes dues, conformément au mode de règlement choisi Tout défaut de règlement des sommes dues à l'échéance peut autoriser l'établissement à rompre le présent contrat ».

Attendu que la clause n'est pas illicite au regard de l'article R. 213-3 § 8 du code de la route dès lors que si le contrat, tout en ne prévoyant aucun formalisme particulier (LRAR, délais...), énonce pour autant les conditions de sa résiliation ;

Que cependant, la stipulation litigieuse doit être jugée abusive au regard de l'article R. 132-2 § 4 du code de la consommation pour ne pas prévoir de préavis d'une durée raisonnable avant la possibilité pour le professionnel de résilier unilatéralement le contrat alors même que le retard dans le règlement peut être minime ;

Que la clause doit être déclarée abusive ;

 

5) « Annulation des leçons ou examen.

Toute leçon ou cours pratique non décommandé par le candidat au moins 48 heures ouvrables à l'avance sera dû et facturé, et ne sera pas [minute page 6] reporté ni ne donnera lieu à remboursement sauf cas de force majeure dûment justifié »

Attendu que la clause permet à l'élève de décommander un cours ou une leçon pratique au moins 48 heures à l'avance sans être tenu de justifier d'un motif et ni de subir une sanction financière mais qu'en revanche, il perdra le bénéfice du cours décommandé moins de 48 heures à l'avance sauf à démontrer l'existence d'un cas de force majeure ;

Qu'en contrepartie, le professionnel peut annuler un cours sans préavis en cas de force majeure ;

Que le régime d'annulation des leçons apparaît de prime abord plus contraignant pour le professionnel qui ne peut annuler une leçon qu'en faisant valoir un cas de force majeure remplissant les conditions de l'article 1148 du code civil, y compris plus de 48 heures avant la leçon ;

Que pour autant, la requérante fait valoir à juste titre le caractère particulièrement restrictif de la définition jurisprudentielle de la force majeure alors même que l'élève peut également être empêché par un motif légitime ;

Que les jugements qu'elle verse aux débats concernent d'autres auto-écoles, qui admettent d'ailleurs dans leur contrat la possibilité pour l'élève de décommander une leçon pour un motif légitime sans frais moins de 48 heures à l'avance ;

Qu'enfin, la clause litigieuse apparaît déséquilibrée en ce que l'obligation pour le client de payer une leçon ou un cours non décommandé au moins 48 heures à l'avance quand il ne fait pas valoir un cas de force majeure s'analyse en une clause pénale sans que le contrat prévoit en contrepartie à la charge du professionnel une clause identique en cas d'annulation d'une leçon dans le même délai à son initiative sans justifier d'un cas de force majeure ;

Que la clause doit être déclarée abusive ;

 

6) « Si un candidat décide de ne pas se présenter à une épreuve, il devra en avertir le centre de formation au minimum 8 jours à l'avance sous peine de perdre les frais afférents à cette prestation ».

Attendu que la clause litigieuse apparaît abusive dès lors qu'elle ne prévoit pas d'exception à la sanction financière subie par l'élève en cas de non avertissement de l'établissement de son impossibilité de se présenter à l'examen au moins 8 jours à l'avance alors que le consommateur doit être en mesure de faire valoir un motif légitime et/ou peut subir un cas de force majeure ;

Que l’interprétation donnée par la défenderesse dans ses écritures selon laquelle la clause litigieuse vise uniquement l'hypothèse où l'élève décide délibérément de ne pas se présenter sans raison valable ne correspond ni à sa lecture littérale ni à son interprétation au regard des articles 1156 et suivants du code civil ;

Qu'au demeurant, la stipulation est déséquilibrée pour absence de réciprocité dès lors que le contrat ne prévoit aucune sanction financière ni dédommagement en cas d'annulation par le professionnel de la présentation à l'examen moins de 8 jours avant sans justifier d'un motif légitime ;

Que la clause doit être jugée abusive ;

[minute page 7]

7) « Résiliation et rupture du contrat.

SUSPENSION : il pourra être suspendu, pour motif légitime ou d'un commun accord, pour une durée de 3 mois, au-delà il devra être renégocié. »

Attendu qu'en dépit d'une formulation maladroite, il apparaît au vu de l'économie du contrat que la suspension du contrat ne peut résulter que d'un motif légitime avancé par l'élève ou d'un commun accord des parties de sorte que la suspension est prévue dans l'intérêt exclusif du consommateur au détriment du professionnel, qui ne peut plus pendant le délai contractuel de 3 mois exiger de son cocontractant l'exécution de ses obligations, notamment celle de payer ;

Que la possibilité pour le professionnel, au-delà de ces trois mois, délai suffisamment long pour être jugé raisonnable, de pouvoir renégocier le contrat constitue une juste contrepartie de la suspension et ce d'autant, que l'élève peut également faire le choix en cas de persistance du motif légitime, de solliciter la résiliation du contrat, sous réserve de l'analyse des conditions financières de celle-ci critiquée (au point n° 10) ;

Que la clause n'est dès lors pas abusive ;

 

8) « Le contrat peut être résilié par le candidat à tout moment et par l'établissement en cas de comportement du candidat contraire au règlement intérieur de l'établissement ».

Attendu que la clause litigieuse est contraire aux articles R. 132-1 1) du code de la consommation et à l'article R. 213-3 § 8 du code de la route dès lors que le contrat ne précise ni les conditions ni les formes de la résiliation à l'initiative de l'établissement mais se réfère à un règlement intérieur dont il n'est pas démontré la communication et la connaissance par le consommateur ;

Que la clause doit être jugée illicite ;

 

9) « En cas de rupture du contrat de formation par l'élève ou par l'auto-école, toute somme versée à l'établissement ne pourra être réclamée par la suite. »

Attendu que la clause litigieuse apparaît contraire aux articles R. 132-1 § 9 et R. 132-2 § 2°) [et] 3°) du code de consommation dans la mesure où, sous réserve de l'hypothèse de la facturation au forfait qui fait l'objet de la phrase suivante également critiquée supra, elle permet au professionnel de conserver l'ensemble des sommes versées par l'élève, quel que soit l'auteur de la résiliation et son motif ;

Que contrairement à ce qu'affirme la défenderesse dans ses dernières écritures, la stipulation n'indique pas que le professionnel conserve les sommes correspondant à des prestations effectuées mais bien toute somme versée à l'établissement ;

Que compte tenu des modalités de paiement énoncées au verso du contrat, il peut dès lors s'agir de prestations à venir dans la mesure où l'élève a pu payer au comptant en un seul versement ou par tranches incluant les leçons non encore prises ;

Que la clause peut ainsi permettre au professionnel de conserver des sommes pour des prestations qu'il n'a pas réalisées alors même qu'il peut être à l'initiative de la rupture ;

[minute page 8] Que cette même stipulation peut donc s'analyser en une clause pénale s'agissant des sommes versées par le consommateur pour des prestations non encore réalisées au jour de la résiliation sans que le contrat prévoit en contrepartie une indemnisation d'un montant équivalent au bénéfice du client lorsque la rupture émane du professionnel et ce d'autant qu'il a été vu précédemment que celle-ci est susceptible de présenter un caractère discrétionnaire puisque le contrat renvoie à un règlement intérieur dont la preuve de la remise et de la connaissance par le consommateur n'est pas établie ;

Que la clause doit être jugée abusive ;

 

10) « Dans le cas d'une facturation au forfait, la somme due sera calculée à partir des tarifs unitaires en vigueur de chaque prestation ».

Attendu que compte tenu de son caractère général, la clause litigieuse apparaît déséquilibrée en ce qu'alors même que susceptible de s'appliquer en cas de résiliation par le consommateur pour motif légitime ou par le professionnel pour tout motif, pas nécessairement légitime, compte tenu du renvoi abusif au règlement intérieur pour les cas autorisant ce dernier à résilier le contrat, la facturation des prestations effectuées dans le cadre du forfait avant la rupture sur la base des tarifs unitaires de chaque prestation et non au prorata du forfait procure au professionnel un avantage injustifié dans l'hypothèse probable et même avérée au vu des tarifs pratiqués d'un prix unitaire des prestations supérieur à celui appliqué ;

Qu'une telle clause aboutit en définitive à faire supporter au client, même lorsqu'il se prévaut d'un motif légitime ou que la résiliation est à l'initiative du professionnel sans faute avérée de son cocontractant, une sanction financière s'analysant en une clause pénale ;

Que la clause doit être déclarée abusive ;

 

11) « Dans ce cas, le dossier, qui est la propriété du candidat, lui est personnellement restitué à sa demande, ou par une tierce personne dûment mandatée par lui ».

Attendu que la clause n'apparaît aucunement abusive dans la mesure où si la restitution du dossier est faite à la demande du client, elle n'est pour autant assortie d'aucune condition particulière et contraignante imposée par le professionnel ;

Qu’au demeurant, il est même rappelé le fait que le dossier est la propriété de l'élève ;

Que la requérante n'établit pas qu'une telle stipulation puisse mettre à la charge du consommateur des formalités ou un surcoût supplémentaires ;

Que la clause n'est dès lors pas abusive ;

 

12) Inclusion dans les prestations de la séance d'évaluation de départ.

Attendu qu'au vu de l'article R. 213-3 § 3 du code de la route, la clause est illicite en ce qu'elle prévoit la rémunération d'une prestation qui est imposée par cette disposition au professionnel avant la signature du contrat ou son entrée en vigueur définitive ;

[minute page 9] Que cette évaluation constitue en effet une information pré-contractuelle que doit donner le professionnel au consommateur sur le nombre d'heures prévisibles de formation en fonction de son niveau afin que celui-ci puisse connaître de la manière la plus précise possible la prestation et son coût ;

Que cette prestation ne peut dès lors être rémunérée ;

Que cette clause apparaît d'ailleurs contraire à la recommandation de la Commission des clauses abusives numéro 05-03 ;

Que la clause doit être déclarée abusive ;

 

13) « Modalités de paiement.

Le paiement pourra s'effectuer selon l’une des deux options suivantes : 1° au comptant, 2° échelonné en fonction de l'exécution du contrat.

Si l'option 2 est retenue, les versements s'effectueront en 5 fois maximum au fur et à mesure de l'avancée de la formation. »

Attendu que la clause critiquée est illicite au regard de l'article R. 213-3 § 10 du code de la route dans la mesure où si elle prévoit la possibilité d'un paiement en 5 fois, elle n'indique pas de manière suffisamment précise le terme et le montant de chaque règlement mais se limite à évoquer un paiement au fur et à mesure de l'avancée de la formation ; Que contrairement à ce qu'affirme la défenderesse dans ses dernières écritures, la stipulation litigieuse ne permet aucunement une individualisation du paiement du prix pour chaque consommateur dès lors que le contrat ne détaille pas les étapes de cet échelonnement ; Que la clause doit être jugée illicite ;

 

14) « Sans la présence de ce livret, votre leçon ne sera pas assurée, et perdue ».

Attendu que la clause litigieuse apparaît abusive en ce qu'elle ne prévoit pas l'hypothèse d'un motif légitime et que surtout, elle peut être assimilée à une clause pénale à raison de l'inexécution par l'élève d'une de ses obligations alors que le contrat et le règlement intérieur n'en comportent aucune sanctionnant celles du professionnel ;

Qu'au visa de l'article R. 132-2 § 2°) 3°) du code de la consommation, la clause litigieuse doit être déclarée abusive ;

 

15) « En cas d’ajournement aux épreuves d'examens, abordez la situation de manière positive. En tout état de cause, aussi compréhensible que puisse être votre déception, vous ne devez jamais départir d'une attitude correcte vis-à-vis de l'inspecteur et du personnel de l'auto-école. En cas d'incorrection ou d'attitude agressive envers un inspecteur, ou un membre de l'auto-école, le directeur procédera à votre exclusion de l'école de conduite, sur le champs, sans qu'il puisse donner lieu à des remboursements quelconques de prestations non effectuées ou commandées à l'école de conduite. »

Attendu que si une attitude agressive ou une incorrection de la part de l'élève à l'égard de l'inspecteur ou du personnel de l'auto-école peut justifier la résiliation du contrat à l'initiative du professionnel sans [minute page 10] préavis compte tenu de la gravité de la faute par exception à l'article R. 132-2 4°) du code de la consommation, qui ne fait que présumer le caractère abusif d'une résiliation par le professionnel sans préavis raisonnable de sorte que certaines inexécutions par le consommateur, parmi les plus graves, peuvent autoriser la résiliation sans préavis ;

Qu'en revanche, au visa de l'article R. 132-2 2°) 3°) du code de la consommation, il apparaît que la clause est déséquilibrée dans la mesure où elle prévoit la conservation des sommes versées par le client, y compris pour des prestations non encore effectuées ; ce qui d'une part, est susceptible de constituer une sanction disproportionnée dans l'hypothèse d'un paiement par avance de la totalité des prestations en cas de résiliation en début de contrat et que d'autre part, si une sanction financière peut être envisagée dans un tel cas à l'encontre du client, force est de constater que le contrat et le règlement intérieur litigieux ne prévoient de clauses pénales qu'au bénéfice du professionnel et jamais en faveur du consommateur en cas d'inexécution par l'établissement de ses obligations ;

Que la clause doit être jugée abusive ;

 

16)  «  Nos tarifs s'entendent toutes taxes comprises, TVA à 19,6 % incluse, et sont susceptibles de modification en cours d'année ».

Attendu qu'au vu de l'article R. 132-1 du code de la consommation, la clause litigieuse, qui figure dans le règlement intérieur, est pour le moins ambiguë en ce que sa lecture ne permet pas de savoir si elle concerne les contrats en cours ou les contrats à venir ;

Que dans l'hypothèse où elle s'applique aux contrats d'ores et déjà signés, elle permet au professionnel de modifier discrétionnairement le prix des prestations, alors même que chacune d'elles, notamment dans « la formation traditionnelle » fait l'objet d'un tarif spécifié et donc contractuellement convenu entre les parties dan le modèle type de contrat ;

Que la danse litigieuse est abusive ;

 

Sur la demande d'astreinte :

Attendu qu'afin de garantir l'effectivité de l'application de la présente décision, il y a lieu, en application des articles 33 et suivants de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, d'ordonner la suppression par Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.] de la totalité des clauses déclarées abusives ou illicites de son contrat par le présent jugement dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent jugement, et ce, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 800 euros par jour de retard pendant une durée de 2 mois ;

 

Sur la demande an titre de l'injonction de faire :

Attendu qu'au vu des articles L. 421-6 du code de la consommation et R. 213-3 11°) du code de la route, il convient de constater que le contrat litigieux ne comporte, en contravention avec cette dernière disposition, aucune mention relative à l'existence ou non d'une garantie financière souscrite par l'établissement en cas de défaillance ;

[minute page 11] Qu'il convient en conséquence d'ordonner à Monsieur X. de porter sur son contrat type l'information de l'absence ou de l'existence de la souscription par son établissement à un dispositif de garantie financière permettant le remboursement au candidat des sommes trop perçues en cas de défaillance de l'établissement et le cas échéant, en cas de souscription, de mentionner le nom du garant et le montant de la garantie ;

Qu'il n'y a pas lieu en l'état d'assortir cette injonction d'une astreinte, le simple rappel au défendeur de son obligation réglementaire devant suffire à le convaincre de rectifier sans délai son contrat type, en réparant cette omission ;

 

Sur les demandes de dommages et intérêts de l’UFC :

Au titre du préjudice collectif :

Attendu qu'il résulte de l'interprétation de l'article L. 421-6 du code de la consommation qu'une association agréée de défense des consommateurs est en droit de demander devant les juridictions civiles la réparation, notamment par l'octroi de dommages et intérêts, de tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ;

Qu'en l'espèce, le maintien par Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], dans ses modèles types de contrats de formation à la conduite automobile de clauses illicites ou abusives a nécessairement causé à la collectivité des consommateurs, au nombre desquels figurent plus particulièrement les clients de cette auto-école, un préjudice collectif significatif, eu égard au nombre, à la nature et à la durée du maintien de ces stipulations ;

Que lesdites clauses ont essentiellement eu pour effet de conférer pendant de nombreuses années au professionnel de multiples avantages injustifiés ou illicites, lui procurant un accroissement non légitime de ses profits au détriment de ses clients/consommateurs mais également de ses concurrents ;

Qu'il convient en conséquence de condamner Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.] à payer à l'association UFC la somme de 1.500 euros en réparation du préjudice collectif ;

 

Au titre du préjudice associatif :

Attendu que l'UFC justifie du développement d'une activité importante dans le domaine de la formation à la conduite automobile en vue de prévenir ou d'obtenir la suppression des clauses abusives ou illicites dans les contrats-types proposés par les professionnels aux consommateurs ;

Qu'il convient donc de condamner Monsieur X. exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], à lui payer la somme de 800 euros en réparation de son préjudice associatif ;

[minute page 12]

Sur la demande de publication de la décision :

Attendu que l'article L. 421-9 du code de la consommation autorise la juridiction saisie à ordonner, aux frais de la partie qui succombe, la diffusion par tous moyens appropriés, de l'information au public du jugement rendu ;

Qu'en l'espèce, eu égard au nombre significatif des clauses déclarées abusives ou illicites contenues dans le contrat type d'apprentissage de la conduite automobile proposé et utilisé par Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], ainsi qu'à celui du nombre de clients/consommateurs susceptibles d'être concernés par cette décision, il y a lieu d'ordonner la publication par extrait du présent jugement inventoriant les clauses écartées dans les journaux LES AFFICHES DE GRENOBLE, LE DAUPHINE LIBÉRÉ et PARU-VENDU ;

Qu'il convient de dire que cette publication aura lieu à l'initiative de l'association, aux frais du défendeur dans la limite de la somme totale de 1.500 euros par publication ;

 

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;

Attendu qu'il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de l'association UFC la charge des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

Qu'il convient en conséquence de condamner Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], à payer à l'association UFC la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que le surplus des prétentions sur ce fondement sera rejeté ;

Qu'en application de l'article 696 du nouveau code de procédure civile, Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], qui succombe à l'instance, est tenue des entiers dépens de l'instance ;

 

Sur l'exécution provisoire :

Attendu qu'au vu de l'article 515 du nouveau code de procédure civile, l'infirmation de tout ou partie du présent jugement en cas d'appel permettrait à Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], de réintégrer dans son contrat type les clauses litigieuses ;

Qu'en revanche, il existerait une insécurité juridique du fait que des clauses jugées abusives ou illicites continuent à trouver application dans l'attente éventuelle d'une décision de recours ;

Qu'il convient en conséquence d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 13] PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

DÉCLARE l'UFC recevable en ses prétendons de suppression des clauses abusives ou illicites du contrat proposé par Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.],

DÉCLARE ILLICITES OU ABUSIVES les clauses suivantes :

1) « Programme et déroulement de la formation. L'établissement délivre une formation conforme aux objectifs contenus dans le Programme National de Formation affiché dans l'auto-école et énumérés dans les étapes de formation du livret d'apprentissage ».

3) « Les présentations aux examens théoriques ne se feront qu'après l'accord du formateur (...) ».

4) « Règlement. Le candidat est tenu de régler les sommes dues, conformément au mode de règlement choisi. Tout défaut de règlement des sommes dues à l'échéance peut autoriser l'établissement à rompre le présent contrat ».

5) « Annulation des leçons ou examen. Toute leçon ou cours pratique non décommandé par le candidat au moins 48 heures ouvrables à l'avance sera du et facturé, et ne sera pas reporté ni ne donnera lieu à remboursement sauf cas de force majeure dûment justifié. »

6) « Si un candidat décide de ne pas se présenter à une épreuve, il devra en avertir le centre de formation au minimum 8 jours à l'avance sous peine de perdre les frais afférents à cette prestation ».

8) « Le contrat peut être résilié par le candidat à tout moment et par l'établissement en cas de comportement du candidat contraire au règlement intérieur de l'établissement ».

9) « En cas de rupture du contrat de formation par l'élève ou par l'auto-école, toute somme versée à l'établissement ne pourra être réclamée par la suite. »

10) « Dans le cas d'une facturation au forfait, la somme due sera calculée à partir des tarifs unitaires en vigueur de chaque prestation ».

12) Inclusion dans les prestations de la séance d'évaluation de départ.

13) « Modalités de paiement. Le paiement pourra s'effectuer selon l'une des deux options suivantes : 1° au comptant 2° échelonné en fonction de l'exécution du contrat. [minute page 14] Si l'option 2 est retenue, les versements s'effectueront en 5 fois maximum au fur et à mesure de l'avancée de la formation. »

14) « Sans la présence de ce livret, votre leçon ne sera pas assurée, et perdue ».

15) « En cas d'ajournement aux épreuves d'examens, abordez la situation de manière positive. En tout état de cause, aussi compréhensible que puisse être votre déception, vous ne devez jamais départir d'une attitude correcte vis-à-vis de l'inspecteur et du personnel de l'auto-école. En cas d'incorrection ou d'attitude agressive envers un inspecteur, ou un membre de l'auto-école, le directeur procédera à votre exclusion de l'école de conduite, sur le champs, sans qu'il puisse donner lieu à des remboursements quelconques de prestations non effectuées ou commandées à l'école de conduite ».

16) « Nos tarifs s'entendent toutes taxes comprises, TVA à 19,6 % incluse, et son susceptibles de modification en cours d'année ».

DIT que les clauses du contrat diffusé par Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.] jugées abusives ou illicites sont réputées non écrites ;

ORDONNE la suppression par Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.]de la totalité des clauses déclarées abusives ou illicites de son contrat par le présent jugement clans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent jugement, et ce, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 800 euros par jour de retard pendant une durée de 2 mois ;

ORDONNE à Monsieur X., exerçant sous l'enseigne[Auto-École Y.], de porter sur son contrat type l'information de l’absence ou de l'existence de la souscription par son établissement à un dispositif de garantie financière permettant le remboursement au candidat des sommes trop perçues en cas de défaillance de l'établissement et le cas échéant, en cas de souscription, de mentionner le nom du garant et le montant de la garantie ;

CONDAMNE Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], à payer à l’association UFC la somme de mille cinq cent (1.500 euros) en réparation du préjudice collectif ;

CONDAMNE Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], à payer à l’UFC la somme de huit cents euros (800 euros) en réparation de son préjudice associatif ;

ORDONNE la publication clans les journaux LES AFFICHES DE GRENOBLE, LE DAUPHINE LIBÉRé et PARU VENDU du présent jugement par extrait inventoriant les clauses écartées, à l'initiative de l'association UFC et aux frais de Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.], [minute page 15] dans la limite de la somme totale de 1.500 euros par publication ;

DÉBOUTE l'UFC du surplus de ses prétentions au titre des clauses abusives ou illicites ;

CONDAMNE Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.] à payer à l'association UFC la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur X., exerçant sous l'enseigne commerciale [Auto-École Y.] aux entiers dépens de l'instance ;

ACCORDE aux Avocats de la cause le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la décision ;

PRONONCÉ publiquement par mise à disposition du jugement au Greffe du Tribunal de Grande Instance, les parties en ayant été préalablement avisées fions les conditions prévues par l'article 450 du Code de Procédure Civile.

Le jugement a été rédigé par F. BLANC.

LE GREFFIER                     LA PRÉSIDENTE

C. SEIGLE-BUYAT              G. GRASSET

(lors du prononcé)

 

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