CA LYON (1re ch.), 11 mai 2006
CERCLAB - DOCUMENT N° 2934
CA LYON (1re ch.), 11 mai 2006 : RG n° 05/00699
(sur pourvoi Cass. civ. 1re, 8 janvier 2009 : pourvoi n° 06-17630)
Publication : Site CCAB
Extrait : « N.B. Sur les clauses abusives, V. le texte de la décision ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 11 MAI 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R. G. n° 05/00699. Sur appel d’une décision du Tribunal de Grande Instance de LYON au fond du 3 janvier 2005 : R.G. n° 2003/14001
APPELANTE :
Association UFC QUE CHOISIR
[adresse], représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA avoués à la Cour, assistée de Maître Christian BRASSEUR avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
LE CRÉDIT LYONNAIS
[adresse]
représentée par Maître Annick DE FOURCROY avoué à la Cour, assistée de Maître MOLAS avocat au barreau de PARIS
[minute page 2]
L'instruction a été clôturée le 10 février 2006. L'audience de plaidoiries a eu lieu le 15 mars 2006. L'affaire a été mise en délibéré au 13 avril 2006 puis prorogée au 11 mai 2006 les avoués dûment avisés, conformément à l'article 450 dernier alinéa du NCPC.
COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré
Président : Monsieur ROUX, Conseiller : Madame BIOT, Conseiller : Monsieur GOURD
Greffier : Madame JANKOV pendant les débats uniquement.
À l'audience Monsieur ROUX a fait son rapport conformément à l'article 785 du NCPC.
ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile, signé par Monsieur ROUX, président et par Madame JANKOV, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSE DU LITIGE :
L'Association UFC QUE CHOISIR, après étude de la convention de compte de dépôts de la Société LE CRÉDIT LYONNAIS (LCL) dans son édition de février 2003 et du guide tarifaire des principales opérations applicable à partir de mai 2003 a par exploit du 12 novembre 2003 fait assigner la Société Anonyme LE CRÉDIT LYONNAIS devant le Tribunal de Grande Instance de LYON sur le fondement des articles L. 421-1 et suivants et L. 132-1 du Code de la consommation afin que le Tribunal dise illicites ou abusives vingt-huit clauses de la convention de compte de dépôts et quatre clauses du guide tarifaire des principales opérations.
Par jugement du 3 janvier 2005, après étude de ces clauses numérotées de 1 à 32 dans l'assignation le Tribunal a déclaré abusives et réputées non écrites quatre clauses de la convention du compte de dépôts :
- la clause numérotée 3 : article 1-1 § 9 de la convention concernant la situation d'un compte joint lors du décès d'un titulaire,
- la clause numérotée 5 : article 1-3 § 4 de la convention concernant l'agrément d'un mandataire,
- la clause numérotée 13 : article 2-2 § 15 de la convention concernant la résiliation de l'accès aux services de consultation et de gestion d'un compte à distance,
- la clause numérotée 16 : article 3-1 § 15 de la convention concernant le versement au compte du client d'un chèque qui s'avérerait impayé.
Le Tribunal ordonnait la suppression de ces clauses de la convention de compte de dépôts dans son édition de février 2003 et condamnait la Société LCL à payer à la Société UFC QUE CHOISIR 3.000 euros à titre de dommages et intérêts et 1.600 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
L'Association UFC QUE CHOISIR a relevé appel de cette décision. Elle demande à la Cour de dire illicites ou abusives vingt clauses de la convention de compte de dépôts et deux stipulations du guide tarifaire référencées sous la numérotation adoptée dans l'assignation initiale et dans le jugement déféré.
[minute page 3] Elle demande la condamnation sous astreinte de la Société LCL à supprimer ces clauses de son contrat dans un délai d'un mois.
Elle sollicite 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, et la publication de la décision à intervenir. Elle demande également que la Société LCL soit contrainte d'envoyer à tous ses clients un courrier les informant des modifications imposées à leur contrat. Elle sollicite enfin une somme complémentaire de 4.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
La Société LCL verse au débat la convention de compte de dépôts dans sa version d'octobre 2005 et soutient qu'il convient d'examiner les clauses litigieuses telles qu'elles sont rédigées dans ce nouveau texte pour apprécier la recevabilité et le bien fondé de l'appel de la Société UFC QUE CHOISIR. Elle conclut au rejet des demandes d'annulation des clauses énumérées par l'appelante.
Elle expose par ailleurs que les quatre clauses annulées par le Tribunal par jugement du 3 janvier 2005 ne figuraient plus dans la convention de compte de dépôts dans l'édition de juin 2004 de sorte que le Tribunal aurait dû considérer ces demandes d'annulation irrecevables car sans objet. Elle demande la réformation du jugement déféré en ce sens.
Elle sollicite la condamnation de la Société UFC QUE CHOISIR à lui payer 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR exerce l'action prévue à l'article L. 421-6 du Code de la consommation qui lui permet de demander la suppression de clauses abusives dans les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs ;
Attendu que l'article L. 132-1 du même code précise que sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu qu'à la lumière de ces textes la Cour examinera successivement les vingt-deux clauses critiquées par la Société UFC QUE CHOISIR telles qu'elles résultent de la convention de compte de dépôts dans son édition d'octobre 2005 et du guide tarifaire de juillet 2005 ; qu'elles seront examinées dans l'ordre choisi dans les conclusions de la Société UFC qui les a classées en trois groupes : les clauses illicites, les clauses légalement abusives et les clauses déséquilibrées.
I) CLAUSES CONSIDÉRÉES COMME ILLICITES PAR L'ASSOCIATION UFC QUE CHOISIR
1) L'article 1.1 § 1
Attendu que cette clause prévoit que le compte de dépôts fonctionne comme un compte courant par lequel les créances et les dettes forment un solde de compte seul exigible ;
Attendu que la Société UFC QUE CHOISIR soutient que cette clause est illicite au regard de l'article L. 312-1 du Code Monétaire et Financier (CMF) qui précise que les comptes ouverts par des particuliers sont des comptes de dépôts et non pas des comptes courants qui sont réservés aux professionnels et ont pour spécificité l'affectation de créances réciproques nées de la relation d'affaire ; qu'elle soutient par ailleurs que l'usage de ces deux notions dans le même texte entraîne une confusion dans l'esprit du consommateur ;
Attendu qu'il n'existe pas de définition légale ou réglementaire du compte de dépôts et du compte courant ; que par ailleurs la clause susvisée n'entraîne pas une confusion entre les deux notions puisqu'elle précise que le compte de dépôt fonctionne selon les règles du compte courant par lequel les créances et dettes se confondent et forment un solde unique ;
Attendu que le mécanisme de fonctionnement du compte courant est simple et accessible à un entendement normal ; qu'il en est en outre conventionnellement prévu ; qu'il s'ensuit que la clause susvisée n'est ni illicite ni abusive ;
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2) L'article 2.1 § 3
Attendu que cette clause prévoit qu'à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date d'édition d'un relevé de compte les écritures et opérations mentionnées sur celui-ci seront considérées comme approuvées ;
Attendu que la Société UFC QUE CHOISIR soutient que cette disposition est illégale au regard de l'article L. 312-1-1 § 2 du CMF qui ne prévoit l'acceptation tacite que pour les modifications de tarifs ; qu'elle précise que cette clause est contraire à la jurisprudence de la Cour de Cassation qui refuse l'acceptation tacite des relevés, et qu'elle crée une immunité au profit de la banque pour ses éventuelles erreurs après un délai de trois mois ; qu'elle considère en conséquence cette clause comme illégale et abusive ;
Attendu que le principe de l'acceptation tacite du client invité à formuler des observations dans le délai raisonnable de trois mois n'est pas illicite puisqu'aucun texte ne l'interdit ; que le délai de trois mois permet au client de prendre connaissance de manière approfondie de toutes les opérations ; qu'en outre le délai ainsi prévu n'interdit pas après son expiration une éventuelle action en responsabilité contractuelle en cas de faute ou d'erreur manifeste ;
Attendu qu'il s'ensuit que cette clause n'est ni illicite ni abusive ;
3) L'article 2.2 § 7
Attendu que cette clause précise : « nous n'assumons pas la responsabilité des conséquences d'un usage abusif ou frauduleux du code » ;
Attendu que le code visé dans ce texte est un code confidentiel permettant l'accès aux services de consultation et de gestion de compte à distance par internet, audiotel, ou minitel ;
Attendu que la Société UFC QUE CHOISIR soutient que cette clause est contraire à l'article L. 132-4 du CMF qui impose à la banque d'assumer les conséquences d'un usage frauduleux à distance d'une carte bancaire, et à l'article R. 132-1 du Code de la consommation qui considère comme interdite toute clause ayant pour effet ou pour objet de supprimer le droit à réparation du consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ;
Mais attendu que le code visé par cette clause n'est pas le code secret d'une carte bancaire mais le code d'accès à des services sans abonnement permettant de consulter le solde des comptes, d'effectuer des virements entre les comptes du même client, et la réalisation d'opérations bancaires et sur titre ;
Attendu que par la clause litigieuse la Société LCL ne s'exonère pas de sa responsabilité en cas de faute de sa part mais seulement en cas d'usage abusif ou frauduleux par le client ou par un tiers ; qu'elle a pour effet d'inviter le client à la prudence en assurant la confidentialité de son code figurant sur les relevés de compte dont il est seul destinataire ;
Attendu qu'il résulte de ces éléments que cette clause n'est ni illicite ni abusive ;
4) L'article 3.2 b) § 2
Attendu que cette clause permet à la Société LCL de refuser au client la mise à disposition ou le renouvellement d'un moyen de paiement en lui en communiquant les raisons, tout en précisant qu'en pareil cas la situation du client fait l'objet d'un examen périodique à sa demande ;
Attendu que la Société UFC QUE CHOISIR soutient que cette clause est contraire aux dispositions des articles L. 131-71 et L. 312-1 du CMF ; qu'elle soutient que s'agissant des cartes bancaires cette disposition constitue un refus de vente ; qu'enfin elle ajoute que cette mesure crée un déséquilibre entre les parties puisqu'elle autorise la banque à refuser un moyen de paiement de manière discrétionnaire sans information préalable ;
[minute page 5] Attendu que l'article L. 131-71 du CMF précise que le banquier peut par décision motivée refuser la délivrance de formules de chèques et demander à tout moment la restitution des formules déjà délivrées ;
Attendu qu'ainsi la clause litigieuse est parfaitement conforme à l'article L. 131-71 du CMF en ce qui concerne les chèques ;
Attendu que l'article 3.2 b) § 2 dans sa version d'octobre 2005 précise que le banquier communique au client les raisons de sa mesure qui peut faire l'objet d'un examen périodique à sa demande ; qu'il s'ensuit que cette clause ne crée pas au profit de la banque un pouvoir discrétionnaire et n'est pas abusive ;
5) L'article 3.2 b) § 4
Attendu que cette clause précise : « en cas de comportement répréhensible ou d'anomalie grave de fonctionnement du compte de dépôts ou des services qui y sont associés exposant notre établissement à un risque légal ou financier, nous pouvons être amenés à vous demander la restitution sans délai du chéquier et/ou de la carte en fonction de la gravité de l'anomalie et à suspendre les services liés à la carte » ;
Attendu que la Société UFC QUE CHOISIR considère cette clause comme illicite au regard des articles L. 131-71, L. 131-73 et L. 312-1 du CMF puisqu'elle permet un retrait des moyens de paiement sans motivation et hors des cas prévus par la loi ;
Attendu cependant que la clause ne s'applique qu'au cas de comportement répréhensible et d'anomalie grave de fonctionnement du compte exposant l'établissement bancaire à un risque légal ou financier ; qu'ainsi, et comme l'ont relevé les premiers juges, cette clause est plus protectrice du client que ne l'est l'article L. 131-71 du CMF puisqu'elle ne s'applique que dans des situations exceptionnelles ;
Attendu que cette clause n'est donc pas illicite ;
6) L'article 3.2 c) § 2
Attendu que cette clause prévoit que les carnets de chèques sont retirés au guichet de l'agence ou envoyés par courrier recommandé aux frais du client dans deux cas : 1) sur instruction du client, 2) en l'absence de retrait dans un délai de six semaines ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR soutient que cette disposition est contraire à l'article L. 131-71 du CMF qui impose la mise à disposition gratuite des formules de chèques ; qu'elle soutient que l'envoi forcé d'un chéquier après un délai de six semaines alors que le client peut ne pas avoir besoin de ce chéquier constitue un déséquilibre au préjudice du client ;
Attendu que l'article L. 131-71 du CMF précise que les formules de chèques sont mises gratuitement à la disposition du titulaire du compte ; que ce texte est respecté par la clause précitée qui prévoit que les carnets de chèques sont retirés gratuitement au guichet de l'agence ;
Attendu que l'envoi par lettre recommandée après un délai d'attente de six semaines ne constitue pas une mesure abusive dès lors que les chéquiers sont renouvelés soit sur demande du client, soit automatiquement après épuisement des formules du précédent chéquier, que le client est avisé de la mise à disposition d'un chéquier en agence, et qu'en outre en cas d'impossibilité de se déplacer il peut donner procuration à un tiers pour retirer le chéquier en attente ;
Attendu que l'article 3.2 c) § 2 n'est donc pas une clause illicite ;
7) L'article 3.2 c) opposition au paiement d'un chèque
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère comme illicite la clause suivante :
[minute page 6] « Lorsque vous déclarez la perte ou le vol par téléphone auprès de votre agence ou de l'accueil téléphonique des agences, vous devez confirmer immédiatement votre déclaration par un écrit (courrier, télégramme, fax...). Tant que la déclaration n'a pas été confirmée par un tel moyen, nous ne sommes pas tenus de la prendre en compte ».
Or attendu que l'article L. 131-35 alinéa 2 du CMF dispose :
« Il n'est admis d'opposition au paiement par chèque qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse du chèque... le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit » ;
Attendu qu'ainsi la clause critiquée, loin d'être illicite est parfaitement conforme aux dispositions légales ;
8) L'article 3.2 e) relatif à l'émission de virements
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère comme abusive la clause ci-dessous reproduite :
« Pour des raisons de sécurité, nous avons la faculté de surseoir à l'exécution d'un ordre donné par télécopie, e-mail ou par téléphone, jusqu'à confirmation de l'ordre par tout moyen que nous jugeront approprié » ;
Attendu que l'association appelante fait valoir que les ordres données par télécopie, e- mail constituent des ordres écrits au regard des articles 1316 et 1316-1 du Code Civil, et que la clause susvisée confère au banquier le pouvoir discrétionnaire d'apprécier lui « moyen approprié » ;
Attendu que l'article 1316-1 du Code Civil précise que l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane ;
Attendu qu'il s'ensuit que le banquier recevant un ordre de virement par un moyen électronique est tout à fait fondé à surseoir à son exécution afin de vérifier l'identité de la personne dont il émane ;
Attendu que cette mesure tout à fait protectrice du client est parfaitement licite ;
9) L'article 4.2 § 3
Attendu que cette disposition précise que certaines opérations, rares ou spécifiques, ne figurent pas sur le guide tarifaire des principales opérations, et qu'il appartient au client de s'informer de leurs conditions financières auprès de son agence ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR estime cette clause illicite au regard de l'article L. 312-1-1 § 1 du CMF et du droit commun des contrats qui impose à un professionnel de fournir ses prix avant toute opération ; qu'elle estime par ailleurs que cette clause crée un déséquilibre en permettant à la banque de tarifier ses services sans indication de prix préalable ;
Attendu que l'article L. 312-1-1 du CMF impose aux établissements de crédit d'informer leurs clients sur les conditions générales et tarifaires, applicables aux opérations relatives à la gestion d'un compte de dépôt ;
Attendu que la clause critiquée ne concerne pas les opérations relatives à la gestion mais les opérations rares ou spécifiques ; qu'en outre les conditions financières de telles opérations peuvent être communiquées au client avant qu'elles ne soient réalisées ; qu'il s'ensuit que la clause litigieuse n'est pas illicite et ne crée par un déséquilibre au détriment du client ;
[minute page 7]
10) L'article 4.3
Attendu que cette clause intitulée « les évolutions des services et de la convention de compte » est ainsi rédigée dans l'édition d'octobre 2005 de la convention de compte de dépôts :
« Les services entrant dans la gestion d'un compte de dépôts et les conditions de la présente convention sont susceptibles d'évoluer notamment pour les adapter aux besoins de la clientèle et aux évolutions financières ou techniques ainsi qu'aux mesures d'ordre législatif ou réglementaire. Nous en informerons la clientèle par lettre d'information « l'Essentiel » jointe au relevé de compte, ou par un message sur le relevé de compte ou par une communication spécifique.
La poursuite de la relation de compte ou l'absence de manifestation écrite d'un désaccord vaudra acceptation de votre part ».
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère cette clause comme illicite en ce qu'elle ne prévoit pas le consentement préalable du client et donne à la banque le droit de modifier unilatéralement les conditions du service à rendre ; qu'enfin elle crée un déséquilibre en ce sens que le client ne bénéficie d'aucune contrepartie ;
Attendu que la convention de compte n'est pas un contrat instantané mais un contrat à exécution successive qui se prolonge dans le temps et doit nécessairement évoluer en fonction de la conjoncture économique et des dispositions législatives ; que cette clause est conforme aux dispositions de l'article R. 132-2 alinéa 2 du Code de la consommation dès lors qu'elle ne prévoit pas d'augmentation des prix ; qu'enfin le principe de l'acceptation tacite du client est reconnu par l'article L. 312-1-1 du CMF ;
Attendu qu'il s'ensuit que la clause critiquée est licite ;
11) L'article 6 intitulé « confidentialité et loi informatique et libertés du 6 janvier 1978
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR critique les dispositions de cette clause en ce qu'elle permet à la banque d'utiliser les informations personnelles qu'elle détient pour proposer des produits, de les partager avec ses partenaires financiers pour permettre de bénéficier des avantages du partenariat, et de les communiquer à ses partenaires non financiers pour qu'ils proposent leurs produits ;
Attendu que l'édition d'octobre 2005 de la convention de compte de dépôts dispose que le client autorise la banque à partager les données le concernant à ses sous-traitants et à ses partenaires pour lui permettre de bénéficier des avantages du partenariat, et à communiquer ses coordonnées personnelles (nom, adresse, numéro de téléphone) à des instituts de sondages agissant pour le compte exclusif de la banque sans que le client soit tenu de répondre à leurs sollicitations ;
Attendu que le partage des données à des sous-traitants et à des partenaires de la banque ne constitue pas une atteinte à la confidentialité dès lors qu'ils restent tenus au secret au même titre que la banque ; que par ailleurs la communication à des instituts de sondage ne concerne que des données non confidentielles ; qu'il s'ensuit que les critiques émises contre l'article 6 qui a été modifié par rapport aux éditions antérieures sont sans fondement ;
II) CLAUSES CONSIDÉRÉES COMME « LÉGALEMENT ABUSIVES » PAR L'ASSOCIATION UFC QUE CHOISIR
1) L'article 1.1 § 8 « fin du compte joint »
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR critique cette clause en ce qu'elle prévoit qu'un titulaire du compte joint peut demander sa transformation en compte non joint et que les titulaires restent responsables solidairement des conséquences de l'utilisation des moyens de paiement qui n'auraient pas été restitués lors de la révocation ;
[minute page 8] Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère cette clause abusive dès lors qu'elle dispense la banque d'informer les autres titulaires du retrait et de reprendre les moyens de paiement dont dispose celui qui s'est retiré ;
Attendu cependant que l'article 1.1 § 8 permet à la personne qui se retire soit de transformer le compte joint en compte collectif auquel cas elle interviendra auprès du cotitulaire pour obtenir la restitution des moyens de paiement, soit de se retirer du compte joint qui demeurera au seul nom du cotitulaire, la personne qui se retire n'étant pas responsable des opérations postérieures ;
Attendu qu'il y a lieu d'adopter les motifs des premiers juges qui ont rejeté les moyens et arguments de la Société UFC QUE CHOISIR ;
2) L'article 2.2 § 8 et 12 sur la consultation et la gestion des comptes à distance
Attendu que le § 8 de cet article précise que l'utilisation du code vaut signature de la part du client et que les enregistrements transmis par ce moyen font preuve ; que le § 12 précise que les soldes de compte communiqués au moyen de ces services (internet, minitel, audiotel) s'entendent sous réserve des opérations en cours et que les relevés de compte font seuls foi ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR soutient que ces dispositions ont pour effet d'inverser la charge de la preuve au détriment du consommateur qui se voit contraint d'apporter lui-même la preuve de toute contestation sur les écritures de la banque ;
Attendu que les conventions portant sur la preuve sont licites au regard de l'article 1316-2 du Code Civil qui prévoit que le juge règle les conflits de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le plus vraisemblable, « à défaut de convention valable entre les parties » ;
Attendu que ces clauses n'ont aucunement pour effet de renverser la charge de la preuve ;
3) L'article 3.1 § 2 et 4 sur les versements d'espèces et de chèques
Attendu que ces dispositions prévoient la remise d'espèces ou de chèques dans des automates qui ne vérifient pas le montant du dépôt mentionné par le client, la preuve du dépôt résultant d'un inventaire ultérieur ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR soutient que ces dispositions ont pour effet d'exonérer le banquier de toute responsabilité en cas de défaillance du matériel ou d'indélicatesse du personnel, de sorte qu'elles seraient abusives au regard de l'article R. 132-1 du Code de la consommation ;
Attendu que la vérification de la remise ne peut pas être effectuée au moment de cette remise, qu'un inventaire ultérieur a été prévu qui fait foi « sauf preuve contraire » ainsi que le précise le § 2 ;
Attendu que cette clause déterminant le procédé de preuve n'est pas illicite et n'entraîne par une exonération ou une limitation de la responsabilité de la banque ; qu'elle n'est donc pas abusive ;
4) L'article 3.1 § 7 concernant les délais d'encaissement
Attendu que cette clause est ainsi rédigée dans l'édition d'octobre 2005 « en ce qui concerne les délais d'encaissement et les avis d'impayé, notre responsabilité n'est engagée qu'en cas de dépassement des délais d'usage imputable à une faute lourde de notre établissement » ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère cette clause comme abusive en ce qu'elle laisse à la banque la discrétion totale du délai et impose au client de démontrer la faute lourde ;
[minute page 9] Attendu que la référence aux usages n'est pas illicite pas plus que l'exonération de responsabilité en cas de faute légère ;
Attendu qu'il s'ensuit que cette clause n'est pas abusive ;
5) L'article 3.1 § 8 sur les encaissements de virements
Attendu que cette clause, après avoir invité le client à fournir un RIB à la personne qui doit opérer le virement à son profit précise :
« Les contrôles que nous sommes tenus d'opérer dans le cadre de la réglementation, en particulier sur les mouvements de capitaux transfrontaliers, peuvent nous amener à différer le crédit à votre compte. Le délai indiqué dans nos conditions tarifaires s'entend après vérification » ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR soutient que par cette clause la banque peut discrétionnairement et pour une durée indéterminée différer l'encaissement des virements sur le compte d'un client alors que le délai contractuel précisé dans le guide tarifaire est d'un jour ouvré après réception des fonds ;
Attendu cependant que la banque est tenue de faire des vérifications imposées par la loi dans la lutte contre le blanchiment et le terrorisme ;
Attendu que cette clause ne vise que des retards éventuels dans des situations exceptionnelles ; qu'elle ne présente pas un caractère abusif ;
III CLAUSES CONSIDÉRÉES COMME DÉSÉQUILIBRÉES PAR L'ASSOCIATION UFC QUE CHOISIR
1) L'article 1.5 § 2 concernant le traitement des opérations
Attendu que cette clause prévoit la perception d'une commission en cas d'opérations en anomalie ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR critique cette clause au motif qu'elle ne donne pas de définition de l'irrégularité de fonctionnement du compte ; qu'elle se contente de fournir quelques exemples parmi lesquels l'usage d'une formule de chèque non normalisée, ce qui n'est pas une anomalie ; que par ailleurs elle critique l'absence de tarification précise ;
Attendu que dans l'édition d'octobre 2005 l'article 1.5 § 2 a été modifié en ce sens qu'il comporte une liste limitative des opérations en anomalie, liste dans laquelle l'usage d'une formule de chèque non normalisée ne figure plus ;
Attendu par ailleurs que la commission est indiquée dans le guide tarifaire auquel renvoie l'article 1.5 § 2 ;
Attendu que cette clause n'est pas abusive ;
2) L'article 2.2 § 14 sur la conservation des enregistrements des instructions informatiques et téléphoniques
Attendu que cette clause prévoit que de tels enregistrements ne sont conservés que durant trois mois, durée susceptible d'être augmentée à la seule appréciation de la banque ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère cette clause comme créant un déséquilibre dès lors que la banque s'autorise à détruire ce qu'elle considère comme les preuves des ordres reçus du client, ce qui peut entraîner pour ce dernier la perte d'un moyen de preuve en cas d'instructions données par un tiers ou un cohéritier non autorisé ;
[minute page 10] Attendu cependant, comme l'ont relevé les premiers juges, que la destruction de ces enregistrements n'est susceptible de créer une perte de preuve qu'au préjudice de la banque à qui incombe la charge de démontrer qu'elle a agi sur instructions conformes du titulaire du compte ; qu'il s'ensuit que cette clause se crée par un déséquilibre au détriment du client ;
3) L'article 3.1 § 4 concernant l'encaissement des chèques émis sur des formules non conformes
Attendu que par la clause précitée la banque s'autorise à refuser les chèques émis sur des formules non conformes aux normes en usage dans la profession et prévoit une commission pour le traitement de pareils chèques ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR fait valoir que la loi n'interdit pas l'usage de pareils chèques pourvu que les mentions prévues à l'article L. 131-2 du CMF y soient portées ; qu'elle considère la clause susvisée comme abusive et créatrice d'un déséquilibre au préjudice du consommateur ;
Attendu toutefois que des impératifs techniques évidents contraignent la banque à prendre des mesures limitant l'usage de chèques sur papier libre, usage qui serait source d'une lenteur dans le traitement et l'encaissement, lenteur qui au demeurant serait préjudiciable au consommateur ; qu'il s'ensuit que la clause susvisée n'est pas abusive ;
4) L'article 5 § 1 et 2 concernant la clôture du compte
Attendu qu'en vertu de cette clause la Société LCL peut prendre l'initiative de clore un compte de dépôts en respectant un délai de préavis d'un mois « sauf irrégularité grave ou désaccord entre les parties exposant l'établissement à un risque légal ou financier » ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère que la possibilité pour la banque de clôturer un compte sans motivation constitue un refus de prestation de service et entraîne un déséquilibre ;
Attendu que la convention de compte de dépôts est un contrat à durée indéterminée à laquelle chacune des parties peut mettre fin à tout moment selon le droit commun ; que la Société LCL s'impose un préavis de trente jours dont elle ne peut se dispenser que dans des circonstances exceptionnelles ; qu'il s'ensuit que cette clause n'est pas abusive ni génératrice d'un déséquilibre entre les parties ;
5) La stipulation du guide tarifaire relative aux ordres de virement
Attendu qu'une stipulation du guide tarifaire relative aux ordres de virement prévoit : « délai d'exécution : crédit à la charge du bénéficiaire au plus tard cinq jours ouvrés après débit à votre compte » ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR estime cette disposition déséquilibrée dès lors que le banquier dispose d'un délai de cinq jours pour créditer le compte du bénéficiaire après avoir débité le compte de son client ce qui peut entraîner pour ce dernier le risque de se voir reprocher un retard ;
Attendu cependant que la banque du donneur d'ordre ne maîtrise pas les délais de transmission des fonds vers la banque bénéficiaire ; qu'il s'ensuit que la fixation d'un délai maximum de cinq jours est tout à fait raisonnable et que la clause n'est pas de nature à créer un déséquilibre ;
[minute page 11]
6) Les stipulations du guide tarifaire concernant la tarification des oppositions sur avis de prélèvement
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR considère que l'avis donné au banquier de cesser un prélèvement automatique ne constitue pas une opposition mais une révocation de mandat qui est libre en application de l'article 2004 du Code Civil ; qu'elle estime que le principe d'une tarification de cette révocation constitue un déséquilibre alors surtout que cette révocation allège pour l'avenir les tâches de la banque ;
Attendu que s'il est vrai que l'avis donné à la banque de ne plus opérer un prélèvement automatique constitue une révocation de mandat et non pas une opposition, il n'en demeure pas moins qu'une telle mesure constitue un service méritant une rémunération ; que les stipulations susvisées ne sont donc pas abusives ;
Attendu que l'Association UFC QUE CHOISIR sera déboutée de ses demandes tendant à la suppression de vingt-deux clauses analysées ci-dessus, ainsi que de toutes ses demandes complémentaires ;
Sur l'appel incident de la Société LCL
Attendu que la Société LCL expose que le jugement déféré du 3 janvier 2005 a déclaré abusives quatre clauses figurant dans l'édition de février 2003 de la convention de compte de dépôts alors qu'elles avaient été supprimées dans l'édition de juin 2004 ; qu'elle soutient que les demandes concernant ces clauses étaient devenues irrecevables car sans objet et devaient être rejetées ; qu'elle sollicite la réformation du jugement en ce sens ;
Attendu cependant que la Société LCL verse au débat la convention de compte de dépôts dans son édition d'octobre 2005, donc postérieure au jugement déféré mais non pas l'édition de juin 2004 ; qu'il s'ensuit qu'elle ne démontre pas la suppression des clauses susvisées antérieurement au jugement du 3 janvier 2005 ; que l'appel incident de la Société LCL sera en conséquence rejeté ;
Attendu que l'équité commande de condamner l'Association UFC QUE CHOISIR à payer à la Société LCL la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, et à supporter les dépens de l'appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Déclare l'Association UFC QUE CHOISIR mal fondée en son appel,
La déboute de l'ensemble de ses demandes présentées devant la Cour,
Déclare la Société LE CRÉDIT LYONNAIS mal fondée en son appel incident,
[minute page 12] Condamne l'Association UFC QUE CHOISIR à payer à la Société LCL la somme de MILLE. CINQ CENTS EUROS (1.500 EUROS) en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
La condamne aux dépens de l'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître de FOURCROY, avoué.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5738 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Modalités - Suppression partielle
- 5766 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Suppression volontaire - Clauses supprimées en cours d’instance - Droit antérieur à la loi du 17 mars 2014
- 5827 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Conséquences : clauses de renonciation dans le contrat
- 5836 - Code de la consommation - Domaine d’application - Contrat - Forme du contrat
- 6026 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre dans l’information - Informations connues du professionnel - Informations juridiques générales
- 6039 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Environnement du contrat - Clauses usuelles
- 6041 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Contraintes d’exécution - Professionnel - Contraintes de gestion
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