CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 23 novembre 1999
CERCLAB - DOCUMENT N° 3112
CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 23 novembre 1999 : RG n° 97/04461 ; arrêt n° 747
Publication : Site CCAB
Extrait : « N.B. Sur les clauses abusives, V. le texte de la décision ».
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 1999
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 97/04461. Arrêt n° 747. Appel d'une décision (N° R 95/5045 - 4ème ch.) rendue par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE en date du 29 septembre 1997 suivant déclaration d'appel du 29 octobre 1997.
APPELANTE :
SARL JFM HABITAT
prise en la personne de son représentant légal en exercice, [adresse], Représentée par la SELARL DAUPHIN et NEYRET, avoués à la Cour, Assistée de Maître Richard COUTTON, avocat au barreau de GRENOBLE, membre de la SCP d'avocats CLEMENT-CUZIN, COUTTON, BRAMBILLA
INTIMÉE :
UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS DE L'ISÈRE UFC « 38 »
prise en la personne de son représentant légal en exercice [adresse], représentée par la SCP PERRET et POUGNAND, avoués à la Cour, assistée de Maître Christian BRASSEUR, avocat au barreau de GRENOBLE, membre de la SCP d'avocats BRASSEUR, CHAPUIS
[minute page 2]
INTIMÉE ET APPELANTE suivant déclaration du 29 octobre 1997 :
SA PLUS INTERNATIONAL
prise en la personne de son représentant légal en exercice [adresse], Représentée par la SCP CALAS, avoués à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame Odile FALLETTI-HAENEL, Président, Madame Françoise MANIER, Conseiller, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller,
Assistées lors des débats de Madame Christiane TERRAZ, Greffière.
DÉBATS : A l'audience publique du 22 juin 1999, les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faisant valoir que 12 des clauses du contrat-type de vente de cuisines intégrées usité par la SA PLUS INTERNATIONAL dont le siège est à QUIMPER et par son franchisé local, la SARL JFM INTERNATIONAL dont le siège est à SAINT EGREVE présenteraient un caractère abusif et placeraient le consommateur virtuel en état d'infériorité, l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS DE L'ISÈRE – « UFC 38 » - a, [minute page 3] par acte du 1er septembre 1995, saisi le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE aux fins que soit ordonnée la disparition de ces dispositions léonines et que lui soit allouée la somme de 50.000 francs à titre de dommages-intérêts outre une somme en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par jugement rendu le 29 Septembre 1997, le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE :
- a constaté que le contrat « Cuisines Plus » élaboré par la Société PLUS INTERNATIONAL comportait dans ses articles 1-5, 4-2 et 4-12 des clauses abusives de nature à porter préjudice aux intérêts des consommateurs et que si les clauses abusives contenues dans les articles 1-5 et 4-12 ont disparu du contrat type actuel, l'article 4-2 subsiste dans toute son irrégularité,
- en conséquence, a ordonné la suppression de cet article 4-2 du contrat-type CUISINES PLUS dans le délai d'un mois à compter du jugement à peine d'une astreinte de 500 francs par jour de retard ou par infraction constatée,
- a condamné solidairement les sociétés PLUS INTERNATIONAL et JFM HABITAT à payer à l'Association UFC 38 la somme de 30.000 francs à titre de dommages-intérêts et celle de 6.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- a dit que la Société PLUS INTERNATIONAL supportera la charge définitive des indemnités,
- a ordonné la publication du dispositif du jugement à la diligence de l'UFC 38 dans les journaux LE DAUPHINÉ LIBÉRÉ et LES PETITES ANNONCES du DAUPHINÉ sans que le coût de chaque insertion qui sera supporté par la Société PLUS INTERNATIONAL puisse excéder 7.000 francs,
- a ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- a condamné les défenderesses aux dépens.
[minute page 4] Suivant déclarations d'appel séparées jointes par ordonnance du Conseiller de la mise en état, la Société JFM HABITAT et la Société PLUS INTERNATIONAL ont relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses secondes conclusions récapitulatives signifiées le 31 mai 1999, la Société PLUS INTERNATIONAL demande à la Cour :
- de débouter l'Association UFC 38 de l'ensemble de ses prétentions,
- de réformer le jugement déféré,
- de dire que les articles 1-5 et 4-12 du contrat, dans leur rédaction initiale, ne contenaient aucune clause abusive,
- de dire que l'article 4-12 du contrat ne contient aucune clause abusive,
- en conséquence, de condamner l'Association UFC 38 à lui verser la somme de 100.000 francs à titre de dommages-intérêts et celle de 20.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- d'ordonner la publication de l'arrêt réformant le jugement dans les mêmes journaux et selon les mêmes conditions que celle ayant eu lieu au profit de l’UFC 38.
Elle conteste, en premier lieu, les clauses jugées abusives par le tribunal. Ainsi, elle considère que le premier juge a ordonné à tort la suppression de la clause de l'article 4-2 du contrat qui énonce que les sommes versées d'avance ne produisent pas intérêts même après trois mois comme étant contraire à l'article L. 131-1 du Code de la Consommation alors que chaque commande correspondant à une commande spéciale et personnalisée selon devis nécessitant une fabrication particulière sur l'ordre passé au fabricant, les dispositions de l'article L. 131-2 du Code de la Consommation qui écartent celles de l'article 131-1 doivent recevoir application.
[minute page 5] Concernant l'article 1-5 du contrat relatif à la solidarité du conjoint et du concubin, elle demande à la Cour de dire que dans sa rédaction primitive, cet article ne contenait pas de clause abusive en particulier pour les concubins dont la situation est prise en compte par la jurisprudence et que dans sa nouvelle rédaction, il est parfaitement conforme à la loi et ne fait que reprendre l'article 220 du Code Civil.
Elle soutient, enfin, que l'article 4-12 relatif à la date de livraison dans sa rédaction initiale comme dans celle de l'article 4-13 qui lui a été substituée est conforme à la jurisprudence selon laquelle l'inexécution par l'acheteur de son obligation de retirement a normalement pour conséquence de libérer le vendeur des risques de la chose.
S'agissant des articles déclarés non abusifs par le premier juge mais qui font l'objet de l'appel incident de l'UFC 38, la position de l'appelante est la suivante :
- sur l'article 1-6 (Fiche technique)
Elle soutient comme l'a jugé le tribunal qu'ayant un objet purement technique, la clause n'a pas pour effet de constater l'adhésion de l'acheteur à des stipulations contractuelles ne figurant pas sur son contrat d'achat,
- sur l'article 2-3 (modification de commande du fait du client)
Elle souligne que la seule obligation du professionnel est de fournir avant la conclusion du contrat les caractéristiques essentielles du bien et non celles de la pièce dans laquelle doit être installé ce bien, lesquelles incombent au client et qu'ainsi, la faculté de réclamer une facture complémentaire en cas d'erreur de métrage incombant à l'acquéreur est fondée.
- sur l'article 7-4 (défauts apparents)
Elle fait remarquer que l'expression « lors de l'enlèvement ou de la livraison » doit s'interpréter au regard des dispositions de l'article 7-5 du contrat aux termes desquelles si la livraison est effectuée par un transporteur, le client devra confirmer ses réserves dans les trois jours (article 105 du Code de Commerce). [minute page 6]
- sur l'article 2-4 (indemnité d'annulation)
L'appelante réplique que la même indemnité a été stipulée en cas de résiliation de la commande du fait de CUISINES PLUS et qu'il est parfaitement licite d'évaluer forfaitairement le préjudice au moment de la conclusion du contrat et de réclamer le règlement du bénéfice espéré si le contrat avait été mené à son terme.
- sur l'article 3-2 (livraison)
Elle soutient que le prix supplémentaire éventuel à payer est établi en fonction d'un barème forfaitaire affiché en magasin connu des consommateurs et défini à l'avance.
- sur l'article 1-7 (récapitulatif)
Elle souligne qu'un tel récapitulatif qui ne modifie en rien les conditions substantielles du contrat initial, ne nécessite à bon droit aucune nouvelle acceptation du client.
- sur l'article 7-2 (modalités de livraison)
Elle fait valoir que cet article parle d'un jour de livraison « convenu » et non fixé par le professionnel de sorte que le grief tiré du caractère unilatéral du choix de la date de livraison n'est pas fondé.
Elle soutient ainsi que la possibilité de réception de la marchandise par un tiers est une facilité offerte au client qui ne lèse pas ses droits puisqu'il dispose de toute manière d'un délai raisonnable pour émettre des réserves.
- sur l'article 6-1 (confirmation du délai de livraison)
Elle souligne que l'article dans sa rédaction initiale a été modifié et rendu conforme aux dispositions des articles L. 114-1 et R. 114-1 du Code de la Consommation et que l'action de l'Association des Consommateurs est devenue ainsi sans objet. [minute page 7]
- sur l'article 5-3 (frais d'entreposage)
Elle fait valoir que cette clause n'est pas abusive, son application impliquant une faute du consommateur caractérisée par des « reports successifs » de livraison de son fait.
Elle conteste le montant des dommages-intérêts alloués par le premier juge alors que sur les 12 articles critiqués par l'UFC 38, trois seulement ont été considérés comme abusifs et le retrait d'un seul ordonné.
Elle souligne que les modifications des articles litigieux auraient pu être négociées à l'amiable si l'UFC 38 avait pris contact avec elle.
Elle fait valoir aussi qu'aucun consommateur ne s'est manifesté pour arguer d'un préjudice.
Elle soutient surtout que l'action de l'UFC 38 étant préventive, elle est incompatible avec l'existence d'un préjudice.
Elle s'oppose à la publication de la décision à intervenir qu'elle estime injustifiée eu égard aux faits reprochés.
Elle considère que l'action de l'UFC 38 lui a causé un important préjudice commercial dont elle demande réparation.
La Société JFM HABITAT conclut à l'infirmation du jugement déféré, au rejet des prétentions de l'UFC 38 et à sa condamnation au paiement de la somme de 100.000 francs à titre de dommages-intérêts et celle de 10.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. A titre subsidiaire, elle demande à être relevée et garantie par la Société PLUS INTERNATIONAL de toutes les condamnations en principal, intérêts et dommages-intérêts prononcées à son encontre.
Elle expose qu'en sa qualité de franchisée de la Société CUISINES PLUS INTERNATIONAL, elle utilise des contrats-type de vente avec leurs conditions générales de vente qu'elle reçoit de son franchiseur dont elle dépend complètement.
[minute page 8] Elle critique tout d'abord le jugement en ce qu'il a retenu deux clauses (1-5 et 4-12) comme étant abusives tout en reconnaissant qu'elles ont depuis disparu du contrat-type actuel, rendant sans objet sur ce point l'action de l'UFC 38.
S'agissant des articles déclarés abusifs par le premier juge comme de ceux que celui-ci a jugé non abusifs mais qui font l'objet de l'appel incident de l'UFC 38, l'analyse de la Société JFM HABITAT rejoint celle de la Société CUISINES PLUS INTERNATIONAL.
L'UFC 38 conclut :
- à l'irrecevabilité et au mal fondé des appels principaux,
- à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré illicites ou abusives les clauses des articles 4-2, 1-5 et 4-12 des contrats-type et la suppression de l'article 4-2,
- à la suppression des clauses des articles 1-5 et 4-12,
- à ce -que soient déclarées illicites ou abusives et que soit ordonnée la suppression des clauses des articles 1-6, 2-3, 7-4, 2-4, 3-2, 1-7 et 7-2 ainsi que des clauses des contrats initiaux : 6-1 et 5-3,
- à l'élévation à 50.000 francs des dommages-intérêts,
- à la publication de l'arrêt à intervenir, à concurrence de 10.000 francs par insertion,
- à l'affichage pendant un mois de l'arrêt à intervenir,
- à la condamnation des appelantes au paiement de la somme de 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
[minute page 9] Concernant l'appel des professionnels relatif au trois clauses jugées abusives par le tribunal, l'UFC 38 reprend la motivation du jugement sauf à dire, en outre, que la clause modifiée qui reprend la présomption de communauté entre époux et que l'article 4-13 qui reprend abusivement la présomption de délivrance devront être supprimés.
L'UFC 38 réplique, d'autre part, qu'à titre préventif elle est recevable et fondée à faire constater comme abusives les clauses figurant sur l'ancien modèle du contrat-type en vigueur lors de l'assignation.
Elle répond aussi qu'aucun texte n'impose à une association agréée de négocier avant de saisir la juridiction civile, que l'assignation est intervenue six mois après une demande amiable vaine et qu'elle est d'ores et déjà justifiée par les modifications que les professionnels ont apportées.
Son appel incident porte sur les clauses non retenues comme illicites par le jugement et qui figurent encore à nouveau au contrat.
Ainsi, l'UFC 38 considère comme illicite et abusive la clause relative à la fiche technique en ce qu'elle n'indique pas les prix unitaires de chaque élément contrairement aux dispositions de l'article 4 du Décret du 14 mars 1986 et qu'elle prévoit que « le client déclare être en possession de la fiche » sans que la remise soit constatée par l'apposition d'une signature autre que celle figurant sur le bon de commande, de sorte que le consommateur ayant signé par avance ne pourra se plaindre des caractéristiques techniques éventuellement différentes.
Elle considère aussi comme abusive la clause de l'article 2-3 qui prévoit une facturation complémentaire pour toute modification du fait du client alors que le professionnel tenu d'une obligation de renseignement général doit vérifier lui-même les cotes et ne pas transférer sur le consommateur une responsabilité qui lui incombe.
Elle critique encore la clause de l'article 7-4 relative aux défauts apparents en ce qu'elle impose que les réclamations aient lieu à la livraison, ce qui ne permet pas au client de vérifier l'intégralité des éventuels désordres.
[minute page 10] Concernant la clause de l'article 2-4, elle estime que l'indemnité de résiliation stipulée n'est admissible qu'en cas de défaillance fautive du consommateur mais non s'il justifie d'un motif légitime. Elle considère également que cette clause est abusive en ce qu'elle ne subordonne pas son application à la justification d'un préjudice professionnel.
Elle critique la clause 3-2 du contrat qui stipule un surcoût des frais de livraison en cas de difficultés d'accès non signalées alors que le consommateur qui n'est pas interrogé sur ce point ne dispose en tout état de cause d'aucune place dans le contrat pour les mentionner, que les conditions de prix ne sont pas indiquées et que la « livraison aux risques et périls » du consommateur revient à dispenser le professionnel de son obligation de délivrance.
Elle conteste que la clause relative au récapitulatif (article 1-7) ne cause pas grief au client alors qu'elle comporte un risque de modification non acceptée des plans initiaux.
Elle considère comme abusive la clause relative aux modalités de livraison (article 7-2) qui laisse au vendeur la fixation définitive de la date de livraison.
L'UFC 38 relève encore que le tribunal aurait dû constater le caractère abusif de la clause initiale de l'article 6-1 même si l'ancien contrat n'est plus proposé et déclarer abusive et ordonner la modification de la clause (article 5-3) relative aux frais d'entreposage, le consommateur n'ayant pas à solder le prix avant la livraison de la marchandise.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION DE LA COUR :
L'appel et l'appel incident nécessitent de la Cour l'examen de l'ensemble des clauses litigieuses du contrat offert sous l'enseigne CUISINES PLUS à l'adhésion de la clientèle par les sociétés appelantes.
[minute page 11]
ARTICLE 1-5 DU CONTRAT :
La Cour reprend intégralement la motivation du premier juge.
Dans sa nouvelle rédaction, l'article 1-5 qui reprend la notion de solidarité entre époux prévue à l'article 220 du Code Civil pour les dettes contractées pour les besoins du ménage est licite.
En revanche, l'extension de la solidarité aux concubins, laquelle ne se présume pas, ne peut trouver de justification dans la jurisprudence de sorte que la clause dans sa rédaction initiale était parfaitement abusive.
ARTICLE 4-12 devenu 4-13 :
La Cour reprend encore intégralement la motivation du premier juge.
L'article 4-13 qui a été substitué à l'article 4-12 est licite, les conséquences résultant du refus abusif de prendre livraison étant laissées à l'appréciation du juge du contrat et n'étant plus déterminées à l'avance comme dans la rédaction initiale.
ARTICLE 4-2 :
Le premier juge a considéré avec raison que la clause était abusive et en a ordonné, à bon droit, la suppression eu égard à la nature des produits vendus.
Comme le relève justement l'UFC 38, les consommateurs qui se rendent dans les magasins CUISINES PLUS commandent des meubles en stock ou aux dimensions standard qui dépendent du réseau de franchise de la Société venderesse.
Le plan qui au demeurant, est établi par le client n'est nécessaire que pour adapter ces meubles à la configuration de la cuisine.
[minute page 12] Les sociétés appelantes qui commercialisent des choses de genre même si leur adaptation diffère pour chaque client ne peuvent prétendre déroger aux dispositions de l'article L. 131-1 du Code de la Consommation.
ARTICLES 1-6 et 1-7 :
Contrairement aux craintes exprimées par l'UFC 38 dans ses écritures, la clause relative à la fiche d'identification technique expressément prévue par le Décret du 14 mars 1986 comme celle relative au récapitulatif qui toutes deux ont un objet purement technique, ne font pas grief au consommateur et le premier juge les a, à bon droit, considéré comme licites.
ARTICLE 2-3 :
Le consommateur qui s'adresse à un cuisiniste industriel du type CUISINES PLUS lequel travaille sur les plans que lui fournit son client comme le contrat le prévoit expressément, ne peut prétendre à la même protection que celui qui recourt à un artisan qui établira lui-même les plans et procédera personnellement à la cotation de la pièce qui doit accueillir les éléments.
Le tribunal a jugé, à bon droit, que la clause applicable en cas d'inexécution par le client de ses obligations, ne remettait pas en cause l'équilibre contractuel.
Compte tenu de la nature du contrat, l'UFC 38 soutient à tort que le cuisiniste doit vérifier lui-même les cotes de la pièce alors que la description précise de la cuisine ne lui incombe pas, son obligation de professionnel consistant seulement à fournir avant la conclusion du contrat les caractéristiques essentielles du bien.
ARTICLE 2-4 :
Comme l'a retenu le tribunal, cette disposition qui consiste à prévoir contractuellement une « indemnité d'annulation » en cas de [minute page 13] défaillance fautive d'une des parties à remplir son obligation n'est pas abusive.
Elle est conforme aux recommandations de la commission des clauses abusives en la matière qui édictent que le préjudice peut être forfaitairement évalué au moment de la conclusion du contrat et que le professionnel est en droit de demander le règlement du bénéfice qu'il pouvait espérer si le contrat avait été mené à son terme.
ARTICLE 3-2 :
Le premier juge qui a relevé que la disposition applicable en cas de reports successifs de livraison supposait l'inexécution par l'acquéreur de ses obligations en a déduit à bon droit qu'elle n'était pas abusive. Vainement, l'UFC 38 soutient-elle que des « reports successifs » de la part du client ne relèveraient pas nécessairement de sa faute alors que la date de livraison est déterminée en accord avec celui-ci.
Le paiement du solde du prix étant concomitant à la livraison, le refus de paiement de ce solde entraînera le refus de livraison conformément aux dispositions de l'article 1651 du Code Civil.
ARTICLE 6-1 :
Le jugement qui a considéré que la disposition dans sa rédaction actuelle était valable sera confirmé. L'appel de l'UFC 38 porte uniquement sur le caractère abusif de cette disposition dans sa rédaction initiale. La disposition critiquée ne figurant plus dans le contrat actuel, l'action de l'Association est devenue sans objet sur ce point.
ARTICLE 7-2 :
Le premier juge, par une motivation pertinente que la Cour adopte, a retenu à bon droit l'absence de caractère abusif de la clause.
Il y a lieu en conséquence d'ordonner la suppression de la clause.
[minute page 14] Contrairement à ce que soutient l'UFC 38, il n'apparaît pas des stipulations contractuelles que le vendeur fixe en définitive la date de livraison laquelle, selon les termes mêmes de la clause, aura été « convenue » entre les parties.
En revanche, le remplacement de l'acquéreur par un tiers de son choix n'a rien d'abusif si le client dispose d'un délai raisonnable pour émettre des réserves concernant les défauts apparents non découverts au jour de l'enlèvement, ce qui n'est pas le cas.
Il y aura donc lieu de supprimer cette partie de la clause.
ARTICLE 7-4 :
Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, cette clause apparaît abusive en ce qu'elle stipule que les réclamations et réserves doivent être présentées lors de l'enlèvement ou de la livraison en ce qui concerne les défauts apparents. En effet, compte tenu du nombre des meubles et accessoires livrés et de leur nature (électroménager), il est impossible de vérifier sur le champ les éventuels désordres mêmes apparents.
Les appelantes en conviennent puisqu'elles soulignent dans leurs écritures que l'expression « lors de l'enlèvement ou de la livraison » ne doit pas être interprétée de manière restrictive à savoir « dès l'enlèvement ou la livraison » mais doit s'apprécier au regard des dispositions de l'article 7-5 du contrat relative à la livraison par un transporteur qui prévoit la confirmation des réserves dans les trois jours.
Cependant, l'article 7-4 qui dispose : « étant entendu que l'utilisation des marchandises équivaut à leur acceptation en l'état et que, lorsqu'elles sont emportées par le client, elles voyagent à ses risques et périls, les réclamations et réserves doivent être présentées lors de l'enlèvement ou de la livraison en ce qui concerne les défauts apparents... » exclut cette interprétation favorable au consommateur.
[minute page 15] Comme l'a jugé le tribunal, l'action de l'UFC 38 qui n'était pas tenue de rechercher au préalable une solution amiable et utile est justifiée au regard des dispositions de l'article L. 421-6 du Code de la Consommation, ne serait-ce que par les modifications que les professionnels ont apportées.
L'action en suppression des clauses abusives n'étant pas exclusive de l'action en réparation de tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs, l'UFC 38 est fondée en sa demande en dommages-intérêts dont le premier juge a fait une juste appréciation.
Le jugement sera également confirmé en ce qui concerne la publication de la décision dont il n'y a pas lieu d'ordonner l'affichage, l'information des consommateurs étant suffisante par la publication faite dans la presse.
Les sociétés appelantes seront déboutées de leur demande reconventionnelle en dommages-intérêts qui n'est pas fondée dès lors que des clauses de leur contrat-type ont été déclarées abusives et qu'elles en ont modifié d'autres après l'assignation de l'UFC 38.
La Société JFM HABITAT étant aux termes de son contrat de franchise tenue d'exploiter son magasin de vente au détail de cuisines selon les méthodes et les procédés de gestion de son franchiseur, elle sera relevée et garantie des condamnations prononcées à son encontre par la Société PLUS INTERNATIONAL.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,
DÉCLARE la Société PLUS INTERNATIONAL mal fondée en son appel,
[minute page 16] L'EN DÉBOUTE,
DÉCLARE la Société JFM HABITAT mal fondée en son appel sauf en ce qui concerne sa demande en relevé et garantie,
DIT que la Société JFM HABITAT sera relevée et garantie de toutes condamnations prononcées à son encontre par la Société PLUS INTERNATIONAL,
CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qui concerne l'article 7-4 du contrat et l'article 7-2 du contrat relative au tiers,
DÉCLARE abusives les clauses contenues dans les articles 7-4 et 7-2 du contrat-type,
EN ORDONNE la suppression dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt à peine d'une astreinte de 500 francs (cinq cents francs) par jour de retard ou par infraction constatée,
AJOUTANT au jugement,
CONDAMNE solidairement les sociétés PLUS INTERNATIONAL et JFM HABITAT à payer à l'Association UFC 38 la somme supplémentaire de 5.000 francs (cinq mille francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
CONDAMNE les sociétés PLUS INTERNATIONAL et JFM HABITAT aux dépens,
RÉDIGÉ et PRONONCÉ par Odile FALLETTI-HAENEL, Président, qui a signé avec Frédéric LE NAOUR, Greffier.
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