CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 30 mars 2004

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 30 mars 2004
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), 1re ch. civ.
Demande : 02/01082
Date : 30/03/2004
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Site Com. cl. abusives (CCA)
Date de la demande : 13/03/2002
Décision antérieure : TGI GRENOBLE (6e ch.), 31 janvier 2002, CASS. CIV. 1re, 14 novembre 2006
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 5340

CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 30 mars 2004 : RG n° 02/01082

Publication : Site CCA

 

N.B. Le texte de la décision a été scanné à partir d’une copie de mauvaise qualité. Les éventuelles erreurs ont été, dans toute la mesure du possible, éliminées.

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE

ARRÊT DU 30 MARS 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 02/01082.

 

APPELANTE :

ASSOCIATION UFC 38 - UFC QUE CHOISIR DE L'ISÈRE

[adresse], représente(e) par la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, avoué à la Cour, Assisté(e) par Maître BRASSEUR, avocat au barreau de GRENOBLE,

 

INTIMÉE ET APPELANTE suivant DA du 19 mars 2002 :

SA ASLY 38 venant aux droits de la société EXSEL

 

INTIMÉE ET APPELANTE suivant DA du 13 mars 2002 :

Société DAIMLERCHRYSLER FRANCE

[adresse], représente(e) par Maître Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour, Assisté(e) par Maître VOGEL, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître BRICOGNE, avocat au même barreau,

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame Odile FALLETTI-HAENEL

Conseiller : Madame Claude-Françoise KUENY

Conseiller : Madame Jean-Pierre VIGNAL

Greffier : Madame Hélène PAGANON

DÉBATS : Audience publique du 31 janvier 2007

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3 - N.B. première page non paginée] EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 18 mars 2002, l'association [UFC 38] a interjeté appel d'un jugement du Tribunal de grande instance de Grenoble en date du 31 janvier 2002 qui a :

- ordonné la suppression sous astreinte d'un certain nombre de clauses figurant sur les contrats-types valant bons de commande de véhicules neufs et portant la marque M. ou la modification de certaines d'entre elles,

- condamné la SA EXSEL à payer à l'association [UFC 38], avec exécution provisoire, la somme de 6.000 € pour le préjudice collectif ; 900 € pour le préjudice associatif et 3.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- ordonné la publication du jugement dans « Le Dauphiné libéré », « Les petites affiches » et le « 38 » à concurrence de 1.500 € par insertion.

L'[UFC 38] demande à la Cour :

- de confirmer le jugement déféré sur les clauses retenues comme abusives,

- de déclarer abusives les clauses figurant dans ses conclusions, B) n° 2, 3, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 13, et d'interdire l'usage de ces clauses à l'avenir,

- d'ordonner la suppression de celles non encore supprimées dans le délai de deux mois de la décision à intervenir, sous astreinte,

- de confirmer le jugement sur le principe de la condamnation des professionnels à des dommages et intérêts, mais élever ceux-ci et condamner in solidum la SA ASLY 38 et la SAS [Daimler Chrysler France].

- à lui payer, au titre du préjudice collectif, les sommes de 17.000 €, et au titre du préjudice associatif, celle de 2.000 €.

Elle sollicite en cause d'appel la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'en cours de procédure de première instance, la SAS [Daimler Chrysler France] se disant rédactrice du contrat litigieux, intervenait volontairement aux débats et indiquait que des modifications étaient intervenues sur ses bons de commande, dont une nouvelle édition avait été imprimée, « datée » 01/00, mais dont le Tribunal a relevé que la version non datée produite en photocopie reprend dix clauses parmi les quinze critiquées.

[minute page 4] Elle indique qu'elle critiquait à l'origine quinze clauses contractuelles et que le Tribunal a retenu six clauses comme abusives ; que les professionnels soutiennent que ces six clauses retenues comme abusives par le Tribunal ne l'étaient pas.

Elle ajoute que le préjudice subi par la collectivité des consommateurs est d'autant plus grand que la plupart des clauses critiquées ont une incidence financière et conduisent à un profit pour le professionnel, par exemple celle relative aux modifications de prix, celle prévoyant des pénalités excessives … ; que de surcroît, les sociétés ont continué d'utiliser le contrat litigieux pendant la durée de la procédure d'appel ; que le préjudice de l'association est incontestable ; qu'elle exerce une importante activité dans le seul intérêt des consommateurs, et en grande partie à titre préventif.

Quant à la mesure de publication, elle est justifiée et elle permet à l'ensemble de la collectivité des professionnels d'en avoir connaissance et d'avoir leur attention attirée sur la nécessité d'équilibrer les contes proposés aux consommateurs.

La SA ASLY 38, venant aux droits de la SA EXSEL, et la SAS [Daimler Chrysler France]. ont interjeté appel par déclarations des 13 et 19 mars 2002.

Les instances enrôlées sous les numéros 02/01082, 02/01201 et 02/01202 ont été jointes par ordonnance du Conseiller de la mise en état du 10 septembre 2.002.

 

Les Sociétés ASLY 38 et [Daimler Chrysler France] demandent à la Cour :

- de déclarer irrecevables car dépourvues d'objet les demandes formées au titre des clauses supprimées dans l'actuelle version du bon de commande (art. 2, § 1, 2 et 3 de l'ancien bon de commande),

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'association II de ses demandes relatives aux clauses n° 2, 3, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 13 visées ci-dessus,

- de confirmer le jugement en ce qu'Il a donné acte aux deux sociétés de ce que certaines mentions avaient été supprimées dans la nouvelle version du bon de commande (art. 2 § 2 et 3),

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré abusives les clauses n° 1, 4, 5, 12, 14 et 15 et ordonné leur suppression,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en réimpression d'un nouveau bon de commande en caractères au moins de corps 8,

- de direct juger que l'association n’apporte pas la preuve d'un préjudice collectif et d'un préjudice associatif, d'infirmer en conséquence le jugement déféré et de débouter l'association de ses demandes formées en appel à ce titre,

- [minute page 5] d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la publication de la décision, et en ce qu'il a fixé une astreinte,

- à titre infiniment subsidiaire, si la Cour considérait comme abusives certaines clauses, d'accorder à la SAS [Daimler Chrysler France] un délai minimal de quatre mois pour lui permettre d'éditer une nouvelle version de ses bons de commande,

- de condamner l'association au paiement de la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elles répondent

- que la première version du bon de commande constituait une ancienne version qui n’est plus proposée aux consommateurs ; qu'elle a été supprimée suite à l'entrée en vigueur du décret du 28 juin 2000 ; que la nouvelle version a été mise à la disposition des membres du réseau à partir du mois de septembre 2000 ; que sur les quinze clauses litigieuses, trois ne figurent plus sur la nouvelle version du bon de commande ;

- que la demande en suppression des clauses contestées n'a plus d'objet dès lors qu'il est établi par les pièces du dossier que les clauses de l'article 2 § 1, 2 et 3 ne figurent plus dans les contrats « habituellement » proposés aux consommateurs ;

- que l'association [UFC 38] ne démontre pas en quoi les douze autres clauses présenteraient un caractère abusif ;

- que la SAS [Daimler Chrysler France] a entrepris les démarches nécessaires afin de mettre en conformité ses bon de commande, qu'elle a adressé une circulaire d'information aux membres du réseau dès le 21 juillet 2000, et a remis au cours de l'année 2000 la nouvelle version de ce bon de commande (n° 07/00) à la direction générale de la concurrence qui l'a invitée à modifier certaines clauses relatives au prix des véhicules

- que l'édition d'un nouveau bon de commande avait pour objectif de mettre en conformité les documents commerciaux avec la nouvelle réglementation ; qu'elle ne peut donc apparaître comme une reconnaissance du caractère abusif des d'anges litigieuses;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] MOTIFS DE LA DÉCISION

L'action de l’association [UFC 38] vise à la suppression de clauses contenues dans les bons de commande de véhicule neuf habituellement proposés par la SAS [Daimler Chrysler France] et les membres de son réseau.

Au cours de l'année 2000,1a SAS [Daimler Chrysler France] a fait procéder à l'impression d'un nouveau bon de commande portant la référence 07/00 qui, selon elle, a été mis à la disposition des membres de son réseau à compter du 16 octobre 2000.

Or ce n'est pas parce qu'un nouveau modèle a été mis à la disposition des vendeurs que la demande formée au titre du contrat précédent serait devenue sans objet. En effet, d'une part, les sociétés n'établissent pas que l'ancienne version du bon de commande ne serait plus utilisée, et d'autre part, il est de l’intérêt des consommateurs que la juridiction saisie se prononce sur le caractère abusif de telle ou telle clause afin qu'elle ne puisse pas à l'avenir être réintroduite dans les bons de commande à l'occasion d'une nouvelle rédaction.

* * *

Aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».

Les différentes clauses critiquées seront examinées dans l'ordre du jugement :

 

1°) Bon de commande (version 12/97). Description du véhicule commandé.

La première page du bon de commande (version 12/97) mentionne, au titre de la description du véhicule commandé, les indications suivantes type, ligne, boîte, année modèle, date de livraison, couleur, garniture, options, et dans la version 07/00 : marque, modèle, type, boîte de vitesses, version, couleur, garniture, options.

Ces deux versions comportent une rubrique « Observations » dans laquelle, selon l’article 1er des conditions générales, l'acheteur peut mentionner sur le bon de commande « les caractéristiques qu'il juge déterminantes et auxquelles il subordonne son engagement ».

Contrairement à ce qui a été jugé, la description du véhicule est suffisante et il n'existe aucun aléa dans cette désignation. L'acheteur peut toujours utiliser la rubrique « Observations » pour faire spécifier des éléments supplémentaires comme le nombre de portières, la puissance fiscale, mention qui ne présente pas un intérêt suffisant dès lors que les véhicules particuliers ne sont plus assujettis la taxe différentielle. La date de fabrication n'est pas un élément indispensable au consommateur, cette date n'étant pas nécessairement connue par le vendeur qui ignore si le véhicule qui sera livré est actuellement disponible en stock ou non encore fabriqué.

[minute page 7] Les mentions relatives à la description du véhicule sont conformes aux exigences du décret du 28 juin 2000 modifiant le décret du 4 octobre 1978, et il n'existe aucun déséquilibre significatif au profit du professionnel.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné la suppression des mentions relatives à la description du véhicule.

 

2°) Article 1 § 3 (version 12/97) et § 2 (version 07/00) : « Le constructeur se réserve la possibilité d'apporter à ses modèles les modifications liées à l'évolution technique ».

L'article R. 132-2 alinéa 2 du Code de la consommation précise : « Toutefois, il peut être stipulé que le professionnel peut apporter des modifications liées à l'évolution technique, à condition qu'il n'en résulte ni augmentation des prix ni altération de qualité et que la clause réserve au non-professionnel ou consommateur la possibilité de mentionner les caractéristiques auxquelles il subordonne son engagement ».

La clause litigieuse ne précise pas que les modifications liées à l'évolution technique ne peuvent entraîner ni augmentation des prix ni altération de qualité alors qu'il était simple de le faire. C'est à tort que la suppression de cette clause a été rejetée.

 

3°) Article 2 § 1 in fine (version 12/97) : « le prix hors taxes ... est garanti à l'acheteur pendant trois mois à compter de la signature de la commande sauf modifications techniques imposées par les Pouvoirs publics ou changement de modèle ou d'année-modèle ».

L'association critique la possibilité pour le professionnel de changer de modèle ou d'année-modèle pour échapper à la garantie de prix. C'est à juste titre que le Tribunal, après avoir relevé qu'aux termes de l'article 9 des conditions générales, l'acheteur peut annuler sa commande si le vendeur ne peut lui livrer un véhicule correspondant à l'année-modèle, au modèle ou aux caractéristiques particulières spécifiées à la commande, a considéré que la clause critiquée ne conférait pas un avantage significatif injustifié.

Cette clause a été modifiée dans la version 07/00 et il n'est plus fait référence à l'année-modèle ou au modèle.

 

4°) Article 2 § 2 : Ce paragraphe indique que « la garantie de prix est prolongée jusqu'à la mise à disposition effective du véhicule dès lors que la livraison est stipulée totalement ou partiellement dans un délai de trois mois excepté toutefois si ce retard est dû à un cas de force majeure ou à un conflit collectif du travail chez le constructeur ou le fournisseur ».

La commission des clauses abusives a recommandé que soient éliminées des modèles de contrat les clauses ayant pour objet ou pour effet d'ajouter à la force majeure susceptible d'exonérer le vendeur professionnel de sa responsabilité en cas de retard de livraison, une série d'événements (conflits collectifs du travail), sans préciser que ces événements ne pourront exonérer le vendeur que s'ils présentent les caractéristiques de la force majeure.

[minute page 8] La rédaction de la clause litigieuse peut faire penser au consommateur que le conflit collectif est toujours un cas de force majeure, lui laissant le choix d'accepter une augmentation éventuelle de tarif ou de résilier la commande.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a considéré que cette clause conférait au vendeur professionnel un avantage injustifié.

Cette clause a été supprimée dans la version 07/00.

 

5°) Article 2 § 3 : Selon cette clause, « pour tout délai de livraison stipulé supérieur à trois mois, le prix dû sera celui précisé aux conditions particulières ; il sera toutefois majoré ou diminué de la différence de prix résultant de l'évolution du tarif M [N.B. lire sans doute Mercedes] entre le jour de la commande et celui de la livraison ».

Le consommateur reste libre de ne pas accepter la modification éventuelle du prix et dispose de la possibilité de résilier la commande. Il n'est pas établi qu'une telle clause crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Cette clause ne figure pas dans le contrat version 07/00. Le jugement sera infirmé de ce chef.

 

6°) Article 5 § 5 : « L'acompte sera exigible en cas de crédit total ou L.O.A. : le huitième jour suivant l'acceptation de l'offre préalable par l'emprunteur ».

Cette clause, qui stipule qu'une compte [N.B. conforme à la minute, lire sans doute « un acompte », V. plus loin] devra être versé le huitième jour suivant l'acceptation de l'offre préalable par l'emprunteur n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 311-7 du Code de la consommation qui prévoit un délai de rétractation de sept jours.

L'exigence de versement d'un acompte n'est pas de nature à remettre en cause le « crédit total » et une telle clause ne créé par un déséquilibre significatif au détriment du consommateur.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

7°) Article 5 § 10 : « en cas de règlement postérieur à la date d'échéance, des pénalités seront calculées sur le montant T.T.C., prorata temporis, sur la base de 1,5 fois le taux d'intérêt légal ».

Les premiers juges ont justement considéré que la stipulation d'intérêt supérieurs au taux légal reste libre, de même que la dispense de mise en demeure pour en fixer le point de départ, dès lors que le consommateur a souscrit une obligation de payer le prix et qu'il doit s'exécuter de bonne foi en temps voulu.

[minute page 9] Le fait qu'il n'existe pas dans le contrat de clause prévoyant, en cas de retard de livraison par exemple, aucune pénalité équivalente, ne constitue pas un déséquilibre au détriment du consommateur.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

 

8°) Article 7 in fine : Selon cet article « en cas d'annulation ou de résiliation du contrat de vente, la reprise du véhicule d'occasion sera purement et simplement annulée et le véhicule restitué à l'acheteur ... : si le vendeur est dans l'impossibilité de restituer le véhicule en raison de la revente à un tiers ou pour tout autre motif sauf en cas de force majeure, il remboursera à l'acheteur le prix de reprise résultant de l'estimation contradictoire ».

Le prix de reprise ayant été déterminé par la convention des parties, le profit que le professionnel a pu retirer de la revente ne constitue pas un avantage excessif, étant la contrepartie des frais et des risques auxquels il s'expose lors de l'opération.

C'est à bon droit que les premiers juges ont relevé qu'il serait illusoire de rechercher la valeur réelle d'un véhicule d'occasion et injuste d'imposer au professionnel de verser au client un prix de revente qui peut comporter des frais de gestion voire de réparations.

Cette clause n'entraîne aucun déséquilibre au détriment du consommateur qui perçoit exactement ce qui a été convenu.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

 

9°) Article 9 § 1 alinéa 1 : Selon ce paragraphe, « L'acheteur peut annuler sa commande et obtenir le remboursement de l'acompte versé majoré des intérêts légaux …, si après mise en demeure, il n'est pas livré dans les sept jours qui suivent la date de livraison convenue ».

Comme l'a retenu le Tribunal, le fait de fixer la forme de la notification au vendeur de la volonté de résiliation par l'acheteur paraît constituer une précaution raisonnable. Cette clause ne tend pas à créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

10°) Article 9 § 2 : Aux termes de ce paragraphe, « le vendeur peut annuler la commande et conserver l'acompte versé si l'acheteur, après mise en demeure, n'a pas pris livraison du véhicule commandé dans les sept jours qui suivent la date de livraison convenue ».

Le Tribunal a justement considéré que dès lors que le client a signé un bon de commande et qu'il bénéficie d'une garantie de prix dans un délai de trois mois, il a souscrit une obligation de payer le prix mais également celle de prendre livraison, et sauf à établir qu’il serait empêché de remplir ses obligations en raison d'un cas de force majeure, il n'apparaît pas que la faculté de [minute page 10] résiliation par le vendeur, après mise en demeure, puisse constituer pour ce professionnel un avantage injustifié.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

 

11°) Article 10 § 3 : « La garantie débute le jour de la livraison ou le jour de la première immatriculation ».

Cette clause, est insérée dans la rubrique « Garantie contractuelle ». Elle ne fixe donc pas le point de départ de la garantie légale. Le Tribunal a justement considéré que l'alternative fixée par la clause, au titre de la garantie contractuelle, puisse conférer au professionnel un avantage significatif dès lors que, sauf à préciser comment il ne pourrait pas en être ainsi, l'immatriculation n'aura lieu qu'après que le consommateur ait signé une commande et qu'aient été accomplies les démarches nécessaires en vue de son immatriculation.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

 

12°) Article 10 § 3 : « La remise en état ne peut avoir comme effet de prolonger le délai de garantie ».

La limitation de la garantie contractuelle résultant de ce qu’une remise en état ne suffit pas à la prolonger ne constitue pas en soi un avantage injustifié dès lors que le client conserve le bénéfice des garanties légales.

L'article 10 distingue clairement la garantie légale de la garantie contractuelle et la clause critiquée est insérée dans le corps du texte relatif à la garantie contractuelle. Contrairement à ce qui a été jugé, cette clause ne tend à faire croire au consommateur que la disposition relative à la prorogation légale de garantie serait inapplicable.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné la suppression de cette clause.

 

13°) Article 10 § 3 : « Les pièces reconnues défectueuses et échangées deviennent propriété du vendeur ».

L'association [UFC 38] n'établit pas que la conservation de la pièce défectueuse pourrait avoir un intérêt pour le consommateur. Le transfert de propriété de la pièce paraît une contrepartie raisonnable de la garantie fournie. En outre, il n'est pas démontré que l'absence de remise de la pièce défectueuse au consommateur priverait celui-ci d'un moyen de preuve en cas de litige, même en cas de pannes répétitives.

Enfin, le constructeur pourrait voir sa responsabilité engagée sur le fondement de l'article 1386-1 du Code civil s'il laissait en circulation une pièce défectueuse.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

[minute page 11]

14°) Article 10 § 3 : Les pièces reconnues défectueuses et échangées « pour lesquelles la garantie a été refusée seront détruites ou retournées au propriétaire à sa demande et à ses frais ».

Comme l'a relevé le Tribunal, le consommateur reste propriétaire de la pièce défectueuse et il appartient au professionnel d'en assurer la restitution, sauf au client de la refuser.

La clause a été jugée à bon droit abusive.

 

15°) Article 10 § 9 : « La garantie cesse ... lorsque le propriétaire néglige les prescriptions d'entretien du véhicule qui doit être effectué obligatoirement dans un atelier agréé M [N.B. lire sans doute Mercedes] et selon les directives du constructeur ».

La clause telle qu'elle est rédigée exclut la garantie du constructeur lorsque le consommateur, même pour un simple « entretien », sollicite les services d'un professionnel qui n'est pas membre du réseau M. [N.B. lire sans doute Mercedes] Cette clause impose au consommateur de s'adresser exclusivement à un représentant de la marque pour des prestations qui peuvent être banales, ne requérant pas une technicité particulière, ou ne mettant pas en cause la sécurité

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a considéré qu'une telle clause conférait au professionnel un avantage injustifié

*****

Une association agréée de défense des consommateurs agissant en suppression de clauses abusives est en droit de demander réparation, notamment par l'allocation de dommages et intérêts, de tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs.

Le Tribunal a fait une appréciation excessive des dommages et intérêts, compte tenu du nombre limité des clauses déclarées abusives. Le montant de la condamnation au titre du préjudice collectif sera ramené à la somme de 3.500 €, et les condamnations prononcées seront supportées in solidum par les deux sociétés.

L'association [UFC 38], afin de mener à bien sa mission de protection des consommateurs, est contrainte d'engager des dépenses importantes d'information, de formation, d'assistance de ceux-ci, de publications de revues diverses … Cependant, le Tribunal a fait une appréciation excessive de ce chef de préjudice. Sa décision sera infirmée de ce chef, et il sera alloué à l'association la somme de 750 €.

*****

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de fixation d'une astreinte.

[minute page 12] Compte tenu de la modification partielle du contrat intervenue en cours de procédure, la demande de publication sera rejetée, et le jugement réformé de ce chef.

* * *

Enfin, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties en cause d'appel des frais non compris dans les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DÉCLARE RECEVABLE l'action de l'association [UFC 38],

CONFIRME le jugement en ce qu'il a ordonné la suppression des clauses figurant aux articles suivants :

- article 2 § 2

- article 10 § 3 (pièces défectueuses hors garantie)

- article 10 § 9

AJOUTANT au jugement,

INTERDIT aux professionnels l'usage à l'avenir de ces clauses,

CONFIRME le jugement en ce qu'il rejeté la demande en suppression des clauses figurant aux articles suivants :

- article 2 § 1

- article 5 § 5

- article 5 § 10

- article 7 in fine

- article 9 § 1 alinéa 1

- article 9 § 2

- article 10 § 3 (point de départ de la garantie contractuelle)

- article 10 § 3 (pièces défectueuses sous garantie)

[minute page 13] INFIRME le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de suppression de la clause de l'article 1 § 3 (version 12/97), et § 2 (version 07/00),

ET STATUANT À NOUVEAU,

DÉCLARE ABUSIVE la clause de l'article 1 § 3 (version 12/97) et § 2 (version 07/00)

ORDONNE la suppression de cette clause des bons de commandes de véhicules neufs de la marque M [N.B. lire sans doute Mercedes], et interdit son utilisation à l'avenir,

INFIRME le jugement en ce qu'il a ordonné :

- la suppression de la page du bon de commande portant désignation du véhicule,

- la suppression de l'article 2 § 3,

- la suppression de la clause de l'article 10 § 3 prolongation du délai de garantie),

- une astreinte,

- la publication de la décision,

ET STATUANT À NOUVEAU,

DÉBOUTE l'association [UFC 38] de ces chefs de demande,

INFIRME le jugement quant au montant des dommages et intérêts alloués au titre du préjudice collectif et du préjudice associatif,

ET STATUANT À NOUVEAU,

CONDAMNE in solidum la SA ASLY 38 et la SAS [Daimler Chrysler France] à payer à l'association [UFC 38] la somme de 3.500 € au titre du préjudice collectif et celle de 750 € au titre du préjudice associatif,

DIT n'y avoir lieu à dommages et intérêts supplémentaires en cause d'appel,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en cause d'appel,

DIT que la somme allouée par le Tribunal au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile sera supportée in solidum par les deux sociétés appelantes,

[minute page 14] FAIT MASSE des dépens d'appel qui seront supportés à concurrence des 2/3 par l'association UFC 38, et de 1/3 par les sociétés SA ASLY 38 et SAS [Daimler Chrysler France] in solidum, avec application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile au profit des avoués qui en ont fait la demande.

Prononcé par Mme Odile FALLETTI-HAENEL, Président, qui a signé avec Mme Hélène PAGANON, Greffier.

 

Le Greffier                                                               Le Président

Signé : Madame Hélène PAGANON                    Signé : Madame Odile FALLETTI-                                                                                            HAENEL

 

Est cité par :