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TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 16 mars 1999

Nature : Décision
Titre : TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 16 mars 1999
Pays : France
Juridiction : TGI Paris 1re ch. 1re sect.
Date : 16/03/1999
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Site Com. cl. abusives (CCA)
Date de la demande : 3/10/1996
Référence bibliographique : D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4023

TGI PARIS (1re ch. 1re sect.), 16 mars 1999 : RG n° inconnu

Publication : site CCA ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729

 

Extraits : 1/ « Attendu qu'il convient au préalable d'indiquer que la S. qui affirme avoir modifié les articles 8.1, 8.2, 14.2, 14.5 et 21 des contrats qu'elle propose aujourd'hui aux consommateurs, ne verse cependant aucun exemplaire de ces nouvelles conditions d'abonnement ».

2/ « Sur les clauses, V. les motifs du jugement ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS

PREMIÈRE CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

JUGEMENT DU 16 MARS 1999

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° inconnu.

 

DEMANDEUR :

L’UFC QUE CHOISIR

dont le siège social est situé [adresse], Représentée par Maître Hermance CONSTANT, avocat postulant (C 1530), Maître Christian BRASSEUR, avocat plaidant, SCP BRASSEUR -PJ CHAPUIS (Grenoble)

 

DÉFENDEUR :

Société S. [N.B. probablement SAGEM]

ayant son siège social [adresse], image001.gifReprésentée par : Maître Marie-Christine MERGNY, avocat (D 421)

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Magistrats ayant délibéré : Madame TAILLANDIER, Président, Madame NESI, Juge, Madame THOMAS, Juge

[minute page 2] Débats tenus publiquement à l'audience du 2 février 1999 devant Madame NESI, JUGE RAPPORTEUR, conformément à l'article 736 du Nouveau Code de Procédure Civile

GREFFIER : Madame MOREAU

JUGEMENT : Prononcé en audience publique, Contradictoire, Susceptible d'appel.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La SA S. propose aux consommateurs des contrats d'abonnement à des services de radiotéléphonie publique numérique. En janvier 1996 l'UFC Que Choisir en a demandé la communication. Estimant que de nombreuses clauses tombaient sous le coup de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation selon lequel « dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat », elle a, par acte d'huissier du 3 octobre 1996, assigné la SA S. devant ce Tribunal afin d'obtenir la suppression de toutes les clauses citées dans l'acte introductif d'instance dans le mois suivant la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de 1.000 francs par infraction constatée. Elle a également sollicité 50.000 francs en réparation du préjudice collectif subi par les consommateurs ainsi que 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par écritures signifiées le 2 décembre 1997 la SA S. a précisé que les clauses critiquées étaient contenues dans deux contrats d'abonnement, l'un au service « G. F. » correspondant à la commercialisation par S. du service de l'opérateur F. [minute page 3] T., l’autre au service « G. F. » étant la commercialisation du service de l'opérateur S. et a fait valoir que suite à un rapprochement entre les parties, seules quatre clauses (5.2. du contrat G. F., 16.3. du contrat G. F., 18.3 du contrat G. F., 20 du contrat G. F.) resteraient en litige. Elle a contesté tout caractère abusif de ces dispositions et a conclu en conséquence au débouté des demandes tant principale qu'en paiement de dommages-intérêts et a sollicité 25.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le 4 mars 1998, L’UFC Que Choisir a fait observer qu'aucun accord partiel n'était versé aux débats et que la S. n'avait communiqué aucun contrat qui rectifierait les clauses critiquées. Elle a donc demandé au Tribunal de statuer sur l'ensemble des articles inventoriés dans son assignation.

La S. a néanmoins maintenu ses conclusions de débouté dans des dernières écritures signifiées le 28 mai 1998.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

I - SUR LES CLAUSES ABUSIVES :

Attendu qu'il convient au préalable d'indiquer que la S. qui affirme avoir modifié les articles 8.1, 8.2, 14.2, 14.5 et 21 des contrats qu'elle propose aujourd'hui aux consommateurs, ne verse cependant aucun exemplaire de ces nouvelles conditions d'abonnement ;

 

* Article 6-1 du contrat G. F. et 6-2 du contrat G. F. :

« Pour des raisons d'organisation ou d'exploitation de son service, l'opérateur se réserve le droit de modifier le numéro d'appel après en avoir avisé l'abonné, sans que celui-ci puisse s'y opposer » ;

Attendu que l'UFC Que Choisir affirme que cette disposition est contraire à l'article 2 du décret du 24 mars 1978, sans donner la moindre explication et sans indiquer en quoi ce texte serait applicable à la présente espèce ;

Qu’elle sera déboutée de ce chef de demande, cette clause n'apparaissant d'ailleurs pas abusive dès lors que la modification doit répondre à une nécessité technique ou d'organisation du service et que l'abonné en est préalablement avisé ;

 

* Articles 8.1. et 8.2. des deux contrats :

« A la signature du Contrat ou à tout moment pendant la durée du Contrat, S. se réserve le droit de demander à l'Abonné le versement d'un dépôt de garantie. »

« Si le dépôt de garantie n'est pas effectué à la date précisée dans la demande de la S., ce Contrat prend fin à cette même date sans que l'Abonné puisse prétendre à une quelconque [minute page 4] indemnisation du chef de la fin du Contrat ».

Attendu que l'UFC Que Choisir est fondée à soutenir que cette clause est abusive dans la mesure où elle permet au professionnel de modifier discrétionnairement les conditions du contrat au cours de son exécution et au détriment du consommateur, la demande de versement d'un dépôt de garantie ne pouvant se concevoir qu'à la signature du contrat ou en cas de modification de celui-ci à la demande de l'abonné ;

Qu'il convient de souligner que la S., qui ne pouvait sérieusement justifier cette disposition par les problèmes de paiement rencontrés avec ses clients, propose de limiter l'exigence d'une caution à la signature du contrat, préalablement à l'ouverture de la ligne, ou en cas de demande de l'Abonné visant à une modification du contrat (changement de formule d'abonnement ou demande d'option supplémentaire) ;

Qu'il y a lieu en conséquence d'ordonner la suppression de ces deux clauses ;

 

* Articles 12.6 des deux contrats :

« La carte SIM étant la propriété de l'opérateur, l'Abonné s'engage à la restituer à la S. aux fins de remplacement sur simple demande de la S., ou en cas de résiliation du présent contrat quelle qu'en soit la cause ».

Attendu que la demanderesse considère cette clause comme contraire au point k) de l'annexe au Code de la Consommation dans la mesure où elle permettrait au professionnel d'imposer discrétionnairement à l'Abonné des modifications des caractéristiques de son téléphone ;

Que la S. estime au contraire qu'il n'y a aucun lien entre la carte et les caractéristiques des téléphones ;

Mais attendu que si la restitution de la carte à son propriétaire n'est pas critiquable en cas de résiliation de l'abonnement, les clauses prévoyant cette cessation du contrat devant elles-mêmes être conformes à l'article L. 132.1 du Code de la Consommation, l’article 12.6 dans sa rédaction actuelle laisse en revanche toute latitude à la S. pour modifier les conditions d'accès de l'abonné au service à sa seule discrétion pendant l'exécution du contrat, sans même avoir à justifier du moindre motif ;

Qu'elle crée donc un déséquilibre manifeste au détriment du consommateur et doit être supprimée ;

 

* Article 12.9 des deux contrats :

« L'Abonné s'engage à respecter les prescriptions données par l'Opérateur relatives aux modifications techniques éventuelles à apporter à son mobile et/ou aux périphériques utilisés et nécessités par l'organisation et l'utilisation du service radiotéléphonie publique numérique GSM, notamment lorsqu'elles résultent de contraintes et/ou de normes techniques imposées à l'Opérateur par les autorités réglementaires ou les groupements [minute page 5] normatifs compétents ».

Attendu que la demanderesse critique cette clause dans la mesure où elle permettrait d'imposer à l'Abonné des modifications de son téléphone pour ces raisons autres que des normes techniques imposées par les autorités compétentes en la matière ;

Que ce moyen apparaît fondé, la S. proposant pour l'avenir de limiter à cette dernière hypothèse l'obligation de l'Abonné ;

Que l'article 12.9, dans sa rédaction actuelle, doit également être supprimé ;

 

* Article 13.2 des deux contrats :

« Les factures sont établies par périodicité mensuelle. Toutefois la S. se réserve la faculté de faire varier cette périodicité après en avoir avisé l'Abonné ou d'émettre des factures intermédiaires ».

Attendu que cette clause permet à la S. de modifier unilatéralement le principe contractuellement adopté d'un paiement mensuel sans avoir à justifier d'un motif quelconque et ni à recueillir au préalable l'accord de l'autre partie au contrat ;

Qu'elle relève de l'alinéa k) de l'annexe au Code de la Consommation qui énonce comme abusives les clauses ayant pour effet « d'autoriser les professionnels à modifier unilatéralement sans raison valable des caractéristiques du service à fournir » ;

Que le client, eu égard à l'imprécision du texte litigieux, n’a aucun moyen de savoir s'il risque ou non de faire l'objet d'une demande de paiement avant l'échéance mensuelle, et se trouve donc dans une situation désavantageuse puisqu'il ne peut gérer avec certitude le coût du service auquel il a souscrit ;

Qu'il convient en conséquence d'ordonner la suppression de cet article ;

 

* Article 15.1. des deux contrats ;

« S. se réserve la faculté de suspendre immédiatement et sans délai, voire de résilier dans les conditions de l'article 18 ci-dessous, l'accès au service souscrit par l'Abonné, en cas d'inexécution par lui de l'une quelconque de ses obligations au titre du présent Contrat d'abonnement. En cas de suspension, quelle qu'en soit la cause, l'Abonné reste notamment tenu des obligations de l'article 12.1, ci-dessus. »

Attendu que l'UFC Que Choisir soutient que cette clause autorise la S. à résilier le contrat de façon discrétionnaire, en cas d'inexécution par l'abonné de l'une quelconque de ses obligations, si minime soit-elle, alors qu'une telle faculté n'est pas reconnue au consommateur, et se prévaut des termes du paragraphe f) de j'annexe au Code de la Consommation ;

Mais attendu que cet article ne modifie pas les conditions et modalités de résiliation du contrat qui sont spécifiées à la clause 18 à laquelle il est expressément renvoyé ;

[minute page 6] que toutefois la faculté pour le professionnel de sanctionner le moindre manquement de l'abonné à l'une quelconque de ses obligations par la privation immédiate et sans information préalable de tout le service fourni crée un déséquilibre manifeste entre les parties qui justifie la suppression de cette disposition, étant précisé que la S. n'avait proposé d'en éliminer que la partie relative à la résiliation ;

 

* Article 15-4 des deux contrats :

« En cas de perturbation du réseau et si l'Opérateur considère que les nécessités techniques l'exigent, l'Abonné accepte que la ligne puisse être suspendue sans préavis. »

Attendu qu'il convient de donner acte à la S. de ce qu'elle accepte de supprimer cette clause, la perturbation du réseau étant traitée dans une autre partie du contrat ;

 

* Article 17-1 du contrat G. F.2 et 16-1 du contrat G. F.1 :

« Le service peut être interrompu en cas de force majeure. En cas de force majeure, dont la durée excéderait trois mois, le Contrat d'abonnement pourra être résilié sans que l'Abonné puisse prétendre à aucune Indemnité. »

Attendu que cette clause ne peut être considérée comme abusive dans la mesure où, contrairement à ce que soutient la demanderesse, elle n'exclut pas, en cas de force majeure, une résiliation à l'initiative de l'Abonné ;

qu'il échet d'ailleurs de donner acte à la S. ce qu'elle entend clairement préciser, à l'avenir, que la résiliation pourra intervenir de part et d’autre ;

 

* Article 17-2 du contrat G. F.2 :

« Sont notamment considérés comme cas de force majeure : - Un dysfonctionnement partiel ou total résultant de perturbations ou d'interruption dans la fourniture ou l'exploitation des moyens de télécommunication fournis par le ou les exploitants du réseau, ou des serveurs exploités par les Opérateurs tiers auxquels sont connectés les réseaux servant de support au service. »

Attendu qu'il est constant que la S. est une société de commercialisation qui propose des abonnements permettant l'accès aux réseaux hertziens des opérateurs FRANCE TELECOM d'une part, SFR d'autre part ;

Qu'elle considère dans ces conditions que ces derniers lui étant bien extérieurs, le cas de force majeure ci-dessus envisagé n'est pas abusif ;

Mais attendu que les dysfonctionnements auxquels il est fait référence ne revêtent pas toutes [N.B. conforme à la minute] les caractéristiques de la force majeure puisqu'ils n'apparaissent ni imprévisibles, ni irrésistibles au moment de la conclusion du contrat ;

[minute page 7] Qu'il appartient au contraire au professionnel de la commercialisation qu'est la S. de prendre les mesures requises pour éviter la réalisation de l'événement, y pallier ou réaliser son obligation par substitution ;

Attendu que reconnaître le caractère de force majeure à tout dysfonctionnement dans la fourniture ou l'exploitation des moyens de communication fournis par des tiers constituerait un déséquilibre au détriment du consommateur en permettant au professionnel de se soustraire à son obligation d'exécution alors que son cocontractant, dépourvu de tout lien contractuel avec l'opérateur et/ou l'exploitant du réseau, ne peut poursuivre contre ce dernier l'exécution complète de la prestation promise ;

Que cet article doit par conséquent être supprimé ;

 

* Article 10.4 des deux contrats ; perte ou vol de la carte SIM :

« L'Abonné est responsable de l'usage de sa carte SIM et du paiement des communications passées avant la suspension de sa ligne. Le contrat d'abonnement reste en vigueur et les redevances facturées. Une nouvelle carte SIM lui sera remise dans les meilleurs délais. »

Attendu que la demanderesse estime cette disposition abusive puisqu'elle laisse au client la charge de ses redevances d'abonnement alors même que le service est suspendu du fait d'un événement qui constitue pour lui un cas de force majeure, en l'occurrence la perte ou le vol de sa Carte SIM ;

Mais attendu que la suspension de la ligne se justifie dans l'intérêt même de l'abonné tandis que le paiement de la redevance pendant cette période a pour contrepartie le maintient du contrat et l'obtention d'une nouvelle carte SIM ;

Qu'en l'absence de preuve d'un déséquilibre entre les obligations de chacune des parties, il n'y a pas lieu d'ordonner la suppression demandée ;

 

* Article 14.2 des deux contrats :

« Les factures émises sont payables dans les quatorze jours de la date d'émission. Passé ce délai, les frais de relance, de mise en demeure, le recouvrement et plus généralement les frais divers de toute nature liés à la récupération des sommes dues à la S. seront facturés à l'Abonné ».

Attendu qu'il convient d'ordonner la suppression de cette clause, la défenderesse ayant admis qu’elle était contraire à l'article 32 alinéa 3 de la loi du 9 juillet 1991 qui prévoit que, sauf s'ils concernent un acte dont l'accomplissement est prescrit par la loi, les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, toute stipulation contraire étant réputée non écrite ;

Qu'il est manifeste que le non respect de cette disposition a nécessairement pour effet en l'espèce d'aggraver de façon abusive les [minute page 8] obligations pesant sur le consommateur ;

 

* Article 14.5 des deux contrats :

« Les sommes dues à S. par l'Abonné demeurées impayées à  leur échéance porteront Intérêts de plein droit et sans mise en demeure préalable au taux de base bancaire (taux Banque de France) majoré de trois points à compter de la date limite de paiement indiquée sur la facture. »

Attendu que la demanderesse soutient que cette clause est abusive en application du point e) de l'annexe au Code à la Consommation car elle imposerait au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant disproportionnellement élevé ;

Que bien que la preuve du caractère manifestement excessif des intérêts stipulés ne soit pas rapportée, il convient de donner acte à la S. de ce qu'elle s'engage à modifier pour l'avenir cette disposition contractuelle comme suit : « les sommes dues à la SCS par l'Abonné demeurées impayées à leur échéance seront majorées de plein droit et après mise en demeure préalable, d'un intérêt égal à une fois et demie le taux de l'Intérêt légat à compter de la date limite de paiement indiquée sur la facture, étant précisé que tout mois commencé est entièrement dû » ;

 

* Article 10.3 des deux contrats :

« S. ne saurait être tenu responsable des conséquences d'une déclaration inexacte ou n'émanant pas de l'abonné. »

Attendu que l'argumentation de la demanderesse selon laquelle cette clause est abusive dès lors qu'une obligation minimale devrait être mise à la charge de la S. quant à la vérification de l'identité de la personne faisant opposition ne saurait être retenue en l'espèce, que cette disposition ne répond pas à la définition de la clause abusive donnée par l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ;

Que l’UFC Que Choisir sera déboutée do sa demande à ce titre :

 

* Article 11.1 du contrat G. F. :

« S. ne peut être responsable des interruptions, suspensions ou perturbations du service causées notamment par des travaux d'entretien, de renforcement, de réaménagement ou d'extension des installations du réseau de l'Opérateur. »

Attendu que pour les mêmes raisons que précédemment développées dans le cadre de l'article 17.2 du contrat G. F., cette clause aboutit à une exonération de responsabilité du professionnel qui n'assure pas son obligation de fourniture de service alors qu'il lui appartient d'appeler en garantie les tiers qu'il estimerait responsables de l'inexécution, le consommateur n'ayant pour sa part aucune possibilité de poursuivre contre l'opérateur l'exécution d'obligations contractuelles ; qu'elle présente un caractère manifestement abusif justifiant que sa suppression [minute page 9] soit ordonnée ;

 

* Article 15.5 du contrat G. F. :

« L'Abonné déclare avoir été informé et accepte que le service puisse, malgré l'obligation de l'Opérateur, visée au point 6.1., être perturbé dans les cas suivants : en cas de défaillance momentanée du système dégradant la qualité du service, notamment en cas de travaux d'entretien, renforcement, extension des installations du réseau de radiotéléphonie publique G. F. »

Attendu que la demanderesse expose que cette clause crée un déséquilibre significatif en défaveur du professionnel qui bénéficie de la plus large exonération de responsabilité grâce à l'emploi du terme « notamment » ;

Attendu que pour les mêmes motifs que ceux développés à propos des articles 17.2 et 11.1., cette clause doit être en effet déclarée abusive, le fait que la S. n'ait aucun pouvoir d'intervention technique sur le réseau dont elle assure une partie de la commercialisation ne pouvant être valablement opposé au consommateur ;

 

* Article  20 du contrat G. F. ; Garantie de continuité du service :

« A cet effet, l'Abonné sera invité à souscrire un nouveau contrat d'abonnement proposé par l'Opérateur, ou le cessionnaire du contrat S. (ci-après désigné « Cessionnaire ») aux conditions générales et tarifs du Cessionnaire, l'abonné étant réputé avoir accepté « ce nouveau contrat s'il ne l'a pas refusé par écrit au Cessionnaire dans un délai maximal de vingt et un jour à compter de sa date d'envoi. » ;

Attendu que l'UFC Que choisir critique cette disposition en ce qu'elle présume l'accord du consommateur pour de nouvelles conditions contractuelles alors qu'il serait nécessaire qu'il donne son consentement exprès à son nouveau cocontractant pour que le contrat soit formé ;

Mais attendu que la preuve d'un déséquilibre significatif n'en est pas pour autant rapportée dès lors que le client a la faculté de refuser dans un délai raisonnable le nouveau contrat qui lui est proposé tout en bénéficiant de la continuité du service fourni pendant sa période de réflexion ;

Que la disposition critiquée permet au consommateur de continuer à bénéficier du service sans interruption en cas de changement d'opérateur, la S. qui ignore s'il y aura cession, à quelles conditions et quel tarif, prenant l'engagement de « s'efforcer de maintenir les conditions tarifaires antérieures pendant les vingt et un jours qui séparent la résiliation de l'ancien contrat de l'acceptation tacite du nouveau, si les conditions anciennes sont plus avantageuses pour le consommateur » ;

Que la demande de ce chef sera par conséquent rejetée ;

[minute page 10]

* Articles 18.1. 18.2. et 18.3 du contrat G. F. : articles 17.1. 17.2 et 17.3 du contrat G.F. :

« 18.1 Le contrat d'abonnement peut être résilié par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec accusé de réception. La résiliation prend effet à réception de celle-ci par son destinataire.

18.2 L'Abonné peut dénoncer son contrat d'abonnement à tout moment après la période initiale mentionnée à l'article 7.1 ci-dessus. S'il résilie le contrat d'abonnement au cours de cette période initiale, les redevances restant à courir jusqu'à la fin de la période initiale deviennent alors immédiatement exigibles.

18.3 Le contrat d'abonnement peut être résilié par S., sans que l'Abonné puisse prétendre à une quelconque indemnisation dans les cas suivants :

- fausse déclaration de l'abonné concernant le contrat d'abonnement,

- manquement de l'Abonné à l'une de ses obligations au titre du présent Contrat d'abonnement,

- force majeure visée à l'article 17 ci-dessus. »

Attendu que la demanderesse estime ces clauses abusives au regard du point f) de l'annexe au Code de la Consommation ;

Attendu qu'aux termes de cette disposition sont abusives les clauses qui ont pour effet « d'autoriser le professionnel à résilier le contrat de façon discrétionnaire si la même faculté n'est pas reconnue au consommateur, ainsi que de permettre au professionnel de retenir les sommes versées à titre de prestations non encore réalisées par lui, lorsque c'est le professionnel lui-même qui résilie le contrat » ;

Mais attendu qu'une faculté générale de résiliation, qui n'a pas à être motivée, est accordée aussi bien au consommateur qu'a la S. et selon les mêmes modalités ;

Que la résiliation par le professionnel, sans que le client puisse prétendre à une indemnisation quelconque, n'est pas discrétionnaire et est limitée aux cas spécifiquement énoncés à l'article 18.3 (fausse déclaration - manquement de l'Abonné à l'une de ses obligations - force majeure), ce qui n'est pas de nature à créer un déséquilibre entre les parties, d'autant que la suppression de certains cas de force majeure, jugés abusifs par l'UFC a été ordonnée ;

Attendu que la demanderesse, qui n'a pas fondé sa contestation sur la deuxième partie du point f), demande toutefois que le Tribunal prenne acte de la décision de la S. de modifier pour l'avenir la rédaction des points 18.1 et 18.2 en permettant notamment à l'Abonné de résilier son Contrat en cas de manquement par S. à l'une de ses obligations sans pour autant qu'il soit redevable dans cette hypothèse des redevances d'abonnement entre la date de résiliation et le terme du contrat ;

[minute page 11] Attendu que l’UFC Que Choisir estime en définitive (conclusions du 4 mars 1998 page 4) que le caractère abusif de la clause ne réside plus que dans l'absence de prévision d'une mise en demeure et d'un délai pour mise à exécution après celle-ci ; que sa contestation concerne donc exclusivement le point 18.3 ;

Mais attendu que l'envoi d'une mise en demeure est prévu en cas de non paiement par l'abonné des sommes dues à la S., les autres causes de résiliation, et notamment l'hypothèse d'une fausse déclaration de l'Abonné, qui suppose un élément intentionnel n'apparaissant pas susceptibles de régularisation ; que l'absence de précision du délai dont dispose le client pour s'acquitter de ses arriérés ne peut suffire à justifier l'application de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ;

Qu'il y a lieu en conséquence de donner acte à la défenderesse de la nouvelle rédaction des articles 18.1, 18.2, 17.1, 17.2 et de rejeter la demande en ce qui concerne les articles 18.3 et 17.3 ;

 

* Article 16-3 du contrat G. F.2 (Obligations et responsabilités de l’Opérateur) :

« La responsabilité de l'Opérateur ne saurait toutefois être engagée :

- en ces de perturbations ou d'interruptions dans la fourniture ou l'exploitation des moyens de télécommunications fournis par le (ou les) exploitant(s) des réseaux auxquels sont raccordés les Installations de l'Opérateur. » (assignation introductive d'instance) ;

- en cas d'utilisation du Service consécutive à une [...] désactivation de la cette SIM […] ;

- en cas de suspension de l'accès au Service résultant de la mise en œuvre des dispositions de l'article 15-5 ci-dessus ;

- au titre des Informations et documents communiqués à l'abonné, et de l'interprétation que ce dernier peut en faire, dès lors que ces informations et documents n'ont qu'une valeur indicative et ne présentent pas de valeur contractuelle ;

- en cas de perturbations, quelle qu'en soit la cause, et/ou d'indisponibilité totale ou partielle, et/ou d'interruption de tout ou partie des services proposés sur les réseaux de radiotéléphonie publique numérique GMS fournis et exploités par des opérateurs tiers, et plus généralement en cas de survenance de tout problème, quelle qu'en soit la nature ou l'importance, dont l'abonné pourrait être victime à l'occasion de l'utilisation desdits réseaux » (autres dispositions visées dans les conclusions en demande signifiées le 4 mars 1998) ;

Attendu que l'UFC Que Choisir apparaît fondée à soutenir que cet article est abusif tout d'abord en ce qu'il institue une exonération de responsabilité pour des obligations qui incombent non pas à l'Opérateur mais à la S. (désactivation de la carte SIM, documents et informations fournis à l'Abonné) ;

[minute page 12] Attendu également que, tout comme pour les articles 17.2, 11.1 et [15.?] du contrat G. F. il crée également un déséquilibre évident et injustifié au détriment du consommateur en le privant de tout recours contre son cocontractant professionnel en cas d'interruption ou de dysfonctionnement du service auquel il a souscrit ;

Que cet article tombe sous le coup du point b) de l'annexe au Code de la Consommation relatif aux clauses qui ont pour objet ou effet « d'exclure ou de limiter de façon inappropriée les droits légaux du consommateur vis-à-vis du professionnel ou d'une autre partie en cas de non-exécution totale ou partielle ou d'exécution défectueuse par le professionnel d'une quelconque des obligations contractuelles », d'autant que par sa généralité finale, l'exonération peut porter sur l'intégralité de la prestation objet du contrat ;

Que sa suppression doit donc être ordonnée ;

 

* Article 21 du contrat G. F. ;

« Tout différend né à l'occasion de l'Interprétation, la conclusion, l'exécution ou la terminaison du présent Contrat d'abonnement relèvera de la compétence exclusive du Tribunal de Commerce de Paris. »

Attendu que la demanderesse ayant fait valoir que cette clause était à la fois abusive et illicite, la S. s’engage, dans ses dernières écritures, à la mettre en conformité avec les dispositions de l'article 48 du Nouveau Code de Procédure Civile en adoptant la rédaction suivante : « conformément aux dispositions de l'article 48 du NCPC, dès lors que le Contrat est souscrit par un Abonné ayant contracté en qualité de commerçant, tout différend né à l'occasion de l'interprétation, la conclusion, l'exécution ou la terminaison dudit Contrat relève de la compétence exclusive du Tribunal de Commerce de Paris » ;

 

* Article 5.2 des conditions générales […] :

« La carte de couverture du réseau […] n'a qu'une valeur indicative sur la précision des limites représentées » ;

Attendu que la S. conteste tout caractère abusif à celte clause en reprochant à son adversaire d'avoir un discours purement théorique ;

Qu'elle considère que le consommateur n'est aucunement induit en erreur par cette disposition puisqu'au vu de la carte qui lui est remise, il est à même de savoir s'il se trouve en limite de zone, et donc dans une zone litigieuse ;

Mais attendu qu'en remettant cette carte au client au moment de la souscription de l'engagement, la S. entend définir l'étendue du service qu'elle s'engage à assurer ;

Qu'en laissant le consommateur dans l'incertitude quant à la fiabilité du service en limite de zoner et en se prémunissant d'emblée contre toute réclamation de sa part en cas de non fonctionnement du système, alors qu'elle est seule en mesure de connaître l'étendue exacte du réseau, elle crée un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 132-1 du [minute page 13] Code de la Consommation ;

Qu'il convient en conséquence d'ordonner la suppression de cette clause ;

 

II -  SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTÉRÊTS :

Attendu que l’UFC Que Choisir est investie, en vertu de la loi, de la mission de défendre les intérêts collectifs des consommateurs ;

Attendu que le caractère abusif de clauses incluses dans un contrat proposé eux consommateurs est constitutif d’un préjudice collectif dont cette association est recevable à demander réparation ;

Qu'eu égard aux éléments de l'espèce le tribunal estime qu'il sera justement réparé par l’allocation d'une somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

 

III - SUR LA DEMANDE DE PUBLICATION :

Attendu que cette demande n'apparait pas justifiée et doit être écartée :

 

IV - SUR L’EXÉCUTION PROVISOIRE ET L’ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE :

Attendu que l'exécution provisoire est justifiée par la nature de l'affaire ;

Attendu qu'il convient d'allouer à l’association demanderesse une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau code de Procédure Civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

Donne acte à la SA. S. de son engagement de modifier les articles 14.5 des deux contrats, 18.1 et 18.2 du contrat G. F. 17,1 et 17. ? du contrat G.F., 21 du contrat G. F. ;

Ordonne la suppression :

- dans les deux contrats, des articles : 8.1 et 8.2 ; 12.6 ; 12.9 ; 13.2 ; 14.2 ; 15.1. 15.4 ;

- dans le contrat G. F. des articles 11.1 ; 15.5 ; 16.3 ;17.2 ;

- dans les conditions générales […] contrat G. F. de l'article 5.2 :

et ce dans le délai d’un mois à compter de la signification du présent [minute page 14] jugement, sous astreinte de MILLE francs (1.000) par jour de retard ;

Condamne la société S. à payer à l’UFC Que Choisir la somme de cinquante mille francs (50.000) à titre de dommages-intérêts ;

Rejette les autres demandes ;

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;

Condamne la SA S. à payer à l’UFC Que Choisir la somme de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne la société S. aux dépens et admet Maître Hermance CONSTANT, avocat, au bénéfice de l'article 629 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Fait et jugé à PARIS, le 16 mars 1999.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT

M. MOREAU                       C. TAILLANDIER

 

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