CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 8 juillet 2009

Nature : Décision
Titre : TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 8 juillet 2009
Pays : France
Juridiction : TGI Grenoble. 4e ch.
Demande : 05/02253
Décision : 09/164
Date : 8/07/2009
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 13/05/2005
Décision antérieure : CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 22 novembre 2010
Numéro de la décision : 164
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 4166

TGI GRENOBLE (4e ch. civ.), 8 juillet 2009 : RG n° 05/02253 ; jugement n° 164

(sur appel CA Grenoble (1re ch. civ.), 22 novembre 2010 : RG n° 09/02931)

 

Extraits : 1/ « Que d'une deuxième part, la recevabilité de l'action en suppression des clauses abusives ou illicites, qui présente pour partie un caractère préventif, n'est pas subordonnée à ce que les contrats critiqués soient effectivement utilisés par le professionnel dans ses rapports avec les consommateurs mais uniquement à la preuve que les contrats litigieux leur soient proposés (CJCE 24 janvier 2002, aff C372-99), ce qui est parfaitement établi en l'espèce en ce que la banque admet proposer actuellement aux clients la convention de compte dans sa version d'octobre 2007 ».

 2/ « Qu'en l'espèce, l'acte introductif d'instance est en date 13 mai 2005 ; Que le défendeur se prévaut d'une convention de compte entrée en vigueur en février 2003, puis d'une nouvelle version mise à jour en décembre 2005 et entrée en vigueur le 1er février 2006, puis d'une troisième version en décembre 2006 et enfin d'un quatrième modèle-type applicable à partir de la mi-octobre 2007 ; Que le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes affirme que seule la dernière version est actuellement en vigueur ;

Que pour autant, le défendeur n'établit pas que l'ensemble des clients ayant ouvert des comptes sous l'empire des modèles types précédents ont été informés des nouvelles conditions générales de la convention de compte et les ont acceptés de sorte que le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes est toujours susceptible de pouvoir recourir aux modèles antérieurs des conventions de compte à sa dernière version d'octobre 2007 ; Que l'UFC 38 sera en conséquence déclarée recevable à agir en suppression des clauses illicites ou abusives insérées dans le contrat type de convention de compte proposé par le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes dans ses versions de février 2003, décembre 2005, décembre 2006 et octobre 2007 ».

3/ « Sur les clauses abusives, V. les motifs du jugement ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE GRENOBLE

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 8 JUILLET 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/02253. Jugement n° 164.

 

ENTRE :

DEMANDERESSE :

UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR

dont le siège social est [adresse] représentée par SCP BRASSEUR & M'BAREK, avocats au barreau de GRENOBLE et plaidant par Maître BRASSEUR, D'UNE PART

 

ET :

DÉFENDERESSE :

CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD RHÔNE ALPES

dont le siège social est sis [adresse] représentée par SCP CDMF - AVOCATS, avocats au barreau de GRENOBLE et plaidant par Maître DREYFUS, D'AUTRE PART

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : lors des débats et du délibéré :

Présidente : Guilaine GRASSET, Vice-Présidente

[minute page 2] Assesseurs : Marie-Pascale BLANCHARD, Vice-Présidente, Frédéric BLANC, Juge, Assistés lors des débats par Anne-Marie CHAMBRON, Greffier

LE TRIBUNAL : À l'audience publique du 16 février 2009, après avoir entendu Marie-Pascale BLANCHARD en son rapport et les avocats en leur plaidoirie, l'affaire a été mise en délibéré, le prononcé de la décision renvoyé au 27 avril 2009, puis prorogé au 8 juillet 2009 date à laquelle il a été statué en ces termes :

 

EXPOSÉ DU LITIGE            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PRÉTENTIONS ET PROCÉDURE :

Par exploit d'huissier en date du 13 mai 2005, l'Union Fédérale des Consommateurs de l'Isère (UFC 38) a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes et entend (se) voir dans ses dernières écritures déposées au greffe le 13 mai 2008 :

- dire recevables et bien fondées ses demandes au regard des articles L. 421-1 et suivants, R. 411-2 et L. 132-1 du code de la consommation et en conséquence,

- dire illicites ou abusives les clauses suivantes des contrats litigieux :

1) celle qui prévoit que la convention s'applique à tout compte même antérieur (§2 du préambule version 2003)

2) celle qui substitue la convention à celle antérieure relative à un compte déjà ouvert (§4 du préambule versions 2003 et 2007)

3) celle qui impose au client d'informer la banque sur l'évolution de son patrimoine (art. I.2 §1° version 2003)

4) celle qui prévoit que le compte de dépôt fonctionne comme un compte courant (article II.1 §1 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

5) celle qui permet à la banque de refuser sans motif la remise d'un chéquier (article II.2.1 §1° versions 2003 et 2007)

6) celle qui autorise la banque à adresser un chéquier par envoi postal simple, selon frais indéterminés (art. II.2.1 §2 version 2003)

7) celle qui autorise le refus de chéquier pour « anomalies de fonctionnement » sans précision (art. II.2.1 §3 version 2003)

8) celle qui permet à la banque de refuser une carte bancaire sans motif (art. II.2.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

9) celle qui permet à la banque d'exiger la restitution d'une carte pour « dysfonctionnement » (art. II.2.2 in fine versions 2003, 2005 et 2006)

10) celle qui dispense la banque de fournir de détail des opérations en cas d'ordre groupé de virement (art. II.2.3 in fine version 2003)

11) celle qui rend non probants les bordereaux de dépôt d'espèces à un guichet automatique (art. II.3.1 version 2003)

[minute page 3]

12) celle qui permet le crédit différé d'un chèque, quel qu'il soit, et sans avertissement (art. II.3.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

13) celle qui limite à un mois le délai de contestation d'un relevé de compte (art. II. 4.2.1 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

14) celle qui prévoit des dates de valeur (art. II.4.2 §4, 5 et 6 et art. III.2.1 versions 2003 et 2007)

15) celle qui prévoit que le relevé cette preuve (art. II.4.2 in fine version 2003)

16) celle qui valide l'acceptation des rejets tardifs (art. II.4.2 in fine version 2003)

17) celle qui prive d'effet une opposition téléphonique confirmée par écrit, à bref délai (art. II 4.4 §3 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

18) celle qui impute au client toute opposition tardive (art. II.4.4 in fine version 2003)

19) celle qui renvoie à un extrait de barème tarifaire, quant aux coûts (art. III.1 §1° versions 2003 et 2007)

20) celle qui prévoit la solidarité pour les comptes indivis (art. IV.l Versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

21) celle qui impose à tous les co-titulaires d'un compte joint la restitution des moyens de paiement en cas de retrait d'un seul d'entre eux (art. IV.2 versions 2003)

22) celle qui autorise la banque à clôturer le compte sans motif (art. V.1.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

23) celle qui autorise la banque à clôturer le compte pour anomalies graves sans autres précisions (art. V.1.2 version 2003)

24) celle qui rend connexes toutes les conventions entre les parties (art. VI versions 2003 et 2007)

25) celle qui autorise les modifications unilatérales de la Convention par la banque (art. IX versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

26) celle qui autorise la communication des informations nominatives à des tiers (art. XII versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

27) celle qui impose la compétence des tribunaux du siège social de la banque (art. XIII version 2003)

28) celle qui prévoit la possibilité pour la banque de retirer à tout moment les formules de chèques délivrées (art. II.2-1 a1.5 versions 2005 et 2006)

29) celles prévoyant le paiement d'une commission pour compte inactif (art. III.4-7 versions 2005 et 2006)

- ordonner en conséquence au CRÉDIT AGRICOLE de supprimer de son contrat les clauses ci-dessus, dans le délai d'un mois de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte définitive d'un montant de 1.000 euros par jour de retard à l'expiration du délai imparti

- interdire l'usage de telles clauses à l'avenir sous la même astreinte

- condamner la défenderesse à verser à l'UFC 38 à titre de dommages et intérêts

* 58.000 euros pour le préjudice collectif

* 5.000 euros pour le préjudice associatif

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir

- autoriser l'UFC 38 à publier le jugement par extrait - mentionnant la liste des clauses écartées - au regard de l'article L. 421-9 du code de la consommation dans les journaux : le Dauphiné Libéré, Affiches de [minute page 4] Grenoble, Paru-vendu, et à ses frais à concurrence de 3.000 euros par insertion, ainsi que pendant 2 mois à compter de la signification du jugement, en-tête de la page d'accueil du site internet de la défenderesse

- condamner encore la défenderesse à lui verser une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la même aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de son avocat

 

En réponse, dans ses dernières écritures déposées au greffe le 11 décembre 2007, le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes entend voir au visa des articles 1134 et suivants du Code civil, 1315, 1382 du même code, 9 et 31 du code de procédure civile, du code monétaire et financier et plus particulièrement des dispositions de l'article L. 313-12 du même code :

- constater que la convention de compte déférée par l'assignation n'est plus en vigueur

- débouter l'UFC 38 de l'intégralité de ses prétendons relatives aux prétendu caractère abusif des clauses stipulées dans celle-ci et pour celles qui ont été maintenues dans les conventions diffusées en février 2006 et en 2007

- débouter purement et simplement l'UFC 38 de l'ensemble de ses demandes pécuniaires

- condamner la même à lui verser une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de son avocat.

 

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 novembre 2008.

 

MOTIFS (justification de la décision)    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES MOTIFS :

 

- Sur la recevabilité de l'action de l'UFC 38 :

Attendu que par application de l'article L. 421-6 du code de la consommation, l'association UFC 38 justifie d'une première part d'un agrément en cours de validité ;

Que d'une deuxième part, la recevabilité de l'action en suppression des clauses abusives ou illicites, qui présente pour partie un caractère préventif, n'est pas subordonnée à ce que les contrats critiqués soient effectivement utilisés par le professionnel dans ses rapports avec les consommateurs mais uniquement à la preuve que les contrats litigieux leur soient proposés (CJCE 24 janvier 2002, aff C372-99), ce qui est parfaitement établi en l'espèce en ce que la banque admet proposer actuellement aux clients la convention de compte dans sa version d'octobre 2007 ;

[minute page 5] Que d'une troisième part, il résulte de l'interprétation conforme de l'article L. 421-6 du code de la consommation à la directive 93/13/CE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, et plus particulièrement son article 7, ainsi qu'à la directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 que les associations mentionnées à l'article L. 421-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au journal officiel des Communautés européennes en application de l'article 4 de la directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil relative aux actions en cessation en matière de protection des consommateurs peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive précitée ; ce qui implique à la fois que ces associations sont recevables à agir à la fois en suppression des clauses illicites ou abusives des contrats toujours proposés au consommateur au jour de l'introduction de l'instance en justice mais encore à l'encontre des contrats en cours, qui sans être encore proposés aux consommateurs au jour de l'acte introductif d'instance, sont destinés à être utilisés par le professionnel dans ses rapports avec le consommateur et constituent dès lors un agissement illicite au sens de l'article 1er de la directive 98/27/01 ;

Que l'article 7 de la directive 93/13/CE dispose en effet que :

1 Les Etats membres veillent à ce que, dans l'intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l'utilisation de clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel ;

2 les moyens visés au paragraphe 1 comprennent des dispositions permettant à des personnes ou des organisations ayant, selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger le consommateur de saisir selon le droit national, les tribunaux ou les organes administratifs compétents afin qu'ils déterminent si des clauses contractuelles, rédigées en vue d'une utilisation généralisée, ont un caractère abusif et appliquent des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l'utilisation de telles clauses ;

Que l'article 2 de la directive 98/27/CE dispose que :

1 Les Etats membres désignent les tribunaux ou autorités administratives compétents pour statuer sur les recours formés par les entités qualifiées au sens de l'article 3 visant :

- a) à faire cesser ou interdire toute infraction au sens de l'article 1 de la même directive, soit notamment la méconnaissance de la directive 93/13/CE, avec toute la diligence requise et le cas échéant dans le cadre d'une procédure d'urgence ;

- b) le cas échéant, à obtenir la prise de mesures telles que la publication de la décision, en tout ou partie, sous une forme réputée convenir et/ou la publication d'une déclaration rectificative en vue d'éliminer les effets persistants de l'infraction ;

- c) dans la mesure où le système juridique de l'Etat membre concerné le permet à faire condamner le défendeur qui succombe à verser au Trésor Public ou à tout bénéficiaire désigné ou prévu par la législation nationale, en cas de non-exécution de la décision au terme du délai fixé par les tribunaux ou les autorités administratives, une somme déterminée par jour de retard ou toute autre somme prévue par la législation nationale aux fins de garantir l'exécution des [minute page 6] décisions ;

Qu'il résulte clairement de ces dispositions que leur finalité est à la fois de permettre d'éviter l'application de clauses abusives ou illicites dans les rapports entre professionnels et consommateurs mais aussi et surtout de faire cesser cette utilisation, qualifiée d'agissement illicite au sens de l'article 1er de la directive 98/27/CE, de sorte que les associations agréées de consommateurs doivent non seulement pouvoir intenter devant la juridiction civile une action préventive en vue d'empêcher l'insertion de stipulations illicites ou abusives par les professionnels dans les contrats conclus avec les consommateurs mais aussi une action en suppression des clauses abusives ou illicites contenues dans les contrats toujours en cours, quoique n'étant plus proposés aux consommateurs ;

Que cette interprétation de la législation européenne est conforme à celle de la Cour de Justice des Communautés européenne, qui dans une affaire Commission/Italie du 24 janvier 2002 aff C-372/99 a sanctionné l'Italie dans le cadre d'une procédure en manquement d'Etat, en ce que sa législation nationale ne prévoyait pas la possibilité d'une action préventive des organismes habilités en suppression des clauses abusives dans les contrats proposés aux consommateurs, peu important qu'ils aient été effectivement signés, mais uniquement dans les contrats effectivement conclus de sorte que l'objectif d'efficacité visé par la directive implique non seulement l'existence d'une action au profit des organismes agréés en vue de la suppression des clauses dans les contrats seulement proposés aux consommateurs (ce que ne prévoyait pas la législation italienne) et a fortiori, dans les contrats d'ores et déjà conclus (ce que prévoyait la législation italienne mais a été jugé insuffisant par la Cour) ;

Que la voie de l'intervention des associations de consommateurs à une action introduite par un ou plusieurs consommateurs en suppression des clauses illicites ou abusives énoncée à l'article L. 421-7 du Code de la Consommation n'est pas de nature à garantir l'efficacité recherchée par la législation européenne en vue tant de prévenir l'emploi que de mettre fin à l'utilisation de telles clauses dans les rapports entre le professionnel et le consommateur en ce qu'elle est subordonnée à l'action en justice éventuelle d'un ou plusieurs consommateurs portée à la connaissance de l'association de consommateurs de sorte que le professionnel, qui, avant toute action préventive d'une association agréée, a pu proposer de manière généralisée aux consommateurs un contrat comportant des clauses abusives ou illicites, sera en mesure d'imposer aux consommateurs l'application des dites stipulations en l'absence d'action en justice et ce, au détriment non seulement de la communauté des consommateurs mais encore de ses concurrents à l'égard desquels il s'est octroyé un avantage indu par le recours à des clauses lui étant exagérément favorables ;

Qu'en l'espèce, l'acte introductif d'instance est en date 13 mai 2005 ; Que le défendeur se prévaut d'une convention de compte entrée en vigueur en février 2003, puis d'une nouvelle version mise à jour en décembre 2005 et entrée en vigueur le 1er février 2006, puis d'une troisième version en décembre 2006 et enfin d'un quatrième modèle-type applicable à partir de la mi-octobre 2007 ;

Que le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes affirme que seule la dernière version est actuellement en vigueur ;

[minute page 7] Que pour autant, le défendeur n'établit pas que l'ensemble des clients ayant ouvert des comptes sous l'empire des modèles types précédents ont été informés des nouvelles conditions générales de la convention de compte et les ont acceptés de sorte que le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes est toujours susceptible de pouvoir recourir aux modèles antérieurs des conventions de compte à sa dernière version d'octobre 2007 ;

Que l'UFC 38 sera en conséquence déclarée recevable à agir en suppression des clauses illicites ou abusives insérées dans le contrat type de convention de compte proposé par le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes dans ses versions de février 2003, décembre 2005, décembre 2006 et octobre 2007 ;

 

- Sur le caractère abusif ou illicite des clauses litigieuses :

1) Celle qui prévoit que la convention s’applique à tout compte même antérieur (42 du préambule version 2003)

Attendu que la clause litigieuse apparaît illicite au regard de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier d'ordre public en vertu de l'article L. 312-1-4 du même code en ce que d'une part, elle n'effectue pas de distinction entre les comptes ouverts avant le 28 février 2003 et ceux ouverts après et que ce texte ne permet à la banque que de proposer une modification des conditions tarifaires s'appliquant en l'absence d'opposition par le client dans les deux mois et non de l'ensemble des conditions générales de la convention ; Qu'à tout le moins, d'après l'arrêté du 8 mars 2005, les conditions de renouvellement, d'opposabilité et d'évolution doivent être prévues dans la convention de compte de sorte que la banque, qui s'est certes vue reconnaître une initiative pour proposer une modification tarifaire, ne peut pour autant imposer unilatéralement une modification des conditions générales de « tout compte de même nature ouvert par le titulaire » ;

Que le fait que la convention de compte soit un contrat à exécution successive n'autorise en effet pas la banque à substituer unilatéralement l'ensemble des nouvelles conditions générales à celles prévues dans l'ancienne convention, à l'exception des modifications du tarif dans les conditions sus-énoncées et d'éventuelles modifications réglementaires ou législatives impératives, qui s'imposent aux deux parties ;

Que la stipulation doit être déclarée illicite ;

 

2) Celle qui substitue la convention à celle antérieure relative à un compte déjà ouvert (§ 4 du préambule versions 2003 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse apparaît illicite au regard de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier en ce que s'agissant des comptes ouverts avant le 28 février 2003, ce texte prévoit qu'à la demande du client, la banque doit lui proposer un projet de convention de compte ;

[minute page 8] Que la stipulation litigieuse aboutit en définitive à maintenir de manière concurrente voire contradictoire les rapports contractuels antérieurs, non écrits et à tout le moins non énoncés dans la convention avec ceux nés de la convention acceptée par le client ;

Qu'aux termes des dispositions susvisées, il appartient à la banque sollicitée pour la signature d'une convention écrite d'un compte ouvert antérieurement au 28 février 2003 de proposer un projet unique reprenant l'ensemble des obligations contractuelles des parties afférentes au compte dans le respect de la législation en vigueur ;

Que la clause litigieuse doit être jugée illicite ;

 

3) Celle qui impose au client d'informer la banque sur l'évolution de son patrimoine (art. I.2. § 1° version 2003)

Attendu que la clause litigieuse, qui visait les informations patrimoniales est illicite en ce que l'article 2.9 de l'arrêté du 8 mars 2005 limite les obligations d'information à la charge du client au signalement sans délai de tout changement intervenu dans les informations qu'il a fournies lors de l'ouverture du compte de dépôt et ultérieurement ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée illicite ;

 

4) Celle qui prévoit que le compte de dépôt fonctionne comme un compte courant (article II.1 §1 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse apparaît illicite en ce que l'assimilation du compte de dépôt au compte courant, non conforme à la réalité du fonctionnement du premier, normalement mouvementé uniquement par des versements ou des retraits dans la limite du disponible, permet à la banque d'éluder les obligations posées par l'article L. 312-1 du code monétaire et financier, concernant les services liés à l'ouverture d'un compte de dépôt ;

Que la stipulation doit être jugée illicite ;

 

5) Celle qui permet à la banque de refuser sans motif la remise d'un chéquier (article II.2.1 §1° versions 2003 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse apparaît illicite dans la version 2003 de la convention de compte au regard de l'article L. 131-71 du code monétaire et financier en ce qu'il est prévu la possibilité pour la banque d'un refus sans obligation de motivation ;

Que la stipulation litigieuse n'est en revanche ni illicite ni abusive en ce que conforme aux dispositions susvisées dans la version 2007 dans la mesure où à l'article II.2.1 §4, il est indiqué que la banque a une obligation de motivation de la décision de suspendre ou de refuser la délivrance de formule de chèques ;

Qu'au vu de l'économie générale de la clause, l'utilisation de la formule, « le Crédit Agricole peut vous délivrer... » et non « délivre » [minute page 9] n'apparaît pas ambiguë dans la version 2007 en ce qu'il apparaît à la lecture que la banque a la possibilité sur demande de délivrer des formules de chèques et qu'en tout état de cause, tout refus devra être motivé conformément à l'article L. 131-71 du code monétaire et financier ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée illicite uniquement dans la version 2003 ;

 

6) Celle qui autorise la banque à adresser un chéquier par envoi postal simple, selon frais indéterminés (art. II.2.1 § 2 version 2003)

Attendu qu'au vu de l'article L. 131-71 du code monétaire et financier, la clause litigieuse, sans être manifestement illicite en ce qu'elle prévoit la possibilité d'un retrait du chéquier au guichet sans frais, est pour autant abusive en ce que la convention ne précise pas de manière suffisante les conditions dans lesquelles le chéquier est susceptible d'être envoyé au client par courrier selon un service payant (quid de l'information sur sa disposition à la banque, délai pour le retirer, envoi automatique...) (Cass. 8 janvier 2009, n°06-17630) ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée abusive ;

 

7) Celle qui autorise le refus de chéquier pour « anomalies de fonctionnement » sans précision (art. II.2.1 §3 version 2003)

Attendu que la clause litigieuse apparaît contraire à l'article L. 131-71 du code monétaire et financier dans la mesure où elle ne prévoit pas expressément la nécessité pour la banque de motiver le refus de la délivrance de formule de chèques ;

Qu'en effet, la clause permet à la banque de refuser un chéquier par référence à une « anomalie de fonctionnement » ; ce qui correspond à une motivation pré-déterminée, générale et imprécise exclusive de l'obligation faite à la banque de fournir concrètement au client les raisons de son refus ;

Que la clause litigieuse aboutit en réalité à un défaut de motivation puisqu'elle laisse à la banque la possibilité d'invoquer uniquement « une anomalie de fonctionnement » sans la détailler et la définir pour refuser un chéquier ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée illicite ;

 

8) Celle qui permet à la banque de refuser une carte bancaire sans motif (art. II.2.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles L. 312-1 du code monétaire et financier et du décret n° 2001-45 du 17 janvier 2001, désormais codifié à l'article D. 312-5 du même code que la banque est tenue, au titre du service de base, de délivrer une carte de paiement dont chaque utilisation est autorisée par l'établissement de crédit qui l'a émise ;

Que l'analyse de la clause litigieuse dans la version 2003 conduit à [minute page 10] considérer que l'emploi de l'expression « peut vous délivrer » laisse en réalité un pouvoir discrétionnaire à la banque ;

Que dans les versions 2005 et 2006 de la convention de compte, il est prévu que la banque délivre une carte de paiement sur demande après accord de la banque ;

Que nonobstant la modification de la formulation, la délivrance de la carte de paiement n'apparaît pas automatique puisque soumise à l'agrément de la banque ;

Que la version 2007 renvoie, s'agissant des conditions de délivrance au contrat au porteur de sorte que la convention de compte ne prévoit pas le droit pour le client d'obtenir une carte de paiement alors même que l'arrêté du 8 mars 2005 en son article 2 impose à la banque de prévoir dans sa convention de compte les modalités d'obtention des moyens de paiement ;

Que les clauses litigieuses apparaissent contraires aux dispositions sus-visées en ce qu'elles laissent en définitive un pouvoir discrétionnaire à la banque de délivrer une carte bancaire alors que le service bancaire de base comprend la délivrance d'une carte de paiement dont chaque utilisation est autorisée par l'établissement de crédit qui l'émet de sorte que cette délivrance doit être considérée comme le principe, à charge pour la banque de prévoir les exceptions dans le cadre strict des lois et règlements ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée illicite ;

 

9) Celle qui permet à la banque d'exiger la restitution d'une carte pour « dysfonctionnement » (art. II.2.2 in fine versions 2003, 2005 et 2006)

Attendu qu'au vu de l'article R. 132-2 du code de la consommation, la clause critiquée, en ce qu'elle octroie en définitive à la banque le pouvoir discrétionnaire de retirer la carte bancaire de son client sans motivation, y compris dans la version 2003 qui évoque un dysfonctionnement du compte, soit un motif pré-déterminé, imprécis et général, crée entre eux une situation de déséquilibre que rien ne justifie et doit être déclarée abusive ;

 

10) Celle qui dispense la banque de fournir le détail des opérations en cas d'ordre groupé de virement (art. II.2.3 in fine version 2003)

Attendu que la clause litigieuse apparaît contraire au décret n° 2001-45 du 17 janvier 2001 alors applicable et désormais codifié à l'article D. 312-5 du code monétaire et financier en ce que la banque est tenue de fournir mensuellement le relevé détaillé des opérations effectuées sur le compte de sorte qu'elle ne peut faire apparaître une écriture unique correspondant à plusieurs opérations dans le cadre d'un ordre de virement groupé ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée illicite ;

 

11) Celle qui rend non probants les bordereaux de dépôt d'espèces à un [minute page 11] guichet automatique (art. II.3.1 version 2003)

Attendu que cette stipulation apparaît d'une part ambiguë en ce qu'elle laisse croire au consommateur qu'il peut exister une divergence entre le montant des versements effectués et celui enregistré par la banque et d'autre part, aboutit à un renversement de la charge de la preuve au regard de l'article 1315 du code civil au détriment du consommateur, alors même qu'en mettant en place notamment des procédures de dépôts automatisés des espèces qui ne peut être supposée infaillible, il appartient à la banque de répondre de tous dysfonctionnements, sauf à prouver l'erreur ou la mauvaise foi du consommateur ;

Qu'en conséquence, une telle clause apparaît légalement abusive au regard des articles R. 132-1 et L. 132-1 §1b du code de la consommation en ce que non seulement elle inverse la charge de la preuve mais encore fixe entre les parties une règle de preuve intangible selon laquelle le montant enregistré par le préposé de la banque fait foi dans ses rapports avec le titulaire du compte, de sorte qu'in fine la banque voit, en toute hypothèse, sa responsabilité totalement exonérée en cas de défaillance dans sa procédure de dépôt des espèces ;

Qu'il convient de déclarer la clause abusive ;

 

12) Celle qui permet le crédit différé d'un chèque, quel qu’il soit, et sans avertissement (art. II.3.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu qu'au vu de l'article L. 131-82 du code monétaire et financier, la clause apparaît illicite en ce qu'elle ne distingue pas selon que le montant du chèque est supérieur ou inférieur à 15 euros ; Que dans cette dernière hypothèse, la banque est en effet obligée de payer nonobstant l'absence, l'insuffisance ou l'indisponibilité de la provision ;

Qu'en outre la version 2003 est au surplus abusive en ce qu'elle ne prévoit aucune information du consommateur sur le délai d'encaissement du chèque litigieux ;

Qu'il convient de déclarer les clauses litigieuses illicites ;

 

13) Celle qui limite à un mois le délai de contestation d'un relevé de compte (art. II.4.2.1 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse prévoyant des délais d'approbation implicites, certes variables en fonction des versions, stipule toutefois de manière systématique la possibilité pour le client consommateur de rapporter la preuve contraire passée le délai de sorte qu'il n'est ainsi pas privé de son droit de contestation ;

Que la clause n'apparaît ni illicite ni abusive ;

 

14) Celle qui prévoit des dates de valeur (art. II.4.2 §4, 5 et 6 et [minute page 12] art. III.2.1 versions 2003 et 2007)

Attendu que pour les opérations autres que la remise de chèques pour lesquelles il existe nécessairement un délai dans l'attente de leur encaissement, l'instauration de date de valeurs se révèle nécessairement sans cause et donc contraire à l'article 1131 du code civil ;

Qu'eu égard à la généralité de la stipulation litigieuse tant dans la version 2003 que 2007 du modèle-type qui ne limite pas la pratique des dates de valeur à la remise de chèques, il y a lieu de considérer cette clause comme illicite ;

 

15) Celle qui prévoit que le relevé fait preuve (art. II.4.2 in fine version 2003)

Attendu que la clause litigieuse apparaît non conforme à l'article R. 132-1 du code de la consommation en ce qu'elle a pour effet d'exonérer la banque de toute responsabilité et est au demeurant en contradiction avec le début du paragraphe qui permet la contestation des relevés de comptes, y compris passé le délai d'acceptation tacite ;

Que la clause doit être jugée abusive ;

 

16) Celle qui valide l'acceptation des rejets tardifs (art. II.4.2 in fine version 2003)

Attendu qu'au vu de l'article R. 132-1 du code de la consommation, la clause litigieuse est susceptible d'exonérer la banque de sa responsabilité à raison de fautes qu'elle a pu commettre, de sorte qu'elle doit être déclarée abusive ;

 

17) Celle qui prive d'effet une opposition téléphonique confirmée par écrit, à bref délai (art. II.4.4 §3 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse ne distingue pas l'opposition sur chèque et celle sur carte bancaire alors même que les régimes juridiques sont différents ;

Qu'en effet, l'article L. 131-35 du code monétaire et financier impose à celui qui fait opposition sur un chèque de la confirmer immédiatement par écrit ;

Qu'en revanche, les articles L. 132-1 et suivants du même code relatif à l'opposition sur une carte bancaire n'imposent aucunement l'obligation de confirmer par écrit et sans délai l'opposition ; Qu'a contrario, l'article L. 132-6 du code monétaire et financier prévoit un délai légal de 70 jours pour faire opposition à compter de l'opération contestée ;

Que le contrat litigieux prévoyant la possibilité d'une opposition téléphonique laisse à penser que seule une déclaration écrite rend efficace l'opposition alors qu'une opposition verbale en matière de carte bancaire dont il peut être justifiée (numéro d'enregistrement de [minute page 13] l'opposition par exemple) est suffisante ;

Qu'il s'ensuit d'une part que la clause est de nature à créer une confusion dans l'esprit du consommateur entre le régime juridique de l'opposition à un chèque et celui d'une opposition à une carte bancaire et que d'autre part, elle induit en erreur le consommateur sur l'étendue de ses droits en matière d'opposition sur cartes bancaires ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée abusive ;

 

18) Celle qui impute au client toute opposition tardive (art. II.4.4 in fine version 2003)

Attendu que la clause litigieuse apparaît contraire à la fois à l'article L. 132-3 du code monétaire et financier qui ne prévoit la responsabilité du titulaire du compte qu'en cas de faute lourde s'agissant d'une absence d'opposition à carte bancaire ainsi qu'à l'article L. 131-35 du code monétaire et financier qui ne prévoit aucune sanction à l'encontre du détenteur d'un chéquier faisant opposition de manière tardive ;

Que la clause doit être déclarée illicite ;

 

19) Celle qui renvoie à un extrait de barème tarifaire, quant aux coûts (art. III.1 §1° versions 2003 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse apparaît abusive au regard des articles L. 312-1-1 du code monétaire et financier et de l'arrêté du 8 mars 2005 en ce que la convention de compte doit notamment comporter les conditions générales tarifaires ainsi que les précisions sur les commissions, tarifs ou principes d'indexation, y compris lorsqu'ils font l'objet de conventions spécifiques annexées ;

Qu'en l'espèce, les deux versions critiquées comportent un renvoi à un extrait de barème tarifaire que la banque ne produit toutefois pas de sorte que nonobstant la mention selon laquelle ce document fait partie intégrante de la convention de compte, force est de constater qu'il n'est aucunement établi que celui-ci est effectivement transmis au consommateur lors de la signature de la convention de compte ;

Qu'à la différence, les versions 2005 et 2006 non critiquées comportent le détail des tarifs de la banque dans le corps du modèle-type ;

Que surtout, il est évoqué dans les versions 2003 et 2007 la remise d'un extrait de sorte qu'il peut en être déduit que l'information, à supposer qu'elle soit donnée, n'est que partielle et donc insuffisante ;

Que le fait que la banque doive procéder à l'information de sa clientèle sur ses tarifs par voie d'affichage et de prospectus en vertu de l'arrêté du 4 avril 2005 rappelée dans les conventions critiquées ne la dispense pas pour autant lors de la souscription de la convention de compte d'informer et de recueillir l'assentiment de son cocontractant sur l'intégralité des tarifs applicables au jour de la signature ;

[minute page 14] Que l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier prévoit d'ailleurs ainsi que les conventions critiquées, en cas de modification du tarif, une information écrite, personnalisée des clients, qui ne peut qu'être complète et non sous forme d'extraits ;

Que bien qu'il ne soit pas démontré de manière certaine que la banque méconnaît expressément les dispositions susvisées, pour autant, elle ne prouve pas la remise effective de l'ensemble des conditions tarifaires applicables à la convention de compte proposée de sorte que la clause doit être jugée abusive ;

 

20) Celle qui prévoit la solidarité pour les comptes indivis (art. IV.1 Versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse n'apparaît pas abusive en ce qu'elle permet à la banque d'avoir un recours pour la totalité contre l'ensemble des indivisaires, y compris lorsqu'ils ont donné mandat de gestion à l'un d'eux, en cas de solde débiteur ; ce qui ne constitue aucunement un avantage injustifié mais la contrepartie de la possibilité offerte par la banque d'ouvrir un compte au nom de plusieurs titulaires sans pour autant devoir s'immiscer dans leurs rapports afin de sauvegarder ses intérêts financiers ;

Que la clause litigieuse n'est dès lors pas abusive ;

 

21) Celle qui impose à tous les co-titulaires d'un compte joint la restitution des moyens de paiement en cas de retrait d'un seul d'entre eux (art. IV.2 versions 2003)

Attendu que la clause litigieuse n'apparaît pas déséquilibrée en ce qu'elle a pour finalité de permettre la substitution de nouveaux moyens de paiement au nom du ou des titulaires restants à ceux détenus par les co-titulaires initiaux du compte joint ;

Que cette obligation imposée aux titulaires d'un compte joint est la contrepartie de l'avantage constitué par la possibilité d'ouvrir ce type de compte comportant plusieurs titulaires ;

Que la banque met à juste titre l'accent sur la nécessité pour les tiers de connaître l'identité exacte et actualisée des titulaires d'un compte bancaire et de ne pas permettre au(x) titulaire(s) restant(s) du compte d'utiliser des moyens de paiement comportant l'identité d'une personne qui n'en est plus titulaire ;

Que la clause n'est pas abusive ;

 

22) Celle qui autorise la banque à clôturer le compte sans motif (art. V.1.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse apparaît illicite au regard de l'article L. 312-1 du code monétaire et financier en ce que toute décision de clôture à l'initiative de l'établissement de crédit désigné par la Banque de France doit faire l'objet d'une notification écrite et motivée ;

Que la clause litigieuse évoque un préavis de 45 jours en cas [minute page 15] d'ouverture sur demande de la Banque de France mais ne prévoit pas de motivation pour une clôture dans cette situation ;

Qu'en outre, la possibilité pour une banque de rompre la convention de compte sans fournir de motif au client laisse à celle-ci un pouvoir discrétionnaire en la matière de nature à lui conférer un avantage injustifié à l'égard de celui-ci dans l'hypothèse où la rupture intervient alors même qu'il a respecté les termes de la convention de compte et toutes autres obligations légales et réglementaires ;

Que la clôture d'un compte sans obligation de motivation aboutirait en outre à un amoindrissement du droit au compte de dépôt énoncé à l'article L. 312-1 précité nécessitant un recours plus systématique à la procédure de désignation par la Banque de France ;

Que cette pratique est en outre susceptible de procurer à un établissement bancaire procédant à la clôture systématique des comptes des clients qu'il estime les moins rentables sans pour autant qu'ils aient manqué à leurs obligations contractuelles un avantage injustifié par rapport à ses concurrents ;

Qu'enfin, l'arrêté du 8 mars 2005 prévoit en son article 13 que la convention doit comporter les conditions de clôture du compte de dépôt et notamment les délais de préavis ;

Que l'emploi de l'adverbe « notamment » indique clairement que la convention ne peut se limiter à fournir les délais de préavis ;

Que ce texte impose la fixation dans la convention des conditions de la clôture de sorte que celle-ci ne peut être le résultat d'une décision arbitraire de la banque ; ce qui implique une nécessité de motivation ;

Que la possibilité pour la banque de clôturer de manière discrétionnaire et sans motivation un compte bancaire est au demeurant incompatible avec l'instauration d'un médiateur bancaire (article L. 313-1-3 du code monétaire et financier) qui obligera l'établissement financier à se justifier en cas de saisine par le client à ce titre ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée illicite ;

 

23) Celle qui autorise la banque à clôturer le compte pour anomalies graves sans autres précisions (art. V.1.2 version 2003)

Attendu que la notion d’« anomalie grave » n'étant pas explicitée, la clôture du compte par la banque en référence à ce seul motif, imprécis général et pré-déterminé, s'analyse en un défaut de motivation de sorte que la clause doit être déclarée abusive ;

 

24) Celle qui rend connexes toutes les conventions entre les parties (art. VI versions 2003 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse est abusive en ce qu'au vu de l'article L. 132-1 du code de la consommation, elle accorde au professionnel un avantage sans contrepartie pour le consommateur ;

[minute page 16] Que le fait que la convention de 2007 indique que la compensation n'a pas lieu dans le cas où elle fait perdre au consommateur un avantage sans éviter des frais ou des pénalités n'est pas de nature à lui faire perdre son caractère abusif dès lors qu'elle permet au professionnel sans information ni accord du consommateur d'effectuer à son seul avantage un opération sur les compte de son client ;

Que la clause litigieuse doit être déclarée abusive ;

 

25) Celle qui autorise les modifications unilatérales de la Convention par la banque (art. IX versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse apparaît illicite au regard de l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier d'ordre public en vertu de l'article L. 312-1-4 du même code en ce que ce texte ne permet à la banque que de proposer une modification des conditions tarifaires s'appliquant en l'absence d'opposition par le client dans les deux mois et non de l'ensemble des conditions générales de la convention ;

Qu'à tout le moins, d'après l'arrêté du 8 mars 2005, les conditions de renouvellement, d'opposabilité et d'évolution doivent être prévues dans la convention de compte de sorte que la banque, qui s'est certes vue reconnaître une initiative pour proposer une modification tarifaire, ne peut pour autant imposer unilatéralement une modification de l'ensemble de ses conditions générales ;

Que le fait que la convention de compte soit un contrat à exécution successive n'autorise en effet pas la banque à substituer unilatéralement l'ensemble des nouvelles conditions générales à celles prévues dans l'ancienne convention, à l'exception des modifications du tarif dans les conditions sus-énoncées et d'éventuelles modifications réglementaires ou législatives impératives, qui s'imposent aux deux parties ;

Que la clause litigieuse doit être jugée illicite ;

 

26) Celle qui autorise la communication des informations nominatives à des tiers (art. XII versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

Attendu que la clause litigieuse constitue pour partie une dérogation au secret bancaire énoncé à l'article L. 511-3 du code monétaire et financier dans la mesure où les informations personnelles collectées par la banque sont susceptibles d'êtres communiquées à des sociétés du groupe non identifiées dans le contrat ou à des prestataires de services avec lesquelles le consommateur n'a a priori aucun lien contractuel ; Qu'en outre, cette clause figurant dans un contrat d'adhésion ne permet pas de s'assurer que la personne a indubitablement donné son consentement de manière libre et éclairée, notamment au fait que ces informations puissent servir à des fins de prospections commerciales alors même que l'article 38 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 permet à toute personne de s'opposer sans frais à ce que les données la concernant soient utilisées à cette fin par le responsable du traitement ;

Que cette levée du secret bancaire doit donc faire l'objet d'un assentiment exprès et spécifique ; ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

[minute page 17] Que la clause litigieuse doit être déclarée abusive ;

 

27) Celle qui impose la compétence des tribunaux du siège social de la banque (art. XIII version 2003)

 

Attendu que la clause litigieuse est contraire à l'article 48 du code de procédure civile de sorte qu'elle doit être déclarée illicite ;

 

28) Celle qui prévoit la possibilité pour la banque de retirer à tout moment les formules de chèques délivrées (art. II.2-1 al.5 versions 2005 et 2006)

Attendu que s'agissant de l'application stricte de l'article L. 131-71 du code monétaire et financier, la clause litigieuse n'apparaît ni abusive ni illicite ;

 

29) Celles prévoyant le paiement d'une commission pour compte inactif (art. III.4-7 versions 2005 et 2006)

Attendu que la clause litigieuse qui se rattache à l'adéquation du prix à une prestation (le maintien d'un compte bien qu'inactif) ne saurait être abusive en vertu de l'article L. 132-1 §7 du code de la consommation ;

Que la clause litigieuse n'apparaît pas abusive ;

 

- Sur la demande d'astreinte :

Attendu qu'afin de garantir l'effectivité de l'application de la présente décision, il y a lieu, en application des articles 33 et suivants de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, d'ordonner la suppression par le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes de la totalité des clauses déclarées abusives ou illicites de ses modèles types de convention de compte version 2003, 2005, 2006 et 2007 par le présent jugement dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent jugement, et ce, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard pendant une durée de 2 mois ;

 

- Sur les demandes de dommages et intérêts de l'UFC 38 :

* Au titre du préjudice collectif :

Attendu qu'il résulte de l'interprétation de l'article L. 421-6 du code de la consommation qu'une association agréée de défense des consommateurs est en droit de demander devant les juridictions civiles la réparation, notamment par l'octroi de dommages et intérêts, de tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ;

[minute page 18 manquante]

[minute page 19] et services, il y a lieu, afin de permettre une information effective la plus large possible des consommateurs, d'ordonner que le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes porte, dans le mois qui suit la signification de la présente décision, sur la page d'accueil de son site internet (www.ca-sudrhonealpes.fr) la mention, en caractères suffisamment apparents, selon laquelle le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes dans une instance l'opposant à l'association UFC QUE CHOISIR 38 a été condamnée, avec exécution provisoire, par jugement du 8 juillet 2009 du Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, à la suppression de 24 clauses abusives ou illicites des modèles types de convention de compte version 2003, 2005, 2006 et 2007 qu'elle propose aux consommateurs, outre la mise en place d'un lien permettant d'avoir la liste des clauses déclarées abusives ou illicites telles qu'énoncées dans le dispositif du présent jugement, et ce pendant une durée d'un mois ;

 

- Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Attendu qu'il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de l'association UFC QUE CHOISIR 38 la charge des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

Qu'il convient en conséquence de condamner le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes à payer à l'Association UFC QUE CHOISIR 38 la somme 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que la demande du Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes sur ce fondement ne peut être accueillie ;

Qu'en application de l'article 696 du code de procédure civile, le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes qui succombe à l'instance, est tenue des entiers dépens de l'instance ;

 

- Sur l'exécution provisoire :

Attendu qu'au vu de l'article 515 du code de procédure civile, l'infirmation de tout ou partie du présent jugement en cas d'appel permettrait au Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes la réintégration de tout ou partie des clauses litigieuses ;

Qu'en revanche, il existerait une insécurité juridique du fait que des clauses jugées abusives ou illicites continuent à trouver application dans l'attente éventuelle d'une décision de recours ;

Qu'il convient en conséquence d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 20] PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort

DÉCLARE l'UFC 38 recevable en ses prétentions de suppression des clauses abusives ou illicites des modèles types de convention de compte version 2003, 2005, 2006 et 2007 du Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes

DÉCLARE ILLICITES OU ABUSIVES les clauses suivantes :

1) celle qui prévoit que la convention s'applique à tout compte même antérieur (§ 2 du préambule version 2003)

2) celle qui substitue la convention à celle antérieure relative à un compte déjà ouvert (§ 4 du préambule versions 2003 et 2007)

3) celle qui impose au client d'informer la banque sur l'évolution de son patrimoine (art. I.2 § 1° version 2003)

4) celle qui prévoit que le compte de dépôt fonctionne comme un compte courant (article II.1 §l versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

5) celle qui permet à la banque de refuser sans motif la remise d'un chéquier (article II.2.1 §1° versions 2003)

6) celle qui autorise la banque a adressé un chéquier par envoi postal simple, selon frais indéterminés (art. II.2.1 §2 version 2003)

7) celle qui autorise le refus de chéquier pour « anomalies de fonctionnement » sans précision (art. II.2.1. § 3 version 2003)

8) celle qui permet à la banque de refuser une carte bancaire sans motif (art. II.2.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

9) celle qui permet à la banque d'exiger la restitution d'une carte pour « dysfonctionnement » (art. II.2.2 in fine versions 2003, 2005 et 2006)

10) celle qui dispense la banque de fournir de détail des opérations en cas d'ordre groupé de virement (art. II.2.3 in fine version 2003)

11) celle qui rend non probants les bordereaux de dépôt d'espèces à un guichet automatique (art. II.3.1 version 2003)

12) celle qui permet le crédit différé d'un chèque, quel qu'il soit, et sans avertissement (art. II.3.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

14) celle qui prévoit des dates de valeur (art. II.4.2 §4, 5 et 6 et art. III.2.1 versions 2003 et 2007)

15) celle qui prévoit que le relevé fait preuve (art. II.4.2 in fine version 2003)

16) celle qui valide l'acceptation des rejets tardifs (art. II.4.2 in fine version 2003)

17) celle qui prive d'effet une opposition téléphonique confirmée par écrit, à bref délai (art. II.4.4 § 3 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

18) celle qui impute au client toute opposition tardive (art. II.4.4 in fine version 2003)

19) celle qui renvoie à un extrait de barème tarifaire, quant aux coûts (art. III.1 § 1° versions 2003 et 2007)

22) celle qui autorise la banque à clôturer le compte sans motif (art. V.1.2 versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

23) celle qui autorise la banque à clôturer le compte pour anomalies graves sans autres précisions (art. V.1.2 version 2003)

[minute page 21] 24) celle qui rend connexes toutes les conventions entre les parties (art. VI versions 2003 et 2007)

25) celle qui autorise les modifications unilatérales de la Convention par la banque (art. IX versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

26) celle qui autorise la communication des informations nominatives à des tiers (art. XII versions 2003, 2005, 2006 et 2007)

27) celle qui impose la compétence des tribunaux du siège social de la banque (art. XIII version 2003)

DIT que les clauses du contrat diffusé par le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes jugées abusives ou illicites sont réputées non écrites

ORDONNE la suppression par le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes de la totalité des clauses déclarées abusives ou illicites de ses modèles types par le présent jugement dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent jugement, et ce, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard pendant une durée de 2 mois

CONDAMNE le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes à payer à l'association UFC Que Choisir 38 la somme de trente mille euros (30.000 euros) en réparation du préjudice collectif

CONDAMNE le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes à payer à l'UFC Que Choisir 38 la somme de cinq mille euros (5.000 euros) en réparation de son préjudice associatif

ORDONNE la publication dans les journaux LE DAUPHINÉ LIBÉRÉ et PARU VENDU du présent jugement par extrait inventoriant les clauses écartées, à l'initiative de l'association UFC QUE CHOISIR 38 et aux frais du Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes dans la limite de la somme totale de 1.500 euros par publication

ORDONNE que le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes porte, dans le mois qui suit la signification de la présente décision, sur la page d'accueil de son site internet (www.ca-sudrhonealpes.fr) la mention, en caractères suffisamment apparents, selon laquelle le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes dans une instance l'opposant à l'association UFC QUE CHOISIR 38 a été condamnée, avec exécution provisoire, par jugement du 8 juillet 2009 du Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, à la suppression de 24 clauses abusives ou illicites des modèles types de convention de compte version 2003, 2005, 2006 et 2007 qu'elle propose aux consommateurs, outre la mise en place d'un lien permettant d'avoir la liste des clauses déclarées abusives ou illicites telles qu'énoncées dans le dispositif du présent jugement, et ce pendant une durée d'un mois

DÉBOUTE l'UFC 38 du surplus de ses prétentions au titre des clauses abusives ou illicites

CONDAMNE le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes à payer à l'Association UFC QUE CHOISIR 38 la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

[minute page 22] DÉBOUTE le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes de sa demande en vertu de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE le Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes aux entiers dépens de l'instance

ACCORDE aux Avocats de la cause le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

ORDONNE l'exécution provisoire de la décision

PRONONCE publiquement par mise à disposition du jugement au Greffe du Tribunal de Grande Instance, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du Code de Procédure Civile.

Le jugement a été rédigé par F. BLANC

LE GREFFIER                                             LA PRÉSIDENTE

AM CHAMBRON                                       MP BLANCHARD

 

Est cité par :