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CA VERSAILLES (3e ch.), 20 mai 2005

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (3e ch.), 20 mai 2005
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 3e ch.
Demande : 03/07266
Décision : 05/265
Date : 20/05/2005
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Site Com. cl. abusives (CCA)
Décision antérieure : TGI NANTERRE (6e ch.), 2 septembre 2003
Numéro de la décision : 265
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3945

CA VERSAILLES (3e ch.), 20 mai 2005 : RG n° 03/07266 ; arrêt n° 265

Publication : Jurica

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 20 MAI 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 03/07266. Arrêt n° 265. Code nac : 59 A. CONTRADICTOIRE.  Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 2 septembre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE (6e ch.) : R.G. n° 01/14479.

LE VINGT MAI DEUX MILLE CINQ, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE et INTIMÉE :

UFC QUE CHOISIR

agissant poursuites et diligences de son président en exercice, monsieur X., [adresse], représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN, avoués, plaidant par Maître BRASSEUR, avocat au barreau de GRENOBLE

 

INTIMÉE et APPELANTE :

[Société TOTALGAZ]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoués plaidant par Maître MITCHELL, avocat au barreau de PARIS

 

Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 mars 2005 devant la cour composée de : Monsieur Patrick HENRY-BONNIOT, président, Monsieur François GRANDPIERRE, conseiller, Monsieur Marc REGIMBEAU, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : madame Marie-Claire THEODOSE.

 L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 10 février 2005.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Légalement habilitée à agir, y compris en justice, aux fins d'obtenir la suppression de clauses illicites ou abusives figurant dans les contrats proposés aux consommateurs par les professionnels, l'association [UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR « UFC »] (ci-après l'UFC) a entrepris fin 1999 l'étude des contrats des différents vendeurs de gaz en citerne.

Les négociations entreprises à ce sujet avec les professionnels de ce secteur n'ayant pas abouti à sa satisfaction totale, malgré l'édition de nouvelles versions de contrats, l’UFC s'est adressée à justice.

Par acte d'huissier du 15 novembre 2001, l’UFC a fait assigner la société [TOTAL] aux fins de dire illicites ou abusives 21 clauses figurant non seulement dans le modèle type de contrat actuellement proposé par [TOTAL] mais également dans les éditions antérieures d'août 2000 et juin 1999.

L'UFC a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 2 septembre 2 septembre 2003, qui a :

- vu le contrat de la société [TOTAL] pour la fourniture de GPL, avec mise à disposition du matériel de stockage,

- déclaré abusives les clauses suivantes :

- dans ses motifs seulement, la décision sur ce point étant omise dans le dispositif :

6) - à l'article 2.5, versions 2000 et 2001 du contrat, qui prévoit que la société [TOTAL] assure le maintien du stockage, à l'exception du détendeur et du limiteur de pression,

- dans le dispositif :

9) - à l'article 3 alinéa 4 qui prévoit que le bon de livraison fera foi pour la détermination de la quantité livrée,

11) - à l'article 4.1 paragraphes 5 et 9 qui prévoit que le prix de la redevance annuelle de maintenance correspond à un barème qui est à la disposition du client sur simple demande de sa part,

14) - à l'article 4.1 paragraphes 7 et 9 (version 1999) qui prévoit la restitution de la caution sans mention de délai,

[minute page 3] 16) - à l'article 4.2 paragraphe 4 qui prévoit que le prix du produit indiqué aux conditions particulières est déterminé à partir du barème [TOTAL] en vigueur à la date de la signature du contrat,

21) - à l'article 6.2 paragraphe 3 qui prévoit des frais de résiliation en cas de décès du titulaire du contrat et de non exécution du contrat pendant plus d'un an,

- ordonné la suppression de ces clauses dudit contrat sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de trois mois après la signification de la présente décision,

- débouté l’UFC de ses demandes concernant les autres clauses,

- donné acte à la société [TOTAL] de ses propositions et engagements de modifications contractuelles,

- condamné la société [TOTAL] à payer à I'UFC la somme de 7.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouté l'UFC de sa demande de publication,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties.

* * *

L'UFC, qui conclut à la réformation du jugement entrepris, demande à la cour de :

- dire recevables et bien fondés, son appel et ses demandes au regard des articles L. 421-1 et suivants du code de la consommation,

- réformant la décision dont appel, dire - outre celles déjà déclarées telles - illicites ou abusives les clauses suivantes du contrat litigieux :

1) la clause contenue au titre et au préambule sur les prestations liées entre la fourniture de la citerne et la livraison du carburant (venions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

2) l'article 2.2 sur la garde de la citerne (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

[minute page 4] 3) l'article 2.3 § 1 sur l'interdiction de modifier les abords immédiats (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

7) l'article 2.6 de la version de juin 1999 pour la limitation de responsabilité du professionnel aux seuls dommages « directement imputables »,

8) l'article 3 § 3 sur la livraison en absence du client (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

10) l'article 3.2 § 3 sur la modification contractuelle en cas de refus successif de livraison (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

12) l'article 4.1 § 4 et 9 sur la facturation intégrale de tout mois commencé (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

13) l'article 4.1 § 7 et 9 sur les imputations sur la caution (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

15) l'article 4.1 § 7 et 9 sur l'état normal d'utilisation de la citerne (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

17) l'article 4.2 § 4 sur la variation du prix (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

18) l'article 5 § 2 sur la majoration d'intérêts en cas de retard de paiement (versions 2000 et 2001), et avec absence de mise en demeure (version 1999),

19) l'article 6.1 sur la durée possible de plus de trois ans du contrat (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

20) l'article 6.1 sur la reconduction par année... même en cas de motif légitime (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001),

- ordonner en conséquence à la société [TOTAL] de supprimer de son modèle de contrat l'ensemble des clauses ci-dessus, et ce dans le délai d'un mois de la décision à intervenir et sous astreinte définitive d'un montant de 1.524,49 euros par jour de retard à l'expiration du délai imparti,

- condamner la société [TOTAL] à verser à l'UFC à titre de dommages et intérêts la somme de 76.300 euros,

- ordonner la publication du jugement dans les journaux Le Monde, le Figaro, Libération et à la charge de la défenderesse, et à concurrence de 6.100 euros par insertion,

- [minute page 5] condamner encore la défenderesse sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à lui verser une indemnité d'un montant de 4.000 euros.

* * *

La société [TOTAL], appelante par incident, conclut à la réformation du jugement entrepris, et prie la cour de :

- donner acte à la société [TOTAL] des modifications apportées au contrat, en exécution de l'injonction du tribunal, tenant compte des engagements pris vis-à-vis de l’UFC durant les négociations,

- recevant la société [TOTAL] en son appel ainsi qu'en ses demandes, fins et conclusions déclarées fondées, et y faisant droit,

- rejeter la demande d'indemnisation de à hauteur de 76.300 euros,

- et, faisant droit à l'appel de la société [TOTAL],

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré comme abusive la clause du contrat faisant supporter, en tant que frais de résiliation, la part non amortie des frais d'installation et d'enlèvement du réservoir en cas de résiliation anticipée du contrat,

- donner acte à la société [TOTAL] de ce qu'elle a modifié son contrat en ce sens que le décès du client et l'inexécution prolongée du contrat sont dorénavant les motifs légitimes de résiliation par le client ou ses ayants droit, et sont exclusifs de tous frais de résiliation en cas de signature d'un nouveau contrat avec le successeur dans les lieux,

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société [TOTAL] à payer à l'UFC une somme de 7.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner l'UFC à verser à la société [TOTAL] la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir aux frais de l'UFC, dans trois revues au choix de la société [TOTAL], dont la revue « […] » ;

- pour le surplus,

- confirmer le jugement entrepris en ses dispositions non contraires précisément en ce qu'il a débouté l’UFC de ses demandes concernant les autres clauses et rejeter sa demande de publication,

- [minute page 6] le confirmer également en ce qu'il a considéré que l'offre globale du contrat de la société [TOTAL] portant d'une part sur la mise à disposition d'un réservoir et d'autre part sur son entretien et la livraison de GPL n'est ni illicite au sens de l'article L. 122-1 du code de la consommation ni abusive,

- y ajoutant,

- la condamner à verser à la société [TOTAL] la somme de 12.009 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Considérant que l'UFC, demande que soient déclarées illicites ou abusives, vingt clauses du contrat proposé par la société dans les versions de juin 1999, août 2000, et dans le contrat type actuel, édition du mois de janvier 2001, contrat intitulé « contrat de fourniture de GPL avec mise à disposition de matériel de stockage » ;

Qu'elle fait plaider que :

- aucun texte, en dehors du code civil, dont les dispositions ne sont pas d'ordre public, et du droit de la consommation, ne régit le contenu des contrats de vente de combustible, de mise à disposition de citernes et de maintenance, ce qui explique la liberté des professionnels,

- malgré les avis de la commission des clauses abusives (ci-après C.C.A.) de 1984 rendu sur le fondement de l'article L. 132-1 du code de la consommation, d'ordre public, la société [TOTAL] continue d'utiliser un contrat contenant des clauses abusives et illicites,

- elle-même intervient donc en défense des consommateurs contre ces clauses, qu'il s'agisse de protéger les nouveaux consommateurs en leur évitant d'avoir à subir ces clauses, ou les anciens clients, pour qu'ils ne continuent pas à les subir,

- elle est fondée à agir même si la société [TOTAL] prétend que certaines des clauses critiquées ne sont pas appliquées, par exemple celles sur la facturation des pénalités de retard,

- contrairement aux prétentions de la société [TOTAL], il n'existe aucun lien juridique nécessaire entre la réglementation technique garantissant la sécurité des opérations de fabrication et de vérification des citernes, ou le transport du GPL et le maintien de clauses abusives créant un déséquilibre, ou illicite ;

[minute page 7]

Considérant que la société [TOTAL] réplique que :

- l’UFC ne tient pas compte de l'avis de la C.C.A. donné en 1984 et plus récemment à la demande du tribunal de grande instance de Nanterre dans une autre affaire, sauf lorsque cela conforte sa position,

- la position de l'UFC est révélatrice de sa mauvaise foi, dans la mesure où certaines des clauses sont parfaitement justifiées ;

 

Considérant qu'il convient avant tout de rappeler les textes applicables à la matière :

- l’article L. 132-1 du code de la consommation : « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ;

- l'article R. 132-1 du même code : « Dans les contrats de vente conclus entre des professionnels, d'une part, et des non professionnels ou des consommateurs, d'autre part, est interdite comme abusive au sens de l'alinéa 1er de l'article L. 132-1 la clause ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du non-professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations » ;

- l'article R. 132-2 du même code qui dispose que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, est interdite la clause ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre.

Toutefois, il peut être stipulé que le professionnel peut apporter des modifications liées à l'évolution technique, à condition qu’il n’en résulte ni augmentation des prix ni altération de qualité et que la clause réserve au non professionnel ou consommateur, la possibilité de mentionner les caractéristiques auxquelles il subordonne son engagement » ;

Que c'est notamment, à la lumière de ces dispositions qu’il convient de rechercher si les clauses critiquées sont ou non illicites ou abusives ;

 

1) Sur les dispositions liant la fourniture du gaz à la mise à disposition d'un matériel de stockage contenues tant dans le titre du contrat, que dans l'introduction aux conditions générales :

Considérant que l’UFC soutient que la société [TOTAL] [minute page 8] assure deux prestations liées, la fourniture d'une citerne et la fourniture exclusive du gaz, ce qui est illicite au regard de l'article L. 122-1 du code de la consommation, et subsidiairement, que ces dispositions sont abusives car elles imposent au client dans un même contrat la fourniture de la citerne et du gaz, sans lui laisser de choix ;

Considérant que la société [TOTAL] fait valoir que :

- son activité est celle de distribution de gaz en citernes, de sorte que l'obliger à modifier son contrat pour l'obliger à donner au client le choix entre la livraison de gaz ou d'une citerne reviendrait à modifier son activité même, et n'aurait aucun sens,

- le Conseil de la Concurrence dans une décision du 4 juin 1991, confirmée par un arrêt du 26 février 1992 de la cour d'appel de Paris, a indiqué que « le maintien de la propriété des bouteilles aux sociétés gazières apparaît indissociable du respect des règles de sécurité et des problèmes de responsabilité qui en découlent », solution qui s'impose donc aux citernes, qui présentent un risque aggravé, et font l'objet d'une réglementation encore plus contraignante,

- des textes réglementaires, décret du 18 janvier et arrêté du 23 juillet 1943, décret du 22 décembre 2004, imposent des règles de fabrication et de vérifications particulières pour les citernes qui pèsent sur le fabriquant, l'exploitant et certaines sur le propriétaire,

- elle a adapté son contrat qui confirme sans ambiguïté que la mise à disposition d'une citerne ne conditionne pas la livraison du GPL, et il ne saurait lui être imposé de proposer à ces clients le choix entre livraison du GPL et mise à disposition de la citerne, cette dernière prestation n'étant pas son objet ;

 

Considérant que l'article L. 122-1 du code de la consommation interdit de subordonner la vente d'un produit ou d'une prestation de service, à l'achat concomitant d'un autre produit ou à la prestation d'un autre service ;

Considérant que contrairement aux prétentions de la société [TOTAL], l'objet de son contrat n'est pas la « distribution de gaz en citerne », mais, suivant son intitulé même, la « fourniture de GPL avec mise à disposition de matériel de stockage » ;

Que cependant, une définition d'activité combinant deux activités dissociables, ce qui est le cas de la fourniture de GPL et de citernes, ne saurait faire échec à la disposition d'ordre public énoncée ci-dessus prohibant les prestations liées, que ce soit pour justifier un refus de la prestation « citerne » ou de celle « livraison de combustible » isolée, sauf [minute page 9] détournement de la loi ;

Que le moyen inverse de la société [TOTAL], qui soutient que la déconnection de son offre globale en une option mise à disposition de la citerne / fourniture de GPL serait une modification de son objet, la livraison de GPL, se heurte aux mêmes règles ;

Que la C.C.A. a recommandé (n° 84-01 § A 1er) de supprimer les clauses ayant pour effet de subordonner la fourniture du gaz à la mise à disposition ou entretien du réservoir ;

Que si l’impératif de sécurité peut justifier l'existence d'un lien entre la fourniture du combustible et la maintenance de la citerne, afin d'écarter tout risque de carence du consommateur lorsqu'il utilise le combustible, il n'impose nullement que le fournisseur de la citerne soit nécessairement le fournisseur du combustible et de la prestation de maintenance, celle-ci pouvant sans risque être opérée par n'importe quel autre prestataire aussi qualifié que la société [TOTAL] ;

Que la décision du Conseil de la Concurrence du 4 juin 1991, invoquée par l'UFC, indique que « le maintien de la propriété des bouteilles aux sociétés gazières apparaît indissociable du respect des règles de sécurité et des problèmes de responsabilité qui en découlent ; qu'en effet la réglementation concernant les GPL impose aux propriétaires des emballages, en raison de la nature dangereuse des produits, toute une série d'obligations que le consommateur pourrait difficilement respecter si ce système de prêt à usage était abandonné et s'il devenait propriétaire des bouteilles ; qu'en outre il devrait faire face aux problèmes posés par la mise en cause éventuelle de sa responsabilité en cas de sinistre. » ;

Que les motifs de cette décision du Conseil, qui se fonde sur la nature dangereuse des bouteilles, leur stockage, leur transport et leur manutention, ne sont pas transposables aux citernes, lesquelles, contrairement aux bouteilles de gaz, restent en place, et ne font donc pas l'objet de stockage, manutentions et transport par le client ou un concurrent du fournisseur ;

Qu'en conséquence, l'impératif de sécurité n'impose nullement la présence d'une entreprise unique d'un bout à l'autre de la chaîne installation/distribution ;

Qu'au surplus, l'argument tiré de l'intérêt du consommateur à ne pas voir engager sa responsabilité en cas de sinistre n'est pas pertinent au regard d'une autre clause revendiquée par la société [TOTAL] qui confie, justement, la garde de la citerne audit consommateur ;

[minute page 10] Que l'intérêt allégué du consommateur, pour obtenir un moindre coût, d'avoir affaire à un seul intervenant, et d'éviter de nombreux contrôles, pure affirmation, ne peut être opposé à la prohibition légale ;

Qu'enfin le fait que la dernière version du contrat propose la fourniture de GPL sans mise à disposition de la citerne ne remplit pas les conditions légales d'option entre deux offres déconnectées, à côté de l'offre globale, citerne seule, GPL seul, ou offre globale ;

Que la société [TOTAL] en est elle-même consciente, puisqu'elle demande à titre subsidiaire, de lui donner acte de son offre de présenter l'option comme telle dans ses conditions générales, que le consommateur soit ou non déjà en possession d'un réservoir, en se gardant toutefois d'offrir la prestation « fourniture de citerne » seule ;

Qu'ainsi, la clause litigieuse doit être jugée illicite, comme subordonnant la fourniture d'un produit, à l'achat concomitant d'un autre produit, sans que cette subordination soit justifiée par un impératif de sécurité

Que le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il en a décidé autrement ;

 

2) Sur l'article 2.2 qui prévoit que le matériel qui constitue le stockage est la propriété inaliénable et insaisissable de la société [TOTAL] : « il est confié en dépôt au client qui en assure la garde conformément aux lois en vigueur » (versions de juin 1999, août 2000 et janvier 2001) :

Considérant que l'UFC, soutient qu'une telle clause est abusive parce qu'elle laisse croire au client que cette mise à disposition constitue un dépôt, alors qu'il s'agirait selon elle d'une location du réservoir, notion à laquelle la notion de garde est étrangère ;

Que la société [TOTAL] soutient que cette clause ne fait pour partie, que rappeler les obligations de droit commun qui incombent au dépositaire ;

 

Considérant cependant que, quelle que soit la nature juridique des relations des parties à l'égard de la citerne, location, prêt ou dépôt, le détenteur de la chose est tenu de veiller à sa bonne conservation, cette obligation étant la contrepartie de son obligation de restituer la chose au propriétaire en son état d'origine ;

Que l'expression « assure la garde conformément aux lois... » suffit à garantir les droits du consommateur, les règles de la responsabilité civile à l'égard des tiers retenant des régimes différents pour le [minute page 11] détenteur, simple gardien du comportement, et le gardien de la structure que serait le prestataire, et l'article 1384 alinéa 2 du code civil invoqué par l’UFC relatif aux incendies, n'étant pas applicable à la situation des parties dans le présent litige ;

Que le fait que d'autres clauses attribuent à la société la charge de l'entretien du réservoir, n'est pas de nature à modifier cette analyse, dans la mesure où, au contraire, l'article 2-6 du contrat rappelle la responsabilité de la société [TOTAL] pour les dommages de toute nature qui pourraient être causés au client ou aux tiers, du fait du stockage du produit ou des interventions de la société [TOTAL], le terme « intervention » devant être jugé équivalent à ceux de « maintenance » ou d’« entretien », clause qui tend ainsi à mettre à la charge du prestataire toutes les conséquences dommageables pouvant résulter de l'entretien ;

Qu'enfin il est juste et sain que le consommateur qui détient la chose de façon quotidienne, en prenne soin dans toute la mesure de son pouvoir, et soit donc responsable des dommages qui ne sont dus ni à un vice du matériel mis à disposition ni à l'entretien, la société [TOTAL] engageant en outre le client à s'assurer en responsabilité civile selon la clause critiquée même ;

Que cette stipulation ne saurait donc être jugé créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ;

Que l'article 2-2 du contrat, conforme aux règles de droit civil, ne revêt donc ni un caractère abusif ni un caractère illicite

 

3) Sur l'article 2.3 § 1 qui interdit au consommateur de modifier l'implantation de la citerne et de ses abords immédiats, sans l'accord écrit et préalable de la société [TOTAL] (versions de juin 1999, août 2000 et janvier 2001) :

Considérant que l’UFC soutient qu'il est déséquilibré d'interdire à un consommateur l'aménagement des abords de la citerne, même paysager, aucune définition ou limites de ces abords ne figurant au contrat ;

Qu'elle ajoute que cette imprécision donne à la clause un caractère ambigu qui suffirait à la faire juger abusive ;

Que la société [TOTAL] soutient que l'autorisation préalable requise est justifiée par l'impératif de sécurité résultant du décret du 30 juillet 1979 modifié ;

 

Considérant que la clause stipule que l'implantation du stockage et de ses abords immédiats sont définis par le contrat ;

[minute page 12] Que de plus le contrat comporte une annexe où est reporté le plan de l'implantation, et qui doit être signé par le client ;

Que la valeur contractuelle de l'implantation n'est donc pas discutable ;

Que par suite, loin de créer un déséquilibre significatif entre les parties, cette clause n'est qu'une manifestation de l'égalité des droits des parties et du nécessaire équilibre contractuel ;

Qu'il appartient donc au consommateur de négocier le cas échéant, l'aménagement paysager du site au moment de contracter ;

Considérant de plus, que l'arrêté du 30 juillet 1979 comporte des règles, notamment de distances et d'implantations, impératives, de sorte que les pouvoirs de la société [TOTAL] ne sauraient être qualifiés de discrétionnaires ;

Que l'équilibre contractuel ainsi que les impératifs de sécurité, veulent donc, inversement, que l'on ne puisse laisser le consommateur, discrétionnairement, modifier l'environnement de l'implantation de la citerne, au risque de conséquences dommageables ;

Que cette clause ne sera donc pas jugée abusive ;

 

7) Sur l'article 2.6 (version juin 1999) qui prévoit que le professionnel assure les dommages de toute nature causés du fait du stockage, du produit livré ou des interventions de la société [TOTAL] pour autant que la responsabilité de ces dommages soit directement imputable à la société [TOTAL] ou à ses préposés :

Considérant que l'UFC soutient que cette clause est illicite au regard de l'article 1386-15 du code civil en ce qu'elle laisse croire au consommateur qu'au cas où le dommage serait imputable à une cause autre que sa faute de professionnel, par exemple un défaut du GPL, il devrait rester à sa charge, ce qui contredit les textes en vigueur et notamment l'article 1386- 15 du code civil ;

Qu'elle précise que cette clause entraîne un renversement de la charge de la preuve ;

Que la société [TOTAL] réplique que les règles applicables à la responsabilité du fait des produits défectueux sont d'ordre public, la croyance éventuellement contraire du consommateur n'y changeant rien ;

[minute page 13] Qu'elle ajoute qu'elle a, dans les versions 2000 et 2001 du contrat, ajouté la référence « aux lois et règlements en vigueur » ;

 

Considérant toutefois, que si le texte de la clause commence en reconnaissant que la responsabilité du prestataire peut être engagée du fait du produit livré, il poursuit par l'expression « pour autant que la responsabilité de ces dommages soit directement imputable à la société [TOTAL] », ce qui conduit à penser que, lorsque le défaut du produit ne lui est pas imputable, il n'en est pas directement responsable, implication qui est d'abord illicite par elle-même, et qui en outre crée au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif, dans la mesure où cette croyance, même erronée, est susceptible de le décourager d'intenter une action en justice qui serait bien fondée au regard des dispositions légales ;

Que la société [TOTAL] en est si consciente, que la modification qu'elle a apportée au texte dans sa nouvelle version du contrat, ne porte pas seulement sur l'addition de la formule « au regard des règlements et lois », mais également sur le remplacement des mots « pour autant que la responsabilité de ces dommages (lui) soit directement imputable » par ceux de « pour autant que la responsabilité de [TOTAL] puisse être retenue au regard… » ;

Que cette clause sera donc également jugée illicite ;

 

8) Sur l'article 3 § 3 relatif à l'approvisionnement qui prévoit que « le client autorise la société [TOTAL] à livrer même en son absence et assure à cet effet à la société [TOTAL] l'accès permanent au stockage » :

Considérant que l’UFC déclare que cette clause emporte un déséquilibre au détriment du consommateur, car elle laisse le prestataire seul maître de la date de livraison et de ses effets, alors que le consommateur a besoin de savoir quand sera effectuée la livraison et de s'assurer des bonnes conditions de celle-ci ;

Considérant que la société [TOTAL] indique que dans le cas où le client a opté pour des livraisons programmées, elle s'engage à l'informer la veille de chaque livraison, qu'elle s'engage en outre, dans les livraisons effectuées à la suite d'une commande, sur un délai de livraison de trois jours ouvrés ;

 

Considérant cependant que l'article L. 114-1 du code de la consommation qui impose à tout prestataire d'indiquer une date limite de livraison, n'est pas applicable aux ventes échelonnées dans le temps ;

Que les conditions générales du contrat stipulent que le client peut choisir la livraison soit à la commande, auquel cas il doit être livré [minute page 14] dans les 7 jours, soit suivant livraison programmée par le prestataire à son initiative, et qu'il peut modifier son choix à tout moment ;

Qu'au surplus les « conditions particulières » du contrat, prévoient que dans le cas de la livraison « sur commande du client », la société [TOTAL] livre dans un délai de trois jours ouvrés suivant l'enregistrement de la commande, et que dans le cas de livraison à « l'initiative de la société [TOTAL] », le client sera prévenu la veille de chaque livraison ;

Que dès lors que le client a le choix de délais de livraison courts et que dans le cas où il ne choisit pas cette modalité, il est informé la veille de la livraison, la clause ne crée pas de déséquilibre significatif au détriment du consommateur, et ne doit pas être jugée abusive ;

 

10) Sur l'article 3.2 § 3 relatif aux livraisons programmées qui prévoit que si le client « refuse à deux reprises successives une livraison et/ou s'il empêche la société [TOTAL] de livrer, il sera considéré contractuellement comme ayant renoncé à ce régime particulier et ayant opté de ce seul fait pour le régime général de livraison à la commande » (versions de juin 1999, août 2000 et janvier 2001) :

Considérant que l’UFC soutient que la clause reconnaît au prestataire un droit de modification unilatérale du contrat, et que ne prévoyant pas les hypothèses dans lesquelles les motifs de refus par le consommateur sont légitimes, elle emporte un déséquilibre ;

Que la société [TOTAL] soutient que le client peut à tout moment modifier le régime de livraison, notamment revenir à la livraison programmée lorsque la cause de son absence aura disparu ;

 

Considérant cependant que le comportement du consommateur, qui n'est sanctionné qu’au deuxième refus, revient à ne pas exécuter le contrat conformément à son option, que la suspension de cette option par le prestataire ne crée donc pas un déséquilibre en sa faveur ;

Que de plus, ainsi que le souligne justement la société [TOTAL], le client pouvant, en vertu des conditions générales mentionnées plus haut, revenir à tout moment à son premier régime de livraison, si sa situation passagère est modifiée, la critique sur les effets de la clause perd sa portée ;

Que pour les situations particulières visées par absence de longue durée, cuves restées pleines hospitalisation du client, la formule de retour automatique à la commande ne fait pas grief ;

Que le moyen tiré de la vente forcée manque de pertinence, puisque, à l'inverse, la société [TOTAL] ne livre qu'à la commande [minute page 15] dans le cas où la clause vient à jouer ;

Qu'il n'est pas plus applicable au fait que le client pourrait être tenté d'accepter la livraison non désirée pour échapper au recours à la livraison « à la commande », puisque le premier régime est justement celui qu'il a choisi par contrat ;

Que cette clause ne sera donc pas jugée abusive

 

12) Sur l'article 4.1 § 4 et 9 relatif au prix de location de la citerne qui prévoit que la redevance annuelle est calculée au prorata mais que « tout mois commencé est dû » :

Considérant que l'UFC soutient que cette clause emporte un déséquilibre car si le contrat est résilié avec effet en début de mois, le paiement de l'indemnité pour le mois correspondant sera sans contrepartie ;

Que la société [TOTAL] estime que la clause prévoyant un calcul de la redevance au prorata temporis, en fonction de la durée de l'utilisation de la citerne, est juste et que la règle selon laquelle tout mois commencé est dû n'est nullement génératrice d'un déséquilibre, et qu'au contraire, mesure de saine gestion, elle concourt à la réduction du coût global annuel du contrat ;

Que la société [TOTAL] sollicite, en tout état de cause, que lui soit donné acte de ce qu'elle accepte de supprimer de tous ses contrats la formule « tout mois commencé est dû » ;

 

Considérant que la formule « tout mois commencé est dû » procure au professionnel un avantage en termes de redevances dues, sans contrepartie pour le consommateur qui n'a pas la jouissance du bien ;

Que dans cette mesure la clause crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur et doit donc être jugée abusive ;

Qu'il convient néanmoins de donner acte à la société de ce qu'elle accepte de supprimer de tous ses contrats la formule « tout mois commencé est dû » ;

 

13) Sur l'article 4.1 § 7 et 9 qui prévoit qu'à l'expiration du contrat le dépôt de garantie sera restitué au client après règlement des sommes dues :

Considérant que l’UFC soutient que cette clause emporte un déséquilibre puisque dans l'incertitude des sommes que le professionnel pourrait être amené à retirer sur le montant de la caution, le consommateur n'est en mesure d’exercer aucun contrôle ;

[minute page 16] Que la société [TOTAL] soutient que cette clause n'est que la traduction du principe de compensation légale, prévu à l'article 1291 du code civil ;

 

Considérant que dès lors que l’UFC ne critique pas l'absence dans la clause, de délai pour restituer le dépôt de garantie, le seul fait qu'elle pose le principe de la compensation entre ce dépôt et le solde restant dû par le client, dont l'évidence est qu'elles sont dues en vertu des clauses du contrat dont s'agit, ne crée pas de déséquilibre significatif entre les parties, au détriment du consommateur ;

Que cette clause prévue au contrat, dans ses versions de 2000 et 2001, ne sera donc pas jugée abusive ;

 

15) Sur l'article 4.1 § 7 et 9 qui prévoit que la restitution de la caution relative à la citerne s'effectuera après reprise de celle-ci « en état normal d'utilisation » :

Considérant que l’UFC soutient que la clause est abusive en ce qu'elle ne distingue pas dans quelles conditions sera apprécié le « bon état » de la citerne, ce qui laisse présumer pour le professionnel, un pouvoir discrétionnaire d'appréciation, et en ce qu'elle ne prévoit pas l'établissement d'un état des lieux contradictoire ;

Que la société [TOTAL] indique que la clause précise « en état normal d'utilisation » et qu'il n'est pas abusif de lier la restitution de la caution à celle de la citerne en bon état ;

 

Considérant toutefois que la clause ne parle pas de « bon état » mais d'un « état normal d'utilisation » ;

Que de plus le fait qu'elle ne précise pas dans quelles conditions cet état sera apprécié, ne préjuge nullement des modalités qui seront utilisées ;

Que notamment aucun des termes de la clause n'implique que les dégradations commises le cas échéant par le prestataire, seraient mises à la charge du consommateur, aucune clause ne pouvant par ailleurs éviter un litige à ce sujet ;

Qu'en outre il est loisible au client d'exiger l'état des lieux contradictoire auquel l'UFC se réfère ;

Qu'il n'est donc pas possible de juger que ces modalités sont plus favorables à l'une des parties, qu'a l'autre ;

[minute page 17] Que par suite la clause ne saurait créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ; et elle ne sen donc pas jugée abusive ;

 

17) Sur l'article 4.2 § 4 qui prévoit que le barème de prix est susceptible de variations (dans les trois versions) :

Considérant que l'UFC soutient que cette clause est déséquilibrée même si le client a la possibilité à toute époque de l'année, sur simple demande de sa part, d'avoir communication du prix en vigueur ;

Qu'elle indique qu'en cours d'exécution du contrat le prix sera déterminé à la discrétion du professionnel ;

Considérant que la société [TOTAL] soutient que s'il y a déséquilibre, celui-ci est compensé par la faculté de résiliation ouverte au consommateur dans le cas où la variation du prix lui paraîtrait incompatible avec la poursuite du contrat ;

 

Considérant que par cette clause, le prestataire se réserve le droit de modifier unilatéralement le prix du contrat, sans aucun critère de révision défini objectivement au contrat ;

Que la société [TOTAL] invoque la liste des clauses abusives annexées à l'article L. 132-1 du code de la consommation, parmi lesquelles figure la clause selon laquelle le fournisseur de services a le droit d'augmenter ses prix, sans que le consommateur n'ait le droit correspondant de rompre le contrat, alors que son contrat stipule, au même article, qu'au cas où la variation du prix lui paraîtrait incompatible avec la poursuite du contrat, le client a la possibilité d'y mettre fin par anticipation, circonstance qui validerait la clause de variation ;

Que toutefois, en l'espèce, le contrat stipule que le client aura à toute époque de l'année, sur simple demande, communication du prix en vigueur ;

Que par suite, le consommateur n'étant pas avisé à l'avance de la variation, il se la verra nécessairement imposer dans un premier temps, avant de pouvoir résilier le contrat ;

Que cette clause, créant ainsi au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif, elle est incontestablement à la fois illicite et abusive ;

[minute page 18]

18) Sur l'article 5 § 2 qui prévoit que toute somme non payée à sa date d'exigibilité produira de plein droit, après mise en demeure préalable, des pénalités de retard au « taux de deux fois l'intérêt légal et au minimum 12 % l'an » (version 9999) ; au « taux d'une fois et demi l'intérêt légal » (versions 2000 et 2001) :

Considérant que l’UFC soutient que cette clause n'est pas conforme aux dispositions de l'article 1153 du code civil qui seules doivent recevoir application, qu'elle est abusive en ce que les manquements du prestataire tels que retards de livraisons, ne sont pas assortis des mêmes sanctions, et dans la version 1999, compte tenu du taux appliqué et de l'absence de mise en demeure ;

Que la société [TOTAL] soutient que cette clause s'analyse en une clause pénale prévue à l'article 1152 du code civil, que si les livraisons se font en principe sur payement au comptant, il arrive, lorsqu'elle livre en l'absence du client, que, par force, elle consente un délai de payement ;

 

Considérant que les clauses pénales librement consenties sont licites, en vertu de l'article 1152 du code civil ;

Que dans la situation de retard de livraison du prestataire invoquée par l’UFC, le client retient le payement, alors que dans celle décrite par la société [TOTAL], celle d'une livraison impayée, le prestataire n'a pas de contrepartie, de sorte que les situations n'étant pas comparables, il ne peut être constaté un déséquilibre ;

Que cette clause ne sera donc jugée ni abusive ni illicite ;

 

19) Sur l'article 6 alinéa 1 qui prévoit que la durée du contrat est celle indiquée aux conditions particulières lesquelles comportent une case vierge :

Considérant que l'UFC soutient que cette clause qui permet au professionnel de suggérer, sinon d'imposer, une durée du contrat supérieure à 3 ans, rend le consommateur captif sans contrepartie, alors que la C.C.A. veut écarter les durées supérieures à 3 ans ;

Qu'elle précise que suivant l'article L. 132-1 § 4, même les clauses négociées peuvent être jugées abusives ;

Que la société [TOTAL] soutient que le système adopté par la clause permet aux parties au contrat de se mettre d'accord sur une durée correspondant aux besoins exprimés par le client ;

[minute page 19]

Considérant cependant que la clause en cause ne fixe pas une durée négociée qui serait excessive, mais pose le principe d'une libre négociation. ;

Qu'une clause qui pose un tel principe conforme aux règles de droit, ne saurait être jugée abusive ;

 

20) Sur l'article 6.1 relatif à la durée qui prévoit une reconduction tacite pour des périodes d'un an, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée, trois mois avant la date d'échéance du contrat :

Considérant que l'UFC soutient que cette clause emporte un déséquilibre car un consommateur peut avoir des raisons légitimes pour rompre le contrat en cours d'année et rien ne justifie que le professionnel lui impose de maintenir le contrat pour la durée restante de l'année et ce, sans contrepartie ;

Considérant que la société [TOTAL] soutient que cette clause est conforme à la recommandation 84-01 de la commission des clauses abusives dans la mesure où la tacite reconduction n'est pas supérieure à un an, et où le délai de préavis n'est pas supérieur à trois mois ;

 

Considérant que la critique de l'UFC manque de pertinence en ce qu'elle vise la tacite reconduction, usuelle dans les contrats, alors que la question posée est celle des motifs légitimes de résiliation, qui appelle une solution propre ;

Que si le contrat se reconduit tacitement pour une durée d'un an renouvelable, le consommateur bénéficie toujours de sa faculté de résilier son engagement avec un délai de préavis de trois mois ;

Que cette clause ne crée ainsi pas de déséquilibre significatif au détriment du consommateur, et n'est donc pas abusive ;

 

- Sur la demande de dommages-intérêts :

Considérant que l’UFC demande la somme de 76.300 euros de dommages-intérêts, invoquant le nombre de clauses irrégulières adoptées par la société [TOTAL], ainsi que l'importance du préjudice causé aux consommateurs par ces clauses, compte tenu de la taille de la société [TOTAL] ;

Que la société [TOTAL] estime que la somme demandée est exorbitante au regard des sommes habituellement allouées à l'UFC ;

[minute page 20]

Considérant que l'insertion répétée par la société [TOTAL] dans ses contrats de clauses abusives, a porté atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs, que l'UFC est légalement habilitée à défendre ;

Que, compte tenu du nombre des clauses en cause, et de l'importance de l'entreprise sur le marché concerné, il convient de juger que l'allocation de la somme de 10.000 euros constitue une indemnisation raisonnable de ce préjudice ;

 

- Sur la demande de publication :

Considérant que la demande de publication doit être accueillie comme propre à informer le public, dans les conditions précisées au dispositif, en application de l'article L. 421-9 du code de la consommation ;

 

- Sur la demande reconventionnelle de la société [TOTAL] :

21) Sur l'article 6.2 § 3 relatif à la résiliation qui prévoit des frais de résiliation dans certaines hypothèses à l'initiative de la société [TOTAL] tel que le décès du titulaire du contrat et la non-exécution du contrat pendant plus d'un an :

Considérant que la société [TOTAL] déclare que cette clause n'est pas abusive, et que le tribunal s'est trompé en lui donnant acte de ce qu'elle a modifié la clause en n'imposant plus de frais de résiliation en cas de décès du client ;

Que la société [TOTAL] demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle a modifié la clause afin de supprimer les termes laissant à penser que le prestataire résiliait le contrat du fait de circonstances constituant une faute du client, tel le décès, et qu'elle reconnaît que le décès et l'inexécution prolongée sont des causes légitimes de résiliation par le client ou son ayant-droit, en les dispensant des frais mais seulement en cas de conclusion d'un nouveau contrat, et non pas dans tous les cas ;

Qu'elle précise que ces frais ne sont pas liés à une faute du client, mais correspondent à la part non amortie au jour de la résiliation, des frais de transport, d'installation et d'enlèvement du réservoir ;

Considérant que l'UFC conclut à la confirmation du jugement ;

 

Considérant que la société [TOTAL] est en droit de réclamer à ses clients des frais de résiliation anticipée, dès lors que cette [minute page 21] résiliation la prive des ressources escomptées en vertu de la durée convenue du contrat, et ce, indépendamment de toute faute du client ;

Que la partie de la clause relative aux frais ne sera donc pas jugée abusive ;

Que pour le surplus, il sera donné à l'UFC l'acte qu'elle requiert ;

 

- Sur la demande au titre des frais irrépétibles :

Considérant que l'équité et la situation économique de l’UFC commandent qu'il lui soit alloué la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

- Sur les dépens :

Considérant que la société [TOTAL] succombe pour l'essentiel dans ses prétentions ;

Qu'elle doit donc supporter les dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré abusives, les clauses figurant :

- à l'article 2.5 qui prévoit que la société [TOTAL] assure le maintien du stockage et procède aux opérations d'entretien « à l'exception du détendeur et du limitateur de pression »,

- à l'article 3 alinéa 4 qui prévoit que le bon de livraison fera foi pour la détermination de la quantité livrée,

- à l'article 4.1 paragraphes 5 et 9 qui prévoit que le prix de la redevance annuelle de maintenance correspond à un barème qui est à la disposition du client sur simple demande de sa part,

- à l'article 4.1 paragraphes 7 et 9 (version 1999) qui prévoit la restitution de la caution sans mention de délai,

- [minute page 22] à l'article 4.2 paragraphe 4 qui prévoit que le prix du produit indiqué aux conditions particulières est déterminé à partir du barème de la société [TOTAL] en vigueur à la date de la signature du contrat.

L'infirme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Dit que la clause (21) de l'article 6.2 paragraphe 3 qui prévoit des frais de résiliation en cas de décès du titulaire du contrat et de non exécution du contrat pendant plus d'un an n'est pas abusive,

Déclare illicites ou abusives les clauses suivantes du contrat litigieux :

1) - la clause contenue au titre et au préambule sur les prestations liées entre la fourniture de la citerne et la livraison du carburant (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001), illicite,

7) - l'article 2.6 de la version de juin 1999 pour la limitation de responsabilité du professionnel aux seuls dommages « directement imputables », illicite,

12) - l'article 4.1 § 4 et 9 sur la facturation intégrale de tout mois commencé (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001), abusive,

17) - l'article 4.2 § 4 sur la variation du prix (versions juin 1999, août 2000 et janvier 2001), abusive.

Ordonne en conséquence à la société [TOTAL] de supprimer de son modèle de contrat l'ensemble des clauses ci-dessus, et ce sous astreinte d'un montant de 1.000 euros par jour de retard et par infraction constaté, à l'expiration du délai de 3 mois à compter de la signification du présent arrêt,

Condamne la société [TOTAL] à verser à l'U. les sommes de :

*10.000 euros à titre de dommages-intérêts, et

* 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Ordonne la publication dans la revue « Q » et dans un quotidien de diffusion nationale au choix de la société [TOTAL] dans [minute page 23] la limite de 1.000 autos par insertion, à la charge de la société [TOTAL] du communiqué suivant :

« Par arrêt du 20 mai 2005, la cour d'appel de Versailles a, à la requête de [l’UFC] confirmé le caractère abusif ou illicite de 6 clauses, et déclaré abusives ou illicites 4 clauses du contrat [TOTAL] Vrac D-01 / 01, ordonnant leur suppression. »,

Donne acte à la société [TOTAL], de ce qu'elle a :

- dans les versions 2000 et 2001 du contrat, ajouté la référence « aux lois et règlements en vigueur » à l'article 2.2 relatif à la garde du réservoir confiée au consommateur,

- accepté de supprimer de tous ses contrats la formule « tout mois commencé est dû » de la clause figurant à l'article 4.1§ 4 et 9,

- modifié la clause de l'article 6.2 § 3 afin de supprimer les termes laissant à penser que le prestataire résiliait le contrat du fait de circonstances constituant une faute du client, tel le décès, et qu'elle reconnaît que le décès et l'inexécution prolongée sont des causes légitimes de résiliation par le client ou son ayant-droit.

Rejette les autres demandes,

Condamne la société [TOTAL] aux dépens d'appel,

Dit que ces dépens pourront être recouvrés par la SCP Debray Chemin, avoués de l’UFC pour la part la concernant, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Arrêt prononcé par Monsieur REGIMBEAU conseiller, Assisté de madame THEODOSE, greffier.

Et ont signé le présent arrêt, Monsieur HENRY-BONNOT, président, Madame THEODOSE, greffier.

 

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